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Analyse des entretiens avec les personnes-ressources

Dans le document RAPPORT Inclusion Financière 2012 (Page 98-101)

6.3.1 microStart

Les réponses collectées auprès de microStart concentrent les observations relevées auprès du public de l'organisation depuis le début de ses activités, à savoir 1300 contacts et 300 clients.

Les constats sont assez cohérents avec les observations tirées des questionnaires directement complétés par le public cible.

En matière de compte en banque, l'accès à ce service est systématique chez les clients, mais il est vrai que c'est une condition d'accès au microcrédit. En revanche, microStart en constate une sous-utilisation pour une part significative de son public : on entend dans ce cas, avant tout, un faible recours aux virements bancaires. Une part de l'explication se trouve sans doute dans la possible complexité de l'opération (notamment, en cas d'illettrisme en français ou néerlandais) pour un public en grande majorité issu de l'immigration.

La situation en matière d'épargne des clients est assez peu connue par microStart, mais la faiblesse des revenus et les préoccupations observées en matière de constitution de garantie font penser que cette dernière est généralement faible, sinon inexistante.

En termes d'accès au crédit, en revanche, la situation diffère des réponses de notre échantillon. En effet, 80 % du public microStart dispose déjà de crédits, le plus souvent de prêts à tempérament destinés à l'activité professionnelle. Enfin, on trouve parmi ce public 70 % de fichage négatif. Faute d'information complémentaire, il est difficile de pousser plus loin l'interprétation.

Enfin, en termes d'assurance, on retrouve de fortes similarités avec notre échantillon.

Globalement, une sous-couverture par rapport aux risques réellement encourus est observée, notamment au niveau de l'activité professionnelle, mais pas uniquement, puisqu'ici aussi, des propriétaires de voitures n'ont pas souscrit de RC auto.

Les situations dans lesquelles on observe une absence de compte en banque sont à la fois rares et très précaires. En dehors de toute considération « juridique », il est clair qu'un accès au compte serait pour ces personnes une source de simplification et une voie vers une intégration sociale plus aisée.

En matière d'épargne, le manque de moyens est la première des barrières, mais la complexité relative de l'opération d'ouverture de compte (barrière linguistique, technique...) n'est pas à négliger pour une part significative de primo-arrivants. Enfin, il n'est pas impossible d'envisager qu'avec des incitants plus adaptés aux publics

précaires (on pense notamment aux expériences de micro-épargne), et malgré une faiblesse de revenus, une certaine épargne serait envisageable.

En matière de crédit, les situations sont plus contrastées. On observe toutefois une pratique significative de prêts auprès de proches et une présence importante d'ouvertures de crédit. Les difficultés d'usage identifiées sont dues à l'inadéquation des crédits faute de choix et à la surdimension des montants reçus.

Pour les assurances, à l'exception de l'assurance maladie, on constate une sérieuse sous-utilisation d'à peu près tous les types de couvertures. Le court-termisme en vigueur dans les situations précaires en est l'une des principales causes, à côté de la faiblesse des revenus. Cette réalité a pour conséquence d'exposer à un risque supplémentaire de précarisation en cas d'accident ou de sinistre.

En ce qui concerne les garanties locatives, les dispositifs destinés à faciliter leur constitution sont assez peu employés dans le panel interrogé. La lourdeur administrative pourrait expliquer cette sous-utilisation.

6.3.2 Après

Les données collectées auprès de l'association Après concernent les impressions des personnes-ressources sur les quelque 120 « détenus et ex-détenus adultes en ordre de papier à Bruxelles » qu'ils reçoivent dans leurs bureaux par année.

D'après leurs connaissances, très peu de personnes de leur public ne possèdent pas de compte bancaire : ils n'en auraient pas rencontré plus de 3 en 5 ans de travail ! Ceux-ci se débrouillent alors avec des comptes de tiers.

