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Chapitre I : Examen de la situation locale en matière d’activité physique

IV. Analyse de l’environnement social et politique

1. Analyse de la problématique de santé

A une échelle globale, la littérature est unanime quant à la menace sur la santé représentée par le déclin de pratique d’activité physique dans les populations (Ng & Popkin, 2012). Ainsi, les derniers chiffres mondiaux parlent d’une inactivité physique chez 31% de la population (Hallal et al., 2012). A l’échelle européenne, les chiffres montent à 42%

d’inactivité (EU, 2014). A l’opposé, le pourcentage d’individus qui atteignent les recommandations officielles en matière d’activité physique est de 31% en Europe (Sjöström et al., 2006) et de 38% en Belgique (Tafforeau, 2008). Les résultats de l’enquête réalisée auprès de 141 habitants de la commune d’Esneux montrent un niveau d’activité physique recommandé chez 48,2% des répondants. Plusieurs hypothèses peuvent être émises afin

106 d’expliquer la différence entre ce constat local et ceux observés à plus large échelle. Avec 48% de participants ayant obtenu un diplôme de l’enseignement supérieur, le niveau de scolarité est un des facteurs qui peut expliquer cette différence. En effet, un niveau de scolarité plus élevé est généralement associé avec un niveau de pratique d’activité physique supérieur (Trost et al., 2002). La littérature actuelle apporte un avis plus nuancé sur l’influence du statut socio-économique sur la pratique d’activité physique (Dumith et al., 2011). Ceci ne nous permet donc pas justifier les résultats obtenus par le grand nombre d’individus se considérant comme dans une situation favorable à ce niveau (63,8%). L’âge moyen (48,6 ans) et le sexe (50,3% d’hommes) des participants à cette enquête, très proche des valeurs observées dans les enquêtes à plus large échelle, ne sont pas non plus des facteurs sur lesquels des hypothèses suffisamment fondées peuvent être émises. Bien que nous ne disposions pas de données systématiques permettant de le vérifier, une autre explication plus plausible se réfère à l’ethnicité de la population. La littérature a en effet montré que le niveau d’activité physique observé était généralement inférieur chez les individus appartenant à une autre ethnie que celle des caucasiens (Trost et al., 2002). Nous avons ainsi mis en évidence que 97,4% des utilisateurs des différents sites extérieurs de pratique d’activité physique communaux dans notre étude sont « Blancs ». Bien que les informations que nous avons présentées par rapport à la pratique d’activité physique et à l’ethnicité proviennent de deux collectes de données différentes, ces résultats pourraient en partie expliquer le plus haut niveau de pratique d’activité physique observé dans la population communale et mériteraient d’être approfondis. Par ailleurs, il est important de rappeler que l’évaluation de la pratique d’activité physique a été effectuée par l’intermédiaire d’un questionnaire auto-rapporté. Il a ainsi été montré que les personnes complétant le questionnaire IPAQ ont tendance à surestimer leur niveau réel d’activité physique (Lee, Macfarlane, Lam, & Stewart, 2011).

Même si l’IPAQ est à l’heure actuelle l’outil le plus utilisé pour mesurer le niveau d’activité

107 physique (Hallal et al., 2012), ce n’est pas le même questionnaire qui a été utilisé dans les enquêtes européennes (EU, 2014) ou belges (Tafforeau, 2008), ni la même méthode d’administration de l’outil. En effet, ces études plus étendues ont utilisé l’interview par téléphone si bien que les données collectées peuvent différer de celles obtenues lors d’une interview en face à face ou de façon auto-administrée, comme dans notre enquête (Craig et al., 2003; Hallal et al., 2010). Les résultats sont encore plus variables lorsque que l’on compare la mesure du niveau d’activité physique par questionnaire et par accélérométrie.

Selon les études, on relève une surestimation des valeurs variant de 36% à 173%, à l’avantage de pour l’IPAQ-S (Lee et al., 2011). D’autre part, il ne faut pas sous-estimer l’impact de la saison et des conditions climatiques sur les comportements d’activité physique. Le niveau d’activité physique a ainsi tendance à être plus élevé durant les périodes estivales, ou lorsque des facteurs limitants tels que le froid ou les précipitations sont absentes (Tucker & Gilliland, 2007). L’observation des sites communaux consacrés à l’activité physique vient confirmer ces constats, avec une fréquentation moins importante lors des mois hivernaux ou lorsque des précipitations sont présentes. Enfin, il faut garder à l’esprit que la représentativité de l’échantillon de participants interrogés est assez faible. En effet, bien que 500 questionnaires aient été adressés à la population, seuls 14,8% de retours ont été constatés. Si ce taux de retour se situe dans la moyenne des taux qui ont été observés dans d’autres enquêtes utilisant la même méthode de collecte de donnée (Cerdin & Peretti, 2001), cela nous invite à penser que la constitution d’un échantillon de base plus important ou l’appel à des stratégies visant à augmenter le taux de réponse auraient été judicieux. L’usage de questionnaires personnalisés, avec une enveloppe timbrée de retour, ou encore un contact téléphonique préalable avec chaque participant sont des stratégies ayant montré leur efficacité (Edwards et al., 2002). Ces démarches auraient cependant impliqué un coût financier et temporel beaucoup plus important. Ces nombreux facteurs d’influence incitent donc à la plus grande prudence quant à

108 l’interprétation et à la généralisation des résultats collectés au sujet de la pratique d’activité physique dans la population. Ceci conforte la nécessité d’adopter une approche à l’échelle communautaire lorsqu’il s’agit d’analyser une problématique de santé qui aboutira sur la sélection d’une méthode d’intervention la plus appropriée au niveau local (Bopp & Fallon, 2008).

Nous pouvons toutefois considérer qu’une majorité de l’échantillon de la population communale se situe en dessous des recommandations officielles à propos de l’activité physique. Les différents acteurs locaux en charge de cette dernière, dont la responsable officielle communale compétente, ont d’ailleurs soulevé cette problématique au cours des interviews effectuées dans nos études. Ceci laisse présager de nombreux effets délétères tant au niveau de la santé individuelle que publique (Lee et al., 2012). Considérée comme la quatrième cause de de mortalité par maladie non transmissible dans le monde (WHO, 2009), la carence en activité physique observée au niveau local incite donc la poursuite des recherches dans ce sens (Brug et al., 2005). Dans un premier temps, ces dernières sont généralement centrées sur l’analyse des déterminants comportementaux et environnementaux qui sont susceptibles de constituer des points d’appui pour les interventions futures.