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1.5 Activation de l’AMPK : une cible thérapeutique potentielle ?

1.5.2 Activateurs pharmacologiques

L’utilisation d’activateurs et d’inhibiteurs pharmacologiques a rendu possible l’identification des cibles en aval de l’AMPK. Il y a encore quelques années, ces composés pharmacologiques étaient peu nombreux. Puis, les scientifiques ont démontré que les agents anti-diabétiques de la classe des biguanides et des thiazolidinediones exerçaient leurs effets anti-hyperglycémiques et anti-hyperlipidémiques en activant l’AMPK (Fryer et al., 2002;

Zhou et al., 2001). Cette découverte a suscité un vif intérêt dans le développement de

nouveaux activateurs de l’AMPK. Ainsi, ces dernières années, un nombre grandissant de composés modulant la phosphorylation de l’AMPK ont été identifiés.

75 1.5.2.1 Les biguanides

Les biguanides (Metformine, Phenformine, Galegine) stimulent la capture du glucose par les muscles tout en inhibant la néoglucogenèse et la lipogenèse hépatiques, ce qui permet l’amélioration de la sensibilité à l’insuline (Zhou et al., 2001). La Metformine est l’agent-antidiabétique le plus utilisé. Elle réduit la glycémie sans stimuler la sécrétion d’insuline. Bien qu’elle soit administrée depuis 1957, les mécanismes par lesquels la Metformine abaisse le glucose et les lipides ne sont pas encore tout à fait clairs. Zhou et al. ont montré que les effets bénéfiques de la Metformine étaient AMPK-dépendants (Zhou et al., 2001). Par ailleurs, il semble que la Metformine n’active pas directement l’AMPK, mais elle agirait en inhibant le complexe I de la chaîne respiratoire mitochondriale, suggérant une activation indirecte de l’AMPK en augmentant le ratio AMP/ATP intracellulaire (Owen et al., 2000). Hawley et al. ont montré que le mécanisme d’action de la Metformine semble également impliquer la protéine kinase PKCζ qui phosphoryle LKB1 sur la Ser428. Cette action favorise l’export nucléaire de LKB1 puis l’activation de l’AMPK par ce dernier (Xie et al., 2008). Par contre, certains effets de la Metformine comme l’inhibition de la néoglucogenèse hépatique, semblent à la fois LKB1 et AMPK-indépendants, suggérant donc l’activation d’autres voies de signalisation par cet agent anti-diabétique (Foretz et al., 2010).

1.5.2.2 Les thiazolidinediones (TZDs)

Les thiazolidinediones (Troglitazone, Pioglitazone, Rosiglitazone) augmentent l’utilisation du glucose par le muscle squelettique et diminuent la production hépatique du glucose. Le mécanisme d’action n’est pas encore bien élucidé. Ces agents insulino-sensibilisateurs ont la faculté de se fixer sur le facteur de transcription PPARγ (principalement présent dans le tissu adipeux) afin de stimuler la différentiation adipocytaire, la synthèse et le transport des acides gras ainsi que la synthèse des hormones dérivées du tissu adipeux (leptine, adiponectine) (Lehmann et al., 1995). En somme, les effets des TZDs concourent à remodeler la répartition des lipides depuis la circulation, le foie et le muscle vers le tissu adipeux. En parallèle, la libération des acides gras libres et les hormones pro-inflammatoires (TNFα et résistine) est inhibée, ce qui réduit l’insulino-résistance (Yamauchi et al., 2001). Il a été proposé que les TZDs activaient l’AMPK grâce à la libération d’adiponectine par le tissu adipeux en activant PPARγ (Kudoh et al., 2011; Merrill et al., 1997). Toutefois, de

76 nombreuses études ont observé une amélioration de la sensibilité à l’insuline indépendamment de PPARγ et de leurs effets sur les adipocytes. En effet, dans des cellules musculaires isolées, l’AMPK était activée par les TZDs favorisant le transport du glucose tandis que l’inhibition de l’ACC stimulait l’oxydation des acides gras. In vivo chez le rat, les TZDs activaient l’AMPK dans le muscle, le tissu adipeux et le foie (LeBrasseur et al., 2006). Les effets des TZDs sont donc probablement AMPK-dépendants. Concernant leur mécanisme d’action, ils pourraient agir comme les biguanides, en inhibant le complexe I de la chaîne respiratoire mitochondriale (Brunmair et al., 2004).

