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CHAPITRE 2 FABRICATION ET CARACTÉRISATION STRUCTURELLE

2.2 Électrodéposition des nanofils

L'électrodéposition consiste en la déposition d'ions sur une électrode portée à une certain potentiel par rapport à une électrode de référence. Ces ions proviennent d'une solution électrolytique que nous avons préparée en laboratoire. Dans notre cas, nous avons préparé une solution permettant le dépôt de nanofils multicouches de CoFeB/Cu et Ni/Cu. La composition de cette solution est présentée en annexe B.

La Figure 2.3 montre la préparation d’une membrane d’alumine pour l’électrodéposition. Un prédépôt d'une couche de 15 nm de Ti est appliqué sur un côté de la membrane, cette couche servant d'adhésion pour une couche d'or (Au) d'environ 1 μm. Cette couche d'or joue le rôle de cathode dans l'électrodéposition. Un ruban de cuivre est collé à la couche d'or avec de la pâte d'argent dans le but d'établir une connexion électrique. La membrane est ensuite placée sur un substrat de plexiglas, le côté de la couche d'or en contact direct avec le plexiglas. Les bords de la membrane sont attachés au substrat à l'aide de rubans adhésifs. Les bords sont ensuite recouverts de vernis à ongle, ceux-ci protégeant contre l'intrusion de solution (et donc d'ions) par les bords. Le vernis est intéressant pour cette application parce qu'il est peu dispendieux, sèche assez rapidement, est facile d'utilisation et peut se dissoudre aisément avec de l'acétone.

Figure 2.3: Vue de face (gauche) et de dos (droite) de la membrane d'alumine prête pour l'électrodéposition. La surface d'électrodéposition (bleu) mesure ici environ 4×2 cm2.

Figure 2.4: Montage expérimental de l'électrodéposition. La solution électrolytique contient les ions qui migrent vers le fond des pores lorsqu'une différence de potentiel négative est appliquée entre l'électrode de travail (ET) et la contre-électrode (CE), par rapport à une électrode de référence (ER). L'appareil utilisé pour effectuer l'électrodéposition est un EG&G Princeton Applied Research model 263.

Le montage expérimental est tel que montré à la Figure 2.4. L’échantillon est l’électrode de travail, l'anode (contre-électrode) est une électrode de platine (Pt), et une électrode de référence de calomel saturée complète la configuration à trois électrodes. Deux classes de nanofils peuvent être électrodéposés dans la membrane d'alumine: les nanofils homogènes et multicouches. L'appareil utilisé pour effectuer l'électrodéposition est un EG&G Princeton Applied Research model 263, pouvant opérer en mode galvanostat (contrôle du courant) ou potentiostat (contrôle du potentiel).

Dans le cadre de ce projet, nous nous sommes concentrés sur les nanofils multicouches, constitués d’alternance de couches ferromagnétiques et non-magnétiques. La solution électrolytique utilisée dans ce cas contient donc à la fois les électrolytes magnétiques (CoFeB) et

non-magnétiques (Cu). La concentration de l'électrolyte non-magnétique dans la solution est en général très faible (1%) afin d'éviter l’inclusion de cuivre (métal plus noble) dans la couche magnétique (métal moins noble). La solution est gardée à température ambiante et à un pH contrôlé (pH 3,5 pour le CoFeB/Cu). Le pH est un paramètre important lors de la fabrication des nanofils. Nous avons observé des changements importants dans l'anisotropie magnétique des réseaux de nanofils en variant le pH de la solution électrolytique (voir annexe A). Nous n'avons pas approfondi la question mais il est possible que le pH puisse avoir une influence sur la structure cristalline des couches ferromagnétiques et ainsi affecter les propriétés magnétiques du réseau.

