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111]à améliorer l’accès aux espaces verts pour les habitants du centre-ville

Dans le document Nature des villes, nature des champs (Page 112-114)

de Malmö (du moins pour les jardiniers) ; en ce sens, ils peuvent être considérés comme une des composantes de la « naturbanité » des villes scandinaves (Landy et Laslaz, 2012), c’est-à-dire une forte imbrication entre naturalité et urbanité, et qui serait la traduction, dans la gestion urbaine, du modèle suédois de relation homme-nature. Cela implique que l’agriculture urbaine soit considérée par les politiques comme des espaces de nature ; or la situation locale fait apparaître des faiblesses dans la construction de la gouvernance de ces espaces.

3.3. Une faible intégration de l’agriculture urbaine

et périurbaine dans la gouvernance alimentaire de la ville

et dans les pratiques des citadins

Du point de vue des pratiques des citadins, le jardinage associatif, composante de la diversité des agricultures urbaines, apparaît décon- necté des espaces de l’agriculture marchande. Cette fragmentation des espaces agricoles urbains du point de vue des pratiques traduit des dif- ficultés à mettre en cohérence ces espaces par les politiques à l’échelle métropolitaine, ce qui serait pourtant une voie pour améliorer la situa- tion de justice alimentaire et de connexion de toutes les populations à des espaces de nature (Nikolli et al., 2016). Ainsi, l’appropriation de la ques- tion alimentaire ne passe pas plus par une politique urbaine d’intégra- tion des agricultures marchandes locales que par les jardins associatifs. Contrairement à d’autres métropoles européennes (Rome ou Londres par exemple), le caractère politique de la question alimentaire ne fait pas encore consensus localement. Plus encore, politique agricole et politique alimentaire prennent deux voies séparées, et dissocient de fait accès à une alimentation de qualité et accès à la nature pour tous.

Du point de vue des pratiques des citadins, l’agriculture périurbaine est déconnectée d’une partie des consommateurs urbains, a fortiori des consommateurs défavorisés de Malmö. Les pratiques de fréquentation des espaces agricoles périurbains, ou de consommation des productions qui en sont issues, reproduisent des inégalités constatées dans le cas du jardinage associatif. En effet, au-delà de l’absence de circuits de proximité dont les lieux de commercialisation seraient intra-urbains1, l’agriculture périurbaine n’est pas accessible à tous de la même manière. Par exemple, la vente directe sous la forme de magasins à la ferme est bien développée 1 Il y a par exemple, en saison, un marché de producteurs locaux organisé sur la place de la vieille ville par l’association nationale Bondens Egen Marknad, mais selon les agricul- teurs et les responsables politiques rencontrés, ce marché ne fonctionne pas bien et peine à recruter des producteurs.

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dans les exploitations maraîchères et fruitières proches de Malmö. Elle est par ailleurs promue par différents projets relevant de la stratégie alimen- taire suédoise (Hochedez, 2014) appliquée à la Scanie, mais aussi dans le cadre de projets européens LEADER dans le territoire de Söderslätt. Ces magasins vendant les fruits et légumes de la ferme, mais aussi des produits transformés issus de la ferme ou en provenance d’autres exploi- tations, étoffent souvent leur offre en proposant des services qui justifient l’excursion pour les citadins : petite restauration ou café sur place, mise à disposition d’un espace de pique-nique, voire possibilités d’héberge- ment. Profiter de ces services suppose néanmoins d’être motorisé ; or à Malmö il n’y a que 36 voitures pour 100 habitants, ce qui est inférieur à la moyenne nationale de 47 voitures pour 100 habitants1. Par ailleurs, nos observations laissent penser que le public accueilli n’est pas représen- tatif de la diversité de la population de Malmö ; une enquête auprès de la clientèle des magasins à la ferme serait nécessaire pour valider entière- ment cette affirmation. La frontière semble effective entre une partie des citadins et les espaces agricoles périurbains. Le manque d’accessibilité est double, puisqu’il concerne à la fois les exploitations physiques mais aussi les produits qui en sont issus.

Les déconnexions observées des citadins avec les espaces de nature que constituent les espaces agricoles marchands en périphérie de la ville sont accentuées par la faiblesse des politiques locales en faveur de l’agri- culture urbaine et périurbaine, témoignant de la difficile mise en place d’une gouvernance alimentaire locale. Les connexions aux espaces de nature via l’agriculture urbaine pourraient être facilitées par des actions politiques visant à en améliorer l’accessibilité physique, l’aménagement et la préservation, ou encore portant sur l’approvisionnement alimen- taire local. Or les différents leviers d’action sur l’agriculture locale dont disposent les communes suédoises (zonage et planification, dispositifs politiques et aides technico-économiques, Hochedez, 2014) ne sont pas pleinement utilisés par la ville de Malmö. Du point de vue de l’urbanisme et de l’aménagement, l’agriculture urbaine, qu’elle soit marchande ou non, a un statut ambigu. Les espaces agricoles sont considérés comme des espaces verts à préserver. Cependant, les documents de planification révèlent l’absence totale d’une vision ou d’une stratégie pour les préserver à l’intérieur de la ville. Le Plan général (Översiktsplan) est guidé par le principe de densification, conformément au modèle de la ville compacte censée être durable, dont Malmö entend être un modèle. En même temps, 1 Nous ne disposons pas d’explication quant à ce faible taux de motorisation. On ne peut donc pas affirmer qu’il y a une corrélation entre l’absence de véhicule et les populations défavorisées.

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Dans le document Nature des villes, nature des champs (Page 112-114)