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CHAPITRE 4: ADAPTATION DU PROGRAMME DE RTT PERSPECTIVE THÉORIQUE

4.2 R ÉSULTATS

4.2.1 Adaptation du modèle logique théorique du programme de RTT pour les TMC

Comme mentionné, le modèle logique théorique d’une intervention met en lumière ses mécanismes d’action, c’est-à-dire, les liens entre son but à long terme et ses objectifs (Champagne et al., 2011a). L’étude de validation de la théorie de programme du programme de RTT a permis de valider les mécanismes d’action du modèle théorique original (Durand et al., 2012a). Comme décrit précédemment, le premier mécanisme d’action du programme de RTT original repose sur l’atteinte de trois objectifs spécifiques qui agissent en interaction pour aider le travailleur en incapacité au travail à développer des « agirs spécifiques au travail » (objectif général 1) et ultimement à retourner au travail (but à long terme) (Durand et al., 2012a). Les trois objectifs spécifiques de ce modèle sont : (1) « la promotion de l’action concertée entre les partenaires » ; (2) ; « l’amélioration des capacités

spécifiques de travail » et (3) « la réduction des contraintes environnementales » (Durand et al.,

2012a; Durand et al., 2003). Dans la littérature portant sur les interventions favorisant le retour au travail des travailleurs présentant des TMC, de nombreux auteurs soulignent l’importance d’atteindre ces trois objectifs pour aider ces travailleurs à retourner au travail (Andersen et al., 2012; de Vries et al., 2012; Dekkers-Sánchez et al., 2011; Noordik et al., 2011; Pomaki et al., 2010). Dans cette perspective, ces trois objectifs spécifiques ont été conservés dans la version préliminaire du modèle théorique du programme de RTT-TMC, explicitant ainsi son premier mécanisme d’action (voir l’annexe A5).

Dans une autre version du programme de RTT, un quatrième objectif spécifique est ajouté au modèle original. Il s’agit de l’objectif spécifique de « la consolidation des acquis du travailleur dans son

milieu de travail » (Durand et al., 2004). Dans la littérature portant sur les interventions offertes aux

travailleurs présentant des TMC, différents auteurs soulignent l’importance des rechutes pour cette population (Andersen et al., 2012; de Vries et al., 2012; Roelen et al., 2010). Ce constat suggère ainsi de conserver cet objectif spécifique dans la version préliminaire du modèle théorique du programme de RTT-TMC pour « maintenir les agirs spécifiques au travail » (objectif général 2). Le maintien des agirs spécifiques au travail se définit comme la poursuite dans le temps de la réalisation des tâches en milieu naturel et de l’adoption des comportements appropriés et attendus (Kielhofner et al., 1999). L’ajout de cet objectif spécifique dans la version préliminaire du modèle théorique représente ainsi le deuxième mécanisme d’action du programme de RTT-TMC (voir l’annexe A5).

L’analyse de contenu des articles a aussi fait ressortir différents éléments devant être considérés pour atteindre les quatre objectifs spécifiques du modèle. Ainsi, les résultats de la revue de la littérature ont permis d’expliciter quatre mécanismes d’action intermédiaire, soit un mécanisme pour expliquer

l’atteinte de chaque objectif spécifique du programme de RTT-TMC. Les prochains paragraphes présentent chacun de ses mécanismes.

4.2.1.1 Promouvoir l’action concertée entre les partenaires et le travailleur

L’action concertée se définit comme la mise en commun des ressources et de l’expertise des différents partenaires en vue d’atteindre un objectif commun (Durand et al., 2004). Dans la littérature traitant des interventions visant à favoriser le retour au travail de travailleurs présentant des TMC, trois éléments apparaissent essentiels pour favoriser l’action concertée entre les partenaires et le travailleur. Ces éléments concernent la communication entre les parties impliquées, leurs enjeux et intérêts en regard du retour au travail, ainsi que leur attitude (voir le tableau 3). Plus particulièrement, concernant la communication, des auteurs soulignent que pour être efficace et favoriser le retour au travail, celle-ci doit d’être structurée, planifiée et solliciter l’ensemble des parties impliquées dans l’intervention (Pomaki et al., 2010). Ensuite, concernant les enjeux et intérêts des partenaires, différents auteurs soulignent que les différences potentielles entre les parties impliquées peuvent faire en sorte de limiter l’établissement d’une action concertée lorsque les enjeux et intérêts respectifs ne sont pas partagés ou qu’ils sont incompris par l’une ou l’autre des parties impliquées (Andersen et al., 2012; de Vries et al., 2012; Higgins et O'Halloran, 2012). Enfin, concernant l’attitude du travailleur et des partenaires impliquées dans la démarche de retour au travail, il apparait qu’une attitude positive en regard du retour au travail, provenant soit du travailleur ou d’un des partenaires, peut favoriser la mobilisation des autres parties impliquées vers l’établissement d’une action concertée (Andersen et al., 2012; Dekkers-Sánchez et al., 2011; Lemieux et al., 2011). Ainsi pour atteindre l’objectif spécifique de promouvoir l’action concertée entre les partenaires et le travailleur et ainsi expliciter le premier mécanisme d’action intermédiaire du programme de RTT-TMC, trois objectifs intermédiaires ont été élaborés. Ces objectifs intermédiaires sont formulés comme suit dans la version préliminaire du modèle théorique : a) « soutenir la communication entre le travailleur et

