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Fertilité à long terme assurée *

Annexe 2. Analyse de l’expérience suisse : exemple du cadmium

Dans le rapport qu’ils ont rédigé pour l’OFEFP, en vue de la révision de la réglementation sur la protection des sols, Vollmer et Gupta (1995) présentent un cas d’application de l’évaluation du risque, celui du cadmium. Ce que ces auteurs ont proposé n’est pas forcément entièrement repris dans la réglementation, mais illustre cependant la logique qui sous-tend cette dernière.

Le cadmium (Cd) est un métal non essentiel, toxique même à faible concentration, pour l’Homme et l’animal, et à un second plan pour les plantes. La Suisse a non seulement des sols anormalement riches en cadmium géogénique, mais également des sols agricoles, horticoles et potagers présentant des teneurs croissantes en cadmium, en raison d’un épandage excessif de boues de station d’épuration et de l’utilisation d’engrais phosphatés contenant des impuretés. Le cadmium, dont la présence est souvent corrélée à celle du zinc, est également trouvé en abondance à proximité des routes, dans les particules contenant du zinc provenant de l’usure des pneus, et au voisinage des usines de combustion (incinérateurs d’ordures). En Suisse, la nourriture représente de 20 à 30 % des apports en cadmium tolérés par le PTWI de l’OMS. C’est la part la plus élevée des métaux dans l’alimentation.

Le tableau A2-1 ci-dessous indique les valeurs indicatives existant en Suisse ainsi que les seuils d’investigation et les valeurs d’assainissement proposées pour le cadmium du sol extrait avec du HNO3 et du NaNO3 (OSol, 1998).

Tableau A2-1 : Valeurs indicatives existant en Suisse ainsi que les seuils

d’investigation et les valeurs d’assainissement proposées pour le cadmium du sol extrait avec du HNO3 et du NaNO3 (OSol, 1998)

Teneur "totale" Teneur "soluble"

(Extraction au HNO3) (Extraction au NaNO3)

Valeurs indicatives (VSO) 0,8 0,02

Valeurs d’investissement proposées

Voies d'exposition (ou cibles)

Plantes alimentaires 2 0,02

Plantes fourragères 2 0,02

Ingestion de sol par les enfants 10 *

Croissance des plantes 5 0,03

Valeurs d'assainissement proposées

Usages

Agriculture et horticulture 30 0,1

Sylviculture 25 **

Jardins domestiques 20 0,1

Terrains de jeux pour enfants 20 *

* Aucune valeur proposée pour les métaux lourds

** Pas de valeur actuellement proposée pour le Cd en raison d'une insuffisance de données pour cet usage

a) Utilisation des seuils d’investigation pour le cadmium

Si une contamination locale au cadmium est suspectée suite à des études préliminaires, des observations du sol ou d’autres sources d’information, des investigations plus poussées doivent être envisagées pour caractériser au mieux la contamination dans un but d’évaluation de risques, et les questions suivantes doivent être posées :

- Quelle est l’étendue de la contamination (horizontale et verticale) ? - Quelles sont les propriétés du sol et son usage actuel ?

- Quelle est la cause de la contamination ?

Tolérance Limite Céréales Grains de Blé 0,1 0,3 Grains de Riz 0,1 0,3 Grains d'Orge 0,1 0,3 Légumes

Légumes tubéreux ou racinaires(3)

0,1 Céleri 0,2 Légumes tiges 0,1 Légumes verts (4) 0,1 Epinards 0,2 Légumes fruits(1) 0,1 Légumes secs (2) 0,1 Plantes à bulbes Cichoriaceae Herbes aromatiques 0,1 Mycètes cultivés(5) 5 Fruits 0,05

(1)Valeur issue du ZEBS allemand (BGA, 1993) (2)

Valeur issue de la liste belge (Belgisch Staatsblad, 1992)

(3) Céleri exclu (4)

Epinards exclus

(5) Champignons cutivés exclus ; valeur rapportée à la MS

(mg Cd kg-1 MF) Tableau A2-2.

Teneurs maximales

(tolérées et limites) en Cd données en Suisse

pour les plantes alimentaires (FIV, 1995).

