• Aucun résultat trouvé

Émergence et évolution d'une problématique urbaine : l'étalement urbain et la

L'étalement urbain n'est pas un phénomène récent. Ses premières manifestations proviennent des suites de la Seconde Guerre mondiale et du boom économique qui en a résulté (Fortin, Després et Vachon, 2002). Recherchant un milieu de vie plus sain, plus tranquille et plus intime, la population de la classe moyenne émergente s'est peu à peu retirée des grands centres urbains pour s'établir en périphérie donnant ainsi lieu à l'éclosion rapide des banlieues et des bungalows individuels aussi connus sous le terme d'ensembles pavillonnaires (Fortin, Després et Vachon, 2002).

A la lumière d'une revue de la littérature, il semble qu'il soit difficile de définir exactement ce qui relève ou non de l'étalement urbain et encore plus ardu d'obtenir un

consensus à cet effet entre les divers intervenants (Boume, 2001; Lewis, Barcelo et Larivée, 2002). En effet, l'expression étalement urbain, urban sprawl dans la littérature anglophone, qui reflète une connotation péjorative, réfère généralement à l'extension urbaine du cadre bâti qui s'articule de façon plus ou moins organisée et à de très faibles densités. De la sorte, même s'il s'avère complexe de déterminer ce qui relève de l'étalement urbain ou tout simplement de la croissance urbaine et démographique «désirée»

et «souhaitable»2, il demeure possible d'énoncer certains facteurs explicatifs communément associées à l'étalement urbain. En effet, selon Lewis, Barcelo et Larivée, certains traits distinctifs peuvent généralement être attribués à l'étalement urbain (tableau

1.1):

Tableau 1.1 - Les traits distinctifs de l'étalement urbain - L'absence de limites à l'extension urbaine.

- Des ensembles résidentiels et commerciaux à faible densité.

- Une urbanisation en saute-mouton.

- La fragmentation du contrôle de l'utilisation du sol entre plusieurs municipalités.

- La prépondérance de l'automobile privée pour assurer les déplacements.

- L'absence de planification ou de contrôle centralisés à l'échelle métropolitaine sur l'utilisation du sol.

- L'extension généralisée des artères commerciales.

- Des disparités fiscales importantes entre les localités.

- La ségrégation des diverses utilisations du sol.

Source: Adapté de Lewis, Barcelo et Larivée, 2002, pp. 15-16.

Ce tableau général des caractéristiques de l'étalement urbain dépeint également de manière probante la situation dans laquelle se trouvent maintes villes nord-américaines en ce qui à trait au contrôle de l'étalement urbain. Par ailleurs, les nouvelles formes urbaines qui se dessinent actuellement et que l'on vient partiellement d'énoncer marquent une profonde mutation entre l'ancienne ville industrielle et traditionnelle et la ville

2 Tel que le souligne Binet (2004), «les nouveaux espaces urbanisés répondent davantage à un redéploiement de la population plutôt qu'à une croissance » (p.90).

métropolitaine actuelle (Bassand, Kaufmann et Joye, 2001; Simard et Gauthier, 2004;

Filion et Bunting, 2006; Fontan et al., 2006). Le phénomène de la mondialisation, alimenté entre autres par l'ouverture des frontières économiques et l'augmentation de la concurrence économique internationale, aurait en effet profondément modifié la structure productive des agglomérations en accélérant le développement du secteur tertiaire, et ce, parallèlement au déclin des activités industrielles caractéristiques du modèle fordiste (Filion et Bunting, 2006). D'autre part, la population mondiale ne cesse de s'urbaniser à un rythme effréné et les métropoles se déploient conséquemment vers des limites toujours plus grandes (Hanna, 2006) définissant ainsi l'essence même de la métropolisation pour Ascher (1997: p.53):

« la concentration des hommes et des richesses dans les villes les plus importantes ». Pour Bassand, Cunha et Tarradellas (2000), l'étalement urbain est le processus le plus manifeste de la métropolisation puisqu'il résulte principalement d'une forte croissance urbaine qui ne peut plus être contenue à l'intérieur des frontières traditionnelles de la ville, donc qui transforme significativement la forme urbaine des villes contemporaines. Ce concept de métropolisation, pour Hamel (2005), se caractérise donc principalement par une mobilité accrue des habitants, par l'étalement urbain et par «l'établissement de nouvelles hiérarchies entre les principales composantes de leur territoire» (p.393). En d'autres termes, cette nouvelle hiérarchie urbaine, encouragée par la mobilité accrue, réfère à l'éclatement du territoire où le développement ne se fait plus uniquement en fonction d'un centre, mais bien à partir de plusieurs pôles attractifs. Cette polycentralité, qui résulte de l'étalement urbain, engendre de nouvelles dynamiques entre le centre et les périphéries, mais aussi, tel que le souligne Bassand (2001), favorise la constitution d'une trame urbaine mondiale caractérisée par un «réseau de métropoles» où chacune d'entres elles tente de tirer son épingle du jeu.

Les régions métropolitaines contemporaines, que l'on peut également qualifier de villes post-fordistes, présentent donc une structure qui contraste grandement avec les anciens référents associés à la ville industrielle. Les auteurs Bassand, Kaufmann et Joye (2001) font état des distinctions entre ce qu'ils qualifient «d'ancien régime de la ville » et

centre et de la périphérie, il en va tout autrement pour la ville du régime urbain et métropolitain. En effet, les mouvances urbaines de la nouvelle métropole sont plutôt marquées par une double dynamique de l'étalement urbain issu d'une croissance accélérée et d'une recomposition des centralités qui, telle que nous venons de le souligner, engendrent des effets de fragmentation sociale et spatiale (Jouve, 2004). Pour Sénécal, Reybum et Poitras (2005), comme pour Hamel (2005), cette recomposition des formes urbaines donne lieu à «l'émergence de la métropole polycentrique» qui découle principalement de la décentralisation des formes urbaines et de la population au profit d'une relocalisation des secteurs d'emploi et de résidence en périphérie (Boume, 1989).

1.2 L'évolution de la planification urbaine au Canada en regard de la transformation