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Chapitre 2 · Modélisation et quantification des incertitudes

4. Application au cas d’étude

Cette section identifie les incertitudes du cas d’étude présenté au chapitre précédent : caractéristiques technico-économiques (paramètres incertains statiques) et ST de production PV pour laquelle l’incertitude porte sur la probabilité d’observer respectivement une année de production photovoltaïque dégradée (dégradation de type 1) et une année de production photovoltaïque très dégradée (dégradation de type 2). La ST de charge électrique est considérée comme une consigne certaine.

4.1. Paramètres incertains statiques

Dans la modélisation par Odyssey du cas illustratif présenté au Chapitre 1, 26 paramètres statiques incertains sont identifiés, il s’agit de l’ensemble des caractéristiques technico-économiques du modèle du système. En suivant la méthodologie décrite dans la section précédente, on obtient les FDP détaillées Tableau II. 3. Les paramètres marqués par un double astérisque (**) n’ont pas directement la valeur et l’unité renseignées dans le Tableau II. 3. La valeur et l’unité renseignées dans le tableau correspondent au paramètre sur lequel porte l’incertitude mais sa relation avec le paramètre nommé est plus complexe : il s’agit de variables dépendantes. Ainsi, la tension de cellule de l’électrolyseur, le rendement de la pile à combustible et le CAPEX du stockage d’hydrogène (H2) sont modélisés par les polynômes décrits dans les équations II. 27 - 29.

Tableau II. 3 : Paramètres statiques incertains, leurs FDP et cas d’attribution (cf. Figure II. 11) du cas illustratif

Composant Paramètre Unité FDP retenue Référence Cas

Panneaux PV

CAPEX €/Wc β [α = 1.44 ; β = 4.54 ; Min = 0.374 ; Max = 3.165]

(IRENA 2016) 1 OPEX % CAPEX U [2 ; 10] Données CEA* 2 Coût de

remplacement % CAPEX U [13.75 ; 41.25] (IEA 2014; IRENA 2016) 3 Durée avant

remplacement h W [α = 5.3759 ; β = 262 800 ; Min = 0] (Weckend et al. 2016) 1

Electrolyseur

CAPEX €/W U [6.5 ; 13.1] Données CEA* 2 OPEX % CAPEX U [2 ; 10] Données CEA* 2 Coût de

remplacement % CAPEX U [9 ; 37] (Bertuccioli et al. 2014) 2 Augmentation de

la tension de cellule (dégradation)

µV/h de

fonctionnement U [0.4 ; 15] (Bertuccioli et al. 2014) 2 Durée avant

remplacement fonctionnement h de U [30 000 ; 90 000] (Bertuccioli et al. 2014) 2 Tension de

cellule** V U [1.39 ; 1.54] (Guinot et al. 2015) 4 Stockage H2 CAPEX** U [18 055 ; 28 239] Données CEA* 2 OPEX % CAPEX U [2 ; 10] Données CEA* 2

Pile à combustible

CAPEX €/W U [1.6 ; 3] Données CEA* 2 OPEX % CAPEX U [2 ; 10] Données CEA* 2 Coût de

remplacement % CAPEX U [15 ; 45] (Guinot et al. 2015) 2 Rendement** - U [0.30 ; 0.34] Données CEA* 4 Diminution de la

tension de cellule (dégradation)

%/h de

fonctionnement U [4.5E-4 ; 13.5E-4] (Saur et al. 2018) 3 Durée avant

remplacement fonctionnement h de U [10 000 ; 20 000] (Chardonnet et al. 2017) 2

Batteries

CAPEX €/Wh β [α = 1.33 ; β = 3.5 ; Min = 0.102 ; Max = 0.354]

(Battke et al. 2013) 1 OPEX % CAPEX U [2 ; 10] Données CEA* 2 Coût de

remplacement % CAPEX U [26 ; 100] (IRENA 2017) 2 Rendement en

charge - β [α = 1 ; β = 4 ; Min = 0.8 ; Max = 0.9] (Battke et al. 2013) 1 Rendement en

décharge - β [α = 1 ; β = 4 ; Min = 0.8 ; Max = 0.9] (Battke et al. 2013) 1 Autodécharge W U [3.75E-5 ; 1.4E-4] (Riffonneau 2009) 2 Perte de capacité

(dégradation) Wh/h U [1.4E-5 ; 4.2E-5] (Riffonneau 2009) 3 Durée avant

remplacement h

β [α = 1.48 ; β = 2.75 ; Min = 43 800 ;

Max = 131 400] (Battke et al. 2013) 1 *Les références « Données CEA » marquées par un astérisque sont issues d’interviews d’experts du CEA.

Tension de cellule de l’électrolyseur

Le modèle utilisé, issu de (Darras 2010), consiste à représenter la tension de cellule via la courbe de polarisation de la cellule (courbe I-V).

