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Autres approches actuelles pour traiter les effets de longueurs internes 70

2.3.1 Approche à Champs Moyens à Longueurs Internes (ACMLI)

Contrairement à l’approche précédente, la description du grain est plus com-plexe. Il s’agit d’un modèle micromécanique simplifié basé sur une description du grain par un composite biphasé [PNB+09, Nic09].

Le cœur du grain constitue une première “phase” pour laquelle seules les disloca-tions statistiquement stockées (c’est-à-dire avec un vecteur de Burgers net de zéro) participent à l’écoulement plastique. La couche, où prennent place les gradients de déformation plastique et les dislocations géométriquement nécessaires (en plus des dislocations statistiquement stockées), constitue une seconde “phase” (cf. figure 2.15). L’approche proposée est conceptuellement similaire à celle proposée initiale-ment par Mughrabi [Mug88] pour la description des cellules de dislocation, mais les outils et les applications sont ici différentes.

Figure2.15 – Représentation du coeur du grain avec uniquement des SSD et de la

couche d’épaisseur λ avec SSD + GND pour un grain de diamètreD [Nic09].

Les descriptions des champs mécaniques dans la couche dépendent des

disloca-tions géométriquement nécessaires (GND) comme introduites par Ashby [Ash70].

gra-dient linéaire dans la zone proche du joint de grain (représenté en rouge sur la figure (2.16)) afin de calculer l’évolution des GND dans la couche.

Figure2.16 – Représentation d’un gradient linéaire des taux de déformation plas-tique dans une couche d’épaisseurλen rouge (longueur interne induite par le gradient de déformation plastique entre les grains). Ce gradient linéaire permet de définirρg

au sens d’Ashby [Ash70] dans la couche. Représentation des taux de déformation

plastique uniformes par morceaux sur un grain en noir (approche en champs moyens) [Nic09].

Néanmoins, pour le calcul des contraintes interphases, cette modélisation est simplifiée en supposant des déformations plastiques uniformes par morceaux dans l’approche à champs moyens, c’est-à-dire des taux de déformation uniformes dans le cœur du grain et dans la couche (représentés en noir sur la figure (2.16)).

Cette représentation permet l’utilisation d’un modèle auto-cohérent. Ce problème comme celui-présenté dans la section précédente à été modélisé à l’aide d’un modèle auto-cohérent à champs translatés en élasto-viscoplasticité (cf. annexe A). L’utilisa-tion de ce schéma modifie la topologie du grain. Ainsi, la configuraL’utilisa-tion du cœur de grain enrobé par la couche n’est pas “respectée”, et est modifiée en une modélisation biphasée du grain (figure (2.17).

Figure2.17 – Représentation du VER contenant une phaseI (coeur des grains) et

une phase C (couches de GND dans le milieu homogène équivalent (MHE) [Nic09]

dont les propriétés effectives sont déterminées par un modèle auto-cohérent en élasto-viscoplasticité.

le modèle. Il n’est alors pas nécessaire de déterminer les GND sur chaque système de glissement. On utilise alors une viscoplasticité isotrope de type Von Mises pour décrire l’écoulement plastique dans chaque phase.

Ce modèle a été utilisé pour modéliser des effets de taille de grain dans les aciers IF (cf. [PNB+09]). Les paramètres matériaux ont été identifiés à partir de courbes de traction expérimentales réalisées sur des aciers avec plusieurs tailles de grains moyennes.

Malgré les hypothèses restrictives utilisées, le modèle reporte une bonne cor-rélation en terme de limite d’écoulement et taux d’écrouissage, entre les courbes expérimentales et les simulations. Par exemple, l’évolution du seuil d’écoulement (cf. figure (2.19)) met particulièrement en évidence les capacités du modèle à dé-crire convenablement l’écrouissage des différents aciers, notamment après 10% de déformation (figure (2.18)), domaine où le taux d’écrouissage devient indépendant

0 5 10 15 20 0 100 200 300 400 500 600 Déformation E 11 (%) Contrainte Σ11 (MPa) D=5.5µm D=8.5µm D=15µm D=120µm expérimental

Figure2.18 – Comparaisons entre les essais expérimentaux de traction simple (don-nées fournies par ArcelorMittal) et les simulations effectuées pour une épaisseur de coucheλ fixe de 0,15 µm et plusieurs tailles moyennes de grain [PNB+09]

de la taille moyenne des grains.

