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Cette immunité innée est le pilier central du développement de l’athérosclérose, puisque les macrophages, cellules phagocytes, sont les cellules principales de la plaque. Nous nous sommes ainsi focalisés davantage sur ces derniers. Tout au cours du développement de la plaque, des récepteurs PRRs à la surface des macrophages sont activés. La saturation des cellules spumeuses en cholestérol intracellulaire est responsable de l’activation d’un cercle vicieux inflammatoire qui va promouvoir la sécrétion de ligands signaux de « danger » dans la paroi artérielle, allant vers une inflammation sans cesse

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augmentée et le recrutement de toujours plus de monocytes, se différenciant en macrophages, se transformant en cellules spumeuses…

Le procédé même d’internalisation des LDL modifiées par les SRs va pouvoir stimuler l’inflammation. L’implication d’autres PRRs, les Toll-Like Recepteur (TLRs), a récemment été étudiée. Ces récepteurs, présents à la membrane des macrophages (mais également des cellules épithéliales) reconnaissent une grande variété de PAMPs (Pathogen associated molecular patterns) et sont les mieux caractérisés. Ils vont, une fois activés, transduire un signal via la myeloid differentiation primary response protein 88 (MyD88) ou le TIR domain-containing adaptor inducing IFNβ (TRIF), qui aboutira au déclenchement de l’inflammation et à la sécrétion de cytokines, principalement via l’activation du facteur de transcription NF-κB. Les souris MyD88-/- apoE-/- développent en effet beaucoup moins d’athérosclérose que les souris apoE-/- (Bjorkbacka H. et al, Nat Med 2004) ; il est cependant difficile d’en faire une cible thérapeutique vu son rôle extrêmement large dans le déclenchement de l’inflammation. Ils sont ainsi exprimés en particulier par les macrophages et les cellules endothéliales, et seront davantage détaillés partie IIIA1.

Le rôle de chaque TLR a été décrypté dans l’athérosclérose (Figure 21) ; leur expression est en effet augmentée dans les lésions chez l’humain et chez la souris. Chez le macrophage, TLR2 et TLR4 semblent émerger comme les principaux médiateurs de l’inflammation : leur délétion chez des souris protège les animaux du développement de l’athérosclérose.

- Les souris LDL-R-/-

TLR2-/- développent moins d’athérosclérose (Mullick AE., J Clin Invest 2005) ; dans des macrophages primaires issus d’athéromes humain, son blocage empêche également l’activation de NF-κB et des métalloproteinases de la matrice (MMPs), d’autres facteurs délétères (Monaco C. et al, Circulation 2009). Enfin, un mécanisme de reconnaissance des LDLox impliquant TLR2 et CD36 favoriserait également l’apoptose en induisant un stress RE (Seimon TA. et al, CellMeTable 2010).

- Les souris apoE-/-

TLR4-/- ont moins de monocytes au niveau des lésions et développent moins d’athérosclérose (Michelsen KS. Et al, Proc Natl Acad Sci 2004). En effet, TLR4 reconnait les LDLox très peu oxydées pour, notamment, déclencher une micropinocytose (Choi SH. Et al, Circ res 2009). Egalement, un complexe formé

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de TLR4 , TLR6 et CD36 reconnait les LDLox et promeut l’inflammation. (Stewart CR. et al, Nat Immunol 2010).

L’internalisation des LDLox participe donc déjà naturellement à l’activation inflammatoire des macrophages. D’autres PRRs, les nucleotid-binding oligomerization domain (NOD)-like receptors (NLRs), complexes protéiques intracellulaires ou inflammasomes, constituent un verrou supplémentaire à l’inflammation. Leur activation, en particulier celle de NLRP3 dans l’athérosclérose, est nécessaire à la sécrétion de certaines cytokines pro-inflammatoire, notamment IL-1β, qui aurait un rôle prépondérant dans le développement de la maladie (Duewell P. et al, Nature 2011). Elle dépend de la cristallisation du cholestérol, qui a lieu dans la lésion ou dans les macrophages. Les voies de signalisation de l’inflammation telles que NF-κB, l’inflammasome et toutes les cytokines sécrétées ou détectées qui en découlent, seront détaillées chapitre III.

