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1 Introduction

1.3 L’adaptation péri-opératoire des traitements dans le cadre d’un acte d’anesthésie

1.3.3 Adaptation des grandes classes thérapeutiques en période péri-opératoire

1.3.3.6 Les anticoagulants

Les médicaments anticoagulants diminuent la capacité hémostatique du patient auquel ils sont administrés. En cas d’intervention invasive, il faut restaurer totalement ou partiellement la capacité hémostatique pour limiter les phénomènes hémorragiques. En revanche, l’interruption intempestive de tels traitements ou l’absence de leur reprise après intervention fait courir le risque de thromboses (21). L’arrêt et la reprise de certains traitements au décours d’une chirurgie comme les anticoagulants est la conclusion d’un raisonnement mettant en balance le risque thrombotique du patient et le risque de saignement per et post-opératoire. Ce raisonnement complexe propre aux anesthésistes-réanimateurs mérite d’être expliqué clairement au médecin généraliste qui est impliqué souvent dans la reprise de ces traitements surtout à l’heure de la chirurgie ambulatoire (22).

La réalisation de questionnaires permettant d’évaluer les connaissances de la gestion péri-opératoire des traitements chroniques par les médecins généralistes à l’instar des AVK permet de cibler les différents points d’incompréhension de ces derniers afin de leur délivrer par la suite une information la plus adaptée possible et d’améliorer ainsi les pratiques et par la suite la prise en charge des patients dans la période péri-opératoire. Cela passe par la création d’algorithmes de gestion des traitements qui précisent la conduite à tenir au cas par cas pour les patients en fonction de leur état clinique et de l’acte chirurgical qu’ils ont subi (23).

1.3.3.6.1 Les anti-vitamine K

Les anti-vitamine K (AVK) comprennent l’acénocoumarol (Sintom®) ; le fluindione (Previscan®) ; la warfarine (Coumadine®). Les AVK sont de petites molécules dont la

structure chimique ressemble à celle de la vitamine K. La warfarine est le médicament de référence de tous les essais cliniques. Le mode d’action des AVK sur la coagulation est indirect. Les AVK sont rapidement absorbés par voie orale et se concentrent dans le foie où ils sont métabolisés. Le délai d’action des AVK est gouverné par le taux de renouvellement des facteurs de la coagulation vitamine-K dépendant. L’état d’équilibre est atteint 4 à 8 jours après le début du traitement. Leur durée d’action à l’arrêt du traitement est de plusieurs jours suivant la demi vie du médicament, la charge en vitamine K et la capacité de synthèse du foie. La réponse individuelle aux AVK est très variable ce qui impose l’adaptation par un test biologique l’INR. Ils sont indiqués principalement en prévention des complications thromboemboliques en rapport avec la fibrillation auriculaire, certaines valvulopathies mitrales et prothèses valvulaires, dans le traitement des thromboses veineuses profondes et de l’embolie pulmonaire. L’effet secondaire grave le plus fréquent est la survenue d’hémorragies majeures (24) (25).

Il est recommandé de ne pas interrompre le traitement par AVK pour les actes à risque hémorragique faible. Dans le cas d’une chirurgie à risque hémorragique intermédiaire ou majeur, il est demandé de prendre la dernière prise à J-5 de l’intervention et de réaliser un contrôle de l’INR la veille au soir de l’intervention (26), En l’absence de risque hémorragique majeur et persistant, il est recommandé de reprendre les AVK dans les 24 premières heures. Si la reprise n’est pas possible, le patient devra bénéficier d’une héparinothérapie à dose curative si le risque hémorragique est contrôlé (27).