1.5.2.3 L’AICAR

Le 5-aminoimidazole-4-carboxamide-1-β-D-ribofuranoside (AICAR) est un activateur souvent utilisé lors des expérimentations in vitro car il pénètre facilement dans la cellule (Corton et al., 1995). Il peut également être utilisé in vivo mais dans une moindre mesure que la Metformine (Pencek et al., 2005). L’AICAR est rapidement phosphorylé en analogue de l’AMP, le ZMP. L’accumulation de ZMP aboutit à l’activation de l’AMPK en mimant les effets de l’AMP: l’activation allostérique de l’AMPK, la phosphorylation du résidu Thr172 et l’inhibition de sa déphosphorylation. Ainsi, l’utilisation d’AICAR a permis de caractériser les effets inhibiteurs de l’AMPK sur l’ACC et sur l’HMGCoA réductase dans les hépatocytes du rat et dans les adipocytes (Sullivan et al., 1994). Dans le muscle de rat, l’AICAR stimule la capture du glucose et l’oxydation des acides gras, alors que dans le foie, ce composé inhibe la néoglucogenèse (PEPCK et G6Pase) en dégradant le facteur de transcription FOXO1(Barthel

et al., 2002; Lochhead et al., 2000; Merrill et al., 1997). Ces effets sont AMPK-dépendants.

Cependant, les résultats obtenus par l’utilisation de cet activateur devraient être validés par d’autres techniques, car l’action du ZMP n’est pas complètement spécifique à l’AMPK et pourrait réguler d’autres enzymes indépendamment de l’AMPK, comme par exemple la glycogène phosphorylase participant à la glycogénolyse (Longnus et al., 2003), et la fructose-1,6-biphosphatase (Vincent et al., 1991) intervenant dans la glycolyse et la néoglucogenèse.

1.5.2.4 Le composé C (inhibiteur)

Le composé C est un inhibiteur de l’AMPK, réversible et compétitif de l’ATP. Lorsque les cellules sont soumises à différents stimuli AMPK-dépendants (activateurs pharmacologiques ou physiologiques), le composé C n’est plus capable d’inhiber

77 complètement l’AMPK. Ainsi, l’addition simultanée de composé C avec l’AICAR ou la Metformine, permet de limiter l’activation de l’AMPK par ces activateurs. Par contre, l’activation de l’AMPK par le dinitrophénol persiste en présence du composé C (Zhou et al.,

2001). D’autre part, le niveau d’inhibition du composé C diffère d’un tissu à l’autre : par

exemple, l’inhibition de l’AMPK est moins importante dans le muscle squelettique que dans les hépatocytes (Funai et Cartee, 2009; Zhou et al., 2001). Cela pourrait être lié à une spécificité des sous-unités de l’AMPK puisqu’elles sont tissu-spécifique. Les effets du composé C sont contraires à ceux induits par les activateurs de l’AMPK. Cet inhibiteur de l’AMPK réduit efficacement l’oxydation des acides gras et le transport du glucose dans le muscle ainsi que la néoglucogenèse hépatique (Merrill et al., 1997; Zhou et al., 2001). Cependant, quelques études ont montré que le composé C inhibe également d’autres protéines kinases, tel que, ERK1/2 et PHK (Bain et al., 2007). Ainsi, les effets cellulaires induits par le composé C devraient être étudiés et évalués avec soin.

D’autres alternatives comme les techniques de biologie moléculaire (e.g. suppression de l’expression de l’AMPK en utilisant des ARNs d’interférence ou l’utilisation des mutants dominants négatifs) permettraient de résoudre ce problème de spécificité.

En résumé, l’activation de l’AMPK, soit physiologique (en particulier par l’exercice physique) soit pharmacologique, permet d’atténuer les anomalies métaboliques comme le DT2, le syndrome métabolique et peut-être l’obésité.

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