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L’application sombre (“Dark Map”)

Avant d’aborder notre modèle, revenons sur les propriétées de celui déjà employé par J. Lages et D. L. Shepelyansky [47] pour traiter de la matière noire capturée gravitationnellement dans le système solaire. Situons d’abord le problème, nous supposons un vaste halo de matière noire englobant la Galaxie. Les particules de matière noire évoluant dans ce halo sont susceptibles de rencontrer les divers composants de la Galaxie, parmi ceux-ci, le Soleil et sa cohorte de planètes.

La dynamique chaotique de la matière noire p. 68 θ φ x y z M2

a

b

q

Figure 3.2 – a) Exemple d’un processus de capture-évolution-éjection d’une particules par un binaire avec µ= 0.01. Le centre de masse du binaire, ici non représenté, est en x = 0 y = 0. b) Angles utilisés pour l’application “dark map” [47].

Les particules venant de l’infini et rencontrant un corps unique comme une étoile sont sim- plement diffusées par celui-ci. En effet, l’énergie w (voir conventions utilisées chapitre 2, section 2.2.3) est conservée dans le problème à deux corps, la particule avec w < 0 subit simplement une diffusion que l’on pourrait qualifier de diffusion Rutherford gravitationnelle. Dès lors, aucune capture n’est possible. En revanche, si une planète ou un corps massif secondaire (de masse faible par rapport au corps massif primaire) se trouve en orbite autour de ce corps primaire, alors la dynamique à trois corps s’applique et l’énergie w n’est plus conservée. La particule, via l’effet du corps secondaire, est susceptible de plonger dans le puits de potentiel du corps primaire et de se retrouver piégée (w >0). Par la suite, la diffusion en énergie va se poursuivre jusqu’à ce que la particule retrouve une énergie w négative et une orbite hyperbolique. Ce processus est fidèle à l’image du processus itéré de l’application de Kepler dont nous avons déjà parlé (chapitre 2) . C’est cette séquence complète, capture-évolution-éjection qui nous intéresse ici. Elle est illustrée sur la Fig. 3.2a où la particule arrive avec une orbite parabolique puis se voit capturée par le binaire, elle décrit ensuite une série d’orbite elliptique avant d’être éjectée.

L’idée d’utiliser une application symplectique pour calculer la masse de matière noire dans le système solaire prend racine dans les travaux réalisés en 2009 par I. K. Kriplovitch et D. L. Shepelyansky [47]. Ces travaux analytiques déterminent une estimation de la section efficace de capture et par conséquent une estimation de la masse capturée. Ces travaux montrent également qu’en unité réduite l’amplitude de la fonction perturbatrice est donnée par5M1v22/M2où M1est la masse du corps principal du binaire, M2est la masse du corps secondaire et v2la vitesse de rotation de ce corps. Dans les travaux de J. Lages et D. L. Shepelyansky [47] l’application de Kepler est utilisée avec des fonctions perturbatrices adaptées à chaque type d’orbite. Cette application est baptisée l’application sombre ou “dark map”. Ici c’est Jupiter qui fait office de corps secondaire, les autres planètes étant négligées. La particule démarre de l’infini avec une énergie w. 0, son orbite hyperbolique est donc quasi-parabolique. Les auteurs ont déterminé leurs fonctions perturbatrices à l’aide d’une intégration numérique RK4 des équations du mouvement et ce pour des orbites elliptiques quasi-parabolique avec w > 0 proche de 0. Ils ont ainsi constitué une bibliothèque

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de fonction perturbatrice suivant une grille composée des éléments θ, φ, q. Ces éléments sont représentés pour une ellipse sur la Fig. 3.2b : θ est l’angle d’inclinaison de l’orbite parabolique de départ, φ est l’angle de rotation par rapport au demi-grand axe, enfin q est la distance au périhélie. Il est important de noter qu’ici les éléments cités ne sont pas les éléments orbitaux traditionnels.

Par la suite, on choisit une fonction perturbatrice dans cette bibliothèque et on lance la dy- namique frappée. En effectuant cela un très grand nombre de fois, nous obtenons le nombre de particules capturées par le système solaire, mais également leur distribution en w. Rappelons que dans l’hypothèse de l’application de Kepler, les éléments q, θ, φ ne changent pas, seul w subit une diffusion. Il est ainsi possible de reconstruire une densité de particule dans l’espace. Il suffit de choisir un laps de temps∆t et de positionner les particules sur leurs ellipses dans ce laps de temps via la loi de Kepler. Nous verrons en détail comment procéder lorsque nous évoquerons notre propre modèle. Suite à ce travail, J. Lages et D. L. Shepelyansky [47] ont évalué une section efficace de capture, une masse de matière noire capturée par le système solaire et également un profil de densité radiale et volumique. Ces résultats seront comparés à ceux de notre modèle par la suite.

Il convient ici de faire remarquer que, comme nous l’avons vu au chapitre2, l’amplitude de la fonction perturbatrice est tributaire du ratio de masse, mais également de la vitesse de rotation du corps secondaire. La limite concernant la masse est assez rigide à notre analyse. En effet, l’application sombre comme l’application de Kepler est basée sur une théorie des perturbations. Elle suppose la masse du second corps faible par rapport à la masse du corps primaire. Nous ne modifierons, par conséquent que très peu ce paramètre (µ '0.001 pour le couple Soleil-Jupiter). En revanche, la vitesse de rotation est un paramètre modifiable sans problème. Dans le cas du système solaire, la vitesse de Jupiter est relativement lente ('12 km/s) par rapport à la vitesse moyenne des particule de matière noire du halo (u = 220 km/s). Si nous envisageons un autre système, par exemple du type trou noir-étoile, alors la vitesse de rotation de l’étoile atteint une valeur intéressante pour un rayon d’orbite faible. Elle pourrait s’élever jusque2 à 3% de c, la vitesse de la lumière dans le vide. Comme nous l’avons vu au chapitre2 la vitesse du corps secondaire agit sur l’amplitude de la fonction perturbatrice, par conséquent, ce type de système en rotation rapide est un véritable aspirateur à matière noire ! Dans notre modèle nous allons traiter toute la plage des vitesses allant de celle de Jupiter à celle de ces systèmes en rotation ultra rapide, mais en simplifiant la forme de la fonction F(x).

Nous attirons l’attention du lecteur sur le fait que lorsque nous parlons de variables réduites nous utilisons les conventions précédemment établies G= 1, M1+ M2' M1= 1, ce qui implique v2 = 1, où G est la constante gravitationnelle, M1 la masse du corps principal du binaire, M2 la masse secondaire du binaire enfin v2est la vitesse de rotation du second corps du binaire. A défaut de cette indication, les variables seront traitées de manière standard.