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La résistance mécanique de l’aluminium pur est relativement faible et interdit son emploi pour la plupart des applications. Cette résistance mécanique peut être notablement augmentée par l’addition d’autres éléments métalliques, formant ainsi des alliages. La différence entre les alliages est essentiellement liée à l’élément d’addition principal. L’addition d’éléments secondaires va également influer sur les caractéristiques physico-chimiques. Enfin, des éléments peuvent être présents dans l’alliage sans qu’ils aient été ajoutés volontairement ; ce sont les impuretés dont les plus importantes sont le fer et le silicium, et dont il faut contrôler précisément la teneur pour certaines utilisations. Il est bien admis que les propriétés des alliages d’aluminium sont déterminées essentiellement par leur microstructure. Bien qu’actuellement encore toutes les interactions entre microstructure et propriétés ne soient pas parfaitement connues, les résultats des nombreuses et importantes recherches effectuées ces dernières années ont permis d’améliorer considérablement nos connaissances à cet égard.

Il y a deux classes principales d'alliages d'aluminium: les alliages corroyés et les alliages moulés. Nous nous sommes intéressés dans cette thèse à l’étude d’alliages corroyés utilisés dans l’industrie aéronautique civile. Pour ce type d’application, le matériau doit offrir à la fois une faible densité et de très bonnes propriétés mécaniques. Les alliages d’aluminium offrent un des meilleurs compromis entre ces deux propriétés. Les alliages sont divisées en huit classes basées sur les principaux éléments d’alliage ajoutés [40] et donc chaque classe a différentes propriétés mécaniques et physiques.

Tableau 1. 1 : Classification des alliages d’aluminium selon les principaux éléments d’alliage [40]

1.3.1) Alliages d’aluminium des séries 2000 et 7000

Les alliages d’aluminium de la série 2000 et la série 7000 sont largement utilisés pour des applications mécaniques aéronautiques. Ce sont des alliages à haute résistance dit à durcissement structural.

Dans les alliages de la série 2000, le principal élément d’alliage est le cuivre, entre 3-6 % de la masse, associé ou non à du magnésium (entre 0 et 2 % massique). Ces éléments permettent un durcissement important par précipitation. Les caractéristiques mécaniques des alliages de la série 2000 sont accrues en raison de la précipitation d’une seconde phase de type Al2Cu ou Al2CuMg. Les alliages sont constitués d’une matrice, qui correspond à une solution solide de cuivre dans l’aluminium, de précipités durcissant, mais aussi de particules intermétalliques grossières et enfin de dispersoïdes. Les propriétés en fatigue de ces alliages sont également très bonnes voire meilleures que celles des alliages de la série 7000. Cependant, la présence du cuivre est néfaste à leur tenue à la corrosion. En effet, le cuivre tend à précipiter dans les joints de grains, et rend l’alliage particulièrement sensible à la corrosion intergranulaire, à la corrosion par piqûres, et à la corrosion sous contrainte. Ces précipités de cuivre sont plus cathodiques que la matrice aluminium et ils réagissent facilement par le biais de couples galvaniques [41].

Actuellement les alliages d’aluminium ayant les meilleures caractéristiques mécaniques appartiennent à la série 7000. Les principaux éléments d’addition sont dans ce cas le zinc, le cuivre et le magnésium. Le durcissement structural dans ces alliages permet d’obtenir les propriétés mécaniques requises. La microstructure de ces alliages est caractérisée par la présence d’une grande diversité de phases : elles peuvent être stables ou métastables, elles sont susceptibles d’améliorer le comportement mécanique du matériau par durcissement structural ou au contraire d’être à l’origine d’un endommagement catastrophique. Ces alliages atteignent la résistance maximale dans l’état T6.

1.3.1.1) Microstructures

Le premier alliage étudié dans ce travail est l’alliage Al-2214-T6. Il a été développé pour obtenir une haute résistance et est utilisé pour des pièces forgées et extrudées. Cet alliage est disponible dans une large variété de formes de produit. Pour l'alliage 2214-T6, le durcissement est réalisé par la précipitation de phase intermétallique Al2Cu pendant le vieillissement. On donne la composition chimique normalisée pour l'alliage 2214-T6 dans le tableau [42];

Élément Si Fe Cu Mn Mg Cr Zn Ti Autres

Composition (% massique)

min 0.5 - 3.9 0.40 0.2 - - - -

max 1.20 0.30 5 1.20 0.8 0,1 0.25 0,15 0,15

Tableau 1. 2 : Composition chimique de l’alliage 2214-T6 [42]

La microstructure de cet alliage 2214-T6 est constituée de grains recristallisés et de grains non-recristallisés avec deux types de particules intermétalliques : Al2Cu et Al (SiMnFeCu). La taille moyenne de ces particules est de 8-12µm [41].

