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La présentation au chapitre 2 de la position de Horsley nous amène à nous poser certaines questions légitimes. A-t-il raison de qualifier les textes du Nouveau Testament de textes anti-impériaux?

Est-ce qu’effectivement les auteurs du Nouveau Testament ont délibérément écrit contre l’Empire romain dans l’intention de créer un mouvement politique révolutionnaire?

Comment comprendre alors la déclaration de Pilate, représentant de l’Empire, innocentant Jésus lors de sa comparution demandée par les autorités juives qui l’accusaient de provoquer un soulèvement contre César?

« Pilate convoqua les grands prêtres, les chefs et le peuple, et leur dit : Vous m’avez amené cet homme parce qu’il entraînerait le peuple à la révolte. Or moi, je l’ai interrogé devant vous et je n’ai rien trouvé chez lui qui mérite condamnation, rien de ce dont vous l’accusez. Hérode non plus, car il nous l’a renvoyé. Ainsi, rien de ce qu’il a fait ne mérite la mort. » Luc 23, 13-16

Pourquoi les autorités romaines n’ont-elles pas directement persécuté les chrétiens dès l’origine du mouvement de Jésus, et ont même semblé plutôt les protéger contre les accusations des Juifs?

Est-ce que l’utilisation d’un vocabulaire commun entre la propagande impériale et les textes du Nouveau Testament oblige le lecteur à comprendre le texte de ce dernier comme une opposition cachée de l’autre? Se pourrait-il que les auteurs du Nouveau Testament aient voulu simplement utiliser un vocabulaire connu afin de faire comprendre à leurs lecteurs leur message qui concerne un autre domaine, un peu comme une parabole?

Jusqu’à quel point pouvons-nous suivre la méthodologie de Horsley dans l’interprétation des textes du Nouveau Testament?

Ayant fait une analyse narratologique et intertextuelle du texte de la Nativité pour arriver à la conclusion qu’effectivement Luc a utilisé abondamment des mots et expressions de la propagande impériale, nous allons maintenant répondre à la question de l’utilisation de ce vocabulaire de la propagande impériale dans l’épisode de la Nativité. Nous utiliserons la méthode de la lexicologie afin de bien définir et comprendre le sens premier du vocabulaire utilisé par l’auteur Luc dans son texte de la Nativité. La lexicologie se consacre à l’étude des mots pour en faire ressortir leur nature et leur étymologie. Nous ralentirons donc notre lecture pour nous arrêter à certains mots et locutions qui ont, pour nous, un lien avec l’Empire romain.

Nous chercherons à dévoiler les objectifs de l’auteur qui sont présents en filigrane dans le texte. Nous nous poserons maintenant les questions suivantes :

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Quelle utilisation Luc fait-il du vocabulaire de la propagande impériale? Cherche-t-il à créer un nouveau mouvement de rébellion contre l’Empire, comme le prétend Horsley? Jusqu’à quel point le texte de la Nativité est-il un texte anti-impérial?

Certains mots et expressions ont effectivement attiré notre attention durant l’analyse intertextuelle du texte de la Nativité. Des mots et expressions qui nous semblent évidemment reliés à l’Empire romain, à l’empereur, ou à la royauté. Nous reprendrons ici la nomenclature de ces mots et expression avec une brève présentation de textes contemporains de l’auteur afin de bien en comprendre le lien avec l’Empire. Nous examinerons du même coup leur utilisation par Luc dans son récit de la Nativité.

5. 1 Dans les jours d’Hérode, un décret de César Auguste

1, 5 Il y avait dans les jours d’Hérode, roi de la Judée, un prêtre du nom de Zacharie de la classe d’Abia, et sa femme des filles d’Aaron, et son nom Élisabeth.

2, 1 En ces jours-là parut un décret de César Auguste, on devait inscrire sur un registre toute la terre habitée.

