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Niveau macroscopique et conditions exogènes

4.1 État de l’art .1 Les facteurs

Le TIV est une variable microscopique associée à chaque véhicule, et résulte directement en un point donné de la route des décisions du conducteur. Dans une section rectiligne et en un point donné, la décision d’un conducteur est un ensemble complexe de choix : choix de voie, choix de vitesse, choix d’accélération. Cet ensemble de choix dépend de beaucoup de facteurs lors de la prise de décision. La connaissance des distributions des TIV sous l’influence de ces divers facteurs doit être approfondie. Rappelons que la distribution des TIV est l’un des indicateurs importants pour décrire et interpréter le comportement de l’ensemble des conducteurs dans le trafic routier.

Aly [65] semble être le premier auteur ayant tenté de classer les facteurs affectant les distributions de TIV. En effet, il a récapitulé 5 facteurs principaux dans sa thèse comme suit :

1. Facteur lié à la circulation, A1 2. Le comportement du conducteur, A2

3. Facteur de la route, A3

4. Facteur de contrôle de trafic, A4 5. Facteur environnemental, A5.

Les facteurs ont été listés et puis abordés par Aly mais ne sont pas analysés plus en détail. Le facteur lié à la circulation ou au trafic A1, d’après Aly, englobe par exemple le pourcentage des PL dans le trafic, la vitesse moyenne globale, la catégorie de poursuite des véhicules comme véhicule libre ou véhicule contraint. La catégorie physique du véhicule est aussi considérée comme un facteur du trafic A1, par exemple la distribution des TIV des VP est différente de celle des PL, etc.

Le deuxième facteur A2 indique l’état psychologique et/ou physique des conducteurs en fonction de leur possibilité de dépassement, de leur position dans le trafic. Prenons un exemple, un suiveur poursuivant un véhicule en tête se comporte différemment selon qu’il a, ou non l’intention de dépasser. Dans le premier cas, le conducteur, dit le dépasseur garde en permanence la volonté de doubler le véhicule en tête pour gagner en temps ou en liberté de mouvement. Le facteur A2 pourrait comporter le sexe, l’âge, l’expérience des conducteurs (l’accidentologie par exemple), etc.

Le facteur de la route A3 concerne l’infrastructure, la qualité de service, la limite de vitesse, le type du réseau routier (autoroute, route nationale, route départementale) ou bien le nombre de voies du tronçon, etc.

Pour le quatrième facteur A4, Aly a indiqué la signalisation et aussi les informations de trafic fournies au conducteur lors du déplacement. Enfin, le facteur environnemental A5 est décrit comme la saison, l’environnement de la route, l’ambiance extérieure aperçue, etc.

Le classement d’Aly permet de comprendre la complexité des phénomènes du trafic et incite les chercheurs à préciser les informations dont ils disposent et qu’ils traitent. Le classement peut jouer aussi le rôle de guide pour des études futures en vue de mieux connaître les différents aspects des comportements des conducteurs.

Pourtant, le classement d’Aly est plutôt qualitatif. En effet, les facteurs d’Aly sont difficiles à quantifier alors que le TIV est une variable quantitative. Le caractère non mesurable des facteurs rend flous certains facteurs, par exemple celui du comportement de conduite A2, car la distinction des types de conducteurs n’est pas facile à effectuer à partir des données empiriques disponibles. De plus, dans chaque facteur, les caractéristiques des « sous-facteur » sont très variées.

Pour éviter ces défauts du classement d’Aly, nous proposons dans cette étude, de prendre en compte les facteurs organisés de façon hiérarchique. Le classement consiste à distinguer quatre niveaux de facteurs comme ci-dessous :

1. Les facteurs exogènes, F1. 2. Les facteurs macroscopiques, F2 3. Les facteurs mésoscopiques, F3 4. Les facteurs microscopiques, F4.

Les facteurs exogènes F1 regroupent toutes les conditions environnementales à l’exté-rieur connues hors celles liées au flux du trafic. Il s’agit par exemple de la condition mé-téorologique, du type de réseau routier (autoroute, route nationale, route départementale, etc.), de la saison, de la période dans la journée ou de l’environnement, de l’infrastruc-ture. Le facteur F1 inclut également les contextes d’infrastructure comme la signalisation, l’information, les virages, le type de voie et le nombre de voies, etc. Autrement dit, en précisant ce facteur, on répondra aux questions où et quand la circulation a eu lieu. Ce sont les questions sur la localisation, les caractéristiques de la route, le temps et l’ambiance

de l’environnement. Le mot exogène utilisé ici qualifie des facteurs qui ne sont pas calculés à partir des données du trafic.

