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Pour mener à bien nos recherches, nous souhaitions idéalement contacter plusieurs institutions ne fonctionnant pas toutes avec la même pédagogie. Nous avons donc sélectionné et contacté quatre institutions par téléphone pour leur communiquer notre sujet de Bachelor (gestion des écarts) tout en veillant à ne pas divulguer la profondeur de la recherche (sanction/punition, « incasabilité »). Cependant, seules deux institutions ont décidé de collaborer avec nous. De ce fait, c’est uniquement à ces deux institutions que nous avons fait parvenir un mail sur le processus de notre recherche, de manière plus détaillée.

Une des deux institutions dans laquelle nous avons pu mener des interviews, nous semblait intéressante dans le sens où elle co-construit avec les adolescent·e·s les moyens de réparation de leurs actes suite à une transgression conséquente. Nous pensions que son approche s’apparentait à ce que nous entendions par sanction éducative. De réputation, ce foyer met à disposition un cadre ouvert pour les adolescent·e·s qu’il accueille, avec quelques règles fixes et non négociables mais avec, en parallèle, une grande marge de manœuvre pour les jeunes et l’équipe éducative. La seconde institution qui a également accepté de nous rencontrer accueille des enfants et adolescent·e·s en difficulté ou en situation de rupture sociale. Pour nous, l’intérêt de contacter cette institution était que celle-ci avait pour réputation de travailler avec la méthode de la sanction non punitive. Ainsi, nous pensions pouvoir questionner ce qui était mis en place pour que cela fonctionne, comprendre en quoi cette méthode influençait la pratique des professionnel·le·s et entrevoir quelles étaient les répercussions pour les jeunes.

Etant donné que notre travail porte sur l’accompagnement éducatif d’adolescent·e·s institutionnalisé·e·s, nous pensions fondamental de nous centrer sur les deux populations de recherches concernées, soit les jeunes et les membres des équipes éducatives. Pour ce faire, nous avons imaginé mener des entretiens semi-directifs individuels avec chaque membre intéressé·e de ces deux populations de recherche. En effet, nous pensions que cela nous permettrait d’orienter et de recentrer la conversation autour des éléments de recherche qui nous intéresseraient tout en laissant une marge de manœuvre et de réponses aux populations interrogées. En procédant ainsi, notre démarche a été qualitative.

Durant tout le processus se rapportant à nos terrains de recherche, nous avons tenu à préserver l’anonymat des institutions et des personnes que nous avons rencontrées. La dimension éthique de notre recherche était un point important pour nous. Nous avons donc rédigé en amont une déclaration de consentement éclairé (Cf. annexes) pour chaque interviewé·e. En effet, il était nécessaire pour nous que chacun·e soit conscient·e des objectifs de la recherche et ait la possibilité de se rétracter si tel était son souhait. De plus, nous avons délibérément fait le choix de proposer des situations fictives qui relevaient un écart de comportement commun (vol de biscuits), car nous souhaitions prévenir les situations de résonnances et nous désirions éviter de heurter nos interlocuteurs et interlocutrices.

Durant les entretiens, nous avons proposé deux situations fictives aux professionnel·le·s leur permettant de suggérer une réaction face à un comportement transgressif. Pour ces deux situations, nous avons présenté le même jeune, nommé Sylvain, ayant le même profil et un parcours de vie identique. Toutefois, dans la situation A, nous avons tenu à rester évasives sur la situation générale du jeune. A contrario, dans la situation B, nous avons mis l’accent sur les caractéristiques « d’incasabilité » du jeune, c’est-à-dire que nous avons décrit un adolescent ayant

une histoire personnelle chargée, un parcours institutionnel compliqué et des difficultés à créer le lien avec l’équipe éducative. Bien évidemment, nous n’avons pas clairement stipulé que ce jeune était « incasable », nous l’avons sous-entendu par les points susmentionnés. Dans un deuxième temps, nous avons présenté un événement problématique que nous pensions être ordinaire au sein d’un foyer. Nous avons choisi l’exemple d’un vol de biscuits. De plus, nous avons relevé que le jeune en question avait, dans les deux situations, disparu du groupe, suite à cet épisode de vol, mais nous avons fait planer le doute sur l’auteur·e du vol en question. (Situations détaillées, Cf. annexes)