Comme nous l’avons déjà observé, Luc situe temporellement son récit de la Nativité « dans les jours d’Hérode » pour ce qui concerne la conception de Jean, et dans le temps où « César Auguste » était empereur à Rome pour la naissance de Jésus. En mentionnant ces noms, le narrateur place le premier et le cinquième tableau dans le contexte de l’Empire romain, comme déjà expliqué plus haut, et nous présente ainsi une clé d’interprétation pour la suite de son texte. Comme le souligne Marguerat : « Le cadre participe dès lors à la compréhension symbolique de l’action. »1 Ces noms ont une utilité

interprétative en narratologie pour la compréhension des mots et termes que l’auteur va utiliser dans son texte. Yamazaki-Ransom souligne que « …the Roman Empire not only provides an important background for Luke’s narrative, it also contributes a significant element to the narrative itself. »2 Nous croyons donc

qu’il nous faut garder en mémoire cette donnée temporelle lors de l’interprétation des mots et expressions utilisés par Luc dans son récit puisque l’auteur aurait pu tout aussi bien ne donner aucun repère temporel ou encore situer son récit dans un tout autre cadre, comme celui du souverain sacrificateur en fonction à l’époque de Zacharie. Ce faisant, le récit aurait eu une autre signification pour le lecteur.

L’annonce de la naissance de Jean est sciemment située dans le contexte historique mais aussi politique des jours d’Hérode, le roi-client préféré de César Auguste, dans la Judée du premier siècle, et dans le contexte religieux avec le sacrificateur Zacharie. Cette « information » rappelle au lecteur que le récit de la naissance du Baptiste va se dérouler dans une période de soumission politique du peuple juif au

1 Marguerat, op. cit., p. 99. 2 Yamazaki-Ransom, op. cit., p. 70.

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pouvoir de Rome, Hérode étant le représentant officiel du pouvoir impérial sur Israël. C’est dans ce cadre déjà vu d’abus de pouvoir et de violence politique sous Hérode que le Seigneur fait irruption dans l’histoire du récit. Un ange, envoyé par Dieu, apparaît à un prêtre du nom de Zacharie, afin de lui annoncer que sa prière a été entendue et exaucée par Dieu. Cette prière n’est pas décrite, et même surprend le lecteur puisqu’il n’y avait dans le texte aucun tableau décrivant Zacharie en train de prier. Avec la description de ce prêtre âgé, marié à Élisabeth, mais sans enfant, le lecteur ne peut que supposer que cette prière concernait l’espoir d’avoir un enfant. L’annonce de l’ange concernant la naissance d’un enfant qui leur sera propre vient alors confirmer l’attente du lecteur. Il s’agit bien d’une prière pour avoir un enfant. Mais se pourrait-il que la prière de Zacharie allait encore plus loin avec l’espérance d’une intervention divine pour la délivrance du peuple juif de l’oppression des Romains? La suite du récit devrait alors répondre à cette question du lecteur.

Le cinquième tableau, qui présente l’accomplissement de la naissance de Jésus s’ouvre avec la mise en contexte d’un décret de César Auguste ordonnant un recensement de toute la terre habitée, c’est-à-dire partout où s’étend le pouvoir de César. Yamazaki-Ransom mentionne que « The reference is not merely for historical information, but it has political and religious implications.”3 Là, la naissance du Baptiste était

mise en parallèle avec le règne d’Hérode en Judée. Ici, la naissance de Jésus arrive dans le cadre de l’ensemble de l’Empire sur lequel règne César Auguste. Il y a ici une volonté évidente de l’auteur de mettre les deux en comparaison l’un en face de l’autre, afin, comme le dit Yamazaki-Ransom de suggérer « a quiet critique of Rome’s world domination. »4

Nous pensons que l’intention de Luc n’est pas, ici, d’enlever le pouvoir de César en soulevant le peuple contre lui, ce que ne font ni Zacharie, ni Joseph. Il présente plutôt Zacharie en homme qui prie et s’en remet à Dieu, et les parents de Jésus en train d’obéir au décret de l’empereur à propos du recensement, ce qui vient à l’encontre même des mouvements dissidents déjà en place dans la population. L’auteur vise alors un double but : confronter une utilisation abusive et corrompue du pouvoir par César et ses clients, romains et juifs, et dénoncer les mouvements de révolte présents parmi le peuple opprimé. Le salut et la délivrance ne doivent pas venir des hommes par la violence, mais de Dieu qui est toujours en contrôle de la situation politique malgré ce qui peut paraître.

