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Accompagnement des familles autour de l’annonce d’un handicap

I. Avant trois ans, ouvrir davantage les modes d’accueil individuels et

2. soutien à la parentalité

2.1. Accompagnement des familles autour de l’annonce d’un handicap

Pour tous les enfants en situation de handicap et leur famille, le moment de l’annonce du diagnostic marque une bascule, que celle-ci ait lieu durant la gestation, à la naissance, quelques mois ou plusieurs années après la naissance de l’enfant (même si parfois, quand le diagnostic arrive après une longue errance, il peut être une source de soulagement). La manière, la personne, le climat et le contexte dans lequel le diagnostic va être amené, plus qu'annoncé dans la plupart des cas, aura des incidences sur la suite et le marquage dans l'histoire de vie de l'enfant et la mémoire de la famille.

Chacun vivra ce moment à sa manière et se le remémorera différemment : « un choc, un tremblement de terre, un soulagement, un brouillard », sont des termes utilisés par les parents.

La charge émotionnelle et le poids de la responsabilité n’épargnent pas les professionnels. Si certains ne sont, ou ne se sentent, pas toujours à la hauteur de ce qui se joue, d’autres sont remarquables.

Mais les récits des familles et de certains professionnels montrent que lors des consultations on parle au parent, souvent devant l’enfant sans lui adresser la parole, de même pour les frères et sœurs venus accompagner la famille à la consultation. Si les recommandations d'attention à ce que vivent les parents ont progressé en revanche, quand l'enfant est très petit, il est encore très rare que l'on s'adresse à lui-même, alors même que plus il est jeune plus il ressent les états

affectifs et les bouleversements de ces proches sans les comprendre. De même, lors de l'annonce de résultats, bilans, hypothèses, il est rarissime qu'on s'adresse, informe, écoute et soutienne les frères et sœurs. Les progrès magistraux de la science et de la médecine cohabitent ainsi dans les pratiques actuelles avec des points aveugles aux connaissances en psychologie élémentaire de l'enfant. Ce n'est pas une fatalité et des initiatives multiples d'humanisation des procédures voient le jour. Une enquête menée par le Centre Technique National d’Etudes et de Recherches sur les Handicaps et les Inadaptations de 2005131 montre que le diagnostic sera plus difficile à accepter s’il est tardif et divergent en fonction des acteurs. La même enquête met en évidence les conséquences des propos du corps médical sur le vécu des parents132.

Une circulaire relative à l’accompagnement des parents et à l’accueil de l’enfant lors de l’annonce pré et postnatale d’une maladie ou d’une malformation existe cependant133. Cette circulaire semblerait méconnue par les services comme nous le verrons ci-après. La circulaire prévoit des méthodes et des principes à respecter en fonction du moment de l’annonce.

Dans le cas d’une annonce prénatale, la circulaire énonce « les parents veulent la vérité et y ont droit. Ils attendent des médecins une attitude humaine et sincère. Ils n’admettent ni le silence ni le discours fuyant ». Elle énonce le but de la consultation médicale avant la prescription des analyses pour établir un diagnostic qui est d’informer la femme et le couple de manière compréhensible : les caractéristiques des pathologies, les risques inhérents au prélèvement et l’évaluation des risques pour l’enfant à naître. Il s’agit d’aborder l’ensemble des éventualités, dont les résultats défavorables. Si une anomalie est mise en évidence, le médecin informe les parents sur les conséquences prévisibles et organise l’accompagnement du couple en liaison avec le centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Le temps est nécessaire pour expliquer les constats, répondre aux questions posées et maintenir la relation de confiance durant cette période difficile pour le couple.

Les investigations complémentaires réalisées dans les meilleurs délais et le travail en équipe de l’équipe pluridisciplinaire permettent d’éviter les avis divergents. La communication hôpital-médecin traitant, un unique référent (le hôpital-médecin obstétricien le plus souvent) et la possibilité de proposer aux parents d’entrer en relation avec des associations de parents d’enfant handicapés au moment opportun pour eux, peut être une aide pour lutter contre la sensation d’abandon, de dévalorisation et de culpabilité.

En rappelant que l’état de choc peut empêcher les parents d’entendre ou de comprendre les informations données, la circulaire rappelle que celles-ci doivent être répétées et les réponses aux questions posées, renouvelées au besoin. Il est également rappelé que du temps doit être laissé aux parents pour exprimer leurs émotions, réfléchir et s’exprimer. Enfin, la prudence s’impose car les paroles des médecins et spécialistes peuvent s’imprimer et dans l’éventualité où l’anomalie suspectée n’est pas confirmée, l’accompagnement durant la grossesse doit prendre en compte l’inquiétude suscitée par la suspicion initiale.

