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VIII. SIGNAUX ENREGISTRES EN NORMANDIE

3. ANALYSE SPECTRALE

3.1 Obtention du spectre

Afin d’obtenir la densité spectrale de puissance ou de pression acoustique DSP (ν) sur une fenêtre de largeur T = M Te, avec Te le pas d’échantillonnage temporel et M le nombre de pas considérés, nous avons eu recours à l’algorithme de signal court [71] :

2 e X( ) T M ) ( DSP νννν ==== νννν (8.8)

où X(ν) est la transformée de Fourier numérique du signal échantillonné :

) kT i 2 exp( ) kT ( X T M T ) ( X e 1 M 0 k e e e −−−− πνπνπνπν ==== νννν

∑∑∑∑

−−−− ==== (8.9)

La fréquence ν est elle-même échantillonnée avec un pas arbitraire ∆ν dans l’intervalle limité d’une part par la largeur de la fenêtre, d’autre part par la fréquence de Shannon, soit :

e e 2T 1 T M 1 ≤≤≤≤ νννν ≤≤≤≤ où νννν0 ≤≤≤≤νννν≤≤≤≤ννννSh (8.10)

La pression acoustique quadratique moyenne sur la fenêtre de largeur M Te s’écrit par ailleurs :

[[[[ ]]]]

2 1 M 0 k e e e 2 rms X(kT ) T M T P

∑∑∑∑

−−−− ==== ==== (8.11)

La densité spectrale doit être multipliée par deux pour tenir compte des fréquences négatives non prises en compte dans la sommation en fréquence. Dans ces conditions la relation de Parseval-Plancherel s’écrit : 2 e 2 rms 2MT X( ) P Sh 0 νννν νννν ∆∆∆∆ ====

∑∑∑∑

νννν νννν ==== νννν (8.12)

Cette relation exprime le fait que la puissance acoustique du signal temporel se retrouve entièrement dans le spectre, ce que notre code de calcul permet de contrôler.

3.2 Procédures de lissage

Les spectres des signaux analysés dans les différentes plages temporelles se révèlent irréguliers, probablement du fait de l’étroitesse de ces plages. Nous avons donc dû élaborer des procédures de lissage spatio-temporelles pour rendre ces spectres plus lisibles.

De façon pratique, on peut pour un capteur donné calculer les spectres sur plusieurs fenêtres si possible adjacentes et effectuer ensuite une "moyenne quadratique" de ces spectres. On peut ensuite, le cas échéant, effectuer une "moyenne spatiale" des spectres obtenus avec les différents capteurs pour une plage temporelle donnée.

En fait, le spectre relatif à un créneau temporel peut être lissé de deux manières différentes :

- en effectuant une moyenne entre les niveaux spectraux quadratiques (Pa2/Hz) obtenus sur des sous-fenêtres ou avec des capteurs différents,

- en effectuant une moyenne directe en dB/Hz de la DSP sur plusieurs fenêtres ou plusieurs capteurs.

La deuxième méthode semble discutable à première vue, mais constitue un moyen efficace pour minimiser l’influence des pics accidentels ou d’une sensibilité différente des capteurs (ceci concerne particulièrement le niveau de bruit).

Nous avons effectué ces deux traitements sur une durée de 400 s de bruit de fond filtré pour le capteur C2 (figure 8.11). La courbe "lin" résulte du passage final en dB/Hz après avoir effectué une moyenne quadratique sur des fenêtres temporelles adjacentes couvrant la durée totale considérée. La courbe "dB" résulte d’un traitement analogue à l’intérieur de créneaux successifs de 100 s complété par une moyenne en dB/Hz des quatre spectres obtenus. On voit que le traitement mixte atténue notamment le pic constaté entre 5 et 6 Hz.

Figure 8.11 – Lissage par deux méthodes du spectre du bruit de fond

Figure 8.13 – Contrôle de la pente du spectre du bruit de fond brut

La figure 8.12 permet de comparer les spectres lissés du signal de bruit de fond brut et filtré. Le lissage a été effectué en moyenne quadratique sur chaque capteur à partir de quatre créneaux de 100 s disjoints et exempts de pics accidentels, puis par moyenne en décibels sur les quatre capteurs. On voit sur la figure que le signal exploitable ne dépasse pas 8 Hz, à plus forte raison quand il est filtré. Par ailleurs, le filtrage à 0,5 Hz a des effets jusqu’à 0,6 Hz.