Nous avons interviewé sept éducateurs et éducatrices, la plupart d’entre elles et eux avaient plusieurs années d’expérience auprès d’adolescent·e·s en difficulté, alors qu’une minorité de professionnel·le·s était diplômée depuis peu. Dans la première institution, deux d’entre elles et eux ont été questionné·e·s sur la situation A et le même nombre de personnes a été interrogé sur la situation B. Pour ce qui est de la seconde institution, une personne a été interviewée sur la situation A et deux individus pour la situation B. Les données que nous avons récoltées étaient plus nombreuses au sujet de la situation B. Nous avons décidé de mettre l’accent sur cette situation, car celle-ci soulève les caractéristiques de « l’incasabilité ». Ainsi, le fait de récolter plus de données au sujet de cette thématique nous semblait pertinent pour répondre à nos axes et hypothèses de recherche.

Pour les jeunes que nous avons interviewé·e·s, nous avons également proposé deux situations différentes. Cependant, certaines variables restent communes telles que la description du profil de la ou du jeune qui reste vague, la culpabilité avérée de Sylvain et le fait que ce dernier soit isolé dans sa chambre. A travers ces entretiens, nous souhaitions que les jeunes interviewé·e·s puissent se positionner face au comportement de l’éducateur, dans un contexte de gestion d’écart. C’est pourquoi, nous avons proposé deux approches éducatives diamétralement opposées. Dans la situation A, l’éducateur réagit sous le modèle de la sanction éducative, tandis que dans la situation B, le professionnel adopte une posture punitive. (Situations détaillées, Cf. annexes)

Nous avions planifié de nous entretenir avec sept adolescent·e·s. Cependant, nous avons dû faire face à une rétractation de dernière minute, que nous avons aisément comprise et acceptée. Dans la première institution, nous avons eu la chance de nous entretenir avec deux jeunes au sujet de la situation A et avec deux autres adolescent·e·s pour la situation B. C’est au sein de la deuxième institution qu’il y a eu une annulation, c’est pourquoi seule la situation B a été travaillée avec deux jeunes. Pour cette population, nous avons également souhaité prioriser la collecte de données autour de la situation B, car celle-ci mettait en avant une posture professionnelle particulière, se rapportant à la punition. Nous imaginions que cette situation pouvait déclencher plus d’échanges et de débats.

Pour l’organisation des entretiens, nous nous sommes entendues avec les institutions pour que ceux-ci se déroulent au sein de leur structure et de préférence dans des locaux à l’écart de tout dérangement. Nous trouvions que le fait que nous nous déplacions pour trouver les interviewé·e·s pouvait prouver que leur témoignage était important pour nous et notre recherche. De plus, nous imaginions que le fait de nous trouver dans un lieu fermé serait plus confortable qu’un lieu public, notamment pour que les individus se sentent plus libres de partager ce qu’ils souhaitaient. Durant les entretiens, nous avons débuté la rencontre sur un échange autour de la situation fictive proposée. Cela a permis, dans un premier temps aux interviewé·e·s de s’exprimer sur une situation externe, qui ne les concernait pas. Dans un deuxième temps, une fois que la confiance

s’était installée entre les personnes interrogées des deux populations et nous-même, celles-ci avaient plus de facilité à se confier et à faire des parallèles avec leurs expériences en institution. De ce fait, à partir de ce moment, nous avons pu échanger plus aisément autour de leur perception de l’accompagnement dans le travail social.

Tout au long de ces entretiens, nous avons été attentives aux termes que nous utilisions, afin de ne pas orienter les dires des personnes que nous interviewions. En effet, nous n’avons pas souhaité traiter de nos thématiques de manière frontale, car nous voulions observer ce que notre public cible pouvait spontanément nous dévoiler à ce sujet. D’ailleurs, c’est en dernier lieu que nous avons demandé aux jeunes et professionnel·le·s avec lesquel·le·s nous nous sommes entretenues de nous faire connaître leur interprétation des termes de sanction et de punition. Nous leur avons aussi demandé d’évaluer la méthode en vigueur dans la situation fictive proposée et de relever les possibles similitudes dans le fonctionnement de leur institution.

Enfin, pour ce qui est de la rédaction de ce document, nous avons tenté de rester objectives. De ce fait, nous avons volontairement essayé de nous effacer du récit qu’il contient. Pour cela, nous avons pris une certaine distance face à nos objets de recherche et avons tenu à traiter les points de celle-ci grâce aux témoignages recueillis ainsi qu’aux ouvrages approfondis.