Les facteurs macroscopiques F2sont des variables quantitatives des flux de trafic calcu-lées par agrégation sur une période de temps I. Les trois variables principales sont le débit agrégé 6 minutes Q6, le taux d’occupation agrégé 6 minutes T6 et la vitesse harmonique agrégée 6 minutes V6. Le pourcentage des PL peut aussi être considéré dans ce facteurs.

Les facteurs mésoscopiques F3 ont un champ plus circonscrit que celui des facteurs macroscopiques F2. Si les facteurs F2 prennent en compte l’ensemble du flux de trafic, les facteurs F3 se concentrent sur des relations à l’intérieur ou entre les pelotons, ou bien sur des interactions entre les véhicules voisins. Le cas le plus important est l’impact du véhicule de tête sur le comportement des véhicules suiveurs. La notion de peloton joue un rôle central dans cette optique et est l’objet d’une étude supplémentaire dans le chapitre suivant.

Enfin les facteurs microscopiques F4 affectant les véhicules sont liés aux autres in-formations du véhicule lui-même. La vitesse instantanée est l’une des trois inin-formations individuelles obtenues par le système de mesure en un point donné (les deux autres sont la longueur et le temps d’arrivée du véhicule). Par conséquent, cette variable est étudiée par mise en relation et/ou par association avec le TIV.

On remarque que les facteurs F2, F3, F4 sont généralement quantitatifs. Un facteur macroscopique F2 important, le débit Q6 est lié à la demande du trafic. Cette demande dépend aussi de la période dans la journée, de la saison, etc., donc des facteurs F1. Cela veut dire que dans certains cas, l’information macroscopique pourrait répondre à la question quand posée en cherchant les facteurs F1.

Le classement hiérarchique proposé n’est pas complet. Il est focalisé particulièrement sur les informations de base couramment enregistrées. D’autres facteurs importants n’ont pas trouvé leurs place dans le classement comme le motif de déplacement, l’état psychologique ou l’expérience de conducteur, etc. Ces types d’information, n’étant pas disponibles au moins dans nos bases de données, sont exclus dans notre étude. Dans ce chapitre, les deux premiers facteurs F1, F2 sont étudiés. Le chapitre suivant sera consacré aux deux derniers F3, F4.

4.1.2 État de l’art

Soit une période de mesure T dans laquelle les TIV H obtenus sont un n-échantillon (h1, h2, . . . hn). Le débit QT calculé par unité de temps sur la période T est calculé comme suit :

QT = n

T (4.1)

Par ailleurs, la moyenne des TIV dans la période T est :

ˆ µT = n X 1 hi×1{hi∈T } n (4.2) =       n X 1 hi T       × 1 QT (4.3)

Dans le cas où Pn

1 hi = T, c.à.d que la période T est remplie entièrement tout d’abord par l’arrivée du véhicule 1 et en fin par l’arrivée du véhicule n au point de mesure, la

moyenne des TIV ˆµT est exactement l’inverse du débit QT. Pourtant, si la période T est fixée en avance, comme c’est le cas (T = 6 minutes) dans le système de mesure français, le cas idéal se produit rarement. On a donc en général µT 6= Q−1T .

Les calculs dans le Chapitre 1 montrent par ailleurs que, malgré l’erreur numérique, la relation hyperbolique entre µT et QT est toujours marquée notamment lorsque le débit QT est élevé - le cas où plusieurs arrivées dans la période T sont réalisées. En conséquence, la relation entre le débit et la moyenne des TIV est naturellement acceptée dans tous les cas, on a µT ≈ Q−1T .

Dans la littérature, le débit QT a été considéré comme seul facteur décisif de la distribu-tion des TIV. Deux principales approches concernant le débit sont appliquées. La première consiste en diviser les états du trafic en trois régimes : le trafic fluide, la congestion et le trafic intermédiaire (entre les deux premiers). Al-Ghamdi et al. en 2001 [105] ont proposé de distinguer les régimes du trafic par des seuils quantitatifs comme suit :

Trafic fluide : QT < 400 véh/h, des phénomènes aléatoires,

Trafic congestionné : QT > 1200 véh/h, les phénomènes de régularité, Trafic intermédiaire : 400 ≤ QT ≤ 1200 véh/h.