Comme nous le verrons plus tard, il est important que l'épaisseur des couches soit bien contrôlée au nanomètre près parce qu'elle a une influence notable sur les propriétés magnétiques. Dans ce cas, nous cherchons à contrôler la charge d'électrolytes déposée dans les pores de la membrane, cette charge étant, selon la loi de Faraday, proportionnelle à la quantité de matière déposée. La charge déposée dans tous les pores de la membrane est, pour une seule couche, donnée par:

(2.1)

où Seff est la surface effective de déposition, h l'épaisseur de la couche, F le nombre de Faraday (96500 Coulombs), la masse volumique de la couche, A sa masse atomique, et le rendement de déposition. Seff est définie par , où S est la surface de la membrane d'alumine et P la porosité de la membrane (rapport de la surface cumulée des pores sur la surface totale de la membrane). Dans le cas d'un alliage (dans notre cas CoFeB), on calcule la moyenne pondérée des masses volumiques et atomiques selon les proportions de chaque atome i dans la phase solide de l'alliage (par exemple notre alliage de CoFeB contient 94% massique de Co, 5% de Fe et 1% de B):

L’Éq. (2.1) donnant la charge déposée en fonction de l'épaisseur de la couche est, sans le terme , pour un transfert parfait des ions vers les pores. Ce n'est toutefois pas le cas en réalité et la charge mesurée lors de l'électrodéposition ne reflète pas nécessairement l'épaisseur réelle des couches. Les causes de ce transfert imparfait d'ions de la solution vers la membrane peuvent notamment s'expliquer par la formation d'hydrogène dans les pores et la dissolution d'une couche métallique par anodisation (Carignan, 2006; Ciureanu et al., 2005). Le rendement de déposition tient compte de ce transfert imparfait. Toutefois ce rendement peut varier selon les conditions expérimentales de l'électrodéposition (composition de la solution, pH, température).

Une fois les charges de dépôt calculées, le dépôt alterné s'effectue en variant le potentiel par rapport à l'électrode de référence favorisant la réduction d'un électrolyte à la fois. Par exemple pour le dépôt de CoFeB/Cu, nous alternons le potentiel entre -1 V, le potentiel de réduction du CoFeB, et -0,56 V, le potentiel de réduction du Cu, par rapport à l'électrode de référence. Il est possible, grâce à un logiciel de contrôle et d'acquisition de données, de planifier le dépôt automatique des nanofils. L'épaisseur des couches est contrôlée par la charge déposée, en intégrant le courant sur le temps de dépôt. Lorsque la charge atteint la valeur désirée (celle donnée par l'Eq. (2.1)) pour une couche, le potentiel alterne à la valeur requise pour déposer l'autre couche. Le cycle est ainsi répété jusqu’à l’obtention du nombre requis de couches. Ce procédé automatique permet d'obtenir des nanofils de configurations variées. Dans notre cas, nous avons exploré deux familles de configuration, que l'on référera par bicouche et tricouche (voir Figure 2.5). Les nanofils bicouches sont constitués d’alternance de couches magnétiques d’épaisseur hm et de couches non-magnétiques (cuivre) d’épaisseur hnm. Les nanofils tricouches sont constitués d’une couche magnétique d’épaisseur hm1, d’une couche non-magnétique (cuivre) d’épaisseur hnm1, d’une seconde couche magnétique d’épaisseur hm1 et d’un espaceur non- magnétique d’épaisseur hnm2, le tout répété plusieurs fois. L'annexe C présente les dimensions nominales des nanofils étudiés dans ces travaux ainsi que les conditions expérimentales pour les obtenir.

Figure 2.5: Les deux classes de nanofils multicouches que nous avons étudiées. a) Configuration classique avec alternance régulière de bicouches magnétiques/non- magnétiques (par exemple Ni/Cu, CoFeB/Cu). b) Alternance de tricouches de type magnétique/non-magnétique/magnétique, séparées par une épaisse couche non- magnétique. L'épaisseur hnm2 est en général plusieurs fois plus grande que l'épaisseur de la tricouche.