• Aucun résultat trouvé

Évolution des fractions volumiques avec l’asymétrie du dispositif 86

Pour résumer les différents résultats expérimentaux obtenus jusqu’à présent avec

un obstacle long, la fraction volumique φ

2

ne dépend plus des paramètres

physico-chimiques et hydrodynamiques du problème, mais seulement de la géométrie. Ce

constat marque une différence importante avec les résultats obtenus dans le cadre

de la fragmentation d’un slug isolé sur un obstacle court. Par ailleurs, plus le

rap-port entre les résistances hydrodynamiques à vide des deux bras est imrap-portant, plus

CHAPITRE 4. FRAGMENTATION D’OBJETS DÉFORMABLES SUR DES

BOUCLES ET OBSTACLES « LONGS »

φ

2

est petite. Nous nous sommes expérimentalement assurés que ce fait se

véri-fiait également avec la géométrie constituée d’une boucle asymétrique, pour laquelle

l’asymétrie des résistances hydrodynamiques provient du rapport d’aspect Λ entre

les deux bras de la boucle. De fait, nous généralisons sur la figure 4.6 les résultats

Figure4.6: Évolution des fractions volumiques φ

1

et φ

2

≤φ

1

avec le produit FΛ.

Les symboles noirs et gris correspondent respectivement aux géométries constituées

d’un long obstacle et d’une longue boucle. Chaque type de symbole est associé à

un système fluide donné : cercles pleins (eau pure/huile silicone), cercles vides (eau

pure/hexadécane), carrés pleins et triangles pleins (eau glucosée/hexadécane, deux

pourcentages différents en glucose).

obtenus pour une boucle asymétrique et un obstacle linéaire longs en traçant les

fractions volumiquesφ

1

etφ

2

en fonction du produitFΛ, correspondant au rapport

des résistances hydrodynamiques à vide des deux bras du dispositif. La

superposi-tion globale des différents jeux de données autour d’une même tendance, pourφ

1

et

φ

2

, semble indiquer que FΛ correspond bien au nouveau paramètre pertinent dans

ce problème. Ce constat est la preuve expérimentale d’un résultat avancé dans la

littérature [18].

Nous tentons par la suite d’analyser nos résultats par une approximation de type

champ moyen.

2 Un modèle de type « champ moyen »

Le fait de travailler avec des boucles et obstacles suffisamment longs engendre une

conséquence importante : les fluctuations des différences de pression entre l’amont

et l’aval du dispositif, résultant de l’entrée ou de la sortie d’un slug, deviennent très

petites devant leurs valeurs moyennes. Selon cette approche, nous pouvons donc

négliger les fluctuations temporelles dans ce système. Dans l’approximation où les

sauts de pression sont constants dans le temps, les débits le sont aussi, et il devient

alors très simple de déterminer les fractions volumiques des slugs créés dans

l’obs-tacle ou dans la boucle, ainsi que les nombres de slugs présents dans chaque bras.

¸

h Ldeff

L1

¸1

n slugs

1

sens de l’ecoulement´

Figure 4.7: Approximation de champ moyen : schéma définissant les notations des

grandeurs utilisées. Dans cette approximation, les slugs seront supposés

parallélé-pipédiques. La géométrie prise pour exemple sur ce schéma correspond à celle de

l’obstacle linéaire long : w

2

≤w

1

, L

1

=L

2

, mais les notations restent bien entendu

les mêmes dans le cas de la boucle asymétrique longue.

Remarquons que cette approximation de champ moyen a également été utilisée pour

décrire des dynamiques de répartition de gouttelettes dans des jonctions microfl

ui-diques [89, 90]. Les notations des grandeurs moyennées dans le temps et utilisées

dans la suite sont précisées sur la figure 4.7. Déroulons ci-dessous les relations entre

ces différentes grandeurs.