Les personnes-ressources estiment à 50 % les personnes ayant des difficultés avec le crédit : environ 30 % sont en médiation de dettes (dont 10 % ont des dettes de plus de 10 000 €) et 20 % sont orientés par Après vers ces services. C'est en général un public qui a beaucoup de dettes : celles-ci sont dues aux frais de justice (pouvant aller de 50 € à 50 000 €), mais aussi aux crédits (souvent cartes de crédit, comptes bancaires en rouge, cartes de grand magasin) contractés avant la détention. Pendant l'incarcération, il y a un gel de dettes.

Le non-accès au crédit peut se révéler très problématique : c'est le cas quand la personne a besoin de financer un moyen de transport pour trouver un emploi, par exemple, dans zoning industriel non ou mal desservi par les transports en commun.

Certains empruntent alors dans cercle familial ou des proches, voire contractent des prêts mafieux.

Enfin, les personnes qui constituent ce public cible souhaiteraient avoir accès au crédit hypothécaire, car leur rêve est bien souvent « d'avoir une famille, un logement et une voiture et de mener une vie normale. »

Les personnes de ce public cible ont tendance à acheter à crédit, pas à penser à l'épargne. Leur budget est très serré et ce sont, en général, des personnes en situation très précaire. Ce non-usage des instruments d'épargne ou plus clairement ce manque d'argent de côté est limitant pour mener une vie normale : « rencontrer un(e) compagn(e/on), sortir, élargir son réseau social par des activités sportives ou culturelles, prendre des vacances ». C'est également difficile pour l'estime de soi : le public visé sent qu'il n'a « pas accès au modèle vie de famille » et qu'il est condamné à « vivre seul et/ou avec un parent retraité ».

Pour les membres de ce public cible, la valeur de l'argent volé ou mal gagné est très différente de celle de l'argent gagné par un « vrai » travail. Ils ont tendance à flamber l'argent mal gagné : ils se retrouvent tout d'un coup avec plein d'argent et donc mènent, un temps, une vie bien au-dessus de leurs moyens.

Certains ex-détenus avouent avoir « planqué » leur argent. L'association Après n'a de contacts qu'avec peu d'entre eux, car ces derniers ne cherchent pas intégrer le circuit du travail.

Concernant les garanties locatives, les personnes-ressources relèvent deux situations typiques : celle de la garantie locative liée à une aide du CPAS et celle du paiement en liquide. Beaucoup de personnes disent trouver l'option de l'aide du CPAS lourde administrativement.

Penchons-nous à présent sur les assurances. En général, le public cible vit dans une logique très court-termiste. Partant, les assurances, qui impliquent une prévoyance ou une planification à plus long terme, ne sont pas courantes. La seule qui est parfois souscrite, pour éviter les amendes, est la RC automobile, car elle est obligatoire. Les autres ne sont que très rarement prises. Toutefois, comme le commentent les personnes ressources : « Cela est vivable tant que tout va bien, mais un accident non assuré peut entraîner des conséquences financières puis sociales disproportionnées ».

En résumé, les personnes ressources de l'association Après perçoivent que les personnes qui composent leur public cible :

• possèdent un compte bancaire, même si son usage n'est pas toujours optimal ;

• sont exclues de l'épargne, car elles n'ont pas d'argent à mettre de côté, « ce n'est pas dans leur mentalité » ;

• sont souvent exclues de l'accès au crédit, car elles sont souvent déjà très endettées ;

• sont exclues, car elles ont une vision court-termiste : elles pensent

« économiser » en ne souscrivant pas d'assurances ;

• constituent leur garantie locative seulement en liquide ou via une aide du CPAS.

Le sentiment général du public cible d'Après est d'être exclu socialement. Ce sentiment est multifactoriel : l'exclusion financière en est un des aspects. Les autres aspects, plus fréquemment relevés, sont l'accès au travail, aux formations, au logement de qualité, au modèle de vie de famille... Ces personnes ont très souvent déjà été exclues de leur famille, de l'école, en prison...

6.4 Analyse des questionnaires des personnes en risque

Dans le document RAPPORT Inclusion Financière 2012 (Page 98-101)