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Œstrogènes et neuromodulation du système dopaminergique

Chapitre 3 : Les hormones ovariennes

3.1. Les œstrogènes

3.1.8. Œstrogènes et neuromodulation du système dopaminergique

Le 17β-estradiol module le système dopaminergique à plusieurs niveaux, dont la synthèse et le métabolisme de la DA, ainsi qu’une modulation des récepteurs et des transporteurs dopaminergiques (Di Paolo 1994, Becker 1999, Sanchez et coll. 2010).

3.1.8.1. Le cycle œstral

De nombreuses études effectuées chez les rongeurs ont montré que les différentes étapes de la neurotransmission dopaminergique varient au cours du cycle œstral (Di Paolo 1994). Le striatum est sujet à des fluctuations dans les niveaux de 17β-estradiol et de progestérone au cours du cycle œstral, d'une manière similaire à celle observée dans le plasma (Morissette et coll. 1992). Dans le cycle œstral chez la ratte, les niveaux de 17β-estradiol sont élevés dans la matinée et dans l'après-midi du proestrus, et les niveaux de progestérone sont élevés en diestrus I et dans l'après-midi du proestrus (Morissette & Di Paolo 1993b).

49 Les concentrations de DA, la densité du DAT et du récepteur D1, ainsi que la proportion des sites de haute et de basse affinité du récepteur D2, varient selon les concentrations endogènes de 17β-estradiol dans le striatum durant le cycle œstral (Di Paolo 1994). En effet, les concentrations de DA et de DOPAC, ainsi que la densité du DAT, sont plus élevées en proestrus (lors de l’augmentation des niveaux endogènes de 17β-estradiol), tandis que le rapport des sites de haute et de basse affinité du récepteur D2 et la densité des récepteurs D1 sont augmentés en diestrus (lorsque les niveaux de 17β-estradiol sont bas et que les niveaux de progestérone sont élevés) (Di Paolo et coll. 1988, Levesque et coll. 1989, Morissette & Di Paolo 1993b). Les concentrations striatales de DA extracellulaire sont plus élevées en proestrus et en œstrus comparativement à la période diestrus (Xiao & Becker 1994). La comparaison directe entre les mesures biochimiques et comportementales n'est pas aussi simple car les tests comportementaux sont effectués sur un cycle lumière-obscurité inversé, contrairement aux mesures biochimiques. Cette différence affecte les niveaux de stéroïdes entre les différentes phases du cycle œstral. Par conséquent, lors d’un cycle lumière- obscurité inversé, les rats en œstrus ont des niveaux plus élevés de17β-estradiol que lors de la diestrus, et les niveaux de progestérone sont à leurs plus hauts (Becker & Cha 1989). Les tests comportementaux montrent que lorsque l'AMPH est administrée pour stimuler le système dopaminergique striatal, la libération de DA et les comportements moteurs induits par l'AMPH sont à leurs plus hauts niveaux chez les rats en œstrus et sont à leurs plus bas niveaux lors de la période diestrus (Becker & Cha 1989). Ainsi, les études biochimiques et comportementales montrent que les variations endogènes des niveaux de 17β-estradiol et de progestérone induisent des changements dans la transmission dopaminergique.

3.1.8.2. L’ovariectomie

Dans des conditions où la source principale de 17β-estradiol est enlevée, soit lors de l’ovariectomie, une diminution de la densité du DAT dans le striatum, sans modification de l’affinité de liaison, est observée à court et à long terme suivant l’ovariectomie (Bosse et coll. 1997). Par contre, l’ovariectomie laisse inchangée la densité du VMAT2 dans le striatum (Rehavi et coll. 1998, Le Saux & Di Paolo 2006). Une diminution de la densité des récepteurs D1 et D2, sans changement de l'affinité de liaison, est observée (Di Paolo et coll. 1988, Landry et coll. 2002, Levesque et coll. 1989, Le Saux et coll. 2006). De plus, la proportion

des sites agonistes de haute affinité des récepteurs D2 augmente, les niveaux extracellulaires de DA sont bas, et la libération striatale de DA ainsi que les comportements moteurs induits par l’AMPH et par la cocaïne sont atténués chez les rattes ovariectomisées (Becker & Ramirez 1981, Camp et coll. 1986, Di Paolo et coll. 1988, Xiao & Becker 1994). Ainsi, dans une condition où les niveaux de 17β-estradiol et de progestérone endogènes sont bas, telle que se produisant à la ménopause, une diminution de l'activité dopaminergique se produit, observée avec une diminution des mesures comportementales et biochimiques.