V𝐸𝐿𝑌 = 𝒂𝟎+ 𝑎1∗ 𝑥 + 𝑎2∗ 𝑥2+ 𝑎3∗ 𝑥3 Equation II. 27

Avec : V𝐸𝐿𝑌 : tension de cellule de l’électrolyseur (en V)

𝑥 : densité de courant (en V/cm2)

𝑎0 : paramètre incertain (en V)

𝑎1, 𝑎2, 𝑎3 : constantes non considérées comme incertaines

Rendement de la pile à combustible

Le modèle polynomial utilisé permet de prendre en compte le fait que le rendement de la pile à combustible est non constant, et lié à la puissance à laquelle celle-ci est sollicitée (Guinot 2013).

𝜂𝑃𝐴𝐶= 𝒂𝟎+ 𝑎1∗ 𝑝 + 𝑎2∗ 𝑝2+ 𝑎3∗ 𝑝3+ 𝑎4∗ 𝑝4+ 𝑎5∗ 𝑝5 Equation II. 28

Avec : 𝜂𝑃𝐴𝐶 : rendement de la Pile A Combustible (-)

𝑎0 : paramètre incertain (-)

𝑝 = 𝑃 𝑃

𝑛𝑜𝑚𝑖𝑛𝑎𝑙𝑒 : puissance relative dans la pile à combustible (-)

𝑎1, 𝑎2, 𝑎3, 𝑎4, 𝑎5 : constantes non considérées comme incertaines (-)

CAPEX du stockage d’hydrogène (H2)

CAPEX𝑠𝑡𝑜𝑐𝑘𝑎𝑔𝑒 𝐻2 = 𝒂𝟎+ 𝑎1∗ 𝑉 Equation II. 29

Avec : CAPEX𝑠𝑡𝑜𝑐𝑘𝑎𝑔𝑒 𝐻2 : CAPEX du stockage d’hydrogène (en €)

𝑉 : volume du stockage d’hydrogène (en m3)

𝑎0 : paramètre incertain (en €)

𝑎1 : constante non considérée comme incertaine (en €/m3)

Enfin, tous les paramètres exprimés en pourcentage du CAPEX (les OPEX et les coûts de remplacement dans notre cas) sont eux aussi des variables dépendantes. Comme évoqué dans la section précédente, cette dépendance permet de modéliser la corrélation entre les deux variables et implique de prendre en compte simultanément les incertitudes sur le CAPEX et sur le pourcentage le liant à l’OPEX dans le traitement des incertitudes. En particulier elle est un des arguments orientant le choix de méthodes d’analyse de sensibilité globale dans l’Approche Analyse de Sensibilité présentée au Chapitre 3.

4.2. Séries temporelles incertaines

Les deux ST utilisées dans le cas d’étude sont :

- un profil de production photovoltaïque (PV),

- un profil de consommation électrique correspondant à la consigne de puissance à satisfaire. Dans ce cas d’étude, seule la ST de production photovoltaïque est considérée comme incertaine.

La charge est quant à elle considérée comme une consigne non incertaine. Celle-ci est pourtant souvent difficile à obtenir, le choix de ne pas la considérer comme incertaine relève davantage du caractère démonstratif de l’application de la méthode que d’une prise de position quant à la nature de cette série temporelle.

Deux ST alternatives sont envisagées pour modéliser les variations possibles par rapport à la ST historique d’une durée d’un an :

- une ST alternative représentant une année de production PV légèrement dégradée dont la fréquence d’occurrence est moyenne (approximativement une fois tous les huit ans),

- une ST alternative représentant une année de production PV fortement dégradée dont la fréquence d’occurrence est faible (approximativement une fois tous les 40 ans).

Les paramètres incertains sont les probabilités d’apparition de ces deux types d’année. Leurs valeurs nominales (respectivement 𝑝10= 0.125 et 𝑝20= 0.025) sont des choix arbitraires pour illustration. La dégradation légère est générée à partir de la ST de référence dont trois jours par mois tirés au hasard ont une production PV réduite de 25%. La dégradation forte est générée à partir de la ST de référence dont six jours par mois tirés au hasard ont une production PV réduite de 50%. Les jours de production réduite étant tirés au hasard, la variabilité entre les ST est partiellement modélisée (au sein d’un même type de dégradation).

Cependant la modélisation de la variabilité pourrait être améliorée par exemple en utilisant les techniques de génération de profil. Il serait possible ainsi d’amplifier la variabilité entre les différentes réalisations d’un même type de dégradation ou d’introduire de la variabilité entre plusieurs réalisations de la ST non dégradée au lieu d’utiliser systématiquement l’unique ST historique de référence. En effet, la proposition de modélisation des deux types de dégradation n’inclut par exemple pas la situation très sollicitante de plusieurs jours consécutifs de faible production.

