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Chapitre 3 | L’adiponectine

F. Adiponectine et homéostasie énergétique

L’adiponectine contrôle de nombreux paramètres du métabolisme énergétique en agissant sur les organes clés de l’homéostasie glucido-lipidique (le foie, le muscle et le tissu adipeux) où elle exerce une action insulino-sensibilisatrice.

1. La production d’insuline

Chez la souris, l’injection d’adiponectine recombinante induit une augmentation des taux d’insuline circulants (Okamoto et al., 2008). Ces résultats ont été confirmés in vitro. En effet, il a été démontré que le traitement de cellules β pancréatiques par l’adiponectine induit une augmentation de l’exocytose d’insuline, accompagnée d’une hausse d’expression des gènes mafa et pdx-1, des co-activateurs de la transcription du gène de l’insuline (Okamoto et al., 2008; Wijesekara et al., 2010).

2. Le métabolisme glucidique

L’adiponectine favorise la consommation de glucose en stimulant la translocation membranaire du transporteur de glucose GLUT4 dans les cellules musculaires et les adipocytes suite à la phosphorylation de l’AMPK (Yamauchi et al., 2002; Ceddia et al., 2005; Saito et al., 2007). Ce phénomène est associé à l’activation de la protéine Rab5 par la protéine APPL1. En effet, Rab5 est une GTPase impliquée dans la biogénèse des endosomes, dont le rôle semble crucial lors de la translocation de GLUT4 des endosomes vers la membrane plasmique (Mao et al., 2006).

L’adiponectine inhibe également la formation de glucose et de glycogène. Dans les cellules hépatiques, la néoglucogenèse et la glycogénolyse sont freinées par l’adiponectine, suite à la diminution de l’expression de deux enzymes clés de ces voies, la glucose-6-phosphatase et la PEPCK (phosphoenolpyruvate carboxy kinase) (Combs et al., 2001; Yamauchi et al., 2002). Dans les cellules musculaires, la production de glycogène est également diminuée par l’adiponectine, suite à l’activation de l’AMPK (Ceddia et al., 2005). L’adiponectine induit ainsi une baisse de la glycémie. Par son action

hypoglycémiante, l’adiponectine contribue à protéger l’organisme contre la survenue d’un diabète de

3. Le métabolisme lipidique

L’adiponectine augmente le transport des acides gras dans les cellules musculaires, en stimulant l’expression de l’acide-gras translocase (Karbowska and Kochan, 2006). Elle favorise également le catabolisme des acides gras en induisant l’activité et l’expression de nombreuses enzymes impliquées dans le processus de β-oxydation (Yamauchi et al., 2002). En particulier via l’AMPK, l’adiponectine inactive par phosphorylation l’acetyl-coA carboxylase. Cette enzyme catalyse la production de malonyl-coA, un inhibiteur de la CPT-1 (carnitine palmitoyl transferase-1). Cette protéine assure le transport des acides gras vers la mitochondrie (Tomas et al., 2002). En levant l’inhibition de la CPT-1, l’adiponectine favorise le transport mitochondrial des acides gras où ils sont dégradés par les enzymes de la β-oxydation. L’adiponectine régule également la transcription de nombreux gènes impliqués dans le

catabolisme lipidique, tels que ACO (acyl-coA oxydase), FABP3 (fatty-acid binding-protein 3) et CPT-1 en induisant l’expression du facteur de transcription PPARα (Yoon et al., 2006).

L’adiponectine favorise également l’accumulation des triglycérides dans les adipocytes (Fu et al., 2005). Dans le foie en revanche, l’adiponectine réduit le transport des acides gras et l’accumulation de triglycérides (Yamauchi et al., 2001; Liu et al., 2012). En effet, l’adiponectine inhibe l’expression d’une trentaine de gènes hépatiques codant des protéines impliquées dans le transport des acides gras et dans la lipogenèse de novo (Liu et al., 2012).

