5.1 Méthodologie
5.1.1 Inventaire
L'inventaire des indices de la présence de castors se trouvant sur les berges des réservoirs de La Grande 2 et Opinaca, a été réalisé selon la méthode de recensement préconisée par Banville (1977a).
La technique d'inventaire consiste à recenser à l'aide d'un hélicop-tère tous les indices récents de la présence d'une colonie de castors. Les signes d'activités inventoriés sont indiqués sur une carte topographique au 1:50,000 selon un code bien défini:
Code 1: Présence d'un amas de nourriture fraîchement constitué à proximité d'une hutte.
Code 2: Présence d'un amas de nourriture fraîchement constitué seulement.
Les inventaires réalisés dans les régions des réservoirs de La Grande 2 et Opinaca avaient pour but de trouver des sites utilisés par des castors afin de capturer des individus vivants et de leur poser un radio-émetteur.
Ces inventaires furent réalisés au mois de septembre 1982, dans les secteurs nord, ouest et nord-ouest du réservoir de La Grande 2 ainsi que dans les secteurs sud et nord-est du réservoir Opinaca, respec-tivement quatre ans et deux ans après la mise en eau des réservoirs de La Grande 2 et Opinaca. Les observations ont été faites à partir d'un hélicoptère de modèle «Bell-Jet Ranger» utilisé pendant une douzaine d'heures. La vitesse de vol se situait en moyenne à 90 km/hre, et l'appareil volait à une altitude d'environ 20 mètres.
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5.1.2 Capture des castors
A
la suite des inventaires aériens effectués à l'automne 1982, deux séances de trappage pour capturer des castors vivants eurent lieu. La première fut réalisée, dans les régions des réservoirs de La Grande 2 et Opinaca, du 18 septembre au 29 septembre 1982 et une deuxième dans la région du réservoir Opinaca du 10 au 12 octobre 1983. Une ving-taine de pièges de modèle Hancock ont été utilisés pour capturer les animaux vivants.Au cours de cette étude, les pièges ont généralement été installés tôt le matin puis visités quotidiennement par la suite. Lors de la' visite des pièges, si un castor était emprisonné, il était retiré de l'eau et transporté sur la berge afin de le munir d'un radio-émetteur.
5.1.3 Pose des radio-émetteurs
Parmi les castors capturés, seuls les individus dont la base de la queue avait plus de 6 cm de largeur et plus de 3 cm d'épaisseur étaient munis d'un radio-émetteur. Les autres castors étaient relâ-chés.
Afin d'éviter tout incident et de faciliter le travail lors de la pose des radio-émetteurs, une injection de chlorhydrate de kétamine était administrée aux castors. Cette drogue est un anesthésique général non barbiturique, non stupéfiant, à action rapide. Elle produit une anesthésie, caractérisée par une analgésie profonde des réflexes normaux du pharynx et du larynx, un maintien du tonus des muscles squelettiques, une légère stimulation cardiaque de même qu'une légère dépression respiratoire. La kétamine produit une 'anesthésie dissociée' parce qu'elle semble exercer un effet de blocage sélectif sur le centre d'association du cerveau d'abord, puis sur la zone somato-sensitive de l'écorce cérébrale (spécification Parke-Davis Canada inc.). Ce tranquilisant a été utilisé sur les castors par Lancia et al. (1978) Brooks et Dodge (1978) et par la
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Société d'énergie de la Baie James et la Société des Travaux de Correction du Complexe La Grande (1983). Ces auteurs mentionnent que cet anesthésiant produit très rapidement un effet qui peut durer de deux à trois heures. Une fois anesthésié, l'animal était retiré du piège et étendu sur le dos, afin de lui fixer un radio-émetteur à la base de la queue.
A
l'exception d'un appareil, tous les radio-émetteurs utilisés au cours de cette étude ont été spécialement conçus pour le castor et fabriqués par la compagnie Telonics de Mesa (Arizona). L'appareil ressemble à un bracelet et est fixé à la base de la queue du castor.Il pèse environ 50 g, est alimenté par une pile au lithium et possède une fréquence et un nombre de pulsations par minute qui lui est spécifique (annexe 1). La durée de l'émission sonore est de 12 à 20 mois. Notons enfin que l'émetteur, la pile et l'antenne sont scellés au laboratoire de la compagnie dans un boîtier métallique étanche recouvert d'un polymère plastique afin d'en augmenter l'étanchéité et de prévenir les dommages à l'antenne. (Société d'énergie de la Baie James et Société des Travaux de Correction du Complexe La Grande, 1984).