les partenaires » ; b) « soutenir la compréhension mutuelle du travailleur/des partenaires aux enjeux/intérêts de chacun en lien avec le retour au travail » et c) « soutenir une attitude positive du travailleur/des partenaires en lien avec le retour au travail » (voir l’annexe A5).

4.2.1.2 Améliorer les capacités spécifiques de travail

Les capacités spécifiques de travail sont les aptitudes à la fois cognitives (ex. : attention, concentration, mémoire, organisation) et physiques (ex. : endurance physique, force musculaire, mobilité) du travailleur lui permettant de réaliser ses tâches au travail (Sandqvist et Henriksson, 2004). La présence et suffisance de ces aptitudes sont les préalables à la réalisation des tâches de travail (Sandqvist et Henriksson, 2004). Comme mentionné précédemment, le programme de RTT

original inclut aussi un mécanisme d’action intermédiaire lié à « l’amélioration des capacités

spécifiques de travail » pour lequel quatre objectifs intermédiaires ont été définis. Dans le modèle

original, ces quatre objectifs intermédiaires sont : (1) « l’amélioration de l’état de santé » ; (2) « la

diminution des peurs face à la douleur et aux mouvements » ; (3) « l’amélioration de la performance physique » et (4) « l’amélioration du sentiment d’efficacité personnel face au travail » (Durand et al.,

2012a; Durand et al., 2004; Durand et al., 2003). Des divergences concernant la poursuite de ces objectifs intermédiaires sont toutefois observées dans la littérature traitant des interventions pour les travailleurs absents en raison d’un TMC. D’abord, il est observé que l’objectif intermédiaire de la « diminution des peurs face à la douleur et aux mouvements » n’est rapporté par aucun auteur comme étant relié à la problématique des TMC. En conséquence, cet objectif intermédiaire n’a pas été inclus dans la version préliminaire du modèle théorique du programme de RTT-TMC. Ensuite cinq éléments sont ressortis de l’analyse de contenu des articles comme étant liés à l’amélioration des capacités de travail des travailleurs présentant des TMC. Ces éléments sont l’état de santé général, la gestion du stress, le sentiment d’efficacité personnel au travail, ainsi que la performance physique et cognitive au travail (voir le tableau 3). Plus particulièrement, la perception d’un bon état de santé général et l’utilisation de saines habitudes de vie, notamment pour le sommeil, sont associées à la perception de meilleures capacités de travail des travailleurs présentant un TMC (D'Amato et Zijlstra, 2010). Des auteurs soulignent également que pour faire face aux demandes variées du travail, les travailleurs présentant un TMC doivent être en mesure de gérer leur stress et leur énergie afin d’établir leurs limites en regard de la réalisation des tâches de travail qui leur sont demandées (Noordik et al., 2011; Norlund et al., 2013). Dans le même sens, l’amélioration du sentiment d’efficacité personnel au travail est aussi considérée par de nombreux auteurs comme étant essentielle à l’amélioration des capacités spécifiques de travail des travailleurs présentant un TMC (Andersen et al., 2012; D'Amato et Zijlstra, 2010; de Vries et al., 2012; Dekkers-Sánchez et al., 2011; Noordik et al., 2011; Norlund et al., 2013). Enfin, pour certains auteurs, il apparait que l’amélioration des capacités spécifiques de travail des travailleurs présentant un TMC doit aussi passer par l’amélioration de la performance physique (D'Amato et Zijlstra, 2010; Salo et al., 2010) et cognitive (Dekkers-Sánchez et al., 2011; Noordik et al., 2011; Slebus et al., 2008). Ainsi, à la lumière des données recueillies, trois des quatre objectifs intermédiaires du modèle théorique original ont été conservés et deux nouveaux objectifs intermédiaires ont été élaborés. Ces cinq objectifs intermédiaires explicitent ainsi le deuxième mécanisme d’action intermédiaire du programme de RTT-TMC et se présentent comme suit dans la version préliminaire du modèle théorique : d) « rétablir l’état de santé général/l’utilisation de saines

habitudes de vie du travailleur » ; e) « améliorer la gestion du stress/de l’énergie/des capacités du travailleur » ; f) « améliorer le sentiment d’efficacité personnel au travail du travailleur » ; g)

« améliorer la performance physique du travailleur » et h) « améliorer la performance cognitive du

travailleur » (voir l’annexe A5).