Enfin, intervient également dans le développement de l’athérosclérose la polarisation des macrophages par les stimuli TLR mais également en provenance des lymphocytes T. Ces signaux font acquérir aux macrophages différenciés des phénotypes particuliers, notamment par l’activation d’un programme transcriptionnel particulier (Figure 6, Tableau 3). On identifie :

- Les macrophages « naïfs »,« résidents » ou M0, seulement différenciés par du M-CSF - Les macrophages « classiques », M1 ou dits « pro-inflammatoires ». Originaires en majorité des monocytes LY-6Chigh ou CD14+CD16-. Ils sécrètent des cytokines pro-inflammatoires ainsi que des ROS.

- Les macrophages « alternatifs », M2 ou anti-inflammatoires. Contrairement aux M1, ils résolvent l’inflammation via la sécrétion de cytokines anti-inflammatoires. Mais leurs phénotypes, récemment remis en cause, est en réalité hétérogènes, au niveau de leur fonction comme au niveau de leur capacité à faire progresser l’athérosclérose (sous catégories détaillées Figure 6).

- De nouveaux « profils » ont été décrits récemment : les « M4 », différenciés par le CXCL4 des plaquettes, pro-athérogéniques (Gleissner CA. et al. J immunol 2010) ; les macrophages « Mhem », spécialisés dans le traitement du fer et de l’hémoglobine, exprimant IL-10 et HO-1 (Boyle JJ. Et al, Am J Pathol 2009) ; les macrophages Mox abordés ci-dessous.

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Figure 6 – La polarisation des macrophages

(Mantovani A. et al, Trends Immunol 2004 ; Hoeksema AM. et al, Curr Atheroscler Rep 2012)

Les différents types de macrophages polarisés sont listés ici. En rouge, les macrophages M1, caractéristiques d’une polarisation Th1/Th17, pro-inflammatoires. En bleu, les M2, plus hétérogènes, induits par la polarisation Th2/Treg. Leur action est anti-inflammatoire et promeut la résolution de l’inflammation. En vert, de nouveaux profils de macrophages polarisés, vers une fonction type particulière. Ces macrophages peuvent néanmois être rapprochés d’un grand « sous-types » de polarisation classique.

Des analyses histologiques de plaques humaines ont démontré que les différentes sous-populations de macrophages occupent des endroits et des fonctions différents dans la plaque (Chinetti-Gbaguidi G. et al, Circ Res 2011). Les LDLox induiraient seules une polarisation intermédiaire, puisqu’en plus de l’activation des TLRs fortement inflammatoire elle pourrait stimuler l’expression du facteur arginase-1, marqueur M2 (Gallardo-Soler A. et

M1

Macrophage « classique »

IL-12high/ IL-23high/ IL-10low

iNOS IL-1β TNFα ROS Th1 response Type2 inflammation Death Killing pathogens and

tumors IFNγ +/- LPS, TNF

IL-4 +/- IL-1 +/- IL-10

M2a «alternative » M2b « type II » M2c « deactivated » IL-10 SR-A IL-1RA IL-10 TGFβ MMP s PTX3 IL-10 ++ TNF IL-1 IL-6 TII inflammation Allergy, parasites Immunoregulation Th2 activation Tissue remodeling Matrix deposition M2 Macrophages « alternatifs »

IL-12low/ IL-23low/ IL-10high

Arginine 1 Mannose-R Galactose R Lymphocyte T Th1 Th2 Macrophage « naïf » M-CSF Th2 response Platelets CXCL4 M4 ? LDLox Mox HO-1Nrf2 Anti oxs IL-1β Mhem

M2c-like? HO-1IL-10

CD163 ? Safe haemoglobin disposal Anti-oxydants

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al, Mol Endocrinol 2008), certains ayant même jusqu’à proposer un phénotype alternatif « Mox » pour décrire ces macrophages de la plaque, caractérisés par l’activation d’un facteur de transcription, Nrf2, lui-même activant l’expression d’antioxydants comme la thioredoxine reductase 1 (Kadl A. et al, Circ Res 2010). Les facteurs de transcription sont en effet proposés comme régulateurs des polarisations de macrophage dans l’athérosclérose. NR4A1 (Hanna RN. Et al, Nature Immunol 2011), KLF-4 (Liao X. et al, J Clin Invest 2011) ou PPARγ ( Chinetti-Gbaguidi G. et al, Circ Res 2011) favorisent par exemple la polarisation en M2 et protègent aussi du développement de l’inflammation et de la plaque. Les voies de signalisation gouvernant cette polarisation du macrophage sont nombreuses et nécessitent encore des recherches.