PARTIE 2 :MATERIEL ET METHODES DE CARACTERISATION
1. Analyse unidimensionnelle : l’analyse de variance
L’analyse de variance (ANOVA) est une méthode univariée d’analyse de données
(descripteur par descripteur), permettant d’étudier l’effet d’un ou plusieurs facteurs qualitatifs
sur une variable réponse quantitative. Son objectif est de comparer des ensembles de plus de
deux moyennes, en identifiant les sources de variation qui peuvent expliquer les différences
existant entre elles. En analyse sensorielle, il y a toujours au moins deux facteurs : l’effet
produit et l’effet juge. Dans notre étude, les juges ont effectué deux répétitions par produit. Le
modèle communément utilisé est une ANOVA à deux facteurs avec interaction (Danzart,
2009a).
Chaque résultat est repéré par 3 indices i, j, k, correspondant respectivement aux numéros du
produit, du juge et de la répétition. Le résultat y
ijkreprésente donc la note donnée au produit i
par le sujet j à la répétition k pour un descripteur donné. Celui-ci peut être décomposé
linéairement en cinq parties : la première (µ) caractérise la valeur moyenne du descripteur, la
seconde (α
i) caractérise l’effet du produit, la troisième (β
j) correspond à l’effet du sujet, la
quatrième (γ
ij) est le terme d’interaction juge×produit et le dernier terme (ε
ijk) est l’erreur
résiduelle du modèle, et traduit à la fois l’incertitude sur la mesure et l’inadéquation du
modèle.
y
ijk= µ + α
i+ β
j+ γ
ij+ ε
ijk(17)
L’analyse de variance repose sur le test de Fisher et donc sur la normalité des distributions et
l’indépendance des échantillons. Cependant, il est intéressant de noter que l’analyse de
Partie 2 –Matériel et méthodes de caractérisation Chapitre 4– Outils statistiques
variance est une méthode d’analyse robuste, peu sensible à la non-normalité des populations
et, pour des échantillons de même effectif, à l’inégalité des variances (Dagnelie, 2011).
Les calculs des sommes des carrés (SC), des degrés de libertés (ddl) ainsi que les statistiques
de Fisher pour chaque source de variation sont donnés dans le Tableau 19 ci-dessous.
Tableau 19. Table d’analyse de la variance à deux facteurs juge-produit avec interaction
Source de variation Somme des carrés ddl Statistique de Fisher
Produits WXY Z [ \
]..\
…²
]
I-1 a
bc d]WX? eefWXY eef⁄
bc d]béh] d5 5
⁄
Juges SCJ=iZ ∑ L\
k .k.\
…M² J-1 a
kdl5WX? eefWX eef⁄
kdl5béh] d5 5
⁄
Juge×produit
SCI=Z ∑ L\
],k ]k.\
]..\
.k.\…² (I-1)(J-1) a
] 5b2n ]cWXi eef⁄
] 5b2n ]cWX? eef⁄
béh] d5 5Erreur résiduelle SCR=∑ L\
],k,o ]ko\
]k.M² IJ(K-1)
Totale SCT=∑ L\
],k,o ]ko\
…M² IJK-1
I= nombre de produits ; J=nombre de juges ; K=nombre de répétitions
La statistique de Fisher calculée pour chaque source de variation doit être comparée à la
valeur lue dans les tables de Fisher au niveau de significativité α choisi avec les nombres de
ddl du numérateur et du dénominateur correspondants. Le risque α, risque de première
espèce, correspond au risque de rejet à tort de H
0(hypothèse d’égalité des moyennes) que l’on
est prêt à accepter « au maximum ». Ce risque est fixé à 5% pour l’étude. Une valeur de
Fisher calculée inférieure à celle de la table signifie que la dispersion à l’intérieur des groupes
(variabilité intra-population) est plus importante que celle des moyennes (variabilité
inter-population) : les populations sont donc identiques pour le descripteur étudié. Par contre, si la
statistique de Fisher calculée est supérieure à celle de la table au niveau α, alors des
différences significatives existent entre les populations. On interprète souvent plutôt la
probabilité p associée au F de Fisher. Ainsi, le facteur est considéré comme influent ou
significatif lorsque cette probabilité p est inférieure à 5%.
1.1. Effet produit
L’effet produit indique si les moyennes des notes des produits (tous juges et répétitions
confondus) sont différentes pour un descripteur donné. Si l’effet est significatif, les produits
sont considérés significativement différents et le panel est discriminant pour ce descripteur.