Pour conclure, dans ce modèle, la description continue du comportement mé-canique du matériau est par morceaux en représentant le grain en deux zones dis-tinctes : le cœur et la zone proche du joint de grain (à forte densité de dislocations géométriquement nécessaires, créant de fortes désorientations du réseau cristallin). Les schémas de transition d’échelle tels que le schéma auto-cohérent restent clas-siques, mais il est possible de capter les effets de taille de grain, sur le comportement mécanique, associés à cette représentation. Ce type d’approche permet d’obtenir des effets de taille de grain naturellement sur les champs mécaniques et les variables in-ternes. Il permet aussi de décrire l’écrouissage du matériau en fonction de la taille moyenne des grains au cours de chargement et aboutit à une approximation réaliste des contraintes locales et des niveaux de densités de dislocation. Ce type d’approche ACMLI a été récemment étendue au cas des particules dures noyées dans une

ma-Figure 2.19 – Evolution du seuil d’écoulement, au cours du chargement pour des déformations de 2, 5 et 10%, en fonction de la taille de grain [PNB+09]

trice subissant un écoulement plastique par Taupin et al. [TBFB10]. Il est a noté

qu’une autre approche à champs moyens intégrant les effets de dislocations géo-métriquement nécessaires stockées à l’interface particule matrice a été récemment

développée par Bouaziz et Bréchet [BB09] dans une extension du modèle de Pilvin

[Pil90].

2.3.2 Dynamique dislocations discrètes

Les modèles de dynamique des dislocations discrètes (DDD) sont apparus au début des années 90 (Kubin et al. [Kub92], Fivel et Forest [FF04a]) et font aujour-d’hui l’objet de nombreuses études. L’échelle de modélisation de la DDD se trouve typiquement entre celle des modèles de type dynamique moléculaire et celle des mo-dèles de type éléments finis traitants des milieux continus. Dans ces approches, les dislocations se déplacent dans un milieu élastique traité comme un milieu continu et celles-ci sont traitées de manière individuelle.

Le développement d’un modèle de dynamique des dislocations passe par la défini-tion de trois composantes [FF04a] : - la discrétisation des lignes de dislocation, - la cinétique des segments de dislocation, - les conditions aux limites.

Il existe deux manières de discrétiser les lignes de dislocation (cf. figure 2.20). Le plus simple consiste à discrétiser la ligne de dislocation uniquement avec des

Figure2.20 – Différents modèles de discrétisation des lignes de dislocation [FF04a]

segments de caractère vis ou coin. La seconde méthode, plus complexe, consiste à considérer des noeuds et non des segments. En les connectant, tous les angles pos-sibles entre segments sont donc considérés (code nodal).

Les segments qui constituent les lignes de dislocation sont sources de contraintes internes à longue distance (évoluant en 1/r, avec r la distance entre le point de calcul et le segment considéré). Les champs de contraintes locales sont donc très hétérogènes. Le tenseur des champs de contraintes effectif de chaque segment est la somme du tenseur de contraintes appliquées (conditions aux limites) et du tenseur des contraintes internes. Le calcul du champ nécessite de calculer la contribution propre du segment généralement introduite par le terme de tension de ligne (force de Peach-Koeler).

Lorsque la contrainte effective résolue dépasse la contrainte de friction du réseau, le segment se déplace perpendiculairement à sa direction de ligne grâce à une loi donnant la vitesse du segment en fonction de la contrainte effective résolue.

