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CHAPITRE 7 : DISCUSSION ET CONCLUSION

7.2. Améliorations à apporter à l’outil

Plusieurs améliorations devront être apportées à l’outil d’évaluation des coûts indirects afin de rendre son utilisation plus conviviale et systématique pour les entreprises. Actuellement, le logiciel Qualigram, qui fonctionne avec Microsoft Visio, est utilisé pour bâtir la cartographie de la réponse organisationnelle à un accident de travail. Les données de cette cartographie sont ensuite extraites manuellement, intégrées puis compilées dans un classeur Microsoft Excel pour l’étape de fonctionnement. Un seul et unique outil, combinant les deux logiciels et les deux étapes, devrait être mis en place. Ainsi, l’utilisateur serait capable de préciser directement pour chaque procédure la fréquence et la durée de chaque opération. Ces informations seraient ensuite directement intégrées au calcul des coûts indirects, sans qu’il soit nécessaire de passer par l’étape d’extraction manuelle.

Un processus standard, élaboré à partir des données de 10 entreprises de petite et moyenne tailles dans 4 secteurs d’activité différents, est proposé comme point de départ de la cartographie. Une fois que l’outil aura été diffusé dans d’autres entreprises, des processus standards adaptés à une taille d’entreprise ou à un secteur d’activité particulier pourraient être élaborés pour satisfaire les besoins du plus grand nombre d’utilisateurs. Des procédures de base pourraient être également proposées afin d’accélérer l’étape de collecte de données. D’autres procédures pourraient être construites afin d’intégrer au calcul du coût indirect certaines composantes comme la baisse de

marchandises, la formation ou l’embauche d’un nouveau travailleur, la contestation juridique d’une blessure, les pénalités pour retards de livraison (notamment dans le cas des chantiers de construction), les amendes, les dommages et intérêts versés (etc.).

Dans le cas de l’absence d’un employé très qualifié (opérateur d’un robot spécifique par exemple) – Miller (1992) parle de « irreplaceable skills » – l’entreprise peut rencontrer certains problèmes pour trouver un remplaçant, lorsqu’aucune personne disponible ne dispose des qualifications pour effectuer la tâche. Dans ce cas, une diminution du volume de production pourra avoir lieu au poste de travail. Si le poste occupé est un goulot d’étranglement (Gavious et

al., 2009), la chute du volume de production pourra avoir un impact sur la productivité de tous les

postes de travail en aval. Dans ces cas, la perte de chiffre d’affaires liée à la diminution du volume de production devrait être calculée au moyen d’une procédure spécifique.

Notre outil s’est révélé efficace, dans le cadre d’une première étude exploratoire, pour calculer le coût des accidents de travail dans 10 entreprises. Les étapes de collecte de données et de compilation ont été réalisées par l’équipe de recherche. La validation de cet outil directement par les personnes responsable de la SST devra être réalisée sur un échantillon plus important d’entreprises de tailles et de secteurs d’activité variés.

L’outil de calcul des coûts indirects devrait être associé à un système de gestion intégré des accidents de travail. Ce système de gestion pourrait centraliser, dans un seul et même outil et une seule base de données, l’ensemble des informations reliées aux accidents de travail. Cet outil global pourrait regrouper les éléments suivants :

- Les déclarations d’événement : notre expérience montre que les déclarations d’événement, généralement complétées en format papier, sont souvent mal remplies, complétées deux fois ou tout simplement manquantes. Un système de remplissage sur support informatique de la déclaration d’événement avec une intégration directe aux statistiques d’événements permettrait de limiter ce problème, de garder un fichier de statistiques d’événements complet et à jour et d’éviter l’étape de « reporting » par la personne en charge de la SST. Un système de suivi pourrait pointer les postes de travail pour lesquels il y a déjà eu plusieurs événements. Les déclarations d’événement devraient donc indiquer le poste de travail sur lequel le travailleur s’est blessé. Dans les entreprises dans lesquelles l’étude à été menée, cette information n’est pas systématiquement rapportée, ce qui rend plus difficile la détection des postes de travail ayant un nombre

élevé d’événements afin de cibler les actions préventives. La non-disponibilité de cette information dans plusieurs des 10 entreprises a d’ailleurs réduit considérablement le nombre de données disponibles pour la mise en relation des niveaux de risque tel qu’évalués par les méthodes d’évaluation des facteurs de risque dans la quatrième partie (chapitre 6) de cette étude.