Dans la figure 8.13, nous avons représenté le spectre du bruit de fond brut lissé en échelle logarithmique. On retrouve bien la pente de -20 dB par décade ou -6 dB par octave constatée avec les signaux de Parentis.

En ce qui concerne les plages de signal utile, nous sommes de plus confrontés au problème de l’étroitesse des fenêtres temporelles à considérer. On sait en effet qu’une fenêtre temporelle étroite équivaut à une fonction porte dont le spectre se superpose à celui du signal. Ce spectre en arches a une composante continue non nulle (voir Chapitre V). La largeur de la fenêtre détermine par ailleurs la période maximale pouvant être décelée par l’analyse spectrale. Ainsi, une fenêtre de largeur 10 s équivaut à un filtrage à 1/10 s = 0,1 Hz.

Figure 8.15 – Spectres du signal et du bruit de fond centrés pour la plage S6

Sur les figures 8.14 et 8.15 sont représentées les densités spectrales de puissance calculées pour le signal des plages temporelles S2 et S6 d’une largeur de 12 s (cf. § 1.2). Pour chacune de ces plages, le signal a été lissé en effectuant une moyenne spatiale en dB entre les différents capteurs. Le symbole T1 signifie que nous avons considéré par capteur qu’une fenêtre temporelle sur la largeur de la plage ; nous n’avons donc pas effectué de moyenne quadratique entre des sous-fenêtres temporelles. Le bruit de fond lissé est celui que nous avons obtenu précédemment hors plages de signal utile.

Les DSP ont été calculées à l’aide des formules 8.8 et 8.9 pour les signaux non filtrés mais centrés (le centrage a pour effet d’annuler la composante continue à 0 Hz). Sur la figure 8.14 relative à la plage temporelle S2, nous constatons un fort rapport signal sur bruit de 0,5 Hz à 8 Hz, limite apparente du signal utile. Par contre, pour la plage temporelle S6 de la figure 8.15, le signal ne sort du bruit, en apparence, qu’entre 0,2 Hz et 1 Hz.

D’ores et déjà nous pouvons dire que les signaux des plages temporelles S2 et S6 sont issus de types de propagation différents. Pour ne pas subir une perte d’information dans la plage temporelle S6 où le signal n’apparaît qu’en dessous de 1 Hz, nous n’avons pas effectué dans cette plage d’analyse avec le signal filtré.

Pour illustrer l’influence des différents paramètres d’analyse du signal, nous avons refait les spectres de la figure 8.15 avec un signal et un bruit de fond non centrés (figure 8.16). La composante continue n’est plus nulle, le spectre du signal apparaît amplifié et sujet à des oscillations supplémentaires. Cela s’explique par la superposition du spectre périodique d’une fonction porte de largeur 12 s, la fréquence des oscillations valant 1/12 s = 0,08 Hz. Lorsque le signal est centré, il ne subsiste de ces perturbations que l’effet passe-haut à 0,08 Hz. En dessous de 0,2 Hz, on a évidemment affaire à du bruit de fond et non à du signal.

La deuxième option possible pour améliorer la lisibilité du spectre est de jouer sur la largeur des fenêtres. On peut par exemple moyenner le spectre de la plage S6 sur 3 sous-fenêtres de 4 s ou 6 sous-sous-fenêtres de 2 s de signal (options T3 et T6 de la figure 8.17). Comme nous l’avons remarqué précédemment, la largeur des sous-fenêtres se traduit par une périodisation du spectre de fréquence correspondante, mais ici le spectre des fonctions porte masque totalement celui du signal. Le centrage du signal temporel n’apporte qu’une amélioration minime (figure 8.18).

On peut conclure qu’avec des plages temporelles étroites, il faut se contenter d’un lissage spatial faisant intervenir les spectres du signal centré issus des quatre capteurs.

Figure 8.17 – Spectres du signal moyenné (T3, T6) et du bruit de fond non centrés

3.3 Recherche de la distance source-station

Nous avons tout d’abord cherché à appliquer la méthode utilisée auparavant dans le § 4 du Chapitre VI, à savoir "le test du premier zéro". Le spectre du signal a été lissé en moyenne quadratique sur les plages temporelles S1, S2 et S3 et en moyenne directe pour les quatre capteurs. Ce spectre n’ayant pas de premier minimum visible, on superpose celui d’une onde en N fictive obtenue par coïncidence du premier maximum. Le pic de fréquence fS qui en découle, proche de 1 Hz (figure 8.19), suggère d’après le tableau 6.1 une distance source-station supérieure à 200 km. Si, comme dans le cas des signaux enregistrés en Bretagne, nous avions connaissance du Mach de l’avion, nous pourrions obtenir une estimation plus précise de la distance source-station avec la droite de corrélation de la figure 6.12.