Dans cette approche de classement, différents types de distributions des TIV sont utili-sés correspondant à chacun des régimes du trafic. On revoit donc les propositions de Haight et al., de May [114], et de Krbalek et al.

La seconde approche tend à calibrer les TIV par l’utilisation d’un seul modèle spécifique. Les paramètres de ce modèle choisi sont ensuite jouent le rôle d’indicateurs pour mesurer la sensibilité du facteur de débit. Ensuite, les paramètres sont calibrés pour chaque niveau du débit et pourraient être représentés par des abaques. Ce sont Grecco et al. [60] et ensuite Khasnabis et al. [66] qui sont les premiers utilisateurs de cette approche. Cette approche de calibrage demande un modèle spécifique très performant ce qui n’est pas le cas du modèle Hyperexponentiel E utilisé par Grecco et al. [60] et par Khasnabis et al. [66].

Grecco et al. en 1968 ont calibré les relations entre les paramètres du modèle Hyper-exponentiel E et le débit qT en véh/s. La régression linéaire a été réalisée et une abaque des probabilités des TIV de type Pr{H > h} a été établie. La méthode a été répétée par Khasnabis et al. en 1980.

L’approche de calibrage est majoritaire parmi les auteurs dans la littérature. Dawson et al. [56] en 1968 ont appliqué le modèle Hyperlang Γ à deux bases de données, l’une était la base du HCM 1965 (Highway Capaacity Manual) et l’autre était celle de l’Université Purdue, aux État-Unis. Ils constatent que certains paramètres sont sensibles au débit QT tandis que les autres ne le sont pas. Par ailleurs, la sensibilité des données est tout à fait différente entre les deux bases de données, par exemple le paramètre κ du modèle d’Erlang des TIV contraints a dépendu de QT pour la deuxième base mais en est resté indépendant pour la première base de données.

Les paramètres obtenus pour chaque niveau de débit QT dépendent aussi de la perfor-mance de la méthode d’estimation utilisée. Buckley en 1968 [57] a utilisé la MM et constaté que certains paramètres des modèles Γτ, Γ-SPM, N -SPM, dont le paramètre β du modèle Γτ et les paramètres σ, λ du modèle N -SPM, ont changé brusquement leur valeur dans l’échantillon ayant la moyenne de TIV de l’ordre de 4 s.

En 1975, des facteurs hors trafic de type F1ont été constatés par Cowan [59] : le nombre de voies qui influe sur les possibilités de dépassement, influence aussi le processus d’arrivée des véhicules en un point donné. Si sur les routes à plusieurs voies, ce processus est un processus de Poisson, le processus des arrivées ne serait plus de Poisson sur les routes (à deux fois une voie par exemple) où le dépassement est restreint. Cette remarque était à l’origine du modèle M4 de Cowan - la première version des modèles g-GQM.

Branston [58] en 1976 a étudié la distribution des TIV sur l’autoroute péri-urbaine M4 à l’Ouest de Londres et sur les routes bidirectionnelles en Indiana aux États-Unis. Il a calibré le modèle ln N -GQM et a constaté que les paramètres diminuaient en fonction du débit QT et dépendaient également de la vitesse moyenne du trafic. En conséquence, ces valeurs des paramètres ont été réutilisées dans la simulation.

Wasielewski en 1979 [64] a utilisé le modèle Γ-SPM pour estimer la capacité du trafic et tester l’indépendance de la distribution des TIV par rapport au débit QT. Wasielewski a constaté que le paramètre λ du modèle Γ-SPM variait linéairement en fonction du débit q (véh/s) :

λ = λ0+ m q Avec λ0 = −0, 058 , m = 1, 401 (4.4) Certains travaux traitent l’effet de la pluie sur la distribution des TIV comme celui de Seddiki [127] en 1993. Le travail s’est concentré sur l’ensemble des données en négligeant les différentes distributions de TIV en fonction de la demande du trafic.