Le deuxième alliage étudié est l’alliage d’aluminium 7050-T7451. L’alliage 7050 a été développé pour avoir une combinaison entre résistance élevée, bonne résistance à la corrosion et très bonne ténacité même pour des sections épaisses. Cet alliage est disponible dans des formes de tôle et plaque. L’état T7451 confère à l’alliage une meilleure résistance à la corrosion sous

Élément Si Fe Cu Mn Mg Cr Zn Ni Zr Ti Composition

(% massique)

min - - 2 - 1,9 - 5,7 - 0,08 -

max 0,12 0,15 2,5 0,10 2,6 0,04 6,7 0,05 0,15 0,06

Tableau 1. 3 : Composition chimique de l’alliage 7050-T7451 [42]

La microstructure de cet alliage 7050 a été étudiée par plusieurs chercheurs, [8], [9] et

[43]. Entre autres, Barter et al [44] (2002) ont montré que la microstructure de l’alliage 7050 était constituée de grains recristallisés et de grains non-recristallisés et ont détecté trois types de particules intermétalliques : des particules Al7Cu2Fe, Mg2Si et Al2CuMg. Elles ont une taille moyenne entre 8 et 10 µm et sont normalement situées dans les grains recristallisés.

1.3.1.2) Propriétés mécaniques pour les alliages des séries 2000 et 7000

Dans les tableaux 1.4 et 1.5, nous indiquons les propriétés mécaniques pour ces deux alliages. Elles sont issues des références [45] et [46] respectivement.

Rp0.2 [MPa] Rm [MPa] Élongation [%] Ténacité MPa√m Densité [kg/dm3] Module de Young [GPa] Coefficient de Poisson L ≥ 455 ≥ 505 ≥ 10,5 40 2,80 72,8 0,33 TL ≥ 440 ≥ 490 ≥ 10 34

Tableau 1. 4 : Propriétés mécaniques de l’alliage d’aluminium 2214-T6 [45]

Rp0.2 [MPa] Rm [MPa] Élongation [%] Ténacité MPa√m Densité [kg/dm3] Module de Young [GPa] Coefficient de Poisson L ≥ 420 ≥ 490 ≥ 8 27,4 2,814 71,4 0,33 TL ≥ 420 ≥ 490 ≥ 5 30 ST ≥ 399 ≥ 462 ≥ 3 26

1.3.2) Le comportement en fatigue pour les alliages d’aluminium – relation avec la microstructure et modèles

Pour les alliages d’aluminium, l’analyse fractographique des éprouvettes rompues par fatigue révèle dans plupart des cas, que la fissure responsable de la rupture s’est amorcée sur une inclusion ou une particule intermétallique localisée à la surface de l’éprouvette ou juste en- dessous. En observant attentivement les inclusions responsables de la rupture, il apparaît que l’amorçage commence soit par une décohésion de l’interface inclusion-matrice, soit par la fissuration des inclusions elles-mêmes. Ces particules ou inclusions se sont formées pendant le processus du recuit. Elles sont inhérentes au matériau et une large dispersion dans les durées de vie en fatigue expérimentales est généralement observée : elle est associée à ces inclusions.

Luévano et al [47] (1994) ont étudié les caractéristiques microstructurales de l'alliage 7050-T7451 au voisinage des fissures de fatigue suivant le chemin de fissuration pour déterminer quelles pouvaient être les caractéristiques qui influençaient le plus la propagation des fissures de fatigue. Ils ont montré que seules les particules intermétalliques avaient une influence sur la propagation en causant la déviation des fissures. Ils ont constaté que le chemin de fissuration était principalement transgranulaire et qu’il n'y avait aucune variation de densité de dislocations ni aucune modification des structures de précipitation dans la zone affectée par la fissuration.

Przystupa et al [43] (1997) ont développé un modèle microstructural pour la prédiction de la durée de vie en fatigue en utilisant un modèle de Monte-Carlo basé sur les distributions des tailles des défauts métallurgiques dans le cas de l’alliage 7050-T7451. Dans leur modèle, ces défauts sont considérés comme des défauts initiaux à partir desquels les fissures se propagent. Le modèle de propagation est une loi de type Paris :

m n K M C D dN da ∆ ⋅ ⋅ = ' Equation 1. 25

C , ' m et n sont des constantes matériaux, D un coefficient correctif qui permet de prendre en compte les bifurcations de la fissure et M un facteur dépendant de la texture du matériau.

expérimentaux et le modèle a permis d’identifier la distribution de la taille des inclusions comme la principale variable qui contrôle la comportement en fatigue pour l'alliage concerné.

Figure 1. 25: Comparaison des courbes de fatigue obtenue par le modèle de Monte-Carlo aux résultats expérimentaux pour l’alliage 7050-T7451 [43]

Magnusen et al [8] (1997) ont également réalisé une caractérisation microstructurale détaillée pour l'alliage 7050-T7451. Ils ont identifié et classé les facteurs microstructuraux qui avaient le plus d’influence sur la durée de vie et ont proposé des modèles pour décrire quantitativement l'évolution et la propagation des fissures. Ils ont pu montrer, avec ces modèles, comment les changements des caractéristiques des matériaux pouvaient affecter la performance en fatigue.

Figure 1. 26 : Comparaison entre les distributions de durée vie en fatigue expérimentale et prévue pour l’alliage d’aluminium 7050-T7451 pour une contrainte maximale de 350 MPa (R = 0,1) [8]