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L’exemple des jeux de hasard et d’argent », Droits, 2015/2 (n° 62), p. 25-58. DOI :

10.3917/droit.062.0025. URL :

https://www.cairn-int.info/revue-droits-2015-2-page-25.htm

III. La tukhê dans l’Œdipe roi ! Apollon dieu faiseur de destin

Thèse : la tukhê est une donnée centrale de l’Œdipe roi. Donnée d’autant plus difficile à comprendre que Sophocle resémantise le terme et se

détache (il n’est pas le seul) de la conception traditionnelle pour faire

l’hypothèse à travers ses personnages d’une tukhê qui ne relèverait plus des dieux, et qui ne cautionnerait plus nécessairement un ordre du monde divin (une menace pour tout le système polythéiste).

La difficulté est alors double : comprendre comment il réinvente une notion, qui reste d’ailleurs sans correspondant/ équivalent exact dans la tradition judéo-chrétienne.

τυγχάνω τύχη εὐτυχ-

δυστυχ-Antigone 7 6 2 2 17

Ajax 9 9 4 1 23

Electre 16 2 6 3 27

Trachiniennes 5 2 3 2 12

Philoctète 12 8 0 0 20

OC 15 5 2 3 25

OR 14 12 5 1 32

Justification statistique d’étudier la tukhê dans l’Œdipe roi

I. Importance de l’Œdipe Roi II. Remarques initiales

III. Repérer un angle d’attaque pour re-lire la tragédie. Avec une question susceptible d’ouvrir de nouvelles pistes.

IV : rôle de la tukhê dans l’Œdipe roi : deux scènes qui posent la question du sens de tukhê

Prologue : 1-150

a) Œdipe- le Prêtre - les Suppliants, 1-84 b) les mêmes + Créon, 85-150

Entrée du chœur : parodos : 151-215.

1er épisode: 216-462, Œdipe- le Chœur - Tirésias 1er stasimon: 463-512

2e épisode: 513-862

a) Créon -le Chœur, 513-531 b) les mêmes + Œdipe, 532-630

c) les mêmes + Jocaste, 631-677, avec commos (strophe: 649-667)

d) Jocaste – Œdipe – le Chœur, 779-862, avec commos (antistrophe: 678-697)

2e stasimon: 863-910 3e épisode : 911-1072

a) Jocaste - le Corinthien - Œdipe: 911-1085.

3e stasimon: 1086-1109

4e épisode : 1110-1185 : Œdipe - le Corinthien - le berger de Laïos

4e stasimon: 1186-1222 Exodos: 1223-1530

a) Messager – le Chœur : 1223-1296

b) Œdipe – le Chœur : 1297-1421, avec 2ecommos (1313-1367)

c) Créon - Œdipe – le Chœur : 1422-1530

Prologue

1er tableau (imaginer une mise en scène)

Œ: Enfants, jeunes rejetons de l’antique Cadmos (Ὦ τέκνα, Κάδμου τοῦ πάλαι νέα τροφή), que faites-vous ainsi assis, couronnés et avec des rameaux de suppliants ? La cité toute entière est remplie de parfums d’encens de péans et de plaintes […] Je suis venu à vous moi-même , mes enfants, moi, Œdipe, au nom connu de tous ! […]

(1-13)

Le Prêtre : Eh bien, je vais parler. O souverain puissant (kratunôn) de mon pays, Œdipe ! Tu vois l’âge de tous ces suppliants à genoux

devant les autels. Les uns n’ont pas la force de voler bien loin, les autres sont accablés par la vieillesse […] (14-17)

Mise en évidence de la solidarité des 3 âges / générations : eugeneia Or le problème est justement celui d’une juste relation des 3 âges

Le prêtre :

Pas plus ces enfants que moi, assis devant toi en suppliants, nous ne voulons te comparer aux dieux mais nous te considérons comme le premier des hommes dans les accidents de la vie et les

bouleversements des dieux, toi qui es arrivé dans cette ville de

Cadmos et l’a libérée du tribut qu’elle payait alors à l’horrible aède (Sphinx) […] (32-36)

οὐδ’ οἵδε παῖδες ἑζόμεσθ’ ἐφέστιοι,

ἀνδρῶν δὲ πρῶτον ἔν τε συμφοραῖς βίου κρίνοντες ἔν τε δαιμόνων συναλλαγαῖς·

ὅς γ’ ἐξέλυσας ἄστυ Καδμεῖον μολὼν (35) σκληρᾶς ἀοιδοῦ δασμὸν ὃν παρείχομεν,

Œdipe comme un champion du « bonheur »

Le prêtre (suite):

Nous ne t’avions ni instruit ni renseigné,

c’est à l’aide d’un dieu, on le dit comme on le pense, que tu nous as redonné de vivre.