5. 2 Annoncer cette bonne nouvelle

1, 19 Et l’ange lui répondit en disant : Moi, je suis Gabriel, celui qui se tient devant Dieu, et j’ai été envoyé vers toi pour te parler et t’annoncer cette bonne nouvelle.

3 Idem, p. 73. 4 Idem, p. 74.

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2, 10 Et l’ange leur dit : Ne craignez pas, car voici je vous annonce une bonne nouvelle qui sera une grande joie pour tout le peuple.

Cette expression est mentionnée premièrement dans le récit lorsque l’ange Gabriel décrit à Zacharie la mission que Dieu lui a donnée lorsque ce dernier l’a envoyé vers lui. Il s’agit ici du verbe « εὐαγγελίζω » qui signifie « annoncer une bonne nouvelle ». Pour Zacharie, il s’agit de la bonne nouvelle de la naissance d’un fils qui sera grand devant le Seigneur, ce qui constitue un miracle, considérant l’âge avancé du couple déjà mentionné dans le texte. Cette naissance sera aussi une cause de grande réjouissance pour plusieurs puisqu’elle représente le début d’une action de Dieu qui ramènera le cœur des gens vers le Seigneur dans le but de lui préparer un peuple bien disposé.

La deuxième occurrence du verbe concerne l’annonce de la bonne nouvelle de la naissance de Jésus par les anges aux bergers de Bethléem. Ceci fait des deux naissances une bonne nouvelle annoncée. Dans la tradition hellénistique de la Septante, dont Luc suit le style, le verbe est utilisé pour parler des actes et des miracles de Dieu. Il s’agit de la bonne nouvelle de ce que Dieu a fait. Quelques textes de la Septante, dans lesquels le verbe « εὐαγγελίζω » se retrouve, suffiront à démontrer son utilisation dans le texte grec :

Psaumes 40, 10 : « J’annonce la bonne nouvelle de la justice dans l’assemblée nombreuse. »

Psaumes 96, 2 : « Chantez pour le Seigneur, bénissez son nom, annoncez jour après jour la bonne nouvelle de son salut! »

Ésaïe 40, 9 : « …élève ta voix avec force, Jérusalem, toi qui portes la bonne nouvelle; […] dis aux villes de Juda : Votre Dieu est là! »

Ésaïe 52, 7 : « Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pas de celui qui porte la bonne nouvelle, qui proclame le salut… ».

Ésaïe 61, 1 : « Le souffle du Seigneur Dieu est sur moi, car le Seigneur m’a conféré l’onction. Il m’a envoyé porter une bonne nouvelle aux pauvres… »

Nahum 2, 1 : « Ils arrivent, sur les montagnes, les pas de celui qui porte la bonne nouvelle, qui proclame la paix! »

La tradition de la Septante est donc accoutumée à l’utilisation du verbe associé aux actes de justice et de salut de Dieu. C’est dans cette pensée traditionnelle que Luc utilise ce verbe. Il est aussi remarquable de noter que Luc utilise ce verbe plus que tous les autres auteurs néotestamentaires, soit dix fois dans son Évangile, et quinze fois dans les Actes, pour un total de vingt-cinq fois sur les cinquante-deux présences du verbe dans le Nouveau Testament, soit près de la moitié. Ce verbe semble donc cher à l’auteur.

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Dans le contexte impérial mentionné dans le récit, il nous faut mentionner que ce verbe a aussi une existence dans la littérature séculière, religieuse et politique de l’époque. Les actes de bravoure de l’empereur, ses victoires militaires, étaient acclamés comme une « bonne nouvelle » (εὐαγγέλιον) pour Rome, ce qui provoquait des festivités et de grandes manifestations de joie dans la ville éternelle. Il y avait déjà, au temps de Jésus, un autre évangile (bonne nouvelle), celui de César Auguste.

