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Évolution du combustible en système fermé

Dans le document Conditionnement des déchets nucléaires (Page 119-121)

La décroissance radioactive des radionucléides est à l’origine des phénomènes physico-chimiques qui caractérisent l’évolu- tion intrinsèque à long terme du combustible usé. D’une part, elle conduit à la formation d’éléments ayant des états d’oxyda- tion différents qui pourraient affecter le

potentiel d’oxygène du combustible, d’autre part, les désintégrations alpha produisent des atomes d’hélium au sein du cristal et sont également responsables de dommages d’auto-irradiation sous l’ef- fet du recul de noyaux lourds sur une dis- tance très courte, de l’ordre de quelques nanomètres. Une conséquence impor- tante de cette évolution pourrait être un endommagement des joints de grain de l’oxyde irradié et, potentiellement, l’ac- croissement de l’inventaire en radionu- cléides labiles, qui pourraient être dissé- minés lors de l’arrivée de l’eau dans le colis d’assemblages de combustibles usés, au cours d’un stockage.

La décroissance bêta des produits de fission, tel le Cs 137

devenant du Ba 137, et des actinides, tel le Pu 241 décroissant en Am 241 modifie la composition chimique de l’oxyde irradié. On a pu montrer à l’aide de calculs d’équilibre thermochimique prolongés jusqu’à 300 ans, que cette évolution de la composi- tion chimique n’est pas suffisante pour affecter l’état d’oxydation du combustible irradié après la fin de l’irradiation en réacteur. Le molybdène, produit de fission abondant, et le zirconium de la gaine constituent un tampon qui permet d’accommoder les variations de l’état d’oxydation des produits de fission.

La génération d’hélium par décroissance alphades actinides

soulève une question majeure pour la tenue à long terme du combustible usé. On présente sur la figure 133 un calcul type de l’activité résiduelle à l’échelle de dix mille ans pour un com- bustible de dioxyde d’uranium irradié à un taux de combustion de 47,5 GWj/tU. La concentration en hélium atteindra 0,7 % ato- mique par atome de métal lourd en 10 000 ans ; pour un com- bustible MOX au même taux d’épuisement, elle atteindrait 4 %. Au cas où l’hélium peut être relâché dans les volumes libres du crayon de combustible, cela entraînerait une augmentation significative de la pression interne dans le crayon, et, par consé- quent, de la contrainte tangentielle de la gaine.

Dans l’hypothèse contraire de rétention de l’hélium dans la pas- tille de combustible, l’hélium pourrait précipiter sous forme de bulles de taille nanométrique ou s’accumuler aux joints de grain (piégeage dans les bulles de gaz de fission pré-existante), en cas de mobilité réduite dans le réseau cristallin. Les recherches

Cm 243 Am 243 Am 241 Pu 239 Pu 240 Pu 238 Cm 244 Cm 242 0.1 0,1 1 10 100 1 000 10 000 10 000 1 000 100 10 0 Temps (années) Activité alpha d’un crayon UOX 47,5 GWj/tU

Activité

alpha

(TBq

/tU)

activité totale

Fig. 133. Évolution dans le temps de l’activité alpha d’un combustible UOX irradié.

expériences, on observe, sur la figure 134, que la mobilité de l’hélium est supérieure à la diffusion du xénon et qu’elle varie sensiblement avec le niveau d’endommagement du combus- tible. En examinant de plus près le rôle des joints de grain et du dommage produit par l’implantation ionique, on a pu montrer que, dans un domaine de température compris entre 750 et 1 300 °C, la mobilité de l’hélium est accélérée au voisinage des joints de grain, tandis qu’elle était nettement plus faible au cœur des grains, l’hélium étant vraisemblablement piégé dans les défauts du cristal ou précipité sous forme de nanobulles (fig. 135, [1]). Ces recherches ont été réalisées en collabora- tion avec le CNRS/CERI d’Orléans et le LPS de Saclay. Au stade actuel, nous en concluons que l’extrapolation aux tem- pératures d’un entreposage à sec conduit à une mobilité limitée de l’hélium dans le combustible, au moins pour le dommage d’un entreposage centenaire.

La décroissance alphades actinides

est également à la source du dommage d’irradiation causé par les cascades de déplacements des atomes du réseau cristallin. Une étude atomistique en dynamique moléculaire est en cours pour simuler les effets des dégâts d’ir-

radiation sur le cristal d’UO2et ses

joints de grains. Des travaux expéri- mentaux portent également sur la caractérisation physique d’analogues naturels du combustible : uraninites et anciens combustibles dopés en acti- nides. Un exemple est présenté sur la figure 136 [2] : on observe sur cette photo prise au microscope électronique à balayage la microstructure atteinte en

Fig. 136. Image au microscope électronique à balayage d’une pile de 238PuO

2âgée de 30 ans [2].

se sont concentrées sur la mobilité de l’hélium dans l’UO2et sur les conséquences d’une accumulation aux joints de grain du solide polycristallin.

Un coefficient de diffusion apparent a été évalué expérimenta- lement par des expériences d’implantations d’hélium dans des échantillons d’UO2, suivies de traitements thermiques en atmo- sphère contrôlée pour éviter une oxydation en cours d’essai. En parallèle, des mesures de désorption d’hélium ont été menées à l’Institut des Transuraniens de Karlsruhe sur des combustibles dopés au plutonium 238 dont la période de décroissance radioactive est de 87,7 ans. En extrapolant les résultats aux températures inférieures aux températures des

1.E-50 1.E-46 1.E-42 1.E-38 1.E-34 1.E-30 1.E-26 1.E-22 1.E-18 1.E-14100 200 300 400 1000 Température (C°)

Coefficient de diffusion de l’He (m

2.s -1) 140 120 100 80 60 40 20 0 0 2 4 6 8 10 12 14 16 Échelle de distance (μm)

Concentration relative en Hélium (%)

Expérience Simulation

UO2- F < 3e15 He/cm2(Roudil et al., 2003)

UO2- F = 3e16 He/cm2(Roudil et al., 2003)

(U,Pu)O2- (Ronchi et Hiernaut, 2004)

Xénon (Garcia et Carlot, 2003)

Fig. 134. Coefficients de diffusion apparents de l’hélium dans des combustibles nucléaires. Comparaison avec le coefficient de diffusion du xénon dans l’UO2.

Fig. 135. Profil de concentration d’hélium autour d’un joint de grain d’UO2. Échantillon polycristallin implanté en hélium et recuit à

trente ans par une pile de 238PuO

2dont 21 % du plutonium a

décru à cet âge. De petites bulles et des fissures autour de quelques joints de grains sont apparues à un niveau de dom- mage supérieur de plusieurs ordres de grandeur à la dose que peut atteindre un combustible irradié en dix mille ans. Cette étude se poursuit sur des combustibles dopés qui atteignent des doses d’irradiation intermédiaires.

Évolution du combustible

Dans le document Conditionnement des déchets nucléaires (Page 119-121)