3.1.8.3. Traitement avec le 17β-estradiol

Lorsque les niveaux de 17β-estradiol sont rétablis par un traitement chronique avec des concentrations physiologiques de cette hormone chez les rattes ovariectomisées, une augmentation de l'activité locomotrice en réponse à la cocaïne et à l’APMH est observée (Becker 1990, Sell et coll. 2000). Une augmentation de la densité du DAT dans le striatum est rapportée lorsque le traitement avec le 17β-estradiol est initié peu de temps après l'ovariectomie (Le Saux & Di Paolo 2006). De plus, la restauration de la densité du DAT est également observée lorsque le 17β-estradiol est administré après une longue période de retrait hormonal, montrant que ce transporteur répond toujours au 17β-estradiol, même après une période prolongée (Le Saux & Di Paolo 2006). La réponse au changement hormonal (effet de l'ovariectomie et du remplacement avec le 17β-estradiol) sur la liaison spécifique au DAT est région spécifique, avec un changement du DAT observé seulement dans le striatum médian alors que le striatum antérieur et postérieur ne sont pas affectés (Le Saux & Di Paolo 2006). Dans la SNc de rattes ovariectomisées, l'ovariectomie et le traitement avec le 17β- estradiol n'ont aucun effet sur les niveaux d'ARNm du DAT (Bosse et coll. 1997), ce qui suggère que la modulation du DAT par le 17β-estradiol se fait par un mécanisme non- génomique. Des résultats contradictoires sont rapportés concernant l'effet du 17β-estradiol sur la liaison spécifique au VMAT2. Une étude rapporte une diminution de la densité du VMAT2 dans le striatum avec un traitement chronique de 17β-estradiol (Rehavi et coll. 1998) alors qu’une autre étude a observé aucune différence (Le Saux & Di Paolo 2006).

51 hormone est administrée après une longue période d’ovariectomie (Bosse & DiPaolo 1996, Levesque & Di Paolo 1989). Les rattes ovariectomisées traitées avec le 17β-estradiol ont une densité restaurée des récepteurs D2 dans le striatum, mais aucune élévation de l’ARNm de ce récepteur n’est observée, ce qui suggère que l'augmentation de la densité des récepteurs D2 induite par le 17β-estradiol se produit par un mécanisme indépendant de la transcription des gènes (Le Saux et coll. 2006). Lorsque les terminaisons dopaminergiques sont endommagées avec la 6-OHDA chez le rat, l'augmentation de la densité des récepteurs D2 par le 17β-estradiol est toujours observée, indiquant que le 17β-estradiol module les récepteurs D2 situés sur les neurones post-synaptiques, et que l'effet observé ne résulte pas de changements dans la transmission dopaminergique pré-synaptique (Di Paolo et coll. 1982).

Alors que la majorité des études ont investigué l'effet du 17β-estradiol sur l'activité de neurotransmission dopaminergique chez les rongeurs femelles, il est intéressant d'explorer si le 17β-estradiol pourrait également influencer la transmission dopaminergique dans le cerveau masculin. Il existe une différence entre les sexes dans le comportement moteur induit par l’AMPH, les rongeurs mâles répondent moins que les rongeurs femelles (Robinson et

coll. 1980). Après l'administration aiguë de 17β-estradiol, aucune augmentation de la

libération de DA ou de comportement moteur induit par l’AMPH chez les rongeurs mâles n’est observée (Becker 1990, Castner et coll. 1993). Le traitement chronique avec le 17β- estradiol chez les souris mâles laisse inchangé la liaison spécifique au DAT et au VMAT2, à la fois dans le striatum et dans la substance noire (Jourdain et coll. 2005). De plus, l'administration chronique de 17β-estradiol ne modifie pas la densité des récepteurs D1 et D2 dans le striatum (Lammers et coll. 1999).

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