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4.5 Bilan et analyse

4.5.2 Analyse

Comparons tout d’abord nos r´esultats `a ceux de Wong et Chan, qui avaient

initiale-ment motiv´e notre travail. Ces auteurs ont rapport´e l’existence d’un palier bien d´efini de

pression dans la r´egion de 5.1 K, qu’ils ont interpr´et´e comme la manifestation d’une vraie

transition de phase. Dans cette r´egion, nos isothermes `a 5.08 K et 5.13 K ne montrent

pas de tel plateau. Par contre, `a 4.47 K, nous observons effectivement un plateau marqu´e,

de largeur inf´erieure au mbar pour une distance `a la pression de saturation de 4 mbar.

A cette temp´erature, les observations optiques mettent en ´evidence, lors du remplissage,

une s´eparation en domaines macroscopiques brillants et sombres. A ce stade, lorsqu’on

injecte de l’h´elium, l’intensit´e diffus´ee par les r´egions brillantes change peu, ce qui sugg`ere

Fig. 4.25: Densit´e de l’h´elium confin´e dans l’a´erogel en fonction de

PP

0

, o`u P

0

est la pression de

vapeur saturante de l’h´elium bulk. Graphe (a) : r´esultats de Herman et al [51]. Graphe (b) : nos

propres r´esultats dans la mˆeme repr´esentation.

que leur structure microscopique n’´evolue plus. Seul leur volume diminue au b´en´efice de

celui occup´e par les r´egions sombres.

Nous nous sommes interrog´es sur la possibilit´e que ces observations refl`etent une vraie

transition de phase entre deux ´etats d’´equilibre, telle qu’elle est d´ecrite dans §2.3.4,

bien que, normalement, cette transition devrait ˆetre masqu´ee par les nombreux ´etats

m´etastables du syst`eme. Ici, l’´equilibre serait entre une phase ”liquide” homog`ene et dense

et une phase interm´ediaire compos´ee de microdomaines diffusant la lumi`ere. Le

compor-tement observ´e est cependant sp´ecifique `a 4.47 K. D`es 4.71 K, l’intensit´e des r´egions

brillantes ´evolue tout au long de la condensation. Si l’interpr´etation en termes de

transi-tion de phase ´etait correcte, il faudrait que la temp´erature critique correspondante soit

comprise entre 4.47 K et 4.71 K. Par ailleurs, cette interpr´etation nous semble peu

vrai-semblable. Hormis la saturation du signal des r´egions brillantes, aussi bien la morphologie

en domaines que la forme de l’isotherme d’adsorption sont identiques `a 4.71 K et 4.47 K.

Nous pouvons ensuite comparer la position et la forme de nos cycles d’hyst´er´esis aux

pr´edictions pour des mat´eriaux poreux classiques. De fa¸con remarquable, la position

des paliers d’adsorption et de d´esorption varie avec la temp´erature comme le pr´edirait

l’´equation de Kelvin de la th´eorie classique de la condensation capillaire. De plus, elle

correspond `a une taille de pores d’environ 20 nm, ce qui est de l’ordre de grandeur de la

longueur de corr´elation de notre gel fractal. Il est cependant surprenant de trouver des

paliers raides dont un mat´eriau o`u les tailles de pores sont a priori fortement dispers´ees.

Nous pourrions certes expliquer la raideur des paliers `a la d´esorption par des effets

col-lectifs entre les pores

13

. Cependant, la raideur du palier d’adsorption `a basse temp´erature

ne peut s’interpr´eter, elle, que par une distribution ´etroite de tailles de pores.

Par contre, cette raideur trouve une explication naturelle dans l’approche de Jussieu

(§2.4.4 page 34) Dans cette approche, si le d´esordre est assez faible, et `a basse temp´erature,

l’a´erogel se remplit brutalement par une avalanche macroscopique `a une pression bien

d´etermin´ee. Cette approche rend ´egalement compte de l’´evolution de la forme des cycles

avec la temp´erature, comme le montre la figure 4.26 . Les ph´enom`enes que nous observons

seraient alors la cons´equence directe du d´esordre, sans qu’il faille pour cela faire appel `a

des consid´erations capillaires.

Nous pouvons alors tenter de confronter nos observations optiques aux calculs de

Det-cheverry et al. Ceci pr´esente deux difficult´es. D’une part, leurs simulations sont en grand

canonique, `a potentiel chimique constant. Dans le cas d’une transition brutale, ils ne

peuvent ainsi ´etudier une situation de remplissage interm´ediaire. D’autre part, la taille

de leur ´echantillon est de l’ordre de 10 ξ, soit, pour nous, environ 200 nm, ce qui est de

l’ordre de la taille maximale que nous avons ´evalu´ee pour nos domaines.

