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IV. DISCUSSION ET PERSPECTIVES

IV.5 La calréticuline interagit avec le macrophage

IV.5.1 A la recherche des partenaires de surface

Bien que la présence de la calréticuline à la surface des phagocytes soit bien établie, son origine et le mécanisme de son exposition restent jusqu’à présent, malgré quelques efforts (cf. Introduction), mystérieux. Ce n’est pas le cas de la CRT exposée à la surface des cellules en apoptose où plusieurs voies ont tout de même été proposées (cf. introduction). Selon les données présentées dans la partie 3 des résultats, la CRT exogène ajoutée dans le milieu de culture est capable de se fixer sur la surface des macrophages THP1. Or la quantité de CRT augmente dans le milieu extracellulaire des cellules apoptotiques précoces, on peut suggérer par conséquent qu’une partie de la CRT présente à la membrane des phagocytes pourrait provenir de la fixation de celle relarguée par les cellules en apoptose. Une hypothèse serait donc que la CRT des macrophages soit d’origine extracellulaire.

En revanche, les cellules Jurkat en apoptose précoce ainsi que les N IR (résultats non montrés) n’ont pas la capacité de fixer la CRT exogène ajoutée dans leur milieu. Quelles sont donc les molécules susceptibles de fixer la CRT à la surface du macrophage? J’ai commencé évidemment par étudier le récepteur CD91 très cité pour son association avec la

CRT à la surface des phagocytes. L’incubation des macrophages THP1 avec des ligands spécifiques de CD91 (anticorps anti-CD91 ; RAP) pouvant entrer en compétition avec la CRT exogène n’a pas modifié la fixation de la protéine sur ces cellules. Il était donc difficile de conclure sur le rôle de CD91. Pour expliquer ce résultat, nous avons pensé que CD91 pourrait être déjà « occupé » et saturé par la CRT endogène « initialement » exprimée par les macrophages. Cependant, le double marquage membranaire CRT/CD91 effectué sur ces cellules (figure 40) ne montre pas, ou très peu, de co-localisation entre les 2 molécules. Ces résultats suggèrent que la fixation de la CRT exogène se fait probablement par des voies essentiellement indépendantes de CD91 dans mes conditions. Il se peut aussi que lorsque les cellules sont en situation de phagocytose, les choses changent et des modifications dans l’expression et aussi la disponibilité des molécules de surface se produisent. Quoiqu’il en soit, l’interaction entre CRT et CD91 à la surface du phagocyte, reposant à la base sur des expériences de compétition, n’est pas toujours évidente (Ogden et al., 2001 ; Walters et Berwin, 2005). Ainsi, l’hypothèse concernant la fixation de C1q sur le complexe CRT/CD91 au cours de l’efferocytose a été récemment remise en question par des données d’ELISA et de SPR démontrant l’interaction directe entre C1q et CD91 indépendamment de la CRT (Duus et al., 2010).

Figure 40. Double marquage CRT endogène/CD91 de la surface des macrophages THP1.

Les cellules THP1 différenciées sont doublement immunomarquées par des anticorps primaires puis des anticorps secondaires couplés à l’A488 et la Cyan 3 pour leur expression respective en surface de CRT endogène et de CD91. Elles sont visualisées en microscopie à épi-fluorescence.

DAPI CD91

Dans le but d’identifier les partenaires de la CRT exprimés à la surface des macrophages THP1, nous avons effectué des expériences d’overlay entre la CRT recombinante que nous avons biotinylée et les protéines extraites à partir de la membrane plasmique de ces cellules (cf. Matériels et Méthodes). La révélation à la streptavidine-HRP des sites de fixation de la CRT sur la membrane de PVDF contenant les protéines membranaires, montre plusieurs bandes, comme on peut le voir sur la figure 41. Ces bandes ont été ensuite découpées puis analysées par séquençage N-terminal afin de déterminer l’identité des protéines concernées. Nous n’avons pu obtenir de résultat que pour le séquençage de la bande indiquée par une flèche verte sur la figure, qui a révélé la présence de l’enzyme glycolytique GAPDH à ce niveau. A ce stade, il pouvait s’agir d’une détection fortuite due à une contamination. Cependant, des travaux précédents du laboratoire et d’autres équipes, ayant démontré la présence de la GAPDH à la surface cellulaire, les analyses ont été poursuivies (Terrasse et al., 2012 ; Raje et al., 2007). Des études d’interaction par SPR (sur appareil Biacore) réalisées récemment confirment l’interaction entre la CRT et la GAPDH, recombinantes purifiées (résultats non montrés). Cela fait de la GAPDH un partenaire potentiel de la CRT à la surface des macrophages. Il sera donc intéressant de mener des études sur l’interaction CRT/GAPDH (co-localisation, FRET) in cellulo (à la surface cellulaire) et sur le rôle et l’implication de cette interaction dans l’efferocytose. Pour le reste des bandes indiquées par des flèches rouges, le séquençage n’a pas donné de résultat à cause de la présence d’un mélange protéique complexe au niveau de chaque bande. Pour cela, il sera nécessaire dans des études futures d’utiliser des méthodes de séparation protéiques plus efficaces comme l’électrophorèse bidimensionnelle afin de mieux purifier les molécules concernées.

Figure 41. Interaction entre la CRT et les protéines membranaires du macrophage.

200 µg d’extrait protéique membranaire des macrophages THP1 sont déposés sur un gel polyacrylamide 10% puis transférés sur une membrane PVDF (cf. matériels et méthodes). La membrane est ensuite incubée avec 5 µg de CRT recombinante biotinylée puis avec de la streptavidyne-HRP afin de révéler les protéines interagissant avec la CRT. Les protéines correspondantes indiquées par les flèches sont récupérées puis analysées par séquençage N-terminal. Un contrôle est effectué en absence de CRT (-CRT). Les flèches rouges indiquent les protéines des bandes que le séquençage n’a pas pu identifier et la flèche verte indique la protéine identifiée. PM : poids moléculaires.

-CR T +CRT PM GAPDH 36 55 95

Dans le cadre du projet du laboratoire ayant pour but d’identifier les partenaires de C1q au cours de l’efferocytose, le récepteur « scavenger » SREC-I a été produit sous forme recombinante par Catherine Wiker-Planquart. SREC-1 récemment décrit pour sa contribution via C1q à l’élimination des cellules apoptotiques a également été décrit comme pouvant interagir avec la CRT en tant que récepteur endocytique (Ramirez-Ortiz et al., 2013 ; Berwin et al., 2004). Nous l’avons testé pour son interaction avec la CRT par SPR. A l’issu de ces expériences (réalisées par Catherine Wiker-Planquart et Nicole Thielens), les résultats ont confirmé que ces 2 protéines interagissent bien ensemble, avec une affinité de l’ordre de 353 nM (figure 42). Pour compléter ces données, il est nécessaire de mener des expériences in cellulo pour s’assurer que cette interaction peut prendre place à la surface du phagocyte.

Figure 42. Analyse cinétique de l’interaction entre CRT et SREC-1.

Sensogrammes obtenus par SPR de l’interaction entre les protéines recombinantes CRT et SREC-I. Cinq concentrations croissantes de CRT (0.15 ; 0.3 ; 0.6 ; 1.2 et 2.4 µM) sont injectées successivement sur la puce où 1845 RU de SREC-I ont été préalablement immobilisées. L’ajustement des données est effectué selon le modèle de ligand hétérogène ou « two state reaction » et est représenté en violet (KD = 353 nM ; χ2 = 0.06). RU : unité de résonance ; s : seconde.

Réponse (R

U)