• Aucun résultat trouvé

Analyse comparative 105

Le mode de gestion actuelle de l'environnement au Québec et cinq modes de gestion en commun ont été présentés dans cet essai. Pour la gestion actuelle de l'environnement, il y a eu une caractérisation et une analyse critique. Ce mode de gestion a ensuite été mis en relation avec les seize principes du développement durable. Pour ce qui est de la gestion en commun, il y a eu une caractérisation, une étude de cas et une analyse critique pour chaque mode de gestion en commun. La gestion en commun a ensuite été mise en relation avec les seize principes de la Loi sur le développement durable du gouvernement québécois.

Les connaissances acquises tout au long de cette démarche et les constats effectués lors du cheminement permettent maintenant de comparer les modes de gestion traités dans cet essai et de tirer des conclusions avec plus d'objectivité qu'avant l'exercice.

La gestion actuelle de l'environnement est une gestion étatique, centralisée, bureaucratique, où la prise de décision suit la logique de management « top-down ». Les parties prenantes ont peu de droits sur l'environnement, mais ont également peu de responsabilités. L'environnement est un bien commun que l'État gère seul pour l'intérêt du plus grand nombre. Pour certains, ce mode de gestion est fort et stable, rassurant, l'État est le gardien du bien commun. Il a le contrôle et il a les moyens pour contrôler. Pour ces derniers, il ne reste qu'à jouir de l'environnement quand bons ils leur semblent. Pour d'autres, la structure présente de nombreuses failles permettant les abus et le non-respect de l'environnement. L'État n'aurait pas la capacité de protéger le bien commun. Pour ces derniers, il y a place aux changements.

Le mode de gestion de l'environnement au Québec est sensiblement la même que dans la plupart des pays occidentaux. Ce mode de gestion n'est pas que mauvais. Malgré tout, il semble inapte à protéger adéquatement l'environnement. Le contexte socioéconomique et environnemental actuel est pour plusieurs fort inquiétant et incite la population, et par le fait même, les décideurs, à explorer différentes avenues afin que la gestion de

l'environnement suive les idéaux du développement durable. C'est notamment ce qu'offre la gestion en commun. Équité, protection de l'environnement, subsidiarité et efficacité économique ne sont que quelques caractéristiques partagées par la gestion en commun et le développement durable. D'ailleurs, la mise en relation des modes de gestion à l'étude et des principes du développement durable a permis de mieux comprendre leur fonctionnement, de mieux les différencier, mais surtout, de voir à quel point ces modes de gestion s'insèrent dans une vision de développement durable. En fonction de cette mise en relation, il a été constaté que la gestion en commun intégrait davantage les seize principes de la Loi sur le

développement durable du gouvernement québécois.

Il importe de mentionner que la gestion collaborative fait partie de la gestion en commun du simple fait qu'elle inclue une participation des parties prenantes et ce, peu importe le niveau d'implication. La gestion collaborative n'est pas pour autant à déprécier. Au contraire, elle ouvre le chemin d'un profond changement dans la façon de gérer les affaires publiques, dans ce cas-ci, l'environnement. Toutefois, la démarche analytique suivie tout au long de cet essai a démontré qu'en fait, la gestion collaborative est fort similaire, voire identique à la gestion étatique. Ce faisant, ce mode de gestion n'est pas considéré dans les affirmations qui suivent.

La gestion en commun surpasse clairement la gestion étatique quant à la santé et qualité de vie (a), l'équité et solidarité sociales (b), la protection de l'environnement (c), l'efficacité économique (d), la participation et l'engagement (e), la subsidiarité (g), la protection du patrimoine culturel (k) et la production et la consommation responsable (n). Il est intéressant de noter qu'il y a une certaine concordance entre les analyses critiques des modes de gestion en commun et les constats tirés de cette évaluation.

Pour certains principes, il est plus difficile de se prononcer. C'est notamment le cas pour la prévention (i), la précaution (j), la préservation de la biodiversité (l) et le respect de la capacité de support des écosystèmes (m). Dans la gestion actuelle, les évaluations environnementales sont les principaux outils permettant l'application de ces principes. Au fédéral, comme au provincial, le respect des conclusions des évaluations environnementales

est à la discrétion de l'État. Tel qu'il a été abordé précédemment, la gestion fédérale de l'environnement est bien souvent vulnérable aux influences politiques et au puissant lobby du secteur industriel. De plus, la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable, proposée par le gouvernement Harper et adoptée en juin 2012, raccourcit le délai prévu pour les évaluations environnementales. Ce faisant, il est raisonnable de remettre en question l'application de ces principes qui, pour certains, sont anodins, mais surtout, contraignants. En autogestion et en gestion du terroir, où il y a absence de contrôle de l'État, il peut arriver, qu'en situation de précarité financière, les bénéfices économiques priment sur la prévention, la précaution, la biodiversité et la capacité de support. Il peut également arriver qu'il y ait des abus et des comportements opportunistes de certaines parties prenantes. Quant à la gestion communautaire, la cogestion et la gestion collaborative, la présence de l'État ramène aux problèmes associés à la gestion actuelle. Dans ce cas-ci, une analyse quantitative serait probablement nécessaire afin de se prononcer.

Les caractéristiques permettant de différencier les modes de gestion en commun des autres modes de gestion permettent également de différencier les modes de gestion en commun entre eux. Tel qu'il a été mentionné à la section 4, la participation des parties prenantes est le plus élevée en autogestion et diminue graduellement jusqu'à la gestion collaborative. La même tendance s'observe pour le partage du pouvoir et des responsabilités, pour les droits accordés aux parties prenantes et pour la subsidiarité. À l'inverse, la présence de l'État est nulle en autogestion et presque totale en gestion collaborative. La même tendance s'observe pour les avantages liés à cette présence, tels que les outils légaux, l'abondance des ressources techniques et humaines, la coordination nationale et le contrôle des abus et des comportements opportunistes des parties prenantes. La caractérisation, les études de cas, les analyses critiques et cette analyse comparative permettent de constater que, parmi les modes de gestion en commun, la gestion communautaire des ressources naturelles est celui présentant le meilleur ratio « Parties prenantes-État ».

En somme, le but n'est pas d'adopter aveuglément l'intégralité de la gestion en commun et de rejeter catégoriquement l'État, mais plutôt de réformer la gestion de l'environnement afin d’unir les forces de chacun.