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I. 4.1.2.3. Les pourritures molles

I.5. Valorisation des extractibles de bois

I.5.2. Activités antioxydante et antiradicalaire des extractibles

Les radicaux libres sont définis comme étant des atomes ou des molécules portant un électron

non apparié. Cette configuration électronique rend ces éléments très réactifs du fait de la tendance

de cet électron à se réapparier, déstabilisant ainsi d’autres molécules. Les molécules ainsi

transformées conduisent à leur tour à de nouveaux radicaux libres et initient ainsi différentes

réactions de dégradation oxydante. Ces phénomènes concernent aussi bien le domaine des

matériaux que celui du vivant. Ils sont produits par un grand nombre de mécanismes tant

endogènes, qu’exogènes. Les radicaux libres ont pu être mis en évidence pour la première fois

grâce à l’analyse de résonnance paramétrique électronique (RPE) des échantillons ayant été

exposés à une source lumineuse à différentes intensités et différents temps d’exposition (Hon et

Ifju, 1978). A l’état naturel, il n’existe pas de radical libre dans le bois sa présence reflète la

dégradation du matériau (Hon et al, 1980). Les principales sources de dégradation du bois

induisant les radicaux libres dans leurs processus de dégradation sont la lumière dans la

photodégradation du bois et les microorganismes avec leurs processus de dégradation

enzymatique. Ces radicaux libres peuvent ensuite migrer en profondeur dans le bois entraînant

une dépolymérisation et des dégâts en profondeur (Feist et Hon, 1984). On définit la

photodégradation comme étant un phénomène de surface qui dépend entre autres de la densité

du bois et du temps d’exposition. Elle a permis de mettre en évidence que l’intensité de formation

des radicaux libres était dépendante de la longueur d'onde donc de l’énergie du photon. Elle suit

alors la cinétique d’une réaction Norrish de type I par dégradation homolytique des liaisons

carbone-carbone adjacentes au carbone alpha du composé carbonylé. C’est la lignine qui est donc

impliquée et permet la formation des radicaux libres participant à la dégradation de la cellulose

et des hémicelluloses (Derbyshire et Miller, 1981). Les polysaccharides sont aussi sujets à la

photodégradation. Mais la distinction entre hémicelluloses et cellulose est difficilement réalisable

à l’aide des techniques analytiques actuelles. Les études ont démontré que la lignine était la plus

sensible à ce type de dégradation avec un pic d’absorption à 280 nm jusqu’à 400 nm (Pandey,

2005a) dû à la présence des groupements aromatiques et phénoliques qui absorbent fortement

dans les UV (Kalnins, 1984). C’est le cas des chromophores donnant la coloration du matériau.

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Sa dégradation tend à rendre la surface du bois plus hydrophile (Williams, 2005). Sur le plan

macroscopique, les cibles de la phtotodégradation sont essentiellement les chromophores de la

lignine qui entraînent un changement de la coloration du bois par formation des groupements

chromophores secondaires. Cette coloration du bois dépend de la longueur d’onde, de la

température et de l’intensité (Pandey, 2005b). Sur le plan microscopique, la caractérisation de la

dégradation du matériau confirme que la lignine est la plus altérée par la photodégradation. Elle

se retrouve principalement dans la lamelle moyenne à hauteur de 73 % et de 16 % dans les parois

secondaires des trachéides. La destruction de la lignine entraîne donc une perte de cohésion entre

les fibrilles (Volkmer et al, 2013) et donc entre les cellules, On parle alors de délamination (Singh

et Dawson, 2003; Williams, 2005). En fonction de l'environnement, de nombreux

microorganismes tels que les champignons de pourritures brunes ou blanches sont capables de

coloniser et de dégrader le bois. Ils sont ubiquitaires et ont un impact direct sur la qualité du bois,

sur son utilisation ou sa durée de vie. Ce sont des organismes eucaryotes et hétérotrophes qui

doivent donc trouver une source externe de matière organique pour pouvoir vivre et se