À titre d’exemples, mentionnons d’abord les mots tirés d’une inscription trouvée dans la ville d’Eresos sur l’île de Lesbos en Grèce en l’honneur de la famille impériale datant des dernières années d’Auguste et des premières années de Tibère : “In the magistracy of Apollonodotus, when news came of the safety and victory of Augustus he sacrificed at the good news [gospel] to all the gods and goddesses and feasted at the sacrifice the citizens, the Romans and the foreigners and gave to those mentioned a bottle of wine and three pounds of bread.”5 Lorsque l’assemblée des provinces d’Asie accorda en 9 avant Jésus-Christ

une couronne à César Auguste, voici comment ils expliquèrent les raisons qui les motivaient : Whereas the providence which divinely ordered our lives created with zeal and munificence the most perfect good for our lives by producing Augustus and filling him with virtue for the benefaction of mankind, sending us and those after us a savior who put an end to war and established all things; and whereas Caesar [Augustus] when he appeared exceeded the hopes of all who had anticipated good tidings, not only by surpassing the benefactors born before him, but not even leaving those to come any hope of surpassing him; and whereas the birthday of the god marked for the world the beginning of good tidings through his coming…6

Cette terminologie utilisée par Luc pour désigner le message de l’ange, non seulement perpétue la tradition littéraire de la Septante, mais crée certainement une tension dans l’esprit du lecteur romain Théophile, habitué à la « bonne nouvelle » des conquêtes et victoires de César. Pour qui est cette « bonne nouvelle » de la naissance d’un enfant annoncée par l’ange du Seigneur? Est-ce que l’arrivée de cet enfant sera une « bonne nouvelle » pour César et ses représentants locaux? Est-elle annonciatrice d’une rivalité entre ces deux royaumes? Selon Bovon, « Luc connaît la racine vétérotestamentaire du verbe euaggelizomai, mais aussi sa signification idéologique pour les Grecs et les Romains. L’usage du verbe ici atteste une volonté polémique à l’encontre de l’Empire. »7

Cependant, ajoute-t-il, « Puisque dans notre passage il s’agit de bonnes nouvelles, Luc emploie le verbe εὐαγγελιζομαι, « annoncer la bonne nouvelle », « évangéliser », bien qu’encore au sens d’Ésaïe et non déjà au sens chrétien. »8 Même si le récit débute en nous situant dans les jours d’Hérode, roi-client de

César, le tableau de l’apparition de l’ange se passe d’abord et avant tout dans le Temple à Jérusalem

5 Horsley, Paul and Empire, p. 48. 6 Idem, p. 53.

7 Bovon, Commentaire, p, 123. 8 Idem, p. 60-61.

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envers un sacrificateur de la classe d’Abia au milieu du peuple juif qui est en attente et en prière. C’est un envoyé de Dieu, un ange, qui annonce une bonne nouvelle au sacrificateur Zacharie.

En fait, la « bonne nouvelle » pour Zacharie est l’annonce que sa prière, probablement d’avoir un enfant, a été entendue et sera exaucée par la naissance d’un fils. Ce fils aura une mission particulière de ramener le peuple vers Dieu, à l’exemple du prophète Élie au temps du roi Achab. Cette mission a pour but de « préparer pour le Seigneur un peuple bien disposé ».

Bien avant la naissance d’Auguste, il y avait déjà une bonne nouvelle des œuvres de Dieu pour le peuple d’Israël. La bonne nouvelle de la naissance d’Auguste n’a pas inauguré l’emploi de ce verbe. Par contre, nous pensons que son utilisation volontaire, choisie par l’auteur de l’évangile, cherche à annoncer que la naissance de Jésus surclassera la naissance de l’empereur romain par la grandeur et la portée de l’œuvre de salut que Jésus apportera au monde. César Auguste n’a pas pu apporter le salut au monde par sa violence et son armée. Jésus va accomplir et apporter au monde le salut par un moyen encore plus grand, mais tout autre, que Luc va s’efforcer de décrire dans son œuvre.