De plus, ne sont modélisées dans cette application que des dégradations de la série de référence, aucune variation positive n’est envisagée. Pourtant, la méthode (incertitude portant sur la probabilité d’occurrence d’une ST alternative structurellement différente de la série temporelle de référence) est tout autant envisageable sur un autre type modification de la ST de référence.

Les caractéristiques des deux ST alternatives sont synthétisées dans le Tableau II. 4. Tableau II. 4 : Caractéristiques des ST alternatives pour la production PV du cas illustratif

Type d’année pour la production PV par rapport

à la ST de référence Mode de génération

Probabilité

d’apparition FDP de la probabilité pi Dégradation légère 3 jours par mois tirés au hasard ont une production réduite de 25% par

rapport à la ST de référence

Loi de Bernoulli de probabilité p1

U [0; 0.25] (en moyenne une fois tous les 8 ans) Dégradation forte

6 jours par mois tirés au hasard ont une production réduite de 50% par rapport à la ST de référence

Loi de Bernoulli de probabilité p2

U [0; 0.05] (en moyenne une fois tous les 40 ans)

Les bornes des lois uniformes (permettant de modéliser l’équiprobabilité) ne sont pas issues de la démarche d’attribution présentée à la Figure II. 11. Ces valeurs, ainsi que 𝑝10 et 𝑝20 sont des choix arbitraires et ont été fixées pour les besoins de la démonstration.

La Figure II. 12 représente trois séries temporelles de production photovoltaïque pour le mois de janvier :

- la ST originale correspondant à la simulation déterministe à partir de laquelle sont générées les ST alternatives en orange au milieu,

- la ST alternative de type « mauvaise année » (dégradation faible) sur laquelle sont identifiés les trois jours de production réduite en bleu,

- la ST alternative de type « année catastrophique » (dégradation forte) sur laquelle sont identifiés les six jours de production réduite en vert.

Figure II. 12 : Mois de janvier de la ST originale et des ST alternatives du cas illustratif

Le cas illustratif comporte donc 28 paramètres incertains : 26 caractéristiques technico-économiques et deux paramètres liés à l’utilisation de deux ST alternatives modélisant respectivement une année de production PV faiblement dégradée et une année de production PV fortement dégradée. Ces paramètres incertains sont tous caractérisés par une fonction de densité de probabilité, attribuée selon la méthodologie présentée à la section 3 de ce chapitre pour les caractéristiques technico-économiques.

0 200 400 600 800 ST originale 0 200 400 600 800 Production PV pour 1 kWc (W) Dégradation faible 0 200 400 600 800 1-j an v. 2-j an v. 3-j an v. 4-j an v. 5-j an v. 6-j an v. 7-j an v. 8-j an v. 9-j an v. 10-j an v. 11-j an v. 12-j an v. 13-j an v. 14 -j an v. 15-j an v. 16-j an v. 17-j an v. 18-j an v. 19-j an v. 20-j an v. 21-j an v. 22-j an v. 23-j an v. 24-j an v. 25-j an v. 26-j an v. 27-j an v. 28-j an v. 29-j an v. 30-j an v. 31-j an v. 1-f évr. Dégradation forte

Conclusion

Malgré les opportunités offertes par différents cadres de représentation de l’incertain présentés dans la première section de ce chapitre, les incertitudes aléatoires et épistémiques considérées dans ces travaux de thèse sont caractérisées dans le cadre probabiliste. Ce cadre permet de considérer de manière homogène les paramètres incertains quelles que soient les informations à disposition dans la littérature et quel que soit l’outil de modélisation et simulation des systèmes énergétiques hybrides utilisé. De plus, ce formalisme de représentation des incertitudes est à la fois ancien et très largement utilisé. Il en découle une relative disponibilité des données pour la quantification des sources d’incertitude mais aussi une pléiade de méthodes requérant ce cadre de modélisation des incertitudes.

Dans le cas des ST, l’incertitude prise en compte porte sur la probabilité d’occurrence d’une ST structurellement différente de la ST de référence. Au-delà de la prise en compte de cette incertitude épistémique, l’utilisation de ST alternatives permet la modélisation de la variabilité temporelle.

Enfin la quantification des sources d’incertitude est un élément indispensable qui ne saurait faire l’impasse sur une recherche bibliographique étendue et / ou sur l’interview d’experts. La méthode proposée dans la section 3 permet d’attribuer une FDP aux paramètres incertains identifiés quelle que soit l’information à disposition sur ceux-ci. Cette approche générique d’identification et de quantification des sources d’incertitude a ensuite été appliquée au système énergétique hybride présenté dans le Chapitre 1.

L’étape de modélisation et de quantification des sources d’incertitude, présentée dans ce chapitre est commune et constitue le point de départ des deux approches mises en œuvre dans cette thèse : l’Approche Optimisation Stochastique Multi-Objectifs (présentée Chapitre 4) et l’Approche Analyse de Sensibilité présentée au chapitre qui suit.