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1.1 Le VIH-1 et le syndrome de l’immunodéficience acquise

1.1.6 La pathogénèse du VIH-1

1.1.6.2 Élimination des lymphocytes T CD4+ infectés et non infectés

L’élimination des lymphocytes T CD4+ naïfs et mémoires constitue l’un des piliers de la pathogénèse de l’infection au VIH-1. Étant impliqués dans l’orchestration des réponses immunes adaptatives humorale et cellulaire, la diminution de la quantité et de la qualité des lymphocytes T CD4+ mène à l’apparition des symptômes typiques du stade SIDA tels que l’infection aux pathogènes opportunistes et aux cancers caractéristiques. Plus particulièrement, la destruction des cellules T CD4+ dans le GALT est suggérée comme jouant un rôle important dans l’activation chronique du système immunitaire observée pendant la phase chronique de l’infection au VIH-1. Ceci s’explique entre autres par le fait que la majorité des lymphocytes T CD4+ CCR5+ mémoires activés résident dans ces tissus lymphoïdes et représentent des cellules permissives au virus qui sont majoritairement (environ 80%) éliminées en trois semaines après l’infection (179, 200, 201). De ces cellules, on peut identifier une population hautement permissive : les lymphocytes T auxiliaires Th17, cellules responsables de la production d’interleukine 17 et 22 (200, 202, 203). Une étude comparant les caractéristiques de l’infection pathogénique et non pathogénique au VIS chez le singe a entre autres révélé que cette élimination des Th17 s’effectue uniquement dans les cas de pathogénicité (200). Ces cellules ont pour rôle de participer au maintien de l’homéostasie intestinale par la production de cytokines et défensines anti-microbiennes, leur dysfonction

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entraînant ainsi une perte graduelle de l’intégrité de la barrière gastro-intestinale (204-207). Cette perte du contrôle immunitaire au niveau de la barrière gastro-intestinale mène à la translocation de produits microbiens tels que le lipopolysacharride (LPS) vers la circulation sanguine, favorisant ainsi une activation systémique de l’immunité, un renouvellement des cellules immunitaires susceptibles à l’infection et donc à l’éventuelle réplication accrue du virus.

Les mécanismes moléculaires favorisant l’élimination des cellules T CD4+ au cours de l’infection au VIH-1 demeurent incertains et sources de débats dans la communauté scientifique (208-210). Il est connu que l’infection au VIH-1 induit d’une manière directe la mort des cellules T CD4+ infectées par divers mécanismes incluant une cytotoxicité induite par les glycoprotéines d’enveloppe, l’apoptose occasionnée par l’activation des caspases et des réponses aux dommages à l’ADN (211-214) ou encore par la réponse immunitaire des cellules T cytotoxiques CD8+ directe contre les cellules infectées (215). Néanmoins, il est suggéré qu’une forte proportion des cellules T CD4+ éliminées au cours de l’infection au VIH-1 n’est pas infectée (216). Les mécanismes proposés pour expliquer la mort des cellules non-infectées incluent notamment la surexpression de ligands de mort programmée (211) ou le dérèglement de l’homéostasie cellulaire dû à un état d’hyper-inflammation (217) causés par l’activation chronique du système immunitaire, l’effet cytotoxique direct de certaines protéines virales telles que Tat, Vpr, Nef et la gp120 (218-220), ou encore par la pyroptose caspase-1- dépendante induite lors d’infections abortives (211, 221, 222). Un nouveau mécanisme impliquant la relâche de gp120 par les cellules infectées et induisant la reconnaissance et élimination des cellules CD4+ non-infectées par la réponse cytotoxique dépendante des anticorps (ADCC, antibody-dependent cell-mediated cytotoxicity) est présenté dans le chapitre 4.

1.1.6.3 Traitements et approches cliniques

L’arrivée de combinaisons efficaces de molécules antirétrovirales en clinique a fait en sorte que le taux de mortalité associé à l’infection au VIH-1 a chuté de plus de 80 % dans les pays développés (223-225). À l’heure actuelle, il existe plus de 30 molécules antirétrovirales

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approuvées pour leur utilisation clinique qui se répartissent dans six classes distinctes pouvant être combinées. La première molécule à être approuvée par la Federal Drugs Administration (FDA) américaine en 1987 est la zidovudine, également mieux connue sous le nom de azidothymidine (AZT) (226). Appartenant à la classe des inhibiteurs nucléotidiques de la transcriptase inverse (NRTI, nucleoside and nucleotide RT inhibitors), la zidovudine est un analogue de la thymidine ne comprenant pas de groupement –OH en 3’, engendrant ainsi l’arrêt de la synthèse du brin d’ADN complémentaire lorsqu’elle est intégrée dans celui-ci par la RT (227). La RT est également ciblée par des inhibiteurs non-nucléotidiques (NNRTI, non- nucleoside RT inhibitors) qui s’insèrent dans un site potentiel de liaison de molécules de la RT et induisent des changements de conformation dans la RT qui inhibe son activité (228, 229). Les NNRTI constituent une classe de composés antirétroviraux de choix pour les traitements de première ligne et dans la prévention de la transmission de la mère à l’enfant.

Le processus d’entrée et de fusion viral est également une cible importante pour les composés antirétroviraux. Bien que le traitement par une forme soluble de CD4 (sCD4) n’a démontré qu’une efficacité limitée pour la neutralisation de particules virales (230, 231), de petits composés chimiques ont été développés et présentent un fort potentiel (232). Ces composés et leur implication dans les changements de conformation de l’Env virale sont davantage décrits dans le chapitre 4. Néanmoins, un anticorps monoclonal humanisé, l’Ibalizumab, liant le domaine 2 de la portion extracellulaire de CD4, agit comme un inhibiteur de l’entrée virale après l’attachement de la particule virale et a fait l’objet d’études cliniques (233, 234). Maraviroc, un composé antagoniste du corécepteur viral CCR5 empêchant l’interaction de la gp120 avec celui-ci, a été démontré comme pouvant inhiber de manière significative la réplication virale dans des études cliniques (235, 236). Probablement l’un des inhibiteurs de la fusion virale les plus connus, l’enfuvirtide (T-20) est un peptide synthétique de 36 acides aminés qui lie la boucle HR1 de gp41 et empêche la formation du paquet de six hélices (237, 238).

D’autres protéines virales telles que la PR et l’IN sont également les cibles de composés antirétroviraux très efficaces (239-241).

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