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Comme nous venons de le voir, les groupes sont arrivés, par consensus, à des résultats manifestes en termes de prises de conscience et de pistes d’amélioration. Rappelons que notre rôle de psychologue du travail consiste à accompagner l’entreprise vers une situation améliorée, ainsi ce n’est pas tant ces premiers résultats qui nous intéressent mais bien les processus par lesquels les groupes y sont parvenus.

Notre méthodologie d’intervention, de la mise en train au retour du groupe, laisse une place prépondérante à celui-ci. Le groupe, auquel nous faisons référence, est un ensemble de personnes complexes en interaction qui partagent des buts communs. Précisons que chaque membre a des caractéristiques individuelles, des attentes, des craintes, etc. différentes. Aussi, le point de départ des psychodrames touche à la spontanéité des personnes. Ainsi, il a été question de créer une dynamique unissant les membres du groupe en tenant compte des individualités particulières. Nous retrouvons, dès lors, le principe hologrammatique du paradigme de la complexité qui postule que le tout est dans la partie comme la partie est dans le tout. D’ailleurs, nous ne prenons de risque en disant que les six groupes ont été différents en termes de fonctionnement (spontanéité, créativité, réflexions, etc.), chacun des salariés ayant apporté son originalité au groupe. A titre d’exemples, certains personnels se sont farouchement opposés à la méthodologie. Nous parlions en amont de spontanéité, autrement dit, d’expression de Soi, ce qui signifie ici porter à connaissance son incapacité à s’exprimer, son retrait ou encore sa colère refoulée. Il était, selon nous, essentiel que les personnes prennent conscience de leur incapacité et l’acceptent pour ensuite les aider à s’en libérer. Deux types de manifestations se sont produits. Soit l’incapacité était formulée au psychodramatiste personnellement, alors elle se transformait en une projection de la colère et de l’énervement sur nous par des propos quelque peu biscornus et réducteurs, soit l’incapacité était formulée à l’ensemble du groupe, alors elle prenait la forme d’un appel au soutien. Dans la première situation, il s’agissait bien d’entendre la personne dans ses propres conflits. La confiance du psychodramatiste en ses objectifs et en ses compétences de régulation était essentielle pour ensuite favoriser le bon déroulement de la formation. Ici, le principe dialogique est mis en exergue à travers le dépassement d’une vision simplificatrice d’une personne en opposition pour rendre compte d’une réalité plus profonde. Ainsi, avons-nous considéré le conflit comme nécessaire, il ne s’agissait donc pas de l’étouffer en catégorisant ou en excluant une personne mais bien en essayant de donner du sens à cette situation. Par ailleurs, lorsque les personnes, au profil plutôt réservé, ont manifesté un besoin en termes de soutien, c’est le psychodramatiste mais aussi les égo-auxiliaires qui ont porté leurs collègues en leur offrant des ressources aidantes : le partage d’expériences, le don d’une réplique facilitatrice, etc. Ces situations circulaires émergent donc dans le groupe et appartiennent au groupe, elles lui donnent, en quelque sorte, une identité et une dynamique propre. Cette dynamique est bien sûr portée par les

interactions. D’ailleurs, il aurait pu être intéressant de réaliser une enquête sociométrique afin de rendre plus objectives nos observations (soupirs, regards diffus, etc.). Toutefois celles-ci ont été appuyées par des propos recueillis après-coup. Ainsi, Moreno, nous dit que tout groupe se structure autour de trois types d’affinités : la sympathie, l’antipathie et l’indifférence. Aiguillées par les normes de comportements et d’internalité, nous conjecturons une tendance pour les individus à ressentir une relative antipathie pour les personnes qui se sont opposées à la méthodologie et plus largement à la formation et de la sympathie pour les personnes manifestant des appréhensions justifiées de manière interne. Par ailleurs, un exemple a mis en évidence une antipathie éphémère envers le psychodramatiste en guise d’expression de la sympathie pour un collègue : le conflit initial interne de la personne a entrainé un besoin d’éclaircir la situation avec le psychodramatiste. Observant cette situation coûteuse mais nécessaire, le collègue s’est sans doute vu renvoyé à des conflits personnels profonds, eux-mêmes projetés sur le psychodramatiste de façon « violente ». Ce comportement pourrait être perçu comme déviant or, il semble plutôt correspondre en une protection de son Soi. Soi en tant que personne et Soi en tant que professionnel. Alors que ces situations ne rentraient pas dans le cadre de représentations psychodramatiques, elles se rapprochaient considérablement de jeux. Elles auront ainsi amené à, ce que Moreno nomme, la catharsis d’intégration autrement dit elles auront permis de libérer le sujet de plusieurs rôles qu’il porte à l’intérieur. Encore une fois, notons tout l’intérêt d’éclaircir les conflits latents afin de n’observer de processus d’exclusion, d’attitudes et de comportements qui iraient à l’encontre d’une bonne dynamique de groupe. Cette dynamique, libérée à présent des tensions, est d’abord portée par des leaders (nombreuses prises de parole, répliques dominantes, premiers à investiguer les exercices, ton affirmatif, etc.), qui pour certains se sont d’ailleurs révélés être les plus réfractaires ! De manière plus large, notons les nombreux exemples montrant que les leaders dans ces formations sont aussi reconnus leaders dans leur vie professionnelle (par leur statut, leur expertise, leur connaissance générale du fonctionnement de l’entreprise, etc.). Cela étant posé, chacun a un rôle à jouer et tous l’ont compris. Nous l’avons perçu lors des représentations bien entendu mais aussi lors de la phase de participation du groupe. Les leaders prennent la parole puis les autres y sont invités, d’autant plus lorsque le psychodramatiste note un désaccord. Ainsi, c’est en laissant la possibilité à tous de s’exprimer dans l’action et en mêlant les différents points de vue que les participants ont perçu les liens qui les unissaient et leur interdépendance permettant ainsi d’augmenter la cohésion du groupe et de créer de vraies bases relationnelles entre les membres. Ces derniers sont donc arrivés, ensemble, à rendre intelligible de manière complexe les situations. Cette capacité collective à co-construire, autrement dit à voir plus large que les simples niveaux émergés de la réalité, au regard de plusieurs réflexions, nous incite à penser que celle-ci est recristallisée au sens lewinien du terme. Il va s’agir à présent de stabiliser ces nouvelles ressources pour favoriser la dynamique positive insufflée par la Direction et investie de tous ces brillants acteurs !

PRECONISATIONS

« Tenir conseil. Délibérer pour agir »

Lhotellier, 2003 A la suite d’une intervention menée dans une perspective constructiviste avec un rôle de consultant facilitateur (Gouldner, 1961), nous passons ici, à une position plus expertale. Pour ce faire, nous nous appuierons sur les propositions faites par les personnels eux-mêmes tout en les approfondissant par des apports de notre discipline. Ces préconisations, nous ferons en sorte de les faire correspondre aux objectifs construits avec le système-client. Comment favoriser la prise de conscience des aspects positifs et, par là même, favoriser les affects agréables au sein de l’organisation mais surtout, en accord avec les recherches scientifiques et nos convictions, quelles actions entreprendre en priorité pour diminuer les affects négatifs chez les salariés.

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