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Chapitre 5 Béton projeté à ultra haute résistance initiale

5.5 Résultats Phase 3

5.6.4 Absorption

L’essai d’absorption est couramment utilisé dans l’industrie du béton projeté pour qualifier la qualité du béton projeté. Une étude réalisée en 1987 (Morgan et coll. 1987) a permis d’établir des critères de qualité du béton projeté in situ en fonction de l’absorption et des vides perméables. Le tableau 5.8 présente cette classification tandis que le tableau 5.9 présente le classement des mélanges projetés en fonction des critères de Morgan.

Tableau 5.8 : Critères de qualité de Morgan

Qualité Volume de vide perméable [%] Absorption [%] Excellent < 14 < 6

Bonne 14 - 17 6 - 8

Raisonnable 17 - 19 8 - 9

Marginal > 19 > 9

Tableau 5.9 : Qualification des mélanges projetés en fonction des critères de Morgan Formulations

DRY CSA CV-33 TERN FAST LIANT EAU Absorption Bonne Bonne Bonne Bonne Bonne Bonne Bonne

Vide

perméable ---

Raison-

nable Bonne Bonne Bonne

Raison-

nable Bonne

En général, la mise en place des bétons projetés produits est classée comme « Bonne » selon les résultats d’absorption bouillie et de vide perméable, à l’exception des mélanges CSA et LIANT. Bien que les résultats de vide perméable des mélanges CSA et LIANT soient « Raisonnables », la projection de ces mélanges a produit des bétons aux performances mécaniques adéquates. Il est important de spécifier que bien que les critères de Morgan soient utilisés comme référence dans l’industrie, ceux-ci ont été développés à partir de béton projeté à matrice cimentaire classique, soit à base de ciment Portland et à base de ciment Portland-fumée de silice. Il est donc incertain si ces critères peuvent également s’appliquer à des bétons projetés à base cimentaire non traditionnelle, telles que les OPC-CAC- ̅ et les sulfoaluminates.

Il a été démontré que l’essai d’absorption ne peut détecter efficacement les vides de compaction et qu’un essai de résistance en compression est un meilleur indicateur de la compaction du matériau (Bolduc 2009). Ainsi, avec les résistances en compression obtenues et avec l’absence d’un nombre important de vides de compaction sur le pourtour

des nombreux spécimens carottés, il est possible d’affirmer que le béton projeté a été produit avec une compaction adéquate.

L’expansion remarquée au cours de l’essai d’absorption sur le mélange DRY présente les symptômes d’une attaque sulfatique interne, plus connue sous le nom général d’ettringite différé (DEF). Ce type de problème se manifeste lorsqu’il y a formation hétérogène d’ettringite dans une matrice cimentaire durcie, ce qui crée une expansion globale du système. Cette attaque se produit lorsqu’un béton contenant beaucoup de sulfates, présents sous forme d’ettringite, subit un traitement thermique. L’ettringite est un hydrate stable à température ambiante, mais se solubilise aux alentours de 70°C (Collepardi 2003). Lors de la réalisation de l’essai d’absorption, les rondelles sont entreposées dans une étuve à plus de 100°C durant de la phase de séchage. L’ettringite se retrouve donc solubilisée durant l’essai.

Il s’ensuit que les matrices contenant majoritairement de l’ettringite devraient toutes subir une expansion qui rend impossible la réalisation de l’essai ASTM C 642. Cependant, les mélanges CSA, TERN et CV-33 sont tous, en théorie, composés majoritairement d’ettringite, mais n’ont pas subi d’expansion significative (pas de fissuration). Le mélange développé doit donc posséder une particularité qui le distingue des autres matrices à base d’ettringite.

Afin de trouver des pistes de solution à ce phénomène, il est nécessaire de s’attarder plus en détail à ce qui se produit lors du traitement thermique. Il est démontré que lors de la solubilisation de l’ettringite, l’ion Al se substituent à d’autres ions dans différents hydrates présents dans la matrice (Taylor et coll. 2001). Lorsque la température revient à la normale, la substitution de l’Al subsiste, car le lien créé entre les hydrates et l’ion est très fort. Malgré la présence de SO3 en solution, l’expansion ne peut survenir, car il n’y a pas assez

d’ions Al disponibles pour créer suffisamment d’ettringite.

Une hypothèse expliquant l’expansion du mélange DRY peut être tirée des résultats de diffractions des rayons X. Ceux-ci ont montré qu’à 28j, la matrice contient une portion non négligeable de C3A. Ce composé fournit donc une source d’ion Al2+ qui permet aux ions en

matrice est remplacée par de la cendre volante, la quantité de C3A présente est grandement

diminuée. Il est possible que les C3A présents ne permettent une précipitation suffisante

pour créer de l’expansion. Dans le cas du mélange CSA, la théorie la plus probable expliquant que la matrice n’aie pas subi d’expansion durant l’essai d’absorption est encore le déficit en Al2+. La quantité de sulfates présents dans le mélange est probablement égale à la quantité nécessaire pour hydrater l’ensemble de la Ye’elimite. Il ne reste alors plus d’ions Al facilement accessibles. Pour ce qui est du mélange TERN, les faibles résistances en jeune âge laissent présager une faible quantité d’ettringite produite. Il est donc possible que la quantité de sulfates dans le système ne soit tout simplement pas suffisante pour créer une expansion. Il est important de préciser que ces hypothèses nécessiteraient des analyses supplémentaires afin de les confirmer ou de les infirmer.

Selon les phénomènes observés, il semble donc impossible de réaliser un essai d’absorption selon la norme ASTM C 642 sur un échantillon de béton possédant une matrice cimentaire à base ternaire majoritairement à base de CAC. De par la procédure même, l’essai entraine une forte expansion qui vient empêcher la réalisation de l’essai. L’expansion importante qu’ont subie les spécimens ternaires après un traitement thermique permet d’affirmer que l’utilisation de ce type de béton dans un environnement à haute température pourrait s’avérer très problématique.

Un moyen d’obtenir une valeur d’absorption en respectant les concepts de la norme serait de faire la saturation de l’échantillon avant le séchage. La saturation devrait cependant être réalisée à température ambiante pour ne pas solubiliser l’ettringite. Il serait alors possible de mesurer l’équivalent de la masse après ébullition et ensuite sécher l’échantillon pour obtenir la masse sèche. Cette méthodologie devrait cependant être testée avec des matrices traditionnelles et être comparée à l’essai normalisé pour en déterminer les différences.

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