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CHAPITRE 2 : LA DOSIMÉTRIE DES RAYONNEMENTS IONISANTS

2.6 La dosimétrie de référence

2.6.1 Étalonnage absolu des accélérateurs linéaires

Les traitements en radiothérapie dépendent de la fiabilité avec laquelle on peut livrer exactement la dose prescrite. L’ICRU recommande une précision de ± 5 % ce qui nécessite une chaîne d’étalonnage qui débute dans un laboratoire de métrologie. Il est pertinent de réitérer que toutes les mesures dosimétriques sont rapportées à l’eau par convention (l’eau ayant des propriétés proches des tissus biologiques). Les chambres d’ionisations utilisées en clinique sont considérées comme étant des dosimètres secondaires lorsqu’elles sont étalonnées contre un standard primaire qui est établi dans un laboratoire standard. L’utilisation d’un laboratoire standard et de protocoles de dosimétrie de référence permet de faire en sorte que le “Gray” d’un centre soit le même partout ailleurs. Il existe plusieurs centre d’étalonnage dans le monde16où le “Gray” est mesuré directement par une méthode de dosimétrie absolue comme la calorimétrie 17 Au Canada, le laboratoire des étalons du CNRC utilise une technique de calorimétrie où une masse d’eau scellée est irradiée par un faisceau de cobalt-60 (énergie moyenne 1.25 MeV) qui donne un débit de dose relativement constant selon sa demi-vie (5.27 ans). La dose absorbée Dfref

w,Qo est donnée par l’équation

suivante [74] :

Dfref

w,Qo =

Cw∆T

1 − δ (2.32)

16Conseil national de recherches Canada (CNRC, Ottawa Canada), National Physical Laboratory (NPL, Londre Royaume-Uni), Physikalisch-Technische Bundesanstalt (PTB, Berlin Allemagne), Laboratoire Na- tional Henri Becquerel (LNE-LNHB, Paris France), Istituto Nazionale di Metrologia delle Radiazioni Io- nizzanti (ENEA-INMRI, Rome Italie) et National Metrology Institute of Japan (NMIJ-AIST, Tsukuba Japon).

17Les chambres d’ionisation et les dosimètres chimiques (dosimétrie de Fricke) peuvent aussi être utilisés comme dosimètres primaires [51].

où Cw = 4170 J/(kg· K) est la capacité thermique massique de l’eau et δ est le défaut de chaleur qui prend en compte la proportion d’énergie utilisée par des réactions chimiques au lieu d’être convertie en chaleur [75]. Une irradiation de 1 Gy donne une petite différence de température ∆T ∼ 0.24 mK qui est difficile à mesurer et nécessite l’expertise d’un laboratoire spécialisé. Il existe également des calorimètres au graphite (le standard au NPL) qui offrent plusieurs avantages par rapport à l’eau scellée : la capacité thermique du graphite étant de Cgr = 714 J/(kg· K), 1 Gy donne ∆T ∼ 1.40 mK ce qui représente un signal 6 fois plus fort. La densité plus élevée du graphite (∼ 1.7 g/cm3) permet de réduire la taille du calorimètre et de mesurer des champs plus petits (jusqu’à 2 x 2 cm2)[76]. Finalement, il n’y a aucun défaut de chaleur (δ = 0) [77]. Il faut cependant rajouter un terme de correction kgr,w calculé par Monte Carlo pour convertir la dose absorbée au graphite à la dose absorbée à l’eau18 [77].

Pour les chambres d’ionisation un facteur d’étalonnage dans le cobalt-60 ND,w,Qo est dé-

terminé comme suit :

Nfref D,w,Qo = Dfref w,Qo Mfref Qo (2.33) où Mfref

Qo est la mesure corrigée de la chambre pour la même durée d’irradiation que le

standard de calorimétrie Dfref

w,Qo. Une chambre d’ionisation étalonnée peut ensuite être

utilisée dans un hôpital clinique pour déterminer la dose absorbée dans un fantôme d’eau selon un protocole de dosimétrie standard comme le TG-51 [20] de l’AAPM ou le TRS-398 [21] de IAEA comme suit :

Dfref w,Q= N fref D,w,Qok fref,fref Q,Qo M fref Q (2.34) où Mfref

Q = PionPelecPTPPpolMbrute est la mesure corrigée pour divers effets expérimentaux (recombinaison des ions, température/pression, effet de polarité) d’un faisceau de qualité

Q et kfref,fref

Q,Qo est un facteur de conversion de qualité permettant de passer du cobalt-60 à la

qualité de faisceau Q désirée (une énergie MV) . Dans le TG-51, ce facteur est déterminé

18Récemment plusieurs groupes se sont intéressés à l’utilisation de ces calorimètres pour faire des me- sures absolues dans les champs non standard qui sont problématiques aux dosimètres secondaires [76–78].

à l’aide du spécificateur de faisceau % dd(10)x19 qui représente la valeur du rendement en profondeur (excluant les électrons de contamination) à une profondeur de d = 10 cm20 pour un champ de référence 10 x 10 cm2 à une SSD (Distance source-surface) de 100 cm. Le physicien peut ensuite obtenir kQ,Qo de valeur tabulée de % dd(10)x. Ces tableaux ont

été récemment actualisées pour 32 chambres cylindriques par B. Muir et al. [79].

La chambre d’ionisation étalonnée peut ensuite être utilisée pour étalonner la chambre moniteur de l’accélérateur linéaire comme suit :

• Toujours en condition de référence du TG-51 (10 x 10 cm2, SSD = 100 cm et d = 10cm), on mesure la dose absorbée pour un nombre d’unités moniteur (ex. 100 UM) ce qui nous permet de déterminer le débit en Gy/UM. Une feuille de travail en annexe du TG-51 permet de documenter chaque étape de ce calcul incluant les différentes corrections qui doivent être appliquées à la mesure.

• Ce débit est ensuite ajusté pour avoir 1 Gy par 100 UM au point de référence de l’accélérateur (souvent l’isocentre en mode SAD21 = 100 cm). Cet ajustement peut être fait par un processus itératif qui implique d’alterner entre prendre des mesures avec la chambre et tourner le potentiomètre du linac qui contrôle les MU. La mesure est acceptée lorsqu’elle est à .5% de la valeur attendue [80].

• Il est important de noter que le logiciel de planification de traitement (TPS) est étalonné avec les données dosimétriques du linac ce qui inclut le débit de la dose absolue au point de référence (ex. 1 cGy/UM à l’isocentre). Si ce débit change, le TPS doit aussi être ré-étalonné pour donner les vraies valeurs de dose car son algorithme de calcul ne donne que des distributions de dose relative au point de référence.

Finalement, pour les autres types de détecteurs, il est possible de faire de la dosimétrie absolue en procédant à un contre-étalonnage avec une chambre d’ionisation retraçable à un standard primaire. Le détecteur devient donc un dosimètre tertiaire.

19Le TRS-398 utilise plutôt un ratio de la dose absorbée à 20 et 10 cm de profondeur (SAD = 100 cm) dénoté par TPR20,10(10) comme indice spécificateur de faisceau.

20La chambre est en fait placée à une profondeur de 10 + 0.6 · r

cav (où rcavest le rayon de la chambre) pour ajuster le point effectif de mesure qui est plus en surface dû aux mouvements avant des électrons.