La dernière question est importante (Osol, 1986 ; OSol, 1998), car si un émetteur actif peut être identifié en tant que source d’une contamination atmosphérique, il faut s’intéresser essentiellement à la déposition directe de cadmium sur les plantes. De même, pour la santé humaine, le cadmium inhalé contribue de façon significative à l’exposition totale.

Seuils d’investigation pour les plantes alimentaires

Si la teneur en Cd du sol excède les seuils d’investigation (désignées par « Trigger values », « valeurs de déclenchement » dans le rapport de Vollmer et Gupta, 1995) donnés pour les plantes alimentaires (seuils d’investigation fixés pour une extraction au HNO ou au NaNO ), il est recommandé de mesurer la teneur en Cd des plantes

et d’évaluer la contamination du site. Les critères d‘évaluation utilisés pour les plantes alimentaires sont les teneurs maximales (valeurs tolérée et limite) fixées par une ordonnance concernant les substances constitutives et étrangères des aliments (FIV, 1995) et présentées dans le tableau A2-2. Lorsqu’il n’existe pas de valeurs fixées, d’autres valeurs standards doivent être utilisées (valeurs ZEBS de l’office fédéral allemand de la santé, Bundesgesundheitamt (BGA), 1993).

Si les teneurs en Cd des plantes cultivées sur sol pollué n’excèdent pas ces valeurs « FIV », la culture de ces plantes peut être maintenue ainsi que la culture de plantes accumulant moins de Cd. Le tableau A2-3 suivant donne des indications sur l’accumulation relative du Cd dans chaque plante alimentaire. On peut noter que la valeur tolérée (rapportée à la masse fraîche) est dépassée plus tôt pour les céréales (blé et orge) que pour les autres plantes, mais que la teneur en Cd par unité de poids sec et la quantité de Cd exporté par unité de surface contaminée sont moins élevées que pour les autres plantes.

Tableau A2-3. Classement des plantes alimentaires en terme d’accumulation de Cd (Vollmer et Gupta, 1995)

Cd exporté par unité de surface

Rapporté à la MS Rapporté aux valeurs tolérées Rapporté au rendement

(FIV, 1995) et aux valeurs tolérées

Elevée Elevée Elevée

Tabac, épinard, laitue, Blé, orge Laitue, épinard, céleri,

cardon, chou vert, céleri, betterave

radis

Betterave, poireau, oignon, Céleri, chou, betterave, Oignon, betterave sucrière, panais, carotte épinard, laitue tomate

Blé, orge, riz, rutabaga, Pois, pomme de terre, cardon, Cardon, pomme de terre, courgette, pomme de chou vert, panais rutabaga, poireau, radis,

terre, tournesol carotte, chou vert

Pois, haricot Haricot, rutabaga, navet, Blé, orge, pois, haricot tomate, radis

Faible Faible Faible

Teneur en Cd pour un niveau donné de contamination du sol

Lorsque les plantes alimentaires ne peuvent plus être cultivées, une culture de plantes fourragères peut être envisagée selon les seuils d’investigation donnés pour ces plantes.

Seuils d’investigation pour les plantes fourragères

Si la teneur en Cd du sol dépasse le seuil d’investigation pour les plantes fourragères, il est recommandé de mesurer la teneur en Cd des parties des plantes fourragères consommées par le bétail et d’évaluer l’ampleur de la pollution. La qualité des plantes fourragères est évaluée en Suisse sur la base de 2 valeurs, un seuil de handicape et une teneur maximale fixée par une ordonnance pour l’alimentation animale (FMBV, FIV, 1995) (voir Tableau A2-4). L’évaluation de l’exposition animale doit prendre en compte 3 voies d’exposition : l’ingestion de plantes contaminées,

l’ingestion directe de sol contaminé lors du pâturage et l’ingestion de particules de sol adhérentes aux plantes pâturées.

Tableau A2-4. Seuil de handicape et teneur maximale en Cd dans l’alimentation végétale des ruminants et des cochons.