Hoogendoorn et al. [79] en 1997 ont utilisé le modèle Γ-GQM. Ils ont proposé que tous les paramètres du modèle varient en fonction du débit QT. Hoogendoorn et al. [80] en 1998 ont aussi étudié l’influence de la période de la journée et du type des véhicules sur la distribution des TIV.

Michael et al. [128] en 2000 ont étudié l’influence d’un message de conseil envoyé aux conducteurs sur le TIV. Ce facteur est donc du type F1. Les groupes de conducteurs sont divisés en deux, l’un avec information et l’autre sans information. Michael et al. constatent que le pourcentage des TIV courts (inférieurs à 2 s), la moyenne des TIV et la moyenne des DIV dans le groupe de conducteurs informés augmentent tandis que le pourcentage des TIV très courts (inférieurs à 1 s) diminue significativement.

Une autre approche pragmatique de Helmut et al. [89], proposée en 2007, consiste à estimer la fonction de répartition des TIV par l’utilisation de formules hyperboliques. L’idée est d’utiliser directement le débit horaire Qh pour obtenir la distribution des TIV correspondante. Le résultat est ensuite entré dans la simulation du trafic. Cette approche est cependant moins précise et n’a eu que des applications locales limitées.

4.1.3 Discussion

En résumé, le problème de la distribution des TIV dans différents contextes et sous différentes conditions exogènes est encore peu étudié. En réalité, plusieurs distributions des TIV pourraient être obtenues pour un même niveau de débit. Pour interpréter ce phénomène, on est incité à en attribuer la cause aux conditions exogènes qui sont liées aux circonstances dans lesquelles les conducteurs conduisent les véhicules, ou lorsque les données de trafic sont collectées. Deux questions principales sont posées : où se trouvent les conducteurs des véhicules et quand font-ils (elles) partie du flux du trafic ? La question où vise le site de mesure, le type de voie alors que la question quand concerne la période de la journée et/ou la condition météorologique, etc. Ces deux questions ont pour but de préciser le facteur F1 précité.

Faute de données suffisantes dans la littérature, les facteurs macroscopiques du trafic tels que le débit QT, le taux d’occupation TT n’ont pas été séparés dans les études pré-cédentes lorsque différentes situations exogènes sont mises en jeu. Par ailleurs, d’autres travaux ont montré des effets exogènes statistiquement significatifs sur les TIV courts (par exemple TH < 2 s, Aron et al. en 1997 [129]), et ces effets étaient eux-même fonction du débit. En conséquence, il est proposé d’étudier au niveau plus général toute la distribution des TIV en fonction des facteurs exogènes.

Peu d’auteurs jusqu’à maintenant ont tenté d’étudier l’impact de la concentration du trafic K sur la distribution des TIV. La concentration, mesurée en espace par exemple

à partir de photographies aériennes, est aussi une variable macroscopique essentielle du trafic. Son caractère spatial semble intuitivement empêcher les chercheurs de la mettre en relation avec la distribution du TIV. Pourtant, il est noté que la concentration peut être estimée par l’intermédiaire du taux d’occupation TT (cf. Cassidy [99]) qui est mesurable par des capteurs routiers en un point donné. En conséquence, le taux d’occupation TT sera un des objets d’étude de ce chapitre.

Dans la première partie de ce chapitre, la distribution des TIV est étudiée en prenant en compte le débit 6 minutes Q6, le taux d’occupation 6 minutes T6 et la vitesse moyenne harmonique 6 minutes V6. Par ailleurs, les distributions des TIV sont aussi examinées dans différents états élémentaires eij du trafic dans le diagramme fondamental empirique. La notion d’état élémentaire correspond à un couple Débit–Taux d’occupation (Q6, T6) représenté par un point du diagramme fondamental empirique (ou plutôt par un carré si le couple correspond à un couple de classes de débit et de taux d’occupation).

Dans la suite de ce chapitre, les effets de la condition météorologique et du type de voie sont examinés en même temps que ceux de la circulation Q6. Le modèle Γ-GQM et le modèle DG sont utilisés en tant que les modèles spécifiques de TIV. Tout au long de notre étude, ces deux modèles fournissent de très bons ajustements pour la majorité des échantillons au niveau de signification de 5 % du test K–S.

4.2 Distribution des TIV à l’échelle macroscopique (les