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ÉLÉMENTS DE DISCUSSIONS ET PERSPECTIVES 13.3 Assemblages d'espèces et impacts anthropiques

Éléments de discussions et perspectives Les coléoptères saproxyliques aptères de litière faisaient l'objet d'importantes lacunes

CHAPITRE 13. ÉLÉMENTS DE DISCUSSIONS ET PERSPECTIVES 13.3 Assemblages d'espèces et impacts anthropiques

13.3.1 Contexte de montagne

Etude réalisée dans les Alpes

Cette étude a été réalisée en partenariat avec une équipe d'IRSTEA, principalement avec Philipe Janssen, Marc Fuhr et Christophe Bouget. Le paragraphe qui suit est un résumé détaillé de l'article Janssen P., Cateau E., Fuhr M., Nusillard B., Brustel H. et Bouget C, Are biodiversity patterns of saproxylic beetles shaped by habitat limitation or dispersal limitation ? A case study in montane mixed forests ; soumis à Oecologia manus- crit en annexe D

L'objectif de cette étude est de comparer la réponse des espèces ailées et aptères aux limi- tations de ressource (maturité) et de continuité temporelle (ancienneté). Deux hypothèses sont émises et testées :

• la richesse et l'abondance des espèces à dispersion limitée augmentent avec l'ancien- neté de la forêt et les forêts récentes proches de forêts anciennes sont plus riches que celles qui sont éloignées ;

• la richesse et l'abondance des espèces associées aux attributs de maturité sont po- sitivement corrélées et la qualité et la quantité de bois mort sont les paramètres explicatifs de la répartition de la biodiversité.

Matériels et méthodes Cette étude a été réalisée dans les pré-Alpes Françaises, dans les massifs du Vercors, de la Chartreuse et des Bauges. Ces contextes présentent une bonne continuité spatiale, avec un taux de boisement de l'ordre de 63% sur l'ensemble de la région. Les forêts sont essentiellement des hêtraies-sapinières.

Quarante forêts ont été échantillonnées suivant un plan d'échantillonnage stratié croi- sant maturité et ancienneté. Ainsi, dix forêts anciennes adultes, dix anciennes matures, dix récentes adultes et dix récentes matures ont été échantillonnées. Cet échantillonnage a été réalisé d'une part avec trois pièges-vitres par forêt et d'autre part par le tamisage de six litres de litière par forêt. Les variables décrivant le peuplement ont été mesurées dans des placettes circulaires de 20m de rayons, an de déterminer : la diversité des classes de diamètre de bois vivant, le nombre de bois vivant à l'hectare, le nombre de très gros bois,

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le volume de bois mort debout, le volume de bois mort au sol, la diversité des types de bois mort (essence, classe de diamètre, classe de décomposition) et la diversité des den- dromicrohabitats. A l'échelle du paysage, les proportions de forêts, de hêtraies-sapinières et de forêts anciennes ont été calculées dans un rayon de 500m autour de la forêt. A titre informatif, notons que les taux de boisement actuel autour des forêts sont en moyenne de 90,2% (± 10,4) et que les taux de boisements anciens sont de 62,7% (±30,6). La con- guration du paysage a été évaluée grâce : au ratio périmètre/surface de la forêt et à la distance à la lisière la plus proche.

Les richesses et abondances de diérents groupes d'espèces (ailés vs aptères et associées aux bois mort vs associées aux dendromicrohabitats) ont été testées en fonction de l'an- cienneté et de la maturité des forêts. Ceci a été réalisé grâce à des T-tests. Trente modèles statistiques ont été réalisés. Ceux-ci visent à étudier le lien entre les variables environne- mentales et i/ la richesse spécique et ii/ l'abondance des coléoptères saproxyliques. Dix de ces modèles ne prennent en compte que les variables liées à la continuité temporelle, dix uniquement les variables liées à la maturité et dix autres prennent en compte les deux catégories de variables.

Résultats Au total, 309 espèces de coléoptères saproxyliques ont été échantillonnées, réparties dans 53 familles. Parmi ces espèces, 16 sont aptères (tableau 13.3).

Aucune diérence signicative de richesse ou d'abondance pour aucun des groupes n'a pu être démontrée en fonction de l'ancienneté de la forêt. En revanche, en fonction de la maturité, des diérences signicatives existent pour l'abondance et la richesse pour les coléoptères ailés, associés au bois mort et aux dendromicrohabitats. Les modèles linéaires généralisés sont cohérents avec ces résultats : les abondances et richesses spéciques des espèces ailées, associées au bois mort et aux dentromicrohabitats sont principalement expliquées par les variables de maturité (diversité des types de bois mort et nombre de gros bois mort au sol) et faiblement par la proportion de hêtraies-sapinières dans les 500m.

