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Les arylsulfinates sont utilisés dans des substitutions nucléophiles aromatiques SNAr

sur des composés halogénés ou pseudo-halogénés. Pour ce faire, un solvant polaire est requis, comme le DMSO par exemple, avec un chauffage entre 100 et 130 °C comme l’ont montré

Ulman et Urankar (Schéma 62).2

Schéma 62 : SNAr du phénylsulfinate de sodium sur des composés fluorés

Le phénylsulfinate de sodium est aussi en mesure d’effectuer une substitution nucléophile aromatique sur la liaison C–F d’un fluorure d’aryle. Quatre exemples de synthèse de sulfones d’aryle ont été rapportés par cette voie avec des rendements allant de 50% à 95%. Le solvant utilisé est le DMSO avec des températures de réaction allant de 100 à 130 °C pendant 16 h. Un chauffage assisté par micro-ondes, permet avantageusement de diminuer le

temps de réaction à 30 minutes (Schéma 63).3

2 Ulman, A.; Urankar, E. J. Org. Chem. 1989, 54, 4691.

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Schéma 63 : formation de sulfones d'aryle et d'hétéroaryle par chauffage aux micro-ondes

Des bromures, chlorures et fluorures d’aryle pauvres en électrons ont été fonctionnalisés montrant l’utilisation possible de la 4-chloropyridine et de la 2-bromopyridine pour des rendements de substitution de 91% et 46%, respectivement.

Il est possible de varier les substituants sur la partie sulfinate de sodium et ainsi de diversifier les sulfones d’aryle accessibles. Les sels de diaryliodonium peuvent être

fonctionnalisés par réaction dans le DMF à 90 °C pendant 24 h (Schéma 64).4

Schéma 64 : synthèse de sulfones d’aryle et d’hétéroaryle avec des sels de diaryliodonium

Cette méthode a permis d’obtenir une vingtaine d’exemples de sulfones d’aryle avec des rendements allant de 47 à 96%. Elle tolère des groupements donneurs ou attracteurs sur

les deux substrats tels que Me, OMe, Br, Cl, F et NO2. Aucun sous-produit n’est observé en

présence de fonctions halogénées sur l’un ou l’autre des réactifs. Cette méthode se focalise sur

des réactifs arylsulfinates de sodium substitués en position para, mais trois exemples de

sulfones portant un hétéroaryle ont été rapportés couplant une quinoline, pyridine ou thiophène. Les désavantages de cette méthode sont liés à l’utilisation de sels de diaryliodonium, peu disponibles commercialement, très chers (1g = 120 €, pour 1 g d’iodure

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d’aryle correspondant à 8 €, Sigma-Aldrich juillet 2018). Mais surtout, la génération de

déchets stœchiométriques de sels aryle iodés est considérable.

Une sulfone portant un groupement pyridyl peut être synthétisée par SNAr sur des

composés chloropyridine. Originellement Senanayake et coll. ont effectué ce type de couplage à partir de la 2-chloropyridine et du phénylsulfinate de sodium dans un mélange acide

acétique/eau (75 : 25) avec un rendement final de 80 % (Schéma 65).5

Schéma 65 : synthèse d'une sulfone d'hétéroaryle

Une méthode de synthèse plus efficace décrit l’addition de chlorure de

tetra-butylammonium (TBACl) dans le DMAc à 100 °C pour 24 h (Schéma 66).6

Schéma 66 : synthèse de sulfones portant une fonction pyridine

Cette méthode permet de coupler des chloropyridines hautement substituées (R1 =

amide, ester, Me, CN, Br, Cl, CF3, NO2) avec le para-toluène sulfinate de sodium.

Vingt-et-un exemples de sulfones d’hétéroaryle sont formés avec de très bons rendements

au-delà de 75%. Le TBACl permettrait de former l’espèce n-Bu4NSO2Ar à partir du sulfinate

NaSO2Ar. Cette espèce serait plus soluble dans le DMAc que le sulfinate (1.5 mg/mL à

100 °C). Sans cet additif, la conversion chute drastiquement en dessous des 20%. L’ajout

5 Qu, B.; Samankumara, L. P.; Savoie, J.; Fandrick, D. R.; Haddad, N.; Wei, X.; Ma, S.; Lee, H.; Rodriguez, S.; Busacca, C. A.; Yee, N. K.; Song, J. J.; Senanayake, C. H. J. Org. Chem.2014, 79, 993.

100 d’acide chlorhydrique aux pyridines est indispensable pour permettre la formation de sulfones. Il permet d’activer ces substrats par protonation de l’azote, le caractère électrophile du pyridinium formé étant comparativement fortement exalté. Cette méthode permet donc de coupler des chloropyridines portant différents substituants donneurs et attracteurs, elle n’est

décrite que pour l’utilisation du para-toluène sulfinate de sodium.

