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Chapitre 5 : Résultat : les précipitations d’électrons le long des lignes

5.3 Analyse des résultats

Nous avons montré, avec ces modélisations, que le cas d’une précipitation verticale d’électrons dans l’atmosphère de Titan dans les conditions du transit T5 posait des problèmes quant aux interprétations des données de flux (comment ce flux pouvait être divisé par dix lors de la descente de la sonde ?). Pour garder l’accord entre la théorie et l’observation dans l’hypothèse d’une précipitation verticale, il fallait diviser le flux d’entrée, pourtant issu de la mesure, par 10. Ceci étant en accord avec les travaux précédents [1, 29]. Dans le cadre de cette hypothèse, il faut considérer que les précipitations d’électrons sont fortement variables (puisque leur flux peut être divisé par dix). Mais pour expliquer cette variabilité, il faut prendre en compte le fait que les électrons suivent les lignes de champ magnétique ; ce qui va a l’encontre de l’hypothèse initiale.

L’utilisation de nombreuses configurations de champ magnétique pour le calcul du flux nous a permis de trouver des conditions rapprochant la modélisation de la mesure. Notamment en figure 5.15. Nous trouvons ainsi (dans les figures 5.7 et 5.15) un excellent accord entre une dizaine d’eV et quelques centaines d’eV. Cette modification fondamentale du code de transport des électrons nous permet de conci-lier théorie et mesure dans cette gamme d’énergie sans nécessiter l’hypothèse d’une forte variation de flux d’électron en entrée. Nous simplifions ainsi l’interprétation des mesures de Cassini.

A plus haute énergie, plusieurs sources permettraient d’expliquer les différences. Un problème de résolution spatiale incertitude sur l’altitude pourrait apparaître, nous voyons par exemple que le flux à haute énergie varie beaucoup entre 1130 et 1200 km d’altitude en figure 5.15. Une autre explication pourrait être l’incertitude dans la forme de la ligne de champ magnétique, ou dans l’atmosphère neutre utilisée. Mais l’explication la plus probante est l’incertitude sur la mesure aux hautes énergies, puisque l’instrument ELS doit être re-calibré avec l’instrument MIMI au dessus du keV (R. Modolo, communication personnelle). En dessous des 10 eV, il est très difficile de comparer mesures et simulations, car divers paramètres perturbent les mesures [6].

On peut donc affirmer que l’utilisation d’une ligne de champ magnétique réaliste permet de bien interpréter les observations de flux d’électron de Cassini.

5.4 Conclusion

Le code TransTitan modifié est capable de calculer l’effet des précipitations d’élec-trons le long de lignes de champ magnétiques. Ce qui a permis, en utilisant les

ré-sultats d’un modèle hybride de ligne de champ magnétique, d’expliquer la différence entre théorie et observation dans le cas du flyby T5 de la sonde Cassini autour de Titan. Nous comprenons maintenant l’importance de travailler avec l’enroulement des lignes de champ magnétique dans l’atmosphère. L’approche de ce modèle peut être étendue pour travailler avec des lignes de champ magnétique du côté diurne, ce qui nécessite une modification conséquente du code de photoionisation. Ce travail doit être considéré comme une base pour de meilleures comparaisons entre modèles MHD et observations dans le cas des précipitations sur Titan et des autres planètes et objets non (ou peu) magnétisés.

Dans le cadre de l’analyse de l’atmosphère de Titan, nous voyons que l’impact des électrons est beaucoup plus complexe que ce qui avait été simulé auparavant, avec une création d’ions à plus haute altitude (le pic étant à une altitude de 800 km pour une précipitation verticale, et de 1000 km pour la ligne provenant du modèle hybride) dans ces conditions magnétiques. Ainsi, au lieu d’avoir un pic de production dans la mésosphère, celui-ci a lieu dans l’ionosphère. Ceci nous donne une autre source d’ionisation, très importante pour l’interprétation des hydrocarbures dans la haute atmosphère, mais pose le problème des effets des précipitations de particules dans la mésosphère. Or, nous savons qu’avec les conditions de champ magnétique dans l’environnement de Titan, les protons peuvent précipiter à ces altitudes, et les rayons cosmiques beaucoup plus bas.