Les boîtes de simulation peuvent être assimilées à des milieux finis élastiques contenant des dislocations. Les frontières de ces boîtes sont soumises à des condi-tions aux limites soit en force, soit en déplacement.

Lorsque l’on veut simuler un volume représentatif du cristal, la boîte de simulation n’est plus un volume fini. Des conditions de périodicité sont imposées aux frontières de la boîte de simulation (comme dans le cas des simulations atomiques [FF04a]). Le principe est que les dislocations qui s’échappent sur une face sont réintroduites par la face opposée ; les contraintes sont également périodisées en sommant la contribu-tion de répliques de la boîte de simulacontribu-tion.

Contrairement à l’approche continue classique, la dynamique des dislocations permet de rendre compte de nombreux effets de longueurs internes puisqu’elle in-tègre naturellement la longueur caractéristique associée au vecteur de Burgers des dislocations, à la source même des effets d’échelle évoqués [FF04b].

Le principal faiblesse de ces méthodes est la taille des boîtes de simulation qui, pour des raisons essentiellement de temps de calcul, reste encore aujourd’hui trop petite.

2.3.3 Mécanique des milieux généralisés

Les méthodes d’homogénéisation classique comme celle présentée dans la section précédente permettent bien de décrire l’influence de la morphologie ou de la texture des constituants (les grains ou les phases) sur le comportement mécanique macro-scopique, tandis que les milieux continus généralisés peuvent rendre compte d’effet de taille. Il s’agit d’effet de taille au sens large (effet de taille de constituant ou de structure) [For06].

La source des difficultés concernant les milieux continus classiques réside dans le fait qu’il ne comporte pas de notion de longueurs caractéristiques " physiques " dans les équations de comportement. Les milieux continus généralisés sont des modèles de milieux continus d’ordre supérieur. Ils possèdent dans leur formulation des degrés

de liberté cinématiques supplémentaires comme les milieux de Cosserat [EB00].

Un milieu de Cosserat est une collection continue de particules agissant comme des corps rigides. Chaque point matériel est doté d’un degré supplémentaire de transla-tion et de rotatransla-tion décrivant son déplacement et sa rotatransla-tion. Un milieu de Cosserat est donc un milieu contenant une cinématique plus riche qu’un milieu continu clas-sique car chaque point matériel va posséder trois degrés de liberté de rotation en plus des trois degrés de liberté de translation d’un milieu continu classique, indépendants de la partie antisymétrique du gradient de déplacement. L’homogénéisation par les milieux de Cosserat apparaît comme une alternative aux approches par modèles discrets lorsque les mécanismes agissant au niveau de la microstructure ont un rôle prépondérant sur le comportement macroscopique.

L’influence des dislocations géométriquement nécessaires (GND) peut être prise en compte par l’utilisation des milieux continus généralisés (cf. figure 2.21). Ceci constitue une méthode efficace pour modéliser des effets de taille dans les cristaux [For98] Les champs mécaniques sont associés aux longueurs internes caractéristiques de la microstructure (taille de grain, taille de cellule ou les gradients de désorientation relative. (cf. chapitre 1). Le modèle de Cosserat prend en compte une longueur caractéristique qui intervient dans la détermination de la contrainte d’écrouissage. L’équilibre n’est pas seulement défini par des contraintes mais aussi par un moment de contraintes dont la partie duale est un gradient de rotation plastique de réseau avec une loi d’évolution (similaire à celle des glissements) et qui fait intervenir une longueur interne caractéristique de la microstructure. Ce type de modèle permet de bien rendre compte des effets de microstructure telle que des effets de taille de grain ou de taille de cellule intra-granulaire [Bar00]. Cependant, ces effets sont obtenus grâce à une démarche phénoménologique (calage de paramètre).

Figure 2.21 – Plasticité du monocristal (milieu de Cosserat) : configurations ini-tiale, isocline et courante (F et K sont respectivement les gradients de déformation et de rotation) [For98]

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