• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 PROTOCOLE DE RECHERCHE

2.2 Stratégie de recherche

2.2.1 Approche générale

Ce travail de recherche est réalisé au moyen d’une observation participante réalisée dans le cadre d’une étude de cas en profondeur en milieu industriel. L’observation participante est une méthode empirique très bien connue et largement utilisée en sciences humaines, particulièrement en anthropologie et en sociologie, dans le cadre de recherches qualitatives visant l’observation d’objets, d’évènements, de processus, de relations ou de personnes dans leur environnement naturel. Plusieurs raisons motivent le choix de cette méthode :

l’observation des évènements et du phénomène à l’étude en temps réel;

les données sont recueillies dans leur contexte (Seaman, 1999-);

l’observation participante permet d’étudier les comportements et les relations interpersonnelles des participants dans leur environnement naturel;

l’observation participante est appropriée pour les recherches exploratoires et descriptives (Babbie, 2001; Jorgensen, 1989);

les échanges à observer ne sont pas visibles du point de vue d’un observateur hors du terrain d’observation, du public (Seaman, 1999-);

le phénomène à observer n’est observable que dans la vie de tous les jours et difficilement reproductible dans un contexte expérimental;

57

le phénomène est assez limité en étendu pour être observé sous forme d’étude de cas.

D'autre part, ce type d’approche est tout à fait approprié dans le cas de cette recherche puisque, tel que mentionné précédemment, cette dernière est exploratoire. De plus, comme le souligne Jorgensen (Jorgensen, 1989) et Babbie (Babbie, 2001), l’observation participante sur le terrain est appropriée lorsqu’il ne s’agit pas de recherche déductive ou d’expériences où le but est de vérifier empiriquement des hypothèses formulées à l’avance, mais plutôt dans le cas d’études visant à générer de façon inductive des théories à partir d’observations et de données empiriques collectées sur le terrain. De cette façon, les observations initiales peuvent mener à certaines conclusions, lesquelles pouvant guider certaines observations subséquentes, vérifiant les conclusions précédemment établies, impliquant peut-être une révision de ces dernières et ainsi de suite.

Bien que dans le cadre d’une observation participante en recherche exploratoire la définition du problème peut être le fruit d’un processus ouvert et flexible durant lequel ce qui sera étudié sera identifié, clarifié, raffiné et élaboré, même au cours des observations, donc après le commencement de l’étude (Jorgensen, 1989), la problématique et les objectifs de la présente recherche ont été établis à l’avance à partir des observations des études antérieures qui ont été exposées au cours du chapitre de revue de littérature. Toutefois, comme il a été mentionné précédemment, il est très important de garder un esprit d’ouverture quant aux

58

issues possibles de la recherche afin de ne pas biaiser ou orienter indûment les observations et les conclusions qui en découlent.

Par ailleurs, le rôle que choisi de revêtir l’observateur lors d’une observation participante est très important. Ce rôle pouvant varier dans un continuum d’observateur à participant complet, quatre types de rôle peuvent être définis :

observateur complet où le chercheur ne participe aucunement aux activités du groupe observé;

observateur-participant où le chercheur occupe davantage un rôle d’observateur que de participant, s’impliquant dans quelques activités du groupe observé;

participant-observateur où le chercheur occupe davantage un rôle de participant que d’observateur, s’immisçant beaucoup plus dans les activités du groupe observé;

participant complet où le chercheur participe pleinement aux activités du groupe observé, voire à en devenir un membre à part entière.

De plus, pour chacun des rôles décrits ci-dessus, deux stratégies d’entrée peuvent être privilégiées :

59

ouverte, où le chercheur annonce clairement le but de sa présence aux observés;

cachée, où le chercheur choisi de ne pas dévoiler ouvertement le but de sa présence. Toutefois, pour adopter cette stratégie d’entrée, le chercheur se doit d’avoir d’excellentes raisons d’agir ainsi puisque cette approche peut venir à l’encontre de certaines règles d’éthique fondamentales. Elle pourrait peut-être être valable, par exemple, dans le cas où le phénomène à observer risque de ne pas survenir si les sujets sont au courant du fait qu’ils sont observés. Cependant, le fait de participer à l’étude sans avoir préalablement donné son consentement ne doit pas comporter de risque ou d’inconvénient pour le sujet et ce dernier doit être mis au courant de sa participation à la recherche aussitôt qu’il est possible de le faire de même qu’il doit se voir également offrir le choix de refuser l’utilisation des données collectées le concernant pour analyse ultérieure.

Dans le cadre de la présente recherche, le rôle occupé par le chercheur est celui de participant complet et la stratégie d’entrée est ouverte. De plus, quoique les rôles de d’observateur et de participant soient généralement considérés en conflit étant donné qu’il est souvent véhiculé que plus la participation augmente, moins le chercheur est en mesure d’observer et vice-versa, cette dualité perd maintenant de son importance en observation participante puisqu’il est démontré que pour éviter les incompréhensions et les observations imprécises, il est impératif que l’observateur participant se rapproche aussi bien physiquement que socialement des observés (Jorgensen, 1989). Cela est également le cas dans la présente recherche

60

étant donné que pour comprendre le contenu des communications ad hoc qui se déroulent entre les concepteurs observés, le chercheur se doit de comprendre le vocabulaire et le jargon de ces derniers, la culture organisationnelle dans laquelle ils baignent, etc.

Un avantage intéressant de l’usage de l’observation participante dans le cadre de recherches exploratoires et d’études de cas telles que celle présentée dans le présent document est qu’elle permet de potentiellement générer des résultats hautement valides puisque la définition des concepts utilisés est puisée directement de la réalité empirique du monde des observés.

Toutefois, à cause de la nature subjective et ouverte de la méthodologie, le fait de devenir envahi par le phénomène implique le danger qu’il deviendra très difficile de faire des rétroactions afin de réévaluer les buts et la problématique de recherche de même que la direction à poursuivre. Ce risque est mitigé dans le cadre de la présente recherche de deux façons. D’abord, la part de subjectivité de la méthode est réduite au maximum à l’aide de techniques d’encodage qui seront détaillées plus loin dans ce document et cette part de subjectivité est ensuite estimée à l’aide de calculs de validité qui seront également exposés plus loin. Ensuite, le recul indispensable au chercheur afin de faire une rétroaction nécessaire à une bonne analyse sur les observations réalisées ainsi que leurs significations, sera soutenu par un second chercheur ayant conservé la distance nécessaire du terrain d’observations.

61

De plus, la conception conventionnelle de la distinction entre objectivité et subjectivité est plus nuancée en observation participante. D’abord, comme il a déjà été exposé ci-haut, il est essentiel de pouvoir accéder à la subjectivité du monde dans lequel vivent les observés afin de pouvoir faire des interprétations justes et véridiques des observations. Finalement, il est souvent essentiel d’expérimenter le phénomène à l’étude, de «devenir le phénomène» (Jorgensen, 1989).