- Les enquêtes et analyses d’accident : les enquêtes et analyses d’accident pourraient être remplies sur un support informatique, annexées directement à l’événement, puis diffusées via le réseau interne ou par courriel directement aux intéressés, afin d’améliorer le suivi des correctifs. Un module pourrait permettre, par le remplissage d’une procédure, de calculer le coût des correctifs à partir du temps des actions de chaque intervenant (ingénierie, équipe de maintenance, etc.) et du coût du matériel. Le coût de cette procédure pourrait être intégré à terme dans un calcul de rentabilité.

- Lien avec l’organisme en charge de l’assurance collective (CSST au Québec) et intégration des coûts directs : l’outil pourrait être relié directement au site Internet de la CSST afin d’obtenir en temps réel les informations reliées au traitement du dossier et à son suivi. Tous les formulaires requis par la CSST pourraient être remplis électroniquement grâce au logiciel et annexés à l’événement. Ceci permettrait de gagner du temps dans la gestion administrative des dossiers de perte de temps. Les coûts directs pourraient également venir compléter et enrichir l’information contenue dans les statistiques d’événements.

- Liaison avec le système de gestion de l’assignation temporaire : notre expérience montre que les données relatives à l’assignation temporaire, nécessaires au calcul du coût indirect, sont généralement difficiles à recueillir dans les entreprises. En effet, les entreprises ont rarement un système de « reporting » des jours passés en assignation temporaire et de la productivité de chaque travailleur pendant cette période. Ces données sont en général annexées aux fichiers de la paye et n’apparaissent donc pas directement dans les statistiques d’accidents comme les autres données nécessaires au calcul du coût indirect de l’événement (nombre de jours de perte de temps, situation du travailleur après l’événement, etc.). Intégrer directement cette information aux statistiques d’accidents simplifierait nettement le fonctionnement de l’outil de calcul des coûts indirects.

- Analyse coût/bénéfice : l’outil pourrait permettre, grâce aux informations disponibles (coûts indirects, coûts directs, coûts des modifications) d’effectuer des calculs de rentabilité des mesures préventives, comme dans les études de Lahiri, Gold & Levenstein (2005), Oxenburgh (1997) ou Amador-Rodezno (2005). Pour ce faire, des fonctionnalités additionnelles devront être ajoutées afin d’intégrer au calcul de rentabilité la diminution de la prime d’assurance (versée par l’employeur à l’organisme en charge de l’assurance collective) et l’amélioration de la productivité à la suite de modifications à un poste de travail. En effet, les modifications touchant l’ergonomie s’accompagnent souvent d’améliorations de la technologie de production qui contribuent à l’amélioration du temps de cycle et à l’augmentation de la productivité (Helander & Burri, 1995). Par exemple, Yeow et Nath Sen (2003) rapportent une diminution du temps de cycle de 6,1 % à la suite de modifications sur le poste de travail et des gains de productivité de 6,5 %.

- Prime d’assurance : la diminution de la prime d’assurance liée à la diminution de la fréquence et de la gravité des accidents de travail à la suite d’actions préventives est un facteur qu’il convient de prendre en compte lors de l’analyse coût/bénéfice d’activités de prévention (Riel & Imbeau, 1997 ; Lanoie & Trottier, 1998 ; Lanoie & Tavenas, 1996 ; Gosselin, 2004). Un module automatisé de calcul d’impact sur la prime d’assurance de chaque accident de travail avec un dossier ouvert à la CSST pourrait être proposé à l’utilisateur afin qu’il ait une vision encore plus globale du coût de l’accident.

La mise en place d’un outil intégré de suivi des dossiers d’accidents, des statistiques d’événements, et des actions préventives ainsi que de calcul de rentabilité devrait permettre de mieux structurer le volet SST dans les entreprises et d’aider les preneurs de décision dans leurs investissements en SST.

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