1.3.3.6.2 Les inhibiteurs directs de la thrombine (anti-IIa) : dabigatran étexilate (Pradaxa®) Le dabigatran étexilate est la pro-drogue inactive du dabigatran. Le dabigatran retarde et réduit la quantité de thrombine générée proportionnellement à la dose. La biodisponibilité par voir orale est faible. Le médicament est un substrat de la P-glycoprotéine(P-gp). Sa biodisponibilité est fortement augmentée par la co-administration des inhibiteurs puissants de la P-gp (vérapamil, amiodarone, quinidine, antifungiques azolés, inhibiteurs de la protéase du VIH) et réduite par les inducteurs de la P-gp (rifampicine, millepertuis). Le pic de concentration est atteint entre 30 minutes et 2 heures chez le sujet sain à jeun, mais il peut être retardé si le médicament est administré au cours du repas ou si le transit intestinal est ralenti, par exemple en post-opératoire immédiat. L’absorption n’est pas modifiée par le repas mais diminué d’environ 30% par la prise d’anti-acides. L’exposition au médicament est multipliée

par 3 en cas d’insuffisance rénale modérée et par 6 en cas d’insuffisance rénale sévère. Ses indications sont : en prophylaxie primaire des évènements thromboemboliques veineux chez les patients adultes ayant bénéficié d’une chirurgie programmée pour prothèse totale de hanche ou de genou, dans la prévention de l’AVC et de l’embolie systémique en cas de fibrillation atriale non valvulaire associée à au moins un facteur de risque. L’incidence d’hémorragie majeure du dabigatran est voisine de celle des traitements comparateurs dans les essais en chirurgie orthopédique ou chez les patients en fibrillation atriale. Chez ces derniers les hémorragies intracérébrales furent environ 3 fois moins fréquentes que sous AVK. En revanche une augmentation des hémorragies gastro-intestinales ont été observée avec la dose la plus forte (28) (25).

C’est pourquoi il est recommandé dans le cadre d’une chirurgie à risque hémorragique élevé d’interrompre le dabigatran J-5 avant l’intervention si la clairance de la créatinine est entre 30 et 50 ml/min et de l’interrompre à J-4 si la clairance de la créatinine est >50ml/min. L’anticoagulation à dose prophylactique doit avoir lieu au moins 6 heures après l’acte invasif, si une thromboprophylaxie veineuse est indiquée. L’anticoagulation à dose curative peut être envisagé dans les 24 à 72h post-opératoire. Pour une chirurgie à risque hémorragique mineur les recommandations sont aucune prise la veille au soir ni le matin de l’intervention. La reprise pourra être effectuée au moins 6 heures après la fin du geste invasif, selon le schéma habituel du patient (26).

1.3.3.6.3 Les inhibiteurs directs du facteur Xa : le rivaroxaban (Xarelto®) et l’apixaban (Eliquis®)

Le rivaroxaban inhibe réversiblement le facteur Xa. Il inhibe le facteur Xa libre, associé au complexe d’activation de la prothrombine ou lié au caillot.

Il est rapidement absorbé par voie orale. Sa biodisponibilité est comprise entre 80 et 100%. Elle n’est pas influencée par la prise d’anti-acides. La demi vie d‘élimination est comprise entre 7 et 11 heures. L’état d’équilibre est atteint après 3 à 5 jours de traitement. Les conditions d’administration (jeûne-repas), l’âge, le sexe, le poids, l’insuffisance hépatique modérée et la fonction rénale n’ont qu’une influence limitée sur l‘exposition au médicament. L’incidence d’hémorragie majeure du rivaroxaban est voisine de celle des traitements comparateurs dans les essais en chirurgie orthopédique ou chez les patients en FA. Les hémorragies intracérébrales furent environ 2 fois moins fréquentes que sous AVK.

L’apixaban (Eliquis®) est une petite molécule chimique qui inhibe réversiblement le facteur Xa. Sa biodisponibilité par voie orale est de 50%. L’absorption n’est pas affectée par le repas ni par la co-administration d’anti-acides. L’état d’équilibre est atteint au 3ème jour (29) (25).

Les recommandations pour le rivaroxaban et l’apixaban dans le cadre d’une chirurgie à risque hémorragique mineur sont pas de prise la veille au soir ni le matin de l’intervention. La reprise pourra être effectuée au moins 6 heures après la fin du geste invasif, selon le schéma habituel du patient. S’il s’agit d’une chirurgie à risque hémorragique majeur, la dernière prise doit avoir lieu J-3 avant le geste chez des patients ayant une clairance de la créatinine >30mL/min. L’anticoagulation à dose prophylactique doit avoir lieu au moins 6 heures après l’acte invasif, si une thromboprophylaxie veineuse est indiquée. L’anticoagulation à dose curative peut être envisagé dans les 24 à 72h post-opératoire (26).

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