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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.3 Transport de l’oxygène en milieu non-saturé

2.3.4 Évaluation du flux d’oxygène

Il existe trois principales méthodes expérimentales pour évaluer le taux d’oxydation des sulfures (Elberling et al., 1994) : la méthode des sulfates, la méthode du gradient d’oxygène et la méthode de consommation d’oxygène. Ces trois méthodes sont successivement présentées ici. La méthode de consommation d’oxygène a été utilisée au cours de nos essais.

La méthode des sulfates consiste à déterminer la quantité de soufre qui s’est oxydée à partir de la quantité de sulfate formée. D’après l’équation 1.1 sur l’oxydation de la pyrite, pour chaque mole de sulfate formée il y a 1,75 mole d’oxygène consommée (peut varier avec le pH). Ainsi, il est possible à partir de la quantité de sulfate récupérée en solution de déterminer la quantité 𝑄𝑂2 = 𝐷2 3 1 − 𝜃𝑠 𝑅𝑖2 𝑟𝑐 𝑅𝑖 − 𝑟𝑐 𝐶𝑎 𝐻 = 𝐾𝑟𝐶𝑎 (2.48)

d’oxygène consommée par la réaction d’oxydation. Cette méthode considère uniquement la réaction d’oxydation directe puisque le seul agent d’oxydation de la pyrite est l’oxygène. Seule la pyrite consomme l’oxygène et il n’y a aucune autre source de sulfate dans notre échantillon. Nicholson et al. (1989) a proposé un ajustement pour tenir compte de l’oxydation indirecte; dans ce cas le rapport O2 :SO4 passe à 2 :1 au lieu de 1.75 :1. Elle peut être appliquée autant pour des

essais en colonnes que des essais en cellules humides et a été utilisée dans de nombreuses études, dont Elberling et al. (1994), Bussière et al. (1997, 2004), Erickson et al. (2001).

La méthode du gradient d’oxygène implique de connaître la concentration d’oxygène dans l’eau et dans le gaz à plusieurs profondeurs dans les résidus (et le recouvrement). Le profil obtenu à partir des mesures de teneur en oxygène dans le milieu exposé (sans couverture) est habituellement comparé à une solution en régime permanent (équation 2.41). Le taux d’oxydation est alors déduit à partir des concentrations d’oxygène à l’aide de la loi de conservation de la masse et des équations de diffusion et consommation. Divers codes comme le logiciel POLLUTE solutionnent ces équations de transport, ce qui permet de modéliser le profil de la concentration en oxygène. On cherche alors à obtenir la meilleure corrélation pour le profil de concentration prédit par le logiciel en le superposant aux valeurs expérimentales obtenues. La valeur de De doit

avoir été préalablement estimée et peut être ajustée au besoin. Cette méthode a été employée par différents auteurs dont Yanful et al. (1994), Li et al. (2000), Elberling et Damgaard (2001), Vigneault et al. (2001), Gosselin (2007) et Demers et al. (2008a).

L’approche utilisée dans cette étude est basée sur la méthode de consommation d’oxygène qui est présentée en détails au chapitre 3. Elle permet de déterminer le flux d’oxygène à partir de la décroissance de la concentration de l’oxygène dans un réservoir. On place dans un espace hermétiquement fermé une quantité de résidus miniers en contact avec l’air ([O2] = 20.9%=280

mg/L). On mesure la diminution de l’oxygène (consommé par les rejets) dans le réservoir à l’aide d’un senseur. La première interprétation de cet essai a été proposée par Elberling et al. (1994, 1996) et suppose un régime permanent dès le début de l’essai. La réaction cinétique entre l’oxygène et la pyrite est alors considérée de premier ordre tel que proposé par Nicholson et al. (1988). Cet essai permet de déterminer conjointement le coefficient de diffusion De et le taux de réactivité du matériau Kr (sans pouvoir les séparer). Cette méthode a été utilisée par Elberling et

al. (1994, 1996), Bussière et al. (1998, 2002, 2004), Dagenais (2005), Martin el al. (2006a), Gosselin (2007) et Ouangrawa (2007).