Figure 8.19 – Spectres de l’onde en N fictive et du signal – Test du 1er maximum

Ne disposant d’aucune donnée concernant la source, nous avons appliqué le "test de la pente" du chapitre précédent qui nous a permis d’estimer la distance source-station pour les signaux enregistrés à Parentis. Nous avons calculé la déformation de l’hyperbole enveloppe de l’onde en N quand l’émission sonore suit une trajectoire stratosphérique (0 < Z < 60 km). Cette hypothèse est justifiable étant donné qu’un signal issu d’une trajectoire de type thermosphérique (Zmax > 100 km) serait majoritairement masqué par le bruit de fond, ce qui n’est pas le cas des signaux reçus à la station de Flers, sauf dans la plage S6. Comme dans le cas de Parentis, ce calcul a été effectué par tranches de 300 km de propagation curviligne, longueur obtenue entre deux rebonds d’un rayon avec l’atmosphère d’hiver du Chapitre VI. De même, nous avons utilisé l’atténuation moyenne donnée par la courbe de la figure 7.20. Remarquons que nous n’avons en fait pas besoin de modèle atmosphérique ni de tracé de rayon pour déduire de cette courbe l’atténuation obtenue pour une distance et une fréquence données, seule l’estimation de la longueur d’une arche nous intéresse ici.

Nous voyons sur les figures 8.20 à 8.22 les spectres lissés par les opérations décrites précédemment du bruit de fond et du signal pour les plages temporelles S1, S2 et S4. Nous y avons superposé les enveloppes des spectres d’ondes en N à l’origine et après 300 et 600 km de propagation, ce qui correspond respectivement aux 1er et 2ème rebonds des rayons sur le sol ou la mer.

Figure 8.20 – Enveloppes des spectres d’onde en N, spectres du bruit et du signal

Figure 8.21 – "Test de la pente" pour la plage S2

On voit sur la figure 8.20 relative à la plage S1 que la courbe "300 km" correspond au spectre du signal entre 1 Hz et 8 Hz au sens des moindres carrés des écarts. Il en est de même pour les plages temporelles S2 et S3. Ceci est moins évident pour les plages S4 et S5, le rapport signal sur bruit y étant nettement moins favorable. Le "test de la pente" effectué sur ces cinq plages temporelles suggère en définitive que l’aéronef responsable du bang sonique ayant généré ces signaux se trouve à environ 300 km de la station de mesure.

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe précédent, le signal de la plage S6 provenant vraisemblablement d’une phase thermosphérique est très rapidement masqué par le bruit et cette méthode d’encadrement n’est pas applicable.

Nous avons utilisé les coefficients de Sutherland moyennés entre 0 et 60 km d’altitude pour le calcul de l’absorption atmosphérique dans la mesure où nous avons voulu montrer que l’on pouvait se passer de la connaissance des données météorologiques et d’un tracé de rayons pour donner une estimation de la distance source-station. Cependant l’utilisation de ces coefficients moyennés pour estimer la distance horizontale à la source sonore implique plusieurs approximations. En particulier, ce faisant nous négligeons la forme réelle du rayon et son altitude de réflexion, étant donné que cette opération revient à considérer une propagation en ligne brisée entre 0 et 60 km d’altitude. Notons que la forte absorption aux altitudes supérieures à 50 km est alors compensée par une longueur de trajet plus courte que celle d’une trajectoire réelle dont le sommet est arrondi. Cependant, comme nous le verrons dans le dernier paragraphe de ce chapitre, l’utilisation des coefficients nominaux le long du trajet du rayon sous-estime l’absorption atmosphérique pour les trajectoires de rayons réelles ( Z < 45 km). Par conséquent, nous pouvons supposer que d’autres phénomènes, tels que l’atténuation des effets non-linéaires, augmentent la distorsion du spectre. On sait en effet que cette atténuation se traduit par la disparition des hautes fréquences que signalent les fronts droits de l’onde en N.

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