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Chapitre 5 Culture et détection de P aeruginosa avec l’électrode 3D de PEDOT:PSS

5.4. Analyse in situ de surnageant

5.4.2. Analyse de surnageants de PAO1 et PAO1DpqsA

Pour la preuve de concept d’analyse de surnageant in situ avec PA, 2 souches qui ont déjà été utilisées dans le Chapitre 2 (et 3 pour la première d’entre elles) ont été choisies. Il s’agit de PAO1 et PAO1DpqsA. L’enregistrement des voltampérogrammes est programmé pour effec-

tuer automatiquement une mesure toutes les heures. Pour ces expériences, le LB utilisé pour la culture est tamponné par 50mM d’acide morpholino-3-propanesulfonique (MOPS). Ce tampon est utilisé classiquement en biologie, ainsi que pour la culture de PA [71]. Il a été introduit dans cette expérience par crainte que la grande acidité du PEDOT ait une influence sur la prolifération bactérienne au sein de l’électrode, la croissance de PA étant optimale entre pH 6,6 et 7 [181].

Les CV obtenues au cours de la croissance des 2 souches sur la plage de potentiel -0,4/+0,4V sont tracées Figure 5-8a et c. Elles présentent 2 différences majeures par rapport à celles obtenues dans le paragraphe précédent pour PP : en dessous de -0,2V la courbe s’aplatit au cours de la culture, et un pic est présent vers +0,35V. En effec tuant la soustraction de la partie oxydation de la CV obtenue juste après inoculation (0h) aux suivantes ( Figure 5-8b et d), on met en avant « 3 pics » présents pour les 2 souches.

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Figure 5-8 : CV (10mV/s) in situ du surnageant de : a. PAO1 et c. PAO1DpqsA au cours de la croissance dans du LB tamponné avec 50mM de MOPS sur une électrode 3D de PG3D0.75 de 16µL. Les figures c. et d. présentent la partie obtenue en oxydation de la CV après soustraction des valeurs obtenues à 0h pour PAO1 et PAO1DpqsA respective- ment.

Le premier « pic » observé (Figure 5-8b et d, pic •) est artificiel et vient de l’aplanis- sement de la courbe pour les potentiels en dessous de -0,2V. Cet aplanissement n’a pas été observé lors de l’expérience sur PP, il n’est donc pas lié intrinsèquement à la croissance de bactéries. Toutefois, 2 origines sont possibles : il peut être lié au tampon MOPS du LB ou bien à la crois- sance de PA par l’intermédiaire de molécules redox hors de la fenêtre de potentiel. Trois données

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· Lorsqu’on analyse le surnageant filtré pour enlever les bactéries avec un montage classique et sur une électrode de GC, on ne voit pas de pic vers ces potentiels. Sur la base de ces résultats, nous pensons plutôt à une action du tampon sur l’état d’oxy- dation de l’électrode. Le pic à -0,4V correspondrait alors à l’oxydation de l’électrode.



Figure 5-9 : CV (10mV/s) in situ du surnageant de PAO1DpqsA après 22h20 de culture dans du LB tamponné avec 50mM de MOPS sur une électrode 3D de PG3D0.75 de 16µL

Le second « pic » (Figure 5-8b et d, pic ‚) est un pic peu intense observé vers +0,04V. Il peut s’agir soit d’une réelle espèce redox, soit d’un pic lié à une modification de l’électrode au cours de la culture, l’électrode présentant déjà initialement un épaulement vers ces potentiels .

Le troisième pic (Figure 5-8b et d, pic ƒ) est lui indiscutablement un pic d’oxydation d’une espèce redox. Nous avons tracé l’intensité du pic à +0,35V en fonction du temps de culture pour les 2 souches (Figure 5-10). L’espèce est détectée avec un retard d’environ 1h pour PAO1DpqsA par rapport à PAO1. Pour les 2 souches, l’intensité du pic de l’espèce augmente

rapidement jusqu’à 4/5h de culture (probablement jusqu’à la fin de la phase de croissance expo- nentielle, si on se réfère à la croissance obtenue dans le Chapitre 2 pour ces mêmes souches). Ensuite l’augmentation de la concentration est plus faible. A partir de 10h de culture pour PAO1 et 12h pour PAO1DpqsA, l’intensité du pic diminue. Cette diminution est légère mais se poursuit

jusqu’à la fin de la culture pour PAO1DpqsA. Pour PAO1, la diminution est observée jusqu’à 14h

de culture. Après cette mesure, un problème informatique a stoppé la prise de mesure. Elle a été relancée le matin, ce qui correspond à une mesure à 24h de culture. La mesure à 24h, ainsi que la suivante à 25h, donnent des pics plus intenses que le pic à 14h. Nous pensons que cela n’est pas la conséquence d’une concentration plus grande de l’espèce dans le surnageant à ces temps de culture, mais la conséquence de l’augmentation du temps d’accumulation de l’espèce à la surface de l’électrode, qui a duré 10h pour le point à 24h au lieu d’1h habituellement.

Sans permettre une identification de l’espèce correspondant à ce 3e pic, nos expériences

nous ont permis d’obtenir quelques informations :

· La molécule subit une réaction d’oxydation irréversible vers +0,35V sur PEDOT:PSS (absence de pics correspondant en réduction).

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· L’espèce, ou son produit d’oxydation s’adsorbe à la surface de l’électrode (diminu- tion drastique de l’intensité du pic lorsque 2 cycles de CV successifs sont réalisés (Figure 5-9)).