4.2.1.3 Réduire les contraintes de l’environnement de travail

Les contraintes environnementales réfèrent aux caractéristiques physiques, psychosociales et organisationnelles du milieu de travail qui empêchent le travailleur d’effectuer partiellement ou complètement ses tâches de travail (Loisel et al., 2001). Dans la littérature traitant des interventions visant à favoriser le retour au travail de travailleurs présentant des TMC, deux éléments apparaissent nécessaires pour réduire les contraintes dans l’environnement de travail. Ainsi, selon plusieurs auteurs, la modification de l’horaire et des tâches de travail, ainsi que la présence d’un soutien pour le travailleur de la part du supérieur immédiat et de ses collègues sont considérées comme des éléments importants pour réduire les contraintes de l’environnement de travail des travailleurs présentant des TMC (Andersen et al., 2014; de Vries et al., 2012; Dekkers-Sánchez et al., 2011; Lemieux et al., 2011; Sainsbury et al., 2008; St-Arnaud et al., 2007). Plus particulièrement, il est recommandé que les modifications proposées au travailleur lors d’un retour au travail offrent à ce dernier une marge de manœuvre qui soit suffisante pour favoriser sa progression au travail (Andersen et al., 2012; de Vries et al., 2012). La marge de manœuvre au travail se définit comme « la possibilité ou la liberté dont dispose un travailleur pour élaborer différentes façons de travailler afin d’atteindre ses objectifs de production, et ce, sans effet défavorable sur sa santé » (Durand et al., 2009). Ainsi, à la lumière des données recueillies pour atteindre l’objectif spécifique de réduire les contraintes dans l’environnement de travail et expliciter le troisième mécanisme d’action intermédiaire du programme de RTT-TMC, deux objectifs intermédiaires ont été élaborés. Ces objectifs intermédiaires sont formulés comme suit dans la version préliminaire du modèle théorique du programme de RTT-TMC : i) « soutenir la préparation d’un environnement de travail qui offre au travailleur une marge de

manœuvre suffisante pour favoriser sa progression au travail » et j) « favoriser la présence d’un soutien du travailleur par son supérieur immédiat et ses collègues » (voir l’annexe A5).

4.2.1.4 Consolider les acquis du travailleur dans son milieu de travail

La consolidation des acquis du travailleur réfère à la stabilité et au maintien des capacités développées pendant le programme, ainsi qu’à l’appropriation par le travailleur de l’utilisation des différentes stratégies de gestion et de résolution de problème (Durand et al., 2004). Dans la littérature portant sur les interventions visant à favoriser le retour au travail des travailleurs présentant des TMC, la consolidation des acquis apparait favorisée par la généralisation des acquis à l’ensemble des tâches régulières de travail (Andersen et al., 2014; de Vries et al., 2012), par la gestion du travailleur des situations risquant de compromettre le maintien de ses acquis en emploi (de Vries et al., 2012), ainsi

que par la communication adéquate du travailleur aux différents partenaires de ses besoins en matière d’aménagement et de soutien (Andersen et al., 2014). Bien que peu discutés dans les études, ces éléments sont apparus essentiels à inclure dans le modèle théorique du programme de RTT-TMC considérant l’importance des rechutes pour cette population (Roelen et al., 2010). Dans cette perspective les objectifs intermédiaires suivants ont été élaborés afin d’expliciter le quatrième mécanisme d’action intermédiaire du programme de RTT-TMC. Dans la version préliminaire du modèle théorique, ces objectifs intermédiaires se lisent comme suit : k) « soutenir le travailleur dans

la généralisation de ses acquis à l’ensemble de ses tâches de travail » ; l) « soutenir le travailleur dans la gestion des situations problématiques en lien avec le maintien au travail » et m) « soutenir le travailleur dans la communication de ses besoins d’aménagements et de soutien nécessaires au maintien au travail » (voir l’annexe A5).

En résumé pour l’adaptation du modèle logique théorique, la revue de la littérature a permis d’expliciter deux mécanismes d’action liés à l’atteinte des objectifs généraux et du but à long terme, de même que quatre mécanismes d’action intermédiaires liés à l’atteinte des objectifs spécifiques (voir l’annexe A5). Cette revue de la littérature ne permet pas cependant de savoir si tous les objectifs intermédiaires doivent être poursuivis pour atteindre respectivement chacun de leur objectif spécifique. Un résultat similaire a également été obtenu par Durand et al. (2012a) concernant le mécanisme d’action lié à l’amélioration des capacités spécifiques de travail dans le programme de RTT original.

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