Notons qu'un radio-émetteur fabriqué par la compagnie AVM de Cham-paign (Illinois) fut utilisé dans la région Opinaca. Ce type de radio avait été utilisé dans le cadre du programme de suivi des castors durant la mise en eau du réservoir de La Grande 3 (Société d'énergie de la Baie James et Société des Travaux de Correction du Complexe La Grande, 1983).
Enfin, à l'automne 1983, deux radio-émetteurs munis d'un indicateur de mortalité furent utilisés à titre expérimental dans la région du réservoir Opinaca. L'indicateur de mortalité est un systême qui augmente le nombre de pulsations sonores de l'émetteur après que ce dernier soit demeuré 24 heures sans bouger. En conséquence, si l'appareil n'a pas bougé depuis 24 heures, le système indique que le castor est mort ou qu'il s'est débarrassé de son radio-émetteur et que celui-ci est au sol.
f 17
Les opérations décrites ci-dessus duraient environ une demi-heure.
A
la fin, le castor était remis dans le piège et laissé sur la berge.
L'animal demeurait dans le piège jusqu'à ce que les effets de la drogue soient complètement disparus, ce qui prenait environ trois heures.
5.1.4 Repérage des castors munis d'un radio-émetteur
Des repérages ont été réalisés à l'aide d'un hélicoptère. Une antenne unidirectionnelle à deux éléments de modèle Yagi était montée sur un des flotteurs de l'hélicoptère. Cette antenne était reliée à une boîte de contrôle et à un récepteur de modèle TR2 (de marque Telonics) dont les fréquences étaient réparties entre 150,000 et 152,000 MH
z' L'appareil, permettait de repérer avec précision les animaux portant un émetteur.
Les castors ont été repérés de la façon suivante: l'hélicoptère se dirigeait d'abord vers l'endroit où le signal avait été repéré la dernière fois; si le signal se trouvait au même endroit, l'emplace-ment était noté sur une carte topographique au 1:50 000; si le signal indiquant la présence du castor ne pouvait être capté la recherche se poursuivait à plus haute altitude (de 500 à 800 m), en exécutant des carrés homocentriques autour du dernier point de repère. Chaque côté des carrés était distant d'environ 2 km du côté précédent.
Une superficie d'environ 400 km2 était ainsi couverte et si le signal n'était toujours pas capté, les recherches se continuaient au cours des deux repérages suivants pour ensuite être abandonnées.
Notons enfin que les repérages aériens avaient lieu environ à tous les 15 jours et qu'à tous les 40 à 60 jours, un repérage au sol, était effectué si l'accessibilité aux sites était possible.
18
5.2 Résultats et commentaires
5.2.1 Réservoir de La Grande 2
5.2.1.1 Inventaire, capture et pose des radio-émetteurs
A
l'automne 1982, une douzaine de sites furent localisés autour du réservoir de La Grande 2 sur une distance d'environ 685 km de rives.De ces 12 sites recensés, sept ont fait l'objet d'un trappage. Au total, 11 castors ont été capturés dans quatre sites (Figure 2). Le temps nécessaire au trappage a été de 92 jours-pièges, ce qui repré-sente un effort de trappage de 8,4 jours-pièges par castor. Le succès de capture, soit le nombre de castors trappés par rapport au nombre total de jour-piège a été de 12% (Tableau 2).
Parmi les 11 castors capturés, seulement cinq individus ont été munis d'un radio-émetteur. Les autres individus ont été relâchés, soit par ce qu'ils n'avaient pas la taille requise (N=4) ou qu'ils furent trouvés morts (N=2).
La mortalité des deux castors est due à la noyade. En effet, les pièges n'ayant pas été fixés adéquatement à un pieu, ces derniers ont glissé sous l'eau lors de la capture des individus, provoquant la noyade des castors.
5.2.1.2 Description des déplacements et du comportement des castors munis d'un radio-émetteur
Des cinq castors marqués, deux (no. 627 et no. 629) ont été trappés par des autochtones, moins de deux mois après la pose des radio-émetteurs. Un radio-émetteur (no. 619) fut retrouvé au sol, à proxi-mité du lieu de capture, après huit mois de suivi. Enfin, le repérage des deux derniers castors (no. 618 et no. 630) fut interrompu 12 mois après la pose des radio-émetteur (Figure 3).