Ainsi, concernant la sulfonation d’halogénures d’aryle, les synthèses peuvent être globalement difficiles à mettre en œuvre du fait de leur faible réactivité face aux arylsulfinates de sodium. L’utilisation de catalyseur métallique, comme le cuivre, a permis de surmonter cette limitation pour au final montrer de bons résultats avec une plus grande variété de

substrats.7 En général, les conditions au cuivre s’effectuent dans un solvant polaire comme le

DMSO ou le DMF au-delà de 100 °C. Un exemple récent de Zhang et coll. utilise 10% molaire de CuI et 20% molaire d’un ligand naturel la D-glucosamine illustrant bien l’utilité

d’un catalyseur pour l’extension à d’autres halogénures d’aryle fonctionnalisés (Schéma 67).7e

Schéma 67 : couplage d’halogénures d'aryle avec des arylsulfinates de sodium par catalyse au Cu(I)

La base KOAc est utile pour conserver un milieu basique favorisant la complexation

du ligand au cuivre ainsi que sa solubilité en milieu polaire (H2O/DMSO). Cette réaction

permet de coupler des iodures d’aryle substitués par des groupements donneurs et attracteurs avec des rendements au-delà de 75%. Un exemple montre l’utilisation du bromobenzène où un chauffage à 120 °C est nécessaire pour pouvoir obtenir la sulfone de diphényle avec un rendement de 72%. Un avantage de cette réaction est l’utilisation d’un ligand issu de la biomasse qui forme un complexe pouvant être recyclé par simple filtration à température

7 a) Suzuki, H.; Abe, H. Tetrahedron Lett.1995, 36, 6239 ; b) Baskin, J. M.; Wang, Z. Org. Lett.2002, 4, 4423 ; c) Zhu, W.; Ma, D. J. Org. Chem.2005, 70, 2696 ; d) Yuan, Y.; Guo, S. Synlett. 2011, 2750 ; e) Yang, M.; Shen, H.; Li, Y.; Shen, C.; Zhang, P. RSC Adv. 2014, 4, 26295 ; f) Srinivas, B. T. V.; Rawat, V. S.; Konda, K.; Sreedhar, B. Adv. Synth. Catal.2014, 356, 805.

101 ambiante. Il peut ensuite être réutilisé pour la même réaction. Après cinq cycles, une baisse de 30% de rendement est constatée (40%). Celle-ci est attribuée à la solubilité partielle du ligand dans l’eau lors de la filtration et donc à la perte de catalyseur.

Le palladium a aussi été utilisé dans ce type de sulfonation par Parisi et coll.

(Schéma 68).8

Schéma 68 : couplages au palladium entre le para-toluène sulfinate de sodium et des halogénures d’aryle

Le couplage entre des halogénures d’aryle et le para-toluène sulfinate de sodium a été

effectué avec l’utilisation de 2,5% de [Pd2(dba)3], accompagné de 5% de ligand bidendate

Xantphos. Le toluène est utilisé comme solvant avec une température de réaction de 80 °C à 120 °C selon les partenaires respectivement utilisés iodés ou bromés. Cette méthode tolère des

substituants donneurs et attracteurs (OH, Cl, F, CF3, Me, CN, OMe, etc.) placés en différentes

positions de l’halogénure d’aryle.

L’utilisation de bromures et iodures d’aryle riches en électrons requiert l’addition de

chlorure de t-butylammonium (TBACl). A l’inverse, les rendements avec les bromures

d’aryle pauvres en électrons sont plus élevés si du TBACl n’est pas utilisé (Schéma 69).

8 a) Cacchi, S.; Fabrizi, G.; Goggiamani, A.; Parisi, L. M. Org. Lett.2002, 4, 4719 ; b) Cacchi, S.; Fabrizi, G.; Goggiamani, A.; Parisi, L. M. Synlett. 2003, 4 ; c) Cacchi, S.; Fabrizi, G.; Goggiamani, A.; Parisi, L. M.; Bernini, R. J. Org. Chem.2004, 69, 5608.

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Schéma 69 : différentes réactivités des ions sulfinates

Dans le cas des substrats pauvres en électrons n’ayant pas besoin d’additif, les auteurs expliquent cette tendance par la différence des effets des paires d’ions formées avec le

sulfinate. En présence de TBACl (Schéma 69 ; Voie A), le sulfinate n-Bu4NSO2Tol formé

in-situ présenterait une paire d’ions éloignés. L’intermédiaire bromure d’aryle palladium

formé après l’addition oxydante du métal possède un caractère cationique important avec les effets électroattracteurs du brome et des substituants de l’aryle. Il pourrait donc avoir tendance à réagir avec le site le plus électronégatif du sulfinate (l’oxygène) pour former

majoritairement le sous-produit ester de sulfinate. Sans TBACl (Schéma 69 ; Voie C), le

sulfinate de sodium formerait une paire d’ions plus proches qui protégerait l’oxygène avec l’association sodium/oxygène. La réaction du sulfinate avec l’intermédiaire bromure d’aryle palladium impliquerait donc préférentiellement l’atome de soufre pour former les sulfones attendues. Avec des iodures d’aryle ainsi que des bromures d’aryle riches en électrons

(Schéma 69 ; Voie C), l’intermédiaire halogénure d’aryle palladium ne forme pas une espèce

assez électrophile pour être attaquée directement par le sulfinate de sodium. L’ajout de

TBACl est donc nécessaire pour former n-Bu4NSO2Tol. La réaction entre ce sulfinate formé

in-situ avec l’intermédiaire bromure d’aryle palladium serait principalement contrôlée par le caractère mou de l’atome de soufre permettant la formation des sulfones.

103 Bien que permettant la synthèse de nombreux thioéthers, cette méthode est limitée aux iodures et bromures d’aryle. Il existe une alternative à l’utilisation des pseudo-halogènes ou des halogènes avec l’utilisation en couplage oxydant d’acides arylboroniques. Ces conditions permettent de surcroît de diminuer la température des réactions.