– Tout d’abord, la conservation du débit s’écrit simplement :

vw=v

1

w

1

+v

2

w

2

. (4.1)

– L’égalité des sauts de pression de part et d’autre de l’obstacle, ou de la boucle,

peut s’écrire

2

:

f

1

v

1

def f

n

1

L

1d

c

(L

1

−n

1

L

1d

)) =f

2

v

2

def f

n

2

L

2d

c

(L

2

−n

2

L

2d

)), (4.2)

où n

1

et n

2

désignent le nombre de slugs dans les bras respectifs 1 et 2. Nous

ne tenons pas compte des sauts de pression capillaires puisque ceux-ci se

com-pensent deux à deux, du fait des signes opposés des courbures convexe/concave

d’unslug. Nous supposons également que l’éventuel saut de pression capillaire

résiduel duslug rentrant dans (ou sortant de) la boucle ou l’obstacle reste très

petit devant le saut de pression visqueux.

2. Notons que le saut de pression dans le brasipeut s’écrire, lorsque ce dernier contientn

i

slugs

de longueurL

i

d

, Δp

i

c

f

i

q

i

(L

i

+n

i

L

i g

)/w

i

h

3

, avec L

i

g

=ΔηL

i

d

une longueur résistive. Ainsi, la

présence d’un slug dans le bras i modifie la résistance hydrodynamique d’une quantité discrète

proportionnelle à L

i

g

. Physiquement, tout se passe comme si la longueur effective du brasi était

plus grande (si Δη >0) ou plus petite (si Δη <0) que L

i

en présence de slug. Dans le premier

cas Δη >0, ce type de comportement est également prédit et vérifié expérimentalement pour le

transport de gouttes sphériques dans des canaux microfluidiques aux bas nombres capillaires et

bas nombres de Reynolds [87], bien que le raisonnement soit légèrement différent de celui adopté

ici. De façon plus surprenante, la prédiction d’une longueur effective inférieure à L

i

dans le cas

CHAPITRE 4. FRAGMENTATION D’OBJETS DÉFORMABLES SUR DES

BOUCLES ET OBSTACLES « LONGS »

– Nous définissons le temps de fragmentation comme la durée pendant laquelle

leslug arrivant sur le dispositif (obstacle ou boucle) est en contact avec celui-ci

avant de se fragmenter. Ce temps peut s’écrire indifféremment

3

:

L

ef fd

v =

L

1 d

v

1

= L

2 d

v

2

, (4.4)

avecL

ef fd

la longueur effective d’unslug introduite dans le chapitre précédent.

– La durée entre deux processus de fragmentation successifs peut s’écrire

indif-féremment :

λ−L

ef fd

v =

λ

1

−L

1 d

v

1

= λ

2

−L

2 d

v

2

. (4.5)

– L’équidistance des slugs dans les deux bras permet d’écrire :

n

1

= L

1

λ

1

et n

2

= L

2

λ

2

, (4.6)

en faisant abstraction du caractère entier den

1

etn

2

. Cette approximation est

d’autant plus valable que le nombre de slugs dans chaque bras est grand.

– En supposant, à nouveau dans un souci de simplicité, que les slugs prennent

une forme grossièrement parallélépipédique (voir Fig. 4.7), les fractions

volu-miques s’expriment comme :

φ

1

= L

1 d

w

1

L

ef fd

w et φ

2

= L

2 d

w

2

L

ef fd

w. (4.7)

Les observables expérimentales auxquelles nous nous intéressons sont les fractions

volumiquesφ

i

et les nombres deslugs n

i

dans chaque bras. Cherchons à les exprimer

uniquement en fonction des paramètres du problème. L’équation 4.2 peut se réécrire

à l’aide des relations 4.6 :

v

1

1 +ΔηL

1 d

λ

1

=F WΛv

2

1 +ΔηL

2 d

λ

2

. (4.8)

Or, la simplification et la division des équations 4.4 et 4.5 permettent de montrer

que :

L

1 d

λ

1

= L

2 d

λ

2

= L

ef f d

λ , (4.9)

de laquelle nous déduisons pour l’équation 4.8 :

v

1

=F WΛv

2

. (4.10)

En injectant cette relation dans l’équation 4.4, et à l’aide des relations 4.7, nous

obtenons :

L

1 d

L

2 d

= Wφ

1

φ

2

= v

1

v

2

=F WΛ, (4.11)

3. La combinaison des équations 4.1 et 4.4 permet évidemment de retrouver la conservation du

volume duslug :

L

ef fd

w=L

1

d

w

1

+L

2

d

w

2

. (4.3)

1

Figure 4.8: Évolution prédite des fractions volumiques φ

1

etφ

2

=1−φ

1

avecFΛ.

