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1.2 Bande de conduction d’un isolant

1.2.2 Absorption et émission de photons par les électrons de

de conduction

Il est bien connu qu’un électron libre ne peut pas absorber ni émettre de photon, car l’énergie et l’impulsion du système électron+champ ne peuvent être simulta- nément conservées lors d’une telle transition. Pour la même raison, un électron de conduction ne peut pas absorber ou émettre de photon, à moins qu’un troisième corps n’intervienne pour permettre d’assurer la conservation de la quantité de mouvement lors de la transition. Ce troisième corps peut par exemple être une impureté, un défaut, ou un phonon, qui peut être émis ou absorbé au cours de la transition. Dans les isolants à grande bande interdite, du fait du fort couplage électron-phonon, l’absorption par les porteurs libres est principalement due aux phonons [11, 31]. Deux modèles peuvent être utilisés pour traiter ce phénomène.

a- Modèle classique

Ce modèle très simple : il consiste à traiter classiquement le mouvement de l’élec- tron dans le champ électromagnétique, et à introduire dans l’équation du mouve- ment un terme de frottement qui rend compte de façon empirique des collisions avec les vibrations de réseau. Cette équation du mouvement s’écrit :

~(d~k

dt +

~k

τ) = e. ~E exp(iωt) (1.27)

où τ est le temps de relaxation de la quantité de mouvement, dû aux collisions avec les phonons. Les échanges d’énergie entre l’électron et le champ se font alors

de façon continue dans le temps. L’énergie moyenne dEc/dt gagnée par l’électron

par unité de temps se déduit de (1.27) :

dEc dt = e2τ m∗ (1 + ω2τ2) · ~E 2 (1.28)

A partir de cette expression, on peut calculer le coefficient d’absorption d’un isolant contenant une densité N d’électrons de conduction, en fonction du taux de collision. La courbe obtenue est représentée sur la figure 1.7, pour une longueur d’onde de 800 nm (période du champ T≈ 2.3 fs).

10 -17 10 -16 10 -15 10 -14 10 -13 0,0 5,0x10 3 1,0x10 4 1,5x10 4 Période du champ C o e f f i c i e n t d ' a b s o r p t i o n ( c m - 1 ) Temps de relaxation (s)

Fig. 1.7: Coefficient d’absorption à 800 nm en fonction du temps de relaxation τ , pour une densité de porteurs libres de 5 1020 cm−3

.

Le coefficient d’absorption est maximum lorsque τ vaut 1/ω = T/2π, i.e. lorsqu’il est de l’ordre de T/2. Ce résultat s’explique de façon très intuitive [32]. Lorsque τ ≫ T , l’électron peut être considéré comme libre, et se contente donc d’osciller sous l’action du champ, sans gagner ni perdre d’énergie en moyenne. Lorsque τ ≪ T , l’orientation de son vecteur vitesse par rapport au champ électrique change de nombreuses fois pendant un cycle optique, et l’accélération moyenne est encore une fois nulle. Si τ ≈ T/2, en moyenne, le vecteur vitesse change de sens à chaque demi-cycle optique, i.e. à chaque changement de sens du champ, et le gain d’énergie est maximum.

Nous avons vu (Cf. figure 1.6) que les taux de collision avec les phonons dans les

isolants à grande bande interdite sont typiquement de l’ordre de 1 fs−1

(τ ≈ 1 fs). Les lasers ultra-brefs femtosecondes ont généralement des longueurs d’onde dans le proche infrarouge, le cas le plus courant étant λ = 790 nm (laser Ti-Sa), i.e. T de l’ordre de 2 fs. Ce modèle classique nous indique donc que l’absorption par les électrons de conduction d’un isolant excité est très efficace pour ces longueurs d’onde.

Les collisions entre électrons et phonons ont en réalité un caractère aléatoire, qui n’est pas pris en compte par le terme de frottement ~k/τ de l’équation (1.27). Cette équation donne donc seulement le mouvement ”moyen” des électrons dans le champ. La distribution en énergie qui résulte des fluctuations par rapport à ce mouvement moyen peut être calculée en utilisant une équation maîtresse plus complexe, telle que l’équation de Boltzmann, tout en continuant à traiter le mouvement de façon classique [32]. Les électrons qui subissent des collisions

telles que leur taux de gain d’énergie est supérieur à la moyenne (dEc/dt donné

par l’équation (1.28)) sont parfois qualifiés de ”lucky electrons” [32, 33]. b- Traitement quantique

Une autre approche consiste à traiter quantiquement le couplage simultané avec les champs de photon et de phonon. Elle permet de prendre en compte de façon plus rigoureuse le couplage avec le réseau, mais est plus lourde que la précédente. Les échanges d’énergie entre l’électron et le champ ne se font alors plus de façon continue, mais par des séries de transitions discrètes. En utilisant la théorie des perturbations au second ordre, la probabilité totale qu’a un électron d’émettre ou d’absorber un photon s’écrit :

W (|ii) = 2π~ Z f X n hf| HT|ni hn| HT |ii Ei− En 2 δ(Ef − Ei) · dSf (1.29)

avec HT = He−ph+He−ch, où He−phet He−chsont respectivement les hamiltoniens

de couplage avec les phonons et le champ électromagnétique. Lors du passage de l’état |ii à l’état intermédiaire |ni, l’électron a :

– soit émis ou absorbé un phonon, auquel cas le passage de |ni à |fi se fait par émission ou absorption d’un photon.

– soit émis ou absorbé un photon, auquel cas le passage de |ni à |fi se fait par émission ou absorption d’un phonon.

Ces transitions sont appelées transitions indirectes ou collisions électron-photon- phonon (Cf. figure 1.8). Remarquons que l’expression (1.29) inclue également des transitions à deux photons et à deux phonons, que nous ne prenons pas en compte ici.

Photon

Phonon

k

E

BC

BV

Fig.1.8:Absorption d’un photon par un électron de conduction assistée par l’émis- sion d’un phonon (cas particulier de collision électron-photon-phonon).

On peut obtenir une expression analytique du taux de transition total W (|ii) en supposant la relation de dispersion des électrons parabolique et isotrope, et

en utilisant pour He−phles formes phénoménologiques que nous avons présentées

précédemment (Hamiltonien de Fröhlich ou Hamiltonien du potentiel de défor- mation) [11, 29, 31]. Le taux d’émission/absorption de photon correspondant aux transitions assistées par les phonons acoustiques est plus grand d’un ordre de grandeur que pour les phonons optiques. De plus, avec ce modèle, le taux de

transition W (|ii) est proportionnel à λ3, où λ est la longueur d’onde du rayonne-

ment [29].