0 Capture du castor 999 Identification du castor
Figure 2 Lieu de capture des castors au réservoir de La Grande 2
Tableau 2. Importance des captures de castors dans la région du réservoir de La Grande 2. Numéro du Nombre total Nombre total Nombre total Période de
site
de jours de de pièges de captures trappage trappage
installés
1° site 2 10 2 automne 1982
2° site 4 21 2 automne 1982
3° site 4 20 1 automne 1982
4° site 4 20 1 automne 1982
5° site 1 5 2 automne 1982
6° site 1 4 3 automne 1982 - 7° site 2 12 0
automne 1982
TOTAL 18 92 11
Figure 3 Surveillance des déplacements et du comportement des castors à la suite de l'exploitation du réservoir de La Grande 2
no 618 no 619 -ab no 627 .1111k_ .414
no 629
-111b_..44
no 630-411,
- SEP.! OCT.
/ NOV .
I DÉC. JAN.
1 FEV, MAR. AVR.' MAI 1JUIN JUIL.
I A011.
I SEP. OCT. NOV.
,I DEC. JAN.
I FEV.
I MARI AVR. MAI
1982 1983 1984
.age Capture du castor et pose du radio-émetteur
no 999 Numéro du radio-émetteur
Période durant laquelle le signal sonore a été perçu .414 Castor capturé par un trappeur
Radio-émetteur retrouvé au sol (aucun indice de prédation) Aucun repérage réalisé
D
Fin des activités de repérage : le castor a vraisemblablement perdu son radio-émetteur. Il fut impossible de le récupérer,mais il fut repéré dans une hutte ou un terrier ❑ Vérification des données recueil- lies à l'automne 1983
num Le castor est toujours localisé au même endroit : aucun signe d'activité n'est enregistré
22
Castor no. 618. Ce castor fut capturé près d'une ancienne hutte située au nord du réservoir de La Grande 2 et muni d'un radio-émetteur le 20 septembre 1982 (Figure 2). Le niveau du réservoir à cette date était à* la cote 173,44m. Notons également que deux autres castors, un juvénile et un jeune de l'année, ont été capturés à ce site puis relâchés en raison de la faible dimension de leur queue.
Une semaine plus tard, le niveau du réservoir atteignait 174,63 m, soit une augmentation de 1,19 m. Le repérage effectué le 28 septembre 1982 indique que ce castor avait migré à l'extérieur du réservoir sur un petit lac situé à environ 1,6 km au nord du lieu de capture. Par la suite, les repérages du 13 et du 22 octobre 1982 indiquent que l'animal était toujours situé sur le même lac et qu'il occupait une vieille hutte située à environ 375 m de l'endroit où il fut repéré le 28 septembre 1982. Un important amas de nourriture fut également observé à proximité de cette hutte (Figure 4). Ce castor n'ayant vraisemblablement pas eu le temps de construire seul un amas de nourriture de cette taille en si peu de temps, on peut donc supposer que d'autres castors se sont joint à lui ou qu'il s'est joint à d'autres castors.
Le repérage effectué le 30 octobre 1982 indique que ce castor a effectué un déplacement de plus de 4 km. Il a été localisé près d'une hutte avec amas de nourriture construite sur les bords d'un petit lac, situé au sud-ouest du point de capture (Figure 4). Ce castor a dû, soit traverser une section du réservoir d'une largeur d'environ un kilomètre ou contourner la baie située au nord du point de cap-ture.
De plus, il est à retenir que le castor s'est probablement déplacé avec des castors appartenant à la même colonie ou s'est joint à une autre colonie qui occupait ce lac à extérieur du réservoir étant donné la taille qu'avait l'amas de nourriture trouvé près de la hutte. Il est peu probable que cet individu ait construit seul, en moins d'une semaine, un amas de nourriture de cette taille.
