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– UNE ADMINISTRATION MOINS COMPLEXE

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ARTICLE 26 – LIBERATION DU POTENTIEL D’INNOVATION DU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION – « PERMIS DE FAIRE » 1. ÉTAT DES LIEUX

Les lois successives sur la construction ont intégré, à différentes époques, les préoccupations nouvelles de la société notamment la performance énergétique dès 1974, les règles relatives aux équipements « de base » des logements et aujourd’hui la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le déploiement de l’électromobilité ou le très haut débit par exemple.

Le code de la construction et de l’habitation a été créé en 1978, soit il y a près de 40 ans. Il n’a pas été réorganisé et modernisé dans sa forme mais a essentiellement fait l’objet d’ajouts sur le fond, en fonction des thématiques nouvelles à traiter.

Ces ajouts ont été réalisés par le législateur dans une logique à la fois de juxtaposition d’une part (un nouveau sujet, une nouvelle règle) et d’exigences de moyens prescriptives, c’est-à-dire ne permettant d’atteindre le résultat souhaité que d’une seule manière, d’autre part. À quelques exceptions près (la réglementation thermique par exemple), les règles de construction consistent en des prescriptions de moyens, ce qui convient à certains acteurs

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économiques qui pratiquent ces règles au quotidien et depuis de nombreuses années, mais n’est pas favorable au développement de l’innovation, tant technique qu’en termes de solutions constructives et architecturales.

Ces règles complexes construites dans une logique d’obligation de moyens (et non de résultats) créent des situations de rente, brident l’innovation source de réduction de coût et de délai mais aussi source d’amélioration de la qualité. Par ailleurs, faute de pouvoir assurer un contrôle systématique du respect de ces règles, dont le coût pour les pouvoirs publics est proportionnel à leur degré de complexité, il devient difficile de s’assurer de la qualité des bâtiments construits.

Par ailleurs, l'excès de normes aboutit à une standardisation de l'architecture et des constructions, non désirée par les acteurs, professionnels, élus et habitants. Afin de porter une dynamique nouvelle à la construction, pour passer d'une culture de la règle à une culture d'objectifs, l’article 88 de la loi n°

2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) et son décret d’application ont initié une démarche globale d’expérimentation par l’architecture issue de la Stratégie nationale pour l’architecture.

La loi prévoyait de faire monter en gamme la construction et ses professionnels, en articulant ensemble création, innovation et construction dans une vision d'efficience économique. Pour autant, la limitation de son champ d’application et ses modalités de dérogations n’ont pas permis sa mise en œuvre opérationnelle.

Par ailleurs, le déploiement du numérique qui tend à se généraliser au sein du monde de la construction (notamment avec l’impulsion du Plan de Transition Numérique du Bâtiment), offre de nouveaux leviers pour concevoir les bâtiments et évaluer leur niveau de performance. Mais cette faculté est peu exploitée par la réglementation, encore essentiellement organisée selon une logique de moyens.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS Mesure relative au I (première ordonnance) :

La première mesure permet d’instaurer une autorisation pour tous les maîtres d’ouvrage de bâtiments à déroger à certaines règles de la construction sous réserve que soit apportée la preuve de l’atteinte de résultats équivalents aux règles auxquelles il est dérogé, dans l’objectif de compléter permis d’expérimenter, de l’ouvrir sur ses champs d’application et sur les modalités de mise en œuvre.

Cette mesure est d’application plus large que les dérogations initiées à titre expérimental par la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 (article 88, I) relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine et son décret d’application actuel (décret du 12 mai 2017). En effet, ces dernières sont limitées par leur champ d’application (logement social, équipements publics), les thèmes traités (accessibilité et sécurité incendie uniquement) et le mode de traitement des dérogations (instruction et contrôle au niveau national). Le I de l’article 88 de la loi précitée a ainsi vocation à être abrogé lorsque le nouveau dispositif de dérogation prendra effet.

Mesure relative au II (seconde ordonnance) :

La seconde mesure permet de faire évoluer et de simplifier, par voie d’ordonnance, certaines normes du livre premier du code de la construction, en substituant aux prescriptions de moyens pour ne définir que des objectifs de résultats.

Dans cette perspective, chaque réglementation devra être revue pour être écrite de façon « performancielle », le choix des moyens et la charge de la preuve de l’atteinte du résultat étant laissée individuellement sous la responsabilité des maîtres d’ouvrage et des porteurs de projets. Le tout restant bien entendu contrôlé.

Les règles à faire évoluer se trouvent pour l’essentiel dans le livre premier du code de la construction et de l’habitation. Il s’agit, de manière non exhaustive : -la performance énergétique, environnementale, aération et qualité de l’air intérieur ;

-l’acoustique ;

-l’accessibilité du cadre bâti ;

-l’accès aux réseaux de communications ;

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-la santé et sécurité des bâtiments et des personnes ;

-le développement de l’électromobilité et des mobilités douces ; -la prévention des risques naturels, technologiques et anthropiques ;

En outre, la variété de thèmes à traiter peut nécessiter des approches différenciées et un travail de fond avec l’ensemble des acteurs de la construction. Ainsi, c’est pourquoi dans l’attente de cette réécriture et afin de créer un choc immédiat d’offre dans le champ de la construction, il est proposé dans un premier temps, d’ouvrir une procédure permettant, de façon encadrée, de déroger à ces règles.

3. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

Le fait de substituer des obligations de résultats à des obligations de moyens ne génère ni surcoût ni gain en tant que tel mais les maîtres d’ouvrage qui font appel à des solutions techniques et constructives qui diffèrent des moyens conventionnels peuvent espérer un gain sur les coûts de construction purs (gains sur les produits et matériaux, gains liés à l’amélioration du délai de mise en œuvre et de chantier) en contrepartie d’un surcoût en conception et en contrôle.

En effet, pour un projet de construction, il y aurait pour le maître d’ouvrage la nécessité de financer une tierce partie indépendante mais également de prévoir un surcoût en matière d’études préalables (études approfondies, simulations dynamiques, mise au point, fabrication, installation et test de prototypes, etc.), se répercutant prioritairement sur la mission de maîtrise d’œuvre, en phase étude, mais également en phase chantier,

Les travaux déjà réalisés à l’occasion de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine ont permis de réaliser des évaluations.

On a ainsi estimé le surcoût des études d’ingénierie par rapport à une mission complète de maîtrise d’œuvre à environ 10 % pour une opération où la maîtrise d’œuvre représente de 7 à 12 %% du montant hors taxes du coût des travaux.

À ce surcoût pour la mission de maîtrise d’œuvre, il conviendra de rajouter le surcoût du contrôle (la mission de tierce partie) que l’on peut évaluer, vu la

technicité supplémentaire, à 50 % pour une opération où le contrôle représente en moyenne 0,6 % du montant hors taxes du coût des travaux.

Les acteurs professionnels consultés estiment que la réduction sur le montant du coût des travaux pourrait atteindre jusqu’à 15 % grâce à une telle mesure.

Or, il est admis que ce coût de la construction représente pour une opération dont le degré de technicité est moyen environ 80 % du montant toutes dépenses confondues de celle-ci.

Dès lors, on peut estimer, dans une fourchette basse, que les mesures permettraient un gain de productivité d’environ 11 % par projet (15 x 0,8 – 10 x 0,07 – 50 x 0,006).

La montée en charge des mesures serait progressive en fonction du délai moyen de réalisation des projets (de l’ordre de 3 ans). Toutefois, la mesure temporaire prévue au I. dont le délai d’habilitation est plus court permettra d’initier dès la première année la dynamique et d’acculturer les acteurs à cette nouvelle façon de concevoir et de construire les bâtiments.

Pour évaluer l’impact de la mesure sur l’ensemble du marché de la construction, il est possible de s’appuyer sur les données Sit@del2 issues des formulaires de permis de construire (mouvements relatifs à la vie du permis : dépôts, autorisations, annulations, modificatifs, mises en chantier, achèvements des travaux) qui peuvent être exploitées à des fins statistiques.

Le marché de la construction représente un chiffre d’affaires (données 2015) annuel de 126 Mds€ répartis à 60 % sur le secteur du logement et 40 % sur le non-résidentiel (tertiaire privé, collectivités, etc.)

Il est estimé que la mesure I de la première ordonnance soit moins porteuse de projets que dans la mesure II prévue par la seconde ordonnance. En effet, les dérogations seront formulées de façon générale et pourront donc nécessiter davantage de compétences en ingénierie au préalable avant d’engager le projet. Il est possible d’estimer qu’entre 1 et 5 % des projets pourraient mobiliser la mesure, ce qui correspondrait à un gain pour le secteur compris entre 1,26 × 11 % = 140 et 6,3 × 11 % = 700 millions d’euros par an.

Pour la mesure II prévue à moyen terme, un taux de pénétration de 10 % paraît conservateur et pourrait donc conduire à des gains de 12,6 x 8 % = 1,4 Milliard d’euros par an d’économie pour le secteur du bâtiment.

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En pratique, le marché de la construction du bâtiment présente traditionnellement une élasticité offre demande 1 pour 1 de telle façon qu’une potentielle baisse des coûts de 1,4Mds€ /an se traduira probablement par un surcroît d’activité pour le bâtiment d’1,4Mds€ plutôt qu’une baisse en tant que telle.

Par ailleurs, comme évoqué ci-dessus, l’ouverture de nouvelles activités et marchés pour les activités de contrôle pourra générer des gains pour les acteurs du contrôle évalués (du fait d’une augmentation de 50 % du coût des contrôles pour les projets qui mettraient en œuvre les mesures du présent projet de loi) à 38M€.

4. JUSTIFICATION DU DÉLAI D’HABILITATION

Le délai d’habilitation de trois mois pour la mesure court terme du I se justifie par le choc d’offre souhaité et surtout les travaux déjà engagés après la publication de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine qui ont permis de solliciter la position des acteurs sur la question.

Le délai d’habilitation proposé de dix-huit mois pour le II est motivé par la variété de thèmes à traiter qui peuvent nécessiter des approches différenciées et un travail de fond avec l’ensemble des acteurs de la construction, au-delà des consultations obligatoires.

5. CONSULTATIONS ENVISAGÉES

Les différents projets d’ordonnance selon les thématiques traitées nécessiteront la consultation du conseil national d’évaluation des normes, du conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique, du conseil national consultatif des personnes handicapées, du conseil national de l'habitat, de la commission nationale de concertation en matière locative, du public au titre du code de l’environnement (par internet), et du conseil national du bruit (consultation facultative spécifique au thème « acoustique »).

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