soit :

φ

1

=FΛφ

2

. (4.12)

La conservation du volume (Éq. 4.3), s’exprimant simplement φ

1

2

= 1, conduit

au résultat final :

φ

1

= FΛ

1 +FΛ et φ

2

= 1

1 +FΛ. (4.13)

Ces prédictions sont illustrées sur la figure 4.8. En cas de parfaite symétrie, la

condition FΛ=1 implique, comme attendu, les valeurs triviales φ

1

= φ

2

= 1/2. En

revanche, dès qu’une brisure de symétrie est introduite, aussi bien sur les largeurs

(F >1) que sur les longueurs (Λ>1) des bras,φ

1

croît et φ

2

décroît, comme obtenu

expérimentalement. L’allure des évolutions prédites est compatible avec les

obser-vations expérimentales (Fig. 4.6) ; une comparaison quantitative est réalisée dans le

prochain paragraphe. Pour aboutir aux expressions de n

1

et n

2

, les équations 4.6

et 4.9 fournissent les résultats intermédiaires :

n

1

= L

1

λ

L

ef fd

L

1 d

et n

2

= L

2

λ

L

ef fd

L

2 d

. (4.14)

En insérant l’expression des fractions volumiques (Éq. 4.7) obtenues par les

rela-tions 4.13, il vient alors :

n

1

= L

1

λ

w

1

(1 +FΛ)

wFΛ et n

2

= L

2

λ

w

2

(1 +FΛ)

w . (4.15)

De nouveau, remarquons que lorsque FΛ=1, la symétrie du dispositif implique

di-rectementn

1

=n

2

. En conséquence, ce modèle très simple prédit que les fractions

vo-lumiques et nombres de slugs fils dépendent seulement de la géométrie de l’obstacle

ou de la boucle, indépendamment des paramètres physico-chimiques et

hydrodyna-miques du problème. De façon plus surprenante encore, nous retrouvons les résultats

du chapitre précédent obtenus pour la fragmentation d’un objet isolé sur un obstacle

long. le rapport des fractions volumiques vaut :

φ

1

φ

2

CHAPITRE 4. FRAGMENTATION D’OBJETS DÉFORMABLES SUR DES

BOUCLES ET OBSTACLES « LONGS »

Figure4.9: Le processus de fragmentation au niveau de la jonction en T engendre

la création de deux nouveauxslugs dans les bras de la jonction. La résistance

hydro-dynamique du bras 1 (resp. 2) est principalement donnée par la première partie du

canal de plus fort confinement, de longueur�

1

(resp.�

2

) (a). Le rapport des volumes

des slugs créés est égal au rapport �

2

/�

1

des longueurs entre les deux bras, valant

respectivement 1(b), 5 (c) et 8(d). Figure tirée de [18].

égal au rapport des résistances hydrodynamiques des deux bras « à vide »,

c’est-à-dire en l’absence de slug à l’intérieur. Ce résultat, frappant au premier abord,

apporte une explication théorique aux résultats expérimentaux trouvés dans la

lit-térature [18], dans le cas d’une jonction en T (Fig. 4.9). Cette dernière étant conçue

de telle sorte que F = 1 (les deux bras ont des sections identiques), le rapport des

fractions volumiques vaut directementΛ, en excellent accord avec les résultats issus

de cet article.

Enfin, le rapport des nombres de slugs présents dans chaque bras vaut :

n

2

n

1

=F WΛ

2

. (4.17)

Alors queW≤1etF≥1, il est possible de montrer que le produitF W vérifie toujours

F W≥1. Comme Λ≥1 par définition, il y a toujours plus de slugs dans le bras de

grande résistance hydrodynamique. La forte dépendance en Λ

2

peut s’interpréter

comme le cumul de deux effets allant dans le même sens : d’une part, lesslugs dans le

bras de faible résistance hydrodynamique sont plus petits, d’après les relations 4.13,

il est donc possible d’en mettre plus dans ce bras-là. D’autre part, ce bras étant

d’autant plus long queΛ est grand, il est possible d’en mettre encore davantage, le

procédé de remplissage est donc magnifié, d’où la variation quadratique en Λ

2

.

3 Comparaison avec l’expérience