82.10.13
Déplacements du castor n°618
Lieu de capture
Déplacement du castor du 20 septembre 1982 au 17 septembre 1983 Réservoir de La Grande 2 au niveau minimal
Zone de marnage du réservoir de La Grande 2 Niveau minimal du réservoir ( 167.6 m Niveau maximal du réservoir ( 175.3 m
1
24
Du 30 octobre 1982 au 19 juillet 1983, ce castor fut repéré au même endroit. Les repérages aériens réalisés au cours du printemps et une partie de l'été 1983 ont permis de noter des signes d'activités en périphérie du plan d'eau (présence de rejets de végétaux, arbres coupés, construction d'un barrage, sentiers, etc.). Un castor fut également aperçu lors d'un repérage.
Du 15 août au 17 septembre 1983, l'émission sonore du radio-émetteur fut repérée toujours au même endroit. Le 17 septembre 1983 et le 29 mai 1984, une visite du site fut réalisée. Le radio-émetteur a été localisé à proximité de la hutte sous le sol couvert de mousse. Une recherche exhaustive sur le site (fouille de la hutte, de quelques terriers et de certains canaux) n'a pas permis de récupérer ce radio-émetteur. La topographie du milieu et le niveau d'eau du lac ont rendu impossible l'accessibilité et la récupération du radio-émetteur.
Castor no. 619.
Le castor fut capturé le 21 septembre 1982 près d'une hutte localisée sur une île située dans la partie nord du réservoir de La Grande 2.
Le niveau du réservoir était alors à la cote 173,64 m. Au cours de cette séance de capture, un autre castor a été capturé à ce site.
Cependant ce dernier a été trouvé mort dans le piège, celui-ci ayant glissé sous l'eau.
Le repérage du 13 octobre 1982 indique que le castor marqué avait réalisé un déplacement de plus de 1,6 km.
A
cette date, le niveau du réservoir avait augmenté d'un mêtre et l'animal était sur une petite île située à environ 400 m au sud-est du site où furent capturés et marqués les castors no. 629 et no. 630 (Figure 5). Notons que des signes d'activités (copeaux de bois, sentiers, etc.) ont été observés sur l'île.Du 22 octobre au 30 octobre 1982, ce castor fut repéré sur une autre île située à environ 625 m à l'ouest de celle où il fut localisé le
25
13 octobre et à environ 550 m au sud-ouest du lieu de capture des castors no. 629 et no. 630 (Figure 5).
Du 8 novembre 1982 au 3 janvier 1983, ce castor a été repéré au même endroit que le castor no. 630. L'animal s'est donc déplacé de l'île vers la bordure du réservoir et s'est établi avec le castor no. 630 dans une hutte nouvellement construite (Figure 5). Notons que durant cette période le niveau du réservoir s'est abaissé de 0,44 m.
Les repérages effectués entre le 14 janvier 1983 et le 5 mai 1983, montrent que le castor no. 619 fut localisé à environ 200 m à l'est du lieu où il fut repéré, du 8 novembre 1982 au 3 janvier 1983 (Figure 5). Au cours de cette période, le niveau du réservoir s'est
abaissé de 1,6 m.
Le 10 avril 1983, une visite du site permis de noter des signes d'activités. Il fut possible d'observer des pistes de castors et un sentier qui partait d'une ouverture pratiquée dans le couvert de glace, à environ trois mètres du rivage. Ce sentier conduisait à un bosquet de bouleaux où des arbres d'un diamètre d'environ 6 cm avaient été abattus.
Une visite au sol effectuée au mois d'avril 1983, permis de suivre, à l'aide d'un récepteur, sous le couvert de glace, les déplacements de ce castor. Ce dernier effectuait des mouvements dans toutes les directions cherchant ainsi à s'éloigner du bruit produit par les déplacements des observateurs sur le couvert de glace.
Les repérages aériens effectués entre le 22 avril 1983 et le 5 mai 1983 ont permis de noter que des arbres étaient régulièrement abattus et que l'accès pratiqué dans le couvert de glace, noté le 10 avril, était utilisé. En effet, tout le long du sentier jusqu'à l'accès, il y avait des morceaux de bouleau abandonnés et des copeaux de bois. De plus, il fut possible de noter la présence d'un tronc de bouleau dans l'ouverture pratiquée dans le couvert de glace.
‹-7s
L n1
201 83-01-14"
83-01-20.
83-02-11v 83-02'4 83-03-02 83-03-31 83-04-10 83-04-22 83.05-05
Figure 5
Déplacements du castor if 619
26
o
0 200 1 000 m