[40] Maintenant, très puissant, très cher Œdipe, tous prosternés nous t’en supplions,

trouve-nous un remède, qu’importe que te l’enseigne un oracle divin ou un simple mortel,

car je sais que souvent sont efficaces aussi [45] les conseils des hommes d’expérience.

44 ὡς τοῖσιν ἐμπείροισι καὶ τὰς ξυμφορὰς (Dawe embarrassé) 45 ζώσας ὁρῶ μάλιστα τῶν βουλευμάτων.

(litt. : parce que chez les hommes expérimentés je vois les conséquences (ξυμφορὰς) des décisions vivre le mieux).

Le prêtre : Redresse, toi le meilleur des humains, notre ville et prends garde pour toi-même. Ce pays t’appelle aujourd’hui son sauveur pour l’ardeur que tu lui montras jadis. Puissions-nous ne jamais avoir souvenir [50] que ton règne nous aurait remis droits debout pour une rechute. Redresse cette ville définitivement. C’est sous d’heureux auspices que tu nous apportas autrefois le salut, ce que tu fus, sois le encore.

Rejouer le même coup de dés et remettre sur pieds

ἴθ’, ὦ βροτῶν ἄριστ’, ἀνόρθωσον πόλιν·

Sens général : ton arrivée était un bon augure; littéralement : Tu nous apportas une tukhê avec un oiseau favorable. Hypallage ou euphémisme ? Tu nous apportas un sort favorable avec l’oiseau (que tu as vaincu)

Le terme τύχη apparaît une première fois ici : Œdipe est l’homme qui a retourné la situation, qui est lié à un premier coup de théâtre heureux ! Son arrivée est une bonne τύχη (chance) envoyée sans doute par les dieux, comment serait-ce autrement. Mais on peut entendre la phrase du prêtre autrement et laisser à τύχη toute son ambiguïté.

— Prêtre : Tu parles fort à propos car ceux-ci justement me font signe que Créon est en train d’arriver.

— Œ : Seigneur Apollon ! Souhaitons qu’il arrive avec autant de chance de salut qu’il a de lumière sur le visage !

Οι. ὦναξ Ἄπολλον, εἰ γὰρ ἐν τύχῃ γέ τῳ (80) σωτῆρι βαίη λαμπρὸς ὥσπερ ὄμμα τι.

Œdipe voit Créon s’approcher (Nous allons le savoir, 84) : il interroge Créon : quelle réponse du dieu nous rapportes-tu donc ? Et Créon répond:

— Créon: Une réponse heureuse. Crois-moi, les faits les plus

fâcheux, lorsqu’ils prennent la bonne route, peuvent tous tourner au bonheur ! (87-88)

ἐσθλήν· λέγω γὰρ καὶ τὰ δύσφορ’, εἰ τύχοι κατ’ ὀρθὸν ἐξιόντα, πάντ’ ἂν εὐτυχεῖν.

Voilà une tragédie où l’on est attentif à ce qui arrive et survient, à la convergence des faits, avec cette certitude que les situations

peuvent se renverser, se retourner avec l’aide des dieux.

Dialogue Tirésias-Œdipe

– T : Toi, tu me prends pour un fou, mais tes parents me trouvaient plein de sagesse. [435]

— Œ: Quels parents ? Reste là. De qui suis-je né ? – T : Ce jour va voir ta naissance et ta mort.

— Œ: Tu ne dis rien qu’obscurément et par énigmes.

– T : Tu n’excelles donc plus à les trouver ? [440]

— Œ: Reproche-moi ce qui fait ma grandeur ! – T : C’est précisément ta tukhê qui te perd.

— Œ: Que m’importe puisqu’elle a sauvé la ville.

Οι. τοιαῦτ’ ὀνείδιζ’ οἷς ἔμ’ εὑρήσεις μέγαν.

Τε. αὕτη γε μέντοι σ’ ἡ τύχη διώλεσεν.

Οι. ἀλλ’ εἰ πόλιν τήνδ’ ἐξέσωσ’, οὔ μοι μέλει.

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