Partie 2 –Matériel et méthodes de caractérisation Chapitre 4– Outils statistiques
Dans ce cas, des comparaisons multiples des moyennes peuvent être effectuées afin de mettre
en évidence des groupes de produits. Différentes approches de comparaison multiples de
moyennes existent (Tukey, PPDS, Scheffé, Duncan, Bonferroni…). Nous avons choisi
d’utiliser le test de Tukey, aussi nommé HSD « Honestly Significant Difference » (test de la
« différence franchement significative »), qui consiste à calculer l’expression q
obspour toutes
les différences de moyennes par paire et à la comparer à l’erreur standard E :
p
cqh rst&surv
(18)
w
.0x'+(19)
Avec µ
iet µ
j, les moyennes à comparer des produits i et j; CMR, le carré moyen des résidus
de l’ANOVA ; J et K, le nombre de juges et de répétitions, respectivement.
Le terme q
obssuit une loi des écarts studentisés de paramètres I et IJ(K-1). La valeur q
obsest
alors comparée à la valeur théorique critique q
crit. Si q
obs> q
crit, on conclut à une différence
significative entre les deux moyennes, µ
iet µ
j.
1.2. Effet juge
Un effet juge significatif indique que la moyenne, tous produits et répétitions confondus,
diffère d’un juge à un autre. En général, cet effet est souvent significatif mais il n’apporte pas
de réelle information sur la performance des panélistes. Il est souvent dû à une différence
d’utilisation de l’échelle de notation entre les juges. Cet effet peut être atténué par un
entraînement plus important ou par l’utilisation de produits référents comme aide à la
notation.
1.3. Effet de l’interaction juge×produit
La performance d’un panel sensoriel est étudiée essentiellement à travers l’interaction
juge×produit (Couronne, 1997). Un effet significatif de l’interaction juge×produit traduit une
différence de perception des produits entre les juges, et donc un non consensus entre juges.
Cependant, ce terme d’interaction comprend deux sources de variation : les juges notent les
produits dans des ordres différents (Figure 45a) impliquant un réel désaccord entre les juges,
et/ou les juges ne perçoivent pas les mêmes écarts entre les produits (Figure 45b).
Partie 2 –Matériel et méthodes de caractérisation Chapitre 4– Outils statistiques
Juge 1
Juge 2
a.
Juge 1
Juge 2
b.
Figure 45. Illustration d’une interaction juge×produit significative. a. correspond à une
inversion de produits. b. correspond à une utilisation différente de dispersion des notes
Lorsque l’interaction juge×produit est significative, il peut-être intéressant de déterminer le ou
les panéliste(s) contribuant le plus à cette interaction et qui sont donc en désaccord avec
l’ensemble du panel. Il est alors possible d’enlever ces juges du panel pour l’évaluation du
descripteur considéré, ou alors de renforcer leur entraînement. Cette interaction peut être
représentée graphiquement en traçant pour chaque juge la courbe produit i=f(moyenne
obtenue par le juge j sur le produit i), illustrée sur la Figure 46.
Figure 46. Illustration de l’interaction juge×produit (Pineau, 2006)
1.4. Répétabilité du panel
La répétabilité du panel entre les deux séances peut être étudiée grâce à l’erreur résiduelle du
modèle, et plus spécifiquement avec l’écart-type résiduel (RMCE). En effet, l’écart-type
résiduel correspond à la racine carré de la moyenne du carré des écarts entre les répétitions de
chaque produit.
RMCE =
/.vyézt{|8668
∑L}tu~&}tu.M²
•' +&!
(20)
Un RMCE élevé implique que les écarts entre les répétitions sont grands et traduit donc la non
répétabilité du panel. Cependant, la valeur du RMCE dépend de l’échelle de notation du
descripteur. Ainsi, pour comparer la répétabilité de deux descripteurs évalués avec des
A B C
C B A
A B C
Partie 2 –Matériel et méthodes de caractérisation Chapitre 4– Outils statistiques
échelles différentes ce qui peut être notre cas, il est nécessaire d’utiliser le coefficient de
variation (CV), correspondant au RMCE divisé par la moyenne globale des notes obtenues
pour le descripteur considéré (exprimé en %).
2. Analyse multidimensionnelle : l’analyse en composantes
Dans le document
Caractérisation physico-chimique et sensorielle d'ingrédients cosmétiques: une approche méthodologique
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