5. 3 Grand

L’emploi du qualitatif « grand » (μέγας) se retrouve à cinq reprises dans le seul épisode de la nativité lucanienne. Luc utilise ce mot cinquante-quatre fois dans son œuvre dyptique, et est le seul auteur néotestamentaire à l’utiliser autant, surpassé uniquement par l’auteur de l’Apocalypse. Les cinq occurrences sont les suivantes :

1, 15 : Car il (Jean) sera grand devant le Seigneur, et du vin et de la boisson fermentée il ne boira pas, et du Saint-Esprit il sera rempli dès le ventre de sa mère.

1, 32 Celui-ci (Jésus) sera grand et appelé fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père.

1, 42 Et elle (Élisabeth) proclama à grands cris, et dit : Tu es bénie parmi les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.

2, 9 Et un ange du Seigneur vint près d’eux (les bergers) et la gloire du Seigneur les entourait, et ils furent effrayés d’une grande peur.

2, 10 Et l’ange leur dit : Ne craignez pas, car voici je vous annonce une bonne nouvelle qui sera une grande joie pour tout le peuple.

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Pour Luc, tout est grand dans le miracle de la Nativité : Jean est grand devant le Seigneur; Jésus est grand en lui-même; Élisabeth proclame à grands cris la bénédiction de Marie; les bergers éprouvent une grande peur; et la bonne nouvelle de la naissance de Jésus provoquera une grande joie dans le peuple d’Israël. Le mot μέγας a ici le sens de « fort », « puissant », « important ». Nous pouvons donc comprendre qu’alors que Jean est grand, important, « devant le Seigneur », Jésus est grand, fort et puissant, en lui-même et par lui-même. Jésus est supérieur en grandeur par rapport à Jean. Les tableaux narratifs mis en parallèle visent à présenter cette différence entre les deux naissances.

Dans la tradition de la Septante, le style qui inspire Luc, Dieu est grand (Psaumes 48, 2), ses œuvres sont grandes (Psaumes, 92, 6), il est un grand roi (Psaumes 47, 3), son nom est grand (Psaumes 76, 2), sa grandeur est insondable (Psaumes 145, 3). La grandeur est l’attribut qui caractérise Dieu et son œuvre. Dans la pensée gréco-romaine, le terme μέγας est employé comme titre devant le nom d’un roi, Alexandre le Grand (ὁ μέγας Ἀλέξανδρος), Antiochus le Grand, Hérode le Grand. Il décrit alors une personne de haut rang ayant un pouvoir important et influent. Nous pouvons logiquement penser que César Auguste était considéré comme la personne la plus « grande » (μέγας ) dans l’Empire, étant le « grand patron » au sommet de la pyramide sociale impériale de ses « clients ». Il est le « princeps » de Rome, le premier et le plus grand citoyen romain. Il n’y a personne plus grand que lui dans tout le monde connu de l’époque.

Étant décrit par l’ange Gabriel comme « μέγας », Jésus est mis au moins au niveau des hommes les plus grands et puissants de son époque. Pour le lecteur Théophile, Jésus reçoit le titre le plus élevé qu’un homme puisse recevoir : ὁ μέγας. Cette grandeur reste encore à définir et à décrire dans le récit.

5. 4 Fils du Très-Haut; Fils de Dieu

L’expression « fils du Très-Haut » retrouvée en 1, 32 : « Celui-ci sera grand et appelé fils du Très- Haut… », est traduite de « υἱὸς ὑψίστου », une expression parallèle à « fils de Dieu ».9 C’est dans ce

sens que Luc l’utilise plus loin, au verset 35 : υἱὸς θεοῦ, fils de Dieu. Jésus sera appelé du titre par excellence de Fils de Dieu, Fils du Très-Haut. Dans l’Ancien Testament (Psaumes 2, 7), seul le roi était connu comme le « fils de Dieu » par adoption.10 Jésus, lui, le sera par sa naissance. La tradition juive

9 Reiling, J. et J.L. Swellengrebel, A translator’s Handbook on the Gospel of Luke, London, United Bible

Society, 1971, p. 55.

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semble plutôt craintive à attribuer ce titre à un homme de peur de tomber dans l’idolâtrie, ce qui a été sa

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