Vaches laitières Moutons Cochons

Seuil de handicape (1) [0,5 - 30] [0,5 - 30] [0,5 - 30]

Fourrage uni-plante (2) 1 1 1

(1) Kessler, 1995 ; Limite inférieure basée sur des condidérations d'hygiène alimentaire (2) Teneurs maximales en accord avec l'ordonnance FMVB (1995).

Teneur en Cd dans l'alimentation animale (mg kg-1 MS)

Si la teneur en Cd du sol est inférieure à la valeur d’assainissement, il n’existe en général pas de risque pour le bétail, mais la teneur en Cd du foie et des reins des animaux peut atteindre des niveaux incompatibles avec les règles d’hygiène alimentaire. Seuls les jeunes animaux ou les animaux à longue vie (chevaux par exemple) peuvent courir un risque pour leur santé propre. L’utilisation des terres contaminées pour l’alimentation animale ne peut alors se poursuivre qu’à la condition que les organes sensibles mentionnés précédemment soient examinés. Il existe en outre des facteurs d’augmentation et de réduction du risque de contamination du bétail lorsqu’un sol pâturé est contaminé par des métaux lourds (Tableau A2-5) : si la nature de l’animal est un facteur important (fragilité ou non), la proportion de la ration alimentaire issue du sol pollué, les caractéristiques du pâturage (fréquence, nombre d’animaux par unité de surface pâturée, etc) et les conditions de la récole sont également des facteurs pertinents.

Tableau A2-5 Facteurs d’augmentation et de réduction du risque de contamination du bétail lorsqu’un sol pâturé est contaminé par des métaux lourds.

Facteurs d'augmentation du risque Facteurs de réduction du risque

Sol

Propriétés du sol Sol faiblement réactif Sol fortement réactif

Teneur en polluants Valeur-seuil dépassée largement Valeur-seuil dépassée faiblement Forte disponibilité pour les plantes Faible disponibilité pour les plantes Forte résorption par les animaux Faible résorption par les animaux Présence d'autres polluants à un Polluant unique

niveau critique

Plantes

Teneurs en polluants Seuil de handicape dépassé Seuil de handicape non dépassé Proportion dans la ration totale Alimentation animale unique Alimentation animale diversifiée

Bétail

Nature / âge des animaux Animaux à longue vie (chevaux) Animaux adultes et non "sensibles" et jeunes animaux

Pâturage Faible couvert végétal Fort couvert végétal Forte densité de bétail Faible densité de bétail Pâturage fréquent Pâturage rare

Conditions de la récolte Année pluvieuse Année sèche

Topographie défavorable Terrain plat (relief accidenté)

Le tableau A2-6 suivant peut servir de guide lorsque la culture de plantes fourragères peut être poursuivie mais doit être conduite différemment. L’accumulation de Cd dans les plantes fourragères varie peu d’une plante à une autre. On constate uniquement une forte augmentation pour la betterave fourragère, et à l’inverse, le risque minimal est observé pour les céréales fourragères, les graines de céréales accumulant moins de Cd que les autres plantes, et le Cd exporté par ces cultures céréalières étant beaucoup plus faible que par les autres plantes fourragères. En outre, l’ingestion de sol durant le pâturage de céréales est quasi inexistant, et la contamination des céréales directement par le sol est très faible. Les facteurs de risque les plus importants ne sont cependant pas la nature des plantes fourragères mais les 2 facteurs suivants :

- les animaux sont-ils pâturants ou non ?

- quelle est la proportion de plantes contaminées consommées dans la ration alimentaire totale ?

Tableau A2-6. Classement des plantes fourragères en terme d’accumulation de Cd (Vollmer et Gupta, 1995)