Ceci ´etant, la figure 4.19 page 92 sugg´erait qu’au remplissage, la taille des domaines

qui diffusent la lumi`ere augmente avec la temp´erature. Sur les images de coupes montr´ees

sur la figure 4.26, on observe bien une augmentation de la taille des ”gouttes” de liquide

avec la temp´erature, ainsi qu’une baisse du contraste de densit´e entre ces gouttes et le

gaz environnant. Le parall`ele est s´eduisant, mais n’est pas enti`erement satisfaisant. En

13De ce point de vue, il serait int´eressant de mesurer, comme les auteurs de [21] dans le Vycor (figure 2.26 page 25), la diffusion `a petit angle pour faire apparaˆıtre un m´ecanisme de percolation par invasion.

Fig. 4.26: A gauche : Quatre cycles adsorption/d´esorption th´eoriques r´ealis´es par Detcheverry

et al sur un ´echantillon num´erique Φ

Si

= 95%. La temp´erature T utilis´ee par les auteurs vaut

2 `a T = T

C

. A droite : trois coupes de l’´echantillon dans la situation d’adsorption pour (µ=

-4.05 ; T=1.9), (µ= -4.13 ; T=1.7), et (µ= -4.4 ; T=1). Tir´e de [43]

effet, les images ont ´et´e prises aux points bas de fermeture des cycles d’hyst´er´esis, donc

au d´ebut des paliers de condensation au remplissage. A cet endroit du cycle, nous sommes

encore dans un r´egime d’adsorption de film d’h´elium sur les brins de silice (figure 4.18

page 91). Il faudrait donc plutˆot comparer nos r´esultats `a des images au milieu du palier

d’adsorption.

Les images pr´esent´ees dans [43] (figure 4.27) montrent la r´epartition dans l’a´erogel des

sites qui, pour une faible variation de potentiel chimique, basculent de l’´etat gazeux `a

l’´etat liquide `a l’adsorption, ou inversement `a la d´esorption. A partir de ces images, il ne

nous paraˆıt pas ´evident de savoir si le signal diffus´e devrait augmenter ou diminuer avec

la temp´erature.

Fig. 4.27: Images de l’´echantillon num´erique de Detcheverry et al prises juste avant la fin de

la branche d’adsorption, et juste avant le d´ebut de la partie raide de la branche de d´esorption.

Les zones sombres sont les sites basculant de l’´etat gazeux `a l’´etat liquide (ou inversement) lors

d’un incr´ement ´el´ementaire du potentiel chimique. Adsorption : (µ = -4.0335 ; T=1.9), (µ =

-4.06 ; T=1.7), et (µ = -4.123 ; T=1). D´esorption : (µ = -4.05 ; T=1.9), (µ = -4.13 ; T=1.7), et

(µ= -4.4 ; T=1).

A l’adsorption, `a basse temp´erature, on voit que presque tout l’´echantillon num´erique

bascule d’un coup de l’´etat ‘film adsorb´e’ `a l’´etat plein . A plus haute temp´erature, les

changements sont plus graduels. Cette diff´erence pourrait peut-ˆetre expliquer l’´evolution

que nous constatons de la morphologie avec la temp´erature. En particulier, le basculement

brutal `a basse temp´erature ´evoque l’absence d’´etat interm´ediaire entre l’´etat ‘brillant’ `a

l’´etat ‘sombre’ (ou rempli).

En revanche, alors que les simulations pr´edisent ´egalement une ´evolution avec la

temp´erature `a la d´esorption, nous n’en voyons pas de cons´equences. Aussi bien la taille

caract´eristique des domaines diffuseurs (voir figure 4.19 page 92), que la morphologie des

r´egions brillantes et sombres sur les figures 4.14, 4.15, 4.16 et 4.17 sont `a peu pr`es les

mˆemes `a toutes les temp´eratures. Des progr`es sur le plan de la simulation, qui

permet-traient par exemple de pr´edire des facteurs de structure, seraient cependant n´ecessaires

pour pousser ces comparaisons.

A l’issue de ces comparaisons, il est difficile de conclure d´efinitivement `a la sup´eriorit´e

de l’approche du groupe de Jussieu par rapport `a une vision plus classique. De ce point

de vue, il est indispensable de r´ep`eter nos exp´eriences sur un a´erogel de mˆeme porosit´e,

mais de microstructure diff´erente, afin de voir l’influence de ce dernier param`etre. Ce sera

l’objet de la prochaine partie.

Etude d’une structure diff´erente avec le

”N102”

5.1 Am´elioration du dispositif exp´erimental

Les ´etudes sur l’a´erogel B100 avaient mis en ´evidence un certain nombre de probl`emes

que nous nous sommes efforc´es de corriger pour l’a´erogel N102. Aussi, dans un premier

temps, nous allons d´ecrire les diverses am´eliorations apport´ees `a notre exp´erience.