Une interprétation alternative de cet essai, appelée méthode de consommation d’oxygène modifiée, a été proposée par Aubertin et al. (2000a, 2000b) et Mbonimpa et al. (2002). L’essai est basé sur la méthode de consommation d’oxygène conventionnelle, mais il dure plus longtemps. Les résultats sont interprétés en régime transitoire à l’aide de calculs numériques. Pour cette étude, le logiciel POLLUTE (Rowe et al., 1994) a été utilisé. Le logiciel et la méthode d’interprétation de cet essai sont présentés à la section 2.6.2.

Des essais en laboratoire menés par Elberling et al. (1994), Bussière et al. (1998, 2004) et Elberling et Damgaard (2001) ainsi que des essais réalisés sur le terrain par Elberling et Nicholson (1996), montrent une bonne corrélation entre la méthode de consommation d’oxygène et la méthode des sulfates. Elberling et al. (1994) et Elberling et Nicholson (1996) notent néanmoins que la méthode de consommation d’oxygène donne des valeurs plus élevées que la méthode des sulfates. Ceci pourrait être causé par, la précipitation de minéraux secondaires sulfatés (gypse, anhydrite…) avant que ne s’installe le régime permanent. Lorsqu’on atteint le régime permanent, les deux méthodes donnent des résultats similaires (Bussière et al., 1998; 2004). D’après Elberling et al. (1994) et Elberling et Nicholson (1996), la méthode de consommation d’oxygène offrerait toutefois une meilleure précision (pour des réactivités élevées).

La méthode de consommation d’oxygène peut être utilisée en laboratoire et sur le terrain. Les essais peuvent aussi être réalisés au travers d’une couverture (figure 2.7) ou directement sur les rejets (Tibble et Nicholson, 1997; Bussière et al., 2002; Mbonimpa et al., 2002; Dagenais, 2005; Gosselin, 2007). Sur le terrain, on insère un tube d’aluminium au travers de la couverture tel que présenté à la figure 2.7a pour des essais de courte durée et à la figure 2.7b pour des essais de longue durée. D’après Tibble (1997), il est important que le tube pénètre la zone des rejets pour empêcher qu’il y ait une migration horizontale d’oxygène qui viendrait fausser les résultats (figure 2.7b). Le réservoir source situé au sommet du tube est fermé et on note la décroissance de [O2] dans le temps. Ces essais peuvent être analysés à l’aide du logiciel POLLUTE comme dans

Figure 2-7 : Montage utilisé pour l'essai de consommation d'oxygène sur le terrain dans le cas d’une CEBC pour les essais à courte durée (a) et pour les essais à longue durée (b) (tiré de Dagenais, 2005).

De nombreux facteurs sont à considérer lorsqu’on veut mesurer le potentiel d’oxydation de rejets (Tibble, 1997):

- le taux de réaction des résidus est influencé par la teneur en sulfure des rejets. Une plus grande teneur en sulfure correspond à une augmentation des sites potentiels d’oxydation; - le type de sulfures présent. Par exemple, la pyrrhotite est 20 à 100 fois plus réactive que la

pyrite (Nicholson et al., 1994);

- l’âge des particules est un facteur important puisque des résidus déjà exposés se sont oxydés et présentent une plus faible quantité de sulfure (partiellement consommée); - la granulométrie des rejets influence aussi le taux de réaction puisque des particules plus

petites présentent une plus grande surface spécifique et ainsi un plus grand potentiel d’oxydation;

- la teneur en eau des rejets et la position du niveau de la nappe influencent le flux d’oxygène et ainsi le taux d’oxydation des résidus;

- la température (qui peut accélérer et/ou ralentir les réactions); - la présence de bactéries (qui peuvent catalyser les réactions);

- la passivation de la surface des rejets; - le pH et Eh de la solution interstitielle.

Ces facteurs d’influence ont aussi été identifiés par Mbonimpa et al. (2003), Dagenais (2005), Ouangrawa (2007) et Gosselin (2007).

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