Cd exporté par unité de surface

Rapporté à la MS Rapporté aux valeurs maximales Rapporté au rendement

fixées par le FMBV et aux valeurs maximales

Elevée Elevée Elevée

Navette, feuille de betterave, Navette, feuille de betterave, Tubercule de betterave, tubercule de betterave tubercule de betterave maïs ensilage et grains,

herbe (ensilée ou pâturée) pomme de terre

Herbe (ensilée ou pâturée) Herbe (ensilée ou pâturée) Foin, herbe ensilée foin, colza et céréales foin, colza et céréales

fourragers fourragers

Céréales fourragères

Faible Faible Faible

Teneur en Cd pour un niveau donné de contamination du sol

Seuils d’investigation pour la croissance des plantes

Dans les domaines du maraîchage et de l’agriculture, les seuils d’investigation pour la croissance des plantes n’ont pas vraiment de sens puisque les niveaux de contamination des plantes alimentaires et fourragères dépassent largement les normes légales avant que la croissance des plantes soit affectée de façon appréciable. Cependant, ces valeurs peuvent être utilisées pour des plantes non consommables, en sylviculture par exemple, pour la production de bois de qualité, etc.

Seuils d’investigation pour l’ingestion directe de sol par les enfants

Ces valeurs sont utilisables sur l’ensemble des terrains concernant des jeunes enfants, à savoir les crèches, les écoles, les parcs, les terrains de jeux et les jardins. Lorsque la teneur en Cd du sol de telles zones dépasse le seuil d’investigation, une évaluation du risque encouru par les enfants est indispensable. Cependant, certains paramètres – la quantité de sol ingéré, la proportion résorbée par l’organisme de l’enfant et les effets physiologique sur l’enfant - sont difficiles à déterminer de façon précise. Pour cette raison, les paramètres pouvant être déterminés facilement sont utilisés pour une évaluation initiale du risque : teneur en métaux lourds du sol, temps passé sur la zone contaminée, importance du couvert végétal. Les facteurs d’augmentation ou de diminution du risque sont listés dans le tableau A2-7 ci- dessous.

Si cette première investigation confirme un risque, des analyses plus poussées doivent être envisagées, et le contact sol-enfants évité.

Tableau A2-7. Facteurs d’augmentation et de réduction du risque de contamination d’enfants en contact avec du sol pollué.

In Dur

Pollua

Au Poid

Facteurs d'augmentation du risque Facteurs de réduction du risque

gestion Sol nu Présence dun couvert végétal (pelouse)

ée d'exposition Fréquentation élevée du site: Fréquentation normale du site:

3 à 7 fois par semaine pendant 1 à 2 fois par semaine pendant

la "belle" saison (hiver exclu) la "belle" saison (hiver exclu)

nt concerné Valeur-seuil largement dépassée Valeur-seuil faiblement dépassée

(> 2xVS) (< 2xVS)

Autres voies significatives d'exposition : Pas d'autres voies significatives plantes alimentaires, eau potable, d'exposition

proximité d'une source d'émission, polluants aéroportés

tres polluants Présence d'autres polluants Un seul polluant

s de l'enfant Bébé et jeunes enfants (de 1 à 4 ans) Enfants plus âgés (plus de 4 ans)

b) Utilisation des valeurs d’assainissement pour le cadmium

Si les valeurs d’assainissement sont dépassées, des mesures appropriées – arrêt ou changement d’usage, remplacement du sol, etc. - doivent être prises obligatoirement. L’objectif minimum à atteindre est l’élimination du risque pour l’Homme, les animaux et les plantes.

Valeurs d’assainissement pour l’agriculture et l’horticulture

Si les valeurs d’assainissement sont dépassées, la production de plantes alimentaires ou fourragères, même peu sensibles, doit être interdite. Dans le cas du Cd, la culture de plantes ornementale non sensibles peut être envisagée.

Valeurs d’assainissement pour les jardins domestiques et les jardins ouvriers

En cas de dépassement des valeurs d’assainissement, la production de plantes alimentaires doit être interrompue et l’exposition via l’ingestion directe de sol doit être évitée. Si l’on veut conserver le même usage du sol, celui-ci doit être traité efficacement ou remplacé.

Valeurs d’assainissement pour la sylviculture

Si les valeurs d’assainissement fixées pour les terres de forêt sont dépassées, la forêt représente un risque et des mesures doivent être prises impérativement, mais en Suisse, de telles mesures ne sont pas encore finalisées.

Valeurs d’assainissement pour les terrains de jeux des enfants

En cas de dépassement des valeurs d’assainissement, soit le terrain doit changer d’usage, soit le sol doit être remplacé.