· La réaction d’oxydation de l’espèce implique des protons (décalage du pic vers les bas potentiels pour l’expérience réalisée avec le tampon phosphate et donc à pH plus élevé).

· L’espèce est produite à la fois par PAO1 et par PAO1DpqsA, elle n’est donc pas

dépendante du gène pqsA.

· L’espèce n’est pas un produit de dégradation (production massive en phase expo- nentielle, puis sa concentration stagne et diminue en phase stationnaire).



Figure 5-10 : Intensité du pic à +0,35V en fonction du temps de culture pour l’analyse de surnageant in situ de PAO1 et PAO1DpqsA.

Aucun de ces « pics » ne correspond à PYO et à PQS en considérant à la fois leurs potentiels et le fait qu’ils sont détectés dans le surnageant des 2 souches de PA. Pour commencer à proposer des pistes d’explications, nous avons réalisé les 3 cultures de PAO1 suivantes :

· Culture témoin (2mL dans un tube de 15mL),

· Culture en présence de l’électrode de référence (2mL dans un tube de 15mL), · Culture dans une puce non connectée (0,5mL dans la puce de 1mL).

Après 15h d’incubation à 36°C et 30rpm dans du LB MOPS 50mM, les 3 cultures ont été filtrées pour enlever les bactéries puis le surnageant a été analysé sur électrode de GC en laboratoire d’électrochimie. Les courbes obtenues en SWV sont représentées sur la Figure 5-11. La courbe obtenue pour la culture témoin (Figure 5-11, courbe « témoin ») correspond à nos attentes. Les pics de PQS et PYO sont présents. Cette analyse permet de confirmer que la

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bactérie, ils doivent être liés à l’interaction électrode référence (ou élément relargué par celle - ci)/bactérie. Le microenvironnement de la bactérie doit être modifié ce qui conduit à la production par la bactérie d’autres espèces redox. Le pic à -0,32V pourrait être une autre phénazine : PCA (-0.31V) [76], PCN (-0.34) [76] ou Aeruginosin A (-0.34V) [87], par exemple. Celui a +0,4V correspond au pic observé lors des mesures in situ, et n’a pas été attribué. Il est intéressant de noter qu’il est détecté sur GC à un potentiel légèrement supéri eur que sur PEDOT:PSS (+0,4V contre +0,35V).

La troisième courbe obtenue lors de la culture dans la puce ( Figure 5-11, courbe « puce »), ne présente ni PYO, ni PQS, ni le pic vers -0,32V. On détecte seulement le pic non identifié présent aussi lors des mesures in situ. Sur cette base, on peut donc affirmer que ce n’est pas l’action de mesurer la culture qui est responsable de l’absence de PYO et de PQS mais bien la puce. L’électrode de référence ayant été mise hors de cause, seules 3 causes restent possibles : les produits relargués par l’électrode de travail et/ou les produits relargué par le plastique ou le collant et/ou la configuration de la culture (0,5mL de milieu de culture et 0,5mL d’air au -dessus de la culture). Par manque de temps, nous n’avons pas pu effectuer d’autres expériences pour tester chacune de ces 3 hypothèses. Toutefois, il nous semble possible de trouver des solutions pour chacune (travail sur la composition de l’électrode, changement de matériau de la puce, créa- tion d’une cuve plus grande, introduction d’O2 dans le système…).



Figure 5-11 : SWV (pas 5mV, amplitude 20mV, fréquence 2Hz) du surnageant de PAO1 après 14h de culture dans du LB tamponné avec 50mM de MOPS sur une électrode de GC.

Un travail d’optimisation est donc à réaliser pour trouver les bonnes conditions de cul- ture permettant à la bactérie de communiquer comme si elle était cultivée dans des conditions classique. Toutefois, ces expériences ont permis de montrer que réaliser une culture et des me- sures automatisées au sein d’une puce combinant électrode de référence, électrode de travail et contre-électrode est possible. De plus, par le pic 3, nous avons déjà obtenu un marqueur de la croissance de PA qui s’exprime rapidement (détection au bout d’1 ou 2h de culture). La faisabili té du système a donc été démontrée.

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5.5. Conclusions

Le travail réalisé dans ce Chapitre a permis d’aborder différents points lié s à la culture de bactérie au sein de l’électrode 3D de PEDOT:PSS. Peu de tests étaient disponibles dans la littérature pour ce type de problématique et nous avons dû imaginer et mettre au point nos propres expériences. Pour développer ces protocoles sans les contraintes liées à la manipulation d’une bactérie pathogène, la majorité du travail présenté dans ce Chapitre a été réalisé en laboratoire de microbiologie de niveau 1 et donc sur d’autres bactéries que PA. Certaines des expériences né- cessitent encore du travail de développement pour être robustes et quantitatives, mais nous avons pu évaluer au moins qualitativement les différents aspects voulus : la bactério-compatibilité du matériau ainsi que les caractéristiques de la croissance des bactéries en son sein. Les résultats obtenus sur ces 2 aspects sont plutôt positifs et encourageants pour la suite.

L’étape suivante a été de concevoir et de tester en condition réelle une puce permettant l’analyse in situ de surnageant. Cette étape a nécessité un effort important notamment en ce qui concerne l’électrode référence et sa bactério-compatibilité. Une fois ces problèmes résolus, de premières expériences de preuve de concept ont été réalisées sur Pseudomonas putida ainsi que sur Pseudomonas aeruginosa. Elles ont révélé que, bien que la puce et le système soit fonctionnel, une étape d’optimisation des conditions de culture est encore nécessaire.