131 CTNERHI, « Le vécu des parents d’enfant(s) handicapé(s), phase III de l’étude ‘Trajectoires des enfants passés en CDES’, enquête qualitative par entretiens » (2005), p. 112

132 CTNERHI, « Le vécu des parents d’enfant(s) handicapé(s), phase III de l’étude ‘Trajectoires des enfants passés en CDES’, enquête qualitative par entretiens » (2005), p. 165

133 CF Annexe 12 : circulaire n°2002/239 du 18 avril 2002 relative à l'accompagnement des parents et à l'accueil de l'enfant lors de l'annonce pré- et postnatale d'une maladie ou d'une malformation, NOR : MESP0230194C

Dans le cas d’une annonce post-natale, la circulaire commence par exposer qu’en cas de difficultés ou de déficiences à la naissance, il est important de ne pas parler d’emblée de handicap et poursuit « quels que soient le moment de l’annonce, la nature et la gravité de l’anomalie, la manière de communiquer le diagnostic aux parents est déterminante pour l’avenir de l’enfant et de sa famille ».

La circulaire énonce ensuite les principes à respecter lors de l’annonce à la naissance : aménager les conditions de l’annonce initiale (choisir le lieu et le moment, avec les deux parents, en présence du bébé si possible), communiquer autour des certitudes et incertitudes (termes accessibles, s’adapter aux questions, insister sur la variabilité d’expression du handicap à venir) et préserver l’avenir (mettre l’accent sur les compétences de l’enfant et le rôle des parents dans son évolution en évitant un jugement définitif sur un état ultérieur).

La circulaire détaille également le soutien et l’accompagnement nécessaires aux parents lors de la naissance qui sont : entourer l’enfant, accompagner les parents et organiser un travail en équipe.

Elle explicite également la préparation à la sortie en évoquant les possibilités de prise en charge de l’enfant qui doivent être proposées, et les services et professionnels qui peuvent apporter leur aide.

Les professionnels auprès des enfants et les familles, relatent une réalité bien différente des préconisations de la circulaire. Ils indiquent que souvent un seul parent est informé, et que ce parent traumatisé aura la lourde tâche d’informer le second parent.»134

Certains parents ont reçu le diagnostic au téléphone et ont dû informer l’autre parent :

« Et puis nous y voilà, à ce fameux coup de téléphone. L’archange du malheur parlait d’une drôle de voix, mais j’ai bien compris son message.

[…] Je n’écoutais plus. Comme dématérialisé, j’ai appelé mon épouse. Je l’ai dérangée en plein travail, mais je me suis jamais posé la question de faire autrement. Il fallait que je lui dise aussitôt et j’ai dû prendre aussi peu de précautions qu’on en avait prises pour moi. On a roulé chacun de notre côté vers la maison. Et là, j’ai pu enfin pleurer, ma femme avait déjà pris de l’avance. »135

D’autres, bien qu’étant en présence et dans le bureau du médecin qui procédera à l’annonce du diagnostic, se heurtent à la brutalité des mots lors de l’annonce :

« ‘On sait ce qu’elle à, votre fille, maintenant ! [...] Certains enfants atteignent 12 ans’ ». Quel choc ! Elle n’aurait jamais dû nous dire une chose pareille, jamais ! […] Là, nous nous sommes retrouvés dehors, seuls : il était 20h, on était le vendredi soir, nous ne pouvions nous adresser à personne. »136

134 E. Zinschitz, « L’annonce du handicap : le début d’une histoire, ‘pour que le blé puisse croître il faut d’abord cultiver le champ’ », 2007/2 ACP-PR n°6 pp. 82 à 93 (2007) p. 86

135 O. Raballand, « L’annonce du handicap : d’un pourquoi à un autre », 2007/4 Reliance n°26 p. 128

136 C. Bert, « L’annonce du handicap », mt pédiatrie, vol. 10, n°4, juillet-août 2007, p. 232

Il est donc nécessaire de mieux accompagner les professionnels de santé dans l’annonce du diagnostic. La mesure suivante y contribuera :

Proposition 22 : Appliquer la circulaire du 18 avril 2002 relative à l’accompagnement des parents et à l’accueil de l’enfant lors de l’annonce pré et postnatale d’une maladie ou d’une malformation. La diffuser largement y compris dans les services de l’enfance et les structures concernées par le handicap. Les plates-formes territoriales d’appui nouvellement créées 137 pourront contribuer à cette démarche ainsi que les organismes de formation des professionnels de la santé, de l'éducation, de l'animation et de l'accueil en petite enfance.

De fait, les professionnels de santé qui sont rarement confrontés au fait d’avoir à annoncer une situation de handicap pourraient trouver du soutien auprès des plates-formes territoriales d’appui qui ont été créées par le décret du 4 juillet 2016, relatif aux fonctions d’appui aux professionnels pour la coordination des parcours de santé complexes. En effet, ces plates-formes ont notamment pour missions l’information des professionnels et le soutien à leurs pratiques.138Le Conseil souhaite une mise en place rapide de ces plates-formes, confiée par le décret aux Agences Régionales de Santé, sur la base des initiatives des acteurs du système de santé relevant des secteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Les unités mobiles d’appui et de ressources, composées de professionnels spécialisés qui interviennent en soutien dans les modes d’accueil et dont le Conseil souhaite la généralisation dans chaque département139, pourraient également apporter leur aide.

2.2. Informer les familles et valoriser leur expertise d’usage, favoriser le