Discussion Pour les trois groupes d'espèces i/ ailées, ii/ associés au bois mort et iii/ associés aux dendromicrohabitats, la seconde hypothèse est donc validée : l'abondance et la richesse spécique de ces groupes sont liées à la maturité des forêts.

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Tableau 13.3  Proportions des peuplements inventoriés dans les Alpes où les espèces ont été échantillonnées

Massif Chartreuse Bauges Vercors Acalles aubei 61,1% 53,3% 42,9% Acalles camelus 38,9% 13,3% 28,6% Acalles lemur 5,6% Acalles micros 38,9% 33,3% Acalles temperei 50,0% 33,3% 14,3% Cotaster cuneipennis 16,7% 46,7% Cotaster uncipes 71,4% Dasycerus sulcatus 66,7% 53,3% 14,3% Dienerella vincenti 50,0% 40,0% 42,9% Kyklioacalles navieresi 88,9% 93,3% 71,4% Ruteria hypocrita 11,1% 20,0% Sphaerosoma globosum 40,0% Sphaerosoma pilosum 33,3% 53,3% 42,9% Sphaerosoma quercus 88,9% 86,7% 85,7% Sphaerosoma reitteri 14,3% Trachodes hispidus 11,1% Richesse spécique 13 12 10

Contrairement à la première hypothèse, l'ancienneté de la forêt n'est apparue détermi- nante pour aucun des groupes étudiés. Dans un contexte fortement boisé (63% du pay- sage), l'importante connectivité spatiale pourrait expliquer la rapide colonisation d'espaces nouvellement boisés.

Contrairement aux autres groupes, l'abondance et la richesse spécique des coléoptères saproxyliques aptères n'ont pas pu être expliquées par les variables relevées. Contraire- ment aux résultats obtenus dans le paysage très fragmenté des Coteaux de Gascogne, les espèces aptères sont apparues déterminées ni par les taux de boisement actuel et ni par les anciens. Or les contextes entre ces deux expériences sont très diérents et complémen- taires : les Alpes sont et étaient beaucoup plus boisées que les Coteaux de Gascogne (de l'ordre de plus de 90% contre 20%). Ceci laisse à penser que les espèces aptères pourraient être très impactées par d'importantes pertes d'habitats, mais supporteraient relativement bien une faible déforestation. Cette hypothèse est cohérente avec leur mobilité dans le paysage montrée aux chapitres 10 et 11.

L'étude de la répartition des espèces individuellement dans ce contexte Alpin pourrait permettre d'aner les résultats précédents. En eet, il est possible que la variabilité d'exigences et de comportement qui caractérise le groupe étudié, amène l'étude de la ri-

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chesse spécique ou l'abondance à être biaisée par la possible compensation des exigences et/ou comportements.

13.3.2 Synthèse des études menées dans les Alpes et dans les

Pyrénées : Absence de lien fort avec la maturité

Malgré le fait que les espèces étudiées soient diérentes, les mêmes conclusions ont pu être tirées dans les Alpes et dans les Pyrénées : les espèces ne semblent pas impactées par l'exploitation forestière récente.

Plusieurs de ces espèces ont été obtenues d'émergence de branche (Galibert, 1932) non qualiée de "grosse" par l'auteur. Il est ainsi possible que les rémanents (normalement laissés après l'exploitation sylvicole actuelle ou provenant de l'élagage naturel) consti- tuent une ressource susante pour ces espèces, y compris dans les peuplements jeunes. Le stock de ressource disponible serait ainsi relativement constant tout au long de la vie du peuplement.

Avec une richesse spécique totale de 16 espèces (tableau 13.3), les sites situés dans les Alpes apparaissent bien plus riches en coléoptères saproxyliques aptères que les surfaces équivalentes de Midi-Pyrénées inventoriées. En eet, seules 7 espèces ont pu être échan- tillonnées dans les Pyrénées, 7 aux alentours de Grésigne et 4 dans les Coteaux de Gas- cogne. Ceci conrme l'intérêt national majeur de ces zones pour leur richesse en espèce saproxylique, ce qui avait déjà été montrée pour les espèces ailées en Chartreuse et dans le Vercors (Brustel, 2004).

13.3.3 Contexte de plaine : un gradient de richesse spécique

Trois contextes paysagers : la forêt de Grésigne, ses alentours et les Coteaux de Gascogne

Cette thèse a été menée de façon à comparer la faune de trois territoires de plaine présentant une anthropisation croissante : la forêt de Grésigne, ses alentours et les Co- teaux de Gascogne. Pour la comparaison de la faune de ces milieux, les espèces jugées trop rarement échantillonnées et qui avaient été exclues des jeux de données dans les ana- lyses précédentes (chapitre 7, 10 et 11), sont, là encore, exclues du pool d'espèces. Ceci concerne : Onyxacalles luigionii et Acalles pulchellus pour la Grésigne, Sphaerosoma pilo-

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