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1 2 Rappel sur la théorie du voilement des plaques

1.3.1 État de l’art

Les développements théoriques sur le voilement des plaques raidies s’avèrent particu- lièrement difficiles. Outre les difficultés rencontrées pour les plaques non-raidies (la pré- sence d’imperfection inévitables dus à la fabrication, la nécessité d’une théorie non-linéaire en grande déformation, etc.), la présence des raidisseurs complexifie le comportement des plaques raidies. En effet, selon la rigidité relative des raidisseurs par rapport la plaque de fond, une plaque raidie peut voiler selon plusieurs modes. La figure 1.7 illustre ce phéno- mène. Si les raidisseurs ont de faibles rigidités, ils voilent avec la plaque, donnant lieu à un mode global (figure 1.7a). Si les raidisseurs sont rigides, le voilement se produit dans

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un mode local des sous-panneaux (figure 1.7d). Si les raidisseurs sont minces, le voilement par torsion ou le voilement local des composants des raidisseurs peut se produire sans la participation de la plaque (figure 1.7e et 1.7f). Les modes de voilement des figures 1.7b et 1.7c sont les modes d’interaction où les raidisseurs sont rigides en flexion mais faibles en torsion.

Figure 1.7 – Mode de voilement élastique des plaques raidies

De plus, la complexité augmente si les raidisseurs ne sont pas identiques ou inéga- lement espacés. Une telle configuration peut être rencontrée en cas de chargement non uniforme, où les raidisseurs sont utilisés à proximité des régions fortement chargées pour des raisons économiques. Par conséquent, les études sur le comportement des plaques raidies sont pour la plupart sous forme semi-analytique voire empirique. Un résumé très riche en terme de références (plus de 400) sur l’état de l’art des plaques raidies peut être trouvé dans Bedair [24]. Il récapitule les résultats des nombreuses études depuis les dé- buts des recherches jusqu’à aujourd’hui. D’après Bedair [24], les travaux sur les plaques raidies peuvent être classés en deux catégories basées essentiellement sur leurs modes de voilement mentionnés ci-dessus : soit sur un modèle de poutre-poteau (en anglais the strut

model), soit sur un modèle de plaque orthotrope.

1.3.1.1

Approche poutre-poteau individuel

Dans cette approche, les plaques raidies sont traitées comme une série de poutres in- dividuelles constituées par le raidisseur et une largeur efficace la plaque associée comme sur la figure 1.8. Cette approche a été utilisée principalement pour les plaques courtes possédant un grand nombre de raidisseurs ou pour les plaques ayant des raidisseurs de grande rigidité. Une telle configuration est fréquemment rencontrée dans la construction

navale car les raidisseurs sont dimensionnés pour résister aussi à la pression hors-plan de sorte que le mode de voilement local du sous-panneau soit le premier. Pour ce type de plaque, l’effet de membrane stabilisant dans le sens transversal est négligeable. En consé- quence, tous les raidisseurs possèdent une déformée identique à l’état ultime sauf une petite partie à proximité des bords non chargés où l’effet stabilisant de la membrane n’est pas négligeable. La problématique se réduit donc à la détermination de la charge ultime d’une partie représentative, qui est le modèle de poutre-poteau constitué par le raidisseur et une partie effective de la plaque adjointe.

Figure 1.8 – Approche par modèle de type poure-poteau

Cette approche est fréquemment utilisée dans la pratique (Dowling [52], Dwight et Little [55], Murray [103]) du fait de sa simplicité et de la facilité de mise en œuvres. Le fait de ne considérer qu’une partie représentative de la plaque permet de ramener le pro- blème de plaque raidie à un problème de flambement d’un poteau qui est très bien connu. Cependant, la méthode est critiquée car elle est basée sur l’hypothèse que le voilement local se produit toujours en premier. Or pour les panneaux raidis longs, le voilement local n’est pas forcement le premier mode critique. De plus, en traitant la plaque comme en un ensemble de poutres-poteaux individuels, les conditions aux limites de la structure n’in- fluent pas sur le comportement du modèle. L’effet membranaire stabilisant est supprimé dans cette approche qui rend donc le résultat très conservatif (c’est-à-dire la charge ultime est sous-estimée).

1.3.1.2

Approche plaque orthotrope équivalente

Dans cette approche, la plaque raidie est traitée comme une plaque orthotrope équiva- lente ayant une épaisseur constante (figure 1.9). Cette épaisseur, normalement plus grande que l’épaisseur réelle, est obtenue en "tartinant" les raidisseurs. Plusieurs techniques de tartinage sont proposées, soit par une section transversale équivalente (méthode la plus simple) ou pour un moment d’inertie de flexion équivalent (la méthode utilisée le plus couranmment). Contrairement à l’approche précédente, cette méthode est plutôt valable si le mode de voilement global domine les autres modes, ce qui est très commun dans les panneaux raidis légers ou les plaques longues.

1.3. Comportement des plaques raidies 17

Figure 1.9 – Approche par modèle de type plaque

Il est noté que l’avantage majeur de cette méthode est qu’elle prend en compte l’effet stabilisant de membrane qui est ignoré par le modèle poutre précédent. En revanche, cette approche ne permet pas de distinguer le mode de ruine, c’est-à-dire de savoir si la ruine a lieu au niveau de la plaque ou du raidisseur. Le fait d’assimiler les modes de ruine de plaque et de raidisseur peut aboutir à des résultats très favorables. Un autre inconvénient de cette méthode se présente si les raidisseurs ne sont pas identiques car elle conduit à la non-uniformité de l’épaisseur équivalente. Des applications de cette approche peuvent être trouvées dans Maquoi et Massonnet [94] et Jetteur [76].

En parallèle aux deux approches précédentes et suite aux développements des outils informatiques, de nombreux auteurs ont utilisé une voie numérique pour étudier le com- portement des plaques raidies. Un des avantages de cette méthode numérique est qu’elle permet d’étudier le comportement de structures à "l’échelle réelle" avec plusieurs pos- sibilités de conditions aux limites qui ne sont pas forcément réalisables au laboratoire. Les différents paramètres intervenants dans le problème peuvent aussi être considérés en même temps dans la modélisation. Bien que les méthodes numériques aient des capa- cités de prédiction pour le comportement de structures complexes, leur applications se restreignent plutôt au domaine de la recherche (notamment pour vérifier l’exactitude des normes proposées).