développer. Les composés lignocellulosiques , les saccharides des parenchymes du bois d’aubier

et les extractibles présents dans le bois peuvent alors être considérés comme des sources de

nutriment. A l’échelle microscopique, ces champignons filamenteux sont constitués de thalles

composés d'une multitude de sous-structures appelées hyphes. C'est l'assemblage de nombreux

thalles qui permet à l'échelle macroscopique d'avoir le mycélium. L'infection du bois par ces

champignons commence par la pénétration des hyphes dans la paroi cellulaire. Cela permet la

sécrétion d'un cocktail enzymatique qui oxyde les chaines des composés aromatiques et facilite

leur métabolisation (Bouslimi et al, 2014). Pour pallier ce problème, l’on apporte en aide à ce

système de défense des antioxydants exogènes naturels ou synthétiques. Ces molécules agissent

en piégeant les radicaux libres transformant ces derniers en entités stables justifiant l’intérêt

croissant sur la recherche de molécules antioxydantes. On peut définir les antioxydants comme

étant des substances qui inhibent ou ralentissent l’oxydation d’un substrat. Ces derniers sont

présents sous différentes formes et sont susceptibles d’intervenir soit en prévention de la

formation des radicaux libres, soit pour participer à leur élimination (antioxydants primaires et

secondaires). Les antioxydants sont présents naturellement dans notre alimentation (fruits,

légumes, thé, vin rouge, cacao et café). Dans la conservation des aliments, les aliments lipidiques

résistent moins à l’oxydation par l’oxygène. Au niveau de l’industrie agroalimentaire, différents

antioxydants synthétiques sont officiellement autorisés et utilisés tels que le 2-tert-butyl-4-oxy

anisole ou hydroxyanisol butylé (BHA), le 2,6-ditert-butyl-4-methyl phenol ou hydroxytoluène

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butylé (BHT), le 2-tert-butyl-1,4-benzenediol ou hydroquinone butyle (TBHQ) et le gallate de

propyl (PG) dont les différentes structures sont présentées dans la figure 30.

Figure 30: Structure des antioxydants de synthèse autorisés dans l’industrie agroalimentaire.

Les travaux réalisés par Linderschmidt et al en 1986 et Kalamouni en 2010 sur la toxicité de

certains de ces antioxydants synthétiques notamment le BHT et le BHA sur des rongeurs ont

révélé que ces derniers étaient potentiellement cancérogènes et s’accumulaient dans

l’organisme. Conscient de ces problèmes, il semble opportun de se tourner vers des sources

d’antioxydants naturels moins toxiques et bénéfiques pour la santé. Les antioxydants naturels

sont surtout des composés phénoliques que l’on rencontre dans la quasi-totalité des plantes. Ces

derniers sont issus du métabolisme secondaire des plantes. Ils sont principalement synthétisés

par voie métabolique du «shikimate» qui existe uniquement chez les champignons, les bactéries

et les plantes. Ces composés polyphénoliques sont capables de piéger des espèces radicalaires,

de chélater les métaux comme le Fer et le Cuivre connus comme agents pro-oxydants. Ces

composés phénoliques peuvent aussi interagir avec des cibles protéiques leur conférant d’autres

propriétés telles que : insecticide, fongicide, fongistatique, termicide, nématicide en plus des

activités antioxydantes. Les structures de quelques antioxydants naturels rapportées dans la

littérature sont présentées dans la figure 31 (Pietta, 2000 ; Moure et al, 2001).

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Figure 31: Structures de quelques antioxydants naturels.

Aujourd’hui, les antioxydants naturels sont largement sollicités et utilisés dans plusieurs

domaines comme la diététique, l’agroalimentaire, la cosmétologie, le domaine médical et

l’industrie moderne. C’est le cas de l’acide ascorbique (vitamine C), du tocophérol (apparenté

à la vitamine E) qui sont utilisés dans l’industrie agroalimentaire (Kalamouni, 2010 ; Taga et

al, 1984 ; Pérez-Bonilla et al, 2006 ; Altarejos, 2005).