Troisième partie

Impact dans les atmosphères

moyennes et basses (protons et

Même aujourd’hui, nous ne comprenons pas tous les processus à l’oeuvre dans l’ionosphère. L’une des raisons qui la rendent difficile à étudier est que tous nos intruments emportés par des fusées ou des satellites y filent à des milliers de kilomètres à l’heure ; on n’a jamais pu y rester immo-bile pour l’observer. Aujourd’hui, pour la première fois, le projet de tour orbitale nous offre une chance d’établir des observatoires fixes dans l’io-nosphère.

»Arthur C. Clarke, The Fountains of Paradise,1979. Traduction française G.H Gallet, R.C. Wagner.

L’étude des précipitations d’électrons dans la haute atmosphère de Titan nous a montré que l’influence de ces particules, dans certaines conditions, pouvait descendre jusqu’à des altitudes de l’ordre de 800 km. La prise en compte des lignes de champ magnétique dans nos simulations nous a aussi montré que l’impact de ces électrons n’était pas forcément mésosphérique, mais pouvait, malgré la largeur du spectre de précipitation en énergie, n’avoir lieu principalement que dans la thermosphère.

Pourtant, l’extrême complexité de la chimie de Titan ne se limite pas à sa haute atmosphère. Ainsi, dans la mésosphère, dont la limite basse est à 350 km, nous avons le problème de la formation de la couche détachée. En effet, Titan est entourée d’une épaisse couche de brume dans les basses couches de son atmosphère, composée d’aé-rosols d’une taille caractéristique de 0.1 µm, et, dans certaines régions, à environ 50 km au-dessus de la couche principale, il existe une autre couche d’aérosols de plus grosse taille (0.3 µm). Cette couche dite détachée se situe à une altitude de l’ordre de 400 km. Pour expliquer cette couche, il faut faire intervenir la photochimie, et no-tamment l’ionisation, qui crée les aérosols, ainsi que la dynamique de l’atmosphère [119, 120]. Une autre couche, apparemment persistante, a été observée à 520 km [78], et il est possible que les deux autres couches de brumes soient liées à elle par la sédimentation des aérosols la composant. Ainsi le problème posé par les longues chaînes moléculaires, observées à haute altitude, se pose aussi à ces plus basses alti-tudes, avec en plus la question du rapport avec les différentes couches de brumes. Là encore, la connaissance du profil d’ionisation s’avère nécessaire, pour savoir quel est l’impact de la chimie ionique par rapport à la dynamique. Or, dans la mésosphère, les principales particules ionisantes sont les protons. Pour continuer notre étude de l’atmosphère de Titan, nous avons donc à étudier leur précipitation.

Vient ensuite le problème de la troposphère, où il y a la plus grande concentration d’aérosols. Si ceux-ci sont créés localement, et si l’hypothèse de leur formation par la chimie ionique est toujours valide à ces altitudes, alors il faut prendre en compte les seules particules restantes capables d’ioniser : les rayons cosmiques.

La compréhension de la chimie de Titan amenant à la formation de ces aérosols ayant de nombreuses conséquences sur notre vision de la Terre (par exemple, dans le rapport avec les noyaux de condensation lors de la formation des nuages), nous comprenons qu’une étude des précipitations des protons et des rayons cosmiques est nécessaire. Faire cette étude nous permettra de faire la jonction entre la haute atmosphère et la surface. Le profil de production total, ainsi créé, pourra être utilisé dans les modèles chimiques, pour ainsi être comparé aux profils de concentration électronique.

Étude générale des rayons cosmiques

Nous commençons cette étude des basses couches de l’atmosphère de Titan par l’analyse de l’impact des rayons cosmiques. En effet, bien que ceux-ci soient plus énergétiques que les protons magnétosphériques (voir 8.3), ils n’ont que peu d’inter-action avec la magnétosphère de Saturne et sont donc toujours présents. Le profil total d’ionisation dans l’atmosphère de Titan peut ainsi n’être simulé qu’avec les photons et les rayons cosmiques lorsque Titan est en dehors de la magnétosphère de Saturne.

Pour ce travail, nous aurons besoin de connaître le spectre de précipitation des rayons cosmiques, ce qui est plus facile que celui des protons magnétosphériques. Mais nous aurons surtout besoin d’un modèle physique permettant de comprendre les in-teractions aux hautes énergies. Pour cela, nous utiliserons le modèle Planetocosmics, que nous couplerons avec TransTitan, et ainsi nous aurons un modèle permettant la modélisation de l’ionisation dans toute l’atmosphère de Titan : TransTitanCosmics.

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