L’adiponectine contrôle donc le métabolisme lipidique en favorisant le transport des acides gras et la β-oxydation dans les cellules musculaires, en inhibant la lipogenèse hépatique et en stimulant la fonction

de stockage par le tissu adipeux. Elle induit donc la diminution des taux de lipides circulants, exerçant

un rôle hypolipémiant dans l’organisme (Figure 48).

4. La fonction mitochondriale

La mitochondrie constitue l’organite clé du métabolisme énergétique. Le catabolisme des glucides, des lipides et des protéines se termine dans la mitochondrie pour alimenter le cycle de Krebs. Il s’agit d’une suite de dix réactions enzymatiques qui conduit à (i) la formation de métabolites tels que le succinate, et (ii) la réduction de coenzymes tels que le NADH (nicotinamide adénine dinucléotide réduit). Ces

facteurs intègrent ensuite la chaine respiratoire, formée de quatre complexes protéiques (I, II, III, IV) situés dans la membrane mitochondriale interne. Suite à une cascade de réactions d’oxydo-réduction, associée à un transfert d’électrons et à un gradient de protons H+, l’ATP est produit par l’ATP synthase (Figure 47).

Figure 47. Activation de la chaine respiratoire mitochondriale et synthèse d’ATP.

La synthèse d’ATP est donc étroitement liée au stock de mitochondries fonctionnelles dans la cellule. La biogénèse mitochondriale est ainsi régulée par de nombreux mécanismes cellulaires et dépend notamment du statut énergétique de la cellule (Jornayvaz and Shulman, 2010). Dans les cellules musculaires, l’adiponectine stimule la biogénèse mitochondriale par l’activation de l’AMPK qui induit l’expression des facteurs de transcription SIRT1 (sirtuin 1) et PGC1-α (PPARγ coactivator 1-alpha) (Iwabu et al., 2010; Qiao et al., 2012). PGC1-α est considéré comme le régulateur clé de la biogénèse mitochondriale. Il induit l’expression des gènes ERR (estrogen-related receptor) et NRF (nuclear respiratory factor) qui activent la transcription du génome mitochondrial (Jornayvaz and Shulman, 2010).

Figure 48. Régulation de l'homéostasie glucido-lipidique par l'adiponectine.

L’adiponectine exerce une action insulino-sensibilisatrice dans l’organisme, notamment en stimulant la production d’insuline par le pancréas. Elle active ensuite le transport et le cataolisme des lipides et des glucides dans le muscle,

via la voie de l’AMPK. Elle inhibe en parallèle toutes les voies anaboliques dans le foie et le muscle. Enfin, elle

favorise les capacités de stockage des lipides par le tissu adipeux. L’adiponectine est donc qualifiée d’hormone hypoglycémiante et hypolipémiante.

5. Les récepteurs ADIPOR : de potentielles cibles thérapeutiques

Il semblerait que l’adiponectine exerce des effets protecteurs et bénéfiques à l’organisme, en participant notamment à la mise en place d’un environnement favorable au maintien de l’homéostasie glucido-lipidique et en limitant la survenue de pathologies telles que le diabète de type 2, l’athérosclérose et les maladies cardio-vasculaires. Ainsi, les effets anti-diabétiques de l’adiponectine ont conduit les scientifiques à rechercher des molécules pouvant mimer les effets de cette adipokine. La molécule AdipoRon a été testée in vitro sur des cellules musculaires. Il a été observé que cet agoniste des ADIPOR est capable de se lier aux deux isoformes ADIPOR1 et ADIPOR2, et d’activer la voie de l’AMPK et du facteur de transcription PPARα. AdipoRon stimule également la biogénèse mitochondriale via l’expression de PGC1-α (Okada-Iwabu et al., 2013). Ces résultats prometteurs ont été confirmés chez la souris, après l’administration orale de cet agoniste. En effet, AdipoRon réduit la résistance à l’insuline, l’intolérance au glucose et les dyslipidémies contribuant à augmenter l’espérance de vie des animaux (Okada-Iwabu et al., 2013).