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L’écoquartier des Vergers comme projet pilote sur Genève

L’écoquartier des Vergers situé à Meyrin (GE) est un projet innovant fondé sur des principes de développement durable. L’élaboration de son plan localisé de quartier (PLQ) a débuté en 2007 et a été accepté dans sa version finale en 2015 [26]. C’est un projet important pour la commune de Meyrin, non seulement de par son ampleur puisque sa construction va engendrer une augmentation de 15% de sa population, mais aussi par les objectifs fixés. Voulu comme un projet exemplaire, de nombreuse actions ont été entreprises, notamment le développement du projet à l’aide de démarches participatives permettant d’impliquer les différents acteurs : habitants actuels de la ville, futurs habitants du quartier, constructeurs, etc. [27].

Ce quartier totalise 1'350 logements ainsi que des activités répartis sur 33 bâtiments, tous certifiés Minergie A ou P. Chaque bâtiment est à la fois consommateur de chaleur pour le chauffage et l’ECS via un réseau de chauffage à distance et producteur d’électricité grâce à des panneaux photovoltaïques placés en toiture. Une partie de l’électricité produite est autoconsommée sur place par les bâtiments et le reste est injecté dans le réseau électrique. Le CAD du quartier est en majeure partie alimenté par une pompe à chaleur de source hydrothermale. De plus, le réseau haute température CAD-SIG, dont la chaleur est issue pour la moitié de la valorisation des déchets, vient compléter la production de la PAC en cas de besoin. Le CAD des Vergers est donc presque basé à 100% sur des ressources renouvelables.

Les sections suivantes décrivent plus précisément les objectifs de durabilité fixés pour le quartier, son développement immobilier ainsi que son concept énergétique, sur lequel se focalisera ce rapport.

4.1 Les objectifs de durabilité

Les objectifs d’un écoquartier est d’amener une plus-value du point de vue social et environnemental. Une de ses vocations est par exemple de faciliter échange et solidarité entre habitants, à la fois sur un plan interculturel et intergénérationnel. Pour garantir également un succès du point de vue environnemental, ce quartier est pourvu de bâtiments à très haut standard énergétique, d’une production de chaleur renouvelable et de production locale d’énergie.

Les objectifs les plus importants listés dans le chapitre 5 de [28] sont les suivants :

 Aller au-delà du label Minergie et viser l’obtention du label Minergie A (𝑄ℎ𝑤𝑤 ≤ 35 kWh/m2.an).

 Utiliser un CAD urbain à basse température alimenté par une PAC centralisée avec source froide sur aquifère. Inclut de la récupération de chaleur fatale des activités industrielles voisines.

 Privilégier des matériaux indigènes ou recyclés et des entreprises locales. Minimiser l’usage du béton afin de limiter l’impact de l’énergie grise.

 Usage de LED pour locaux communs – consommation en énergie électrique < 10 kWh/m2.an.

 Installation dans les logements d’éclairage et appareils électro-ménager de classe A+++.

 Sensibilisation et information des occupants.

 Affichage des consommations électriques par logement.

 Réduction de la consommation en eau potable issue du réseau SIG (-30% par rapport aux consommations habituelles).

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4.2 Le développement immobilier des Vergers

Les informations suivantes ont été extraites de la page officielle de l’écoquartier Les Vergers [29].

Les origines « modernes » de Meyrin remontent à 1922, lorsque se construit la première piste d'aviation de Cointrin. En passant par l’arrivée du CERN en 1954 et à partir des années 1960, Meyrin vit une métamorphose complète. La Commune est choisie par les autorités genevoises pour devenir la 1ère cité satellite de Suisse, construite selon des idées urbanistiques inspirées par Le Corbusier. Le petit village de 3’200 habitants se transforme en une ville de plus de 14’000 habitants qui grandira encore pour héberger 22'000 personnes en 2010. Les nouveaux arrivants, essentiellement des jeunes couples avec enfants, s’investissent dans l’élaboration d’une qualité de vie à Meyrin, transformant cette commune en l’une des plus peuplées et multiculturelle du canton de Genève.

La construction de l’écoquartier des Vergers constitue une nouvelle étape clé dans l’histoire de Meyrin : c’est celle d’un champ d’arbres fruitiers qui deviendra un lieu de vie, d’activités et de partage.

Entre 2014 et 2020, 33 bâtiments ont vu le jour, totalisant environ 1'350 logements ainsi que des surfaces d’activités. Actuellement, quelques bâtiments sont encore en travaux ou en cours de raccordement au CAD et devraient à priori être habités d’ici la fin de l’année 2020. La Figure 6 montre un plan des bâtiments du quartier avec leurs propriétaires et superficiaires respectifs. Le PLQ comprend trois secteurs : Arbères, Vergers et Sports [30].

Figure 6 : Plan de l'écoquartier Les Vergers avec localisation des bâtiments par superficiaires des droits à bâtir de la commune et propriétaires privés [30]

Secteur des Arbères : 13 bâtiments situés au nord du PLQ avec des gabarits allant de R+4 à R+8. Une partie des bâtiments est entièrement destinée aux logements, l’autre est mixte avec des activités au rez-de-chaussée.

Secteur des Vergers : 14 bâtiments situés au sud du PLQ avec un gabarit uniforme de R+4. Une partie des bâtiments est entièrement destinée aux logements, l’autre est mixte avec des activités au rez-de-chaussée.

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Secteur des Sports : 3 bâtiments longeant la route de Meyrin avec un gabarit de R+11 à R+13. L’ensemble des 3 immeubles est mixte. Comprend également 3 bâtiments d’utilité publique incluant école, crèche et salle de sport.

Le plan localisé de quartier No 29'674 [26], arrêté le 23 mars 2015, octroyait initialement 138’939 m2 de droits à bâtir répartis sur 30 bâtiments à usage résidentiel collectif ou mixte. A ce périmètre initial se sont ajoutés 3 bâtiments d’utilité publique. Le total de la surface de référence énergétique de l’ensemble des logements chauffés a été initialement estimée à 162'673 m2 [31]. Après récolte des valeurs de SRE des certificats Minergie et de la couche IDC des SITG [22], il a été possible de consolider les données et de recalculer la SRE totale du quartier. La valeur obtenue s’élève à 170'831 m2.

4.3 Le concept énergétique

Le réseau de chaleur à distance (CAD) des Vergers est présenté sur le schéma de la Figure 7. Il est alimenté par une pompe à chaleur eau-eau Friotherm de 5 MWth maintenant le réseau à 50°C pour assurer le chauffage des bâtiments. Deux fois par jour, la température du CAD est portée à 65oC pour la charge des réservoirs tampons d’ECS situés au sein des bâtiments (batch d’ECS). L’énergie produite par la PAC centralisée est soit délivrée directement aux SST, soit stockée dans deux réservoirs de 20 m3 chacun.

La Figure 8 illustre la régulation de la température du CAD. Sur la gauche, les deux élévations de température journalières correspondent aux batch d’ECS et ont chacune une durée de deux heures. Elles ont lieu de 5h à 7h, le matin et le soir. Le détail d’un batch est décrit sur la droite de la Figure 8, avec en traitillé la température de l’eau provenant du ballon d’ECS de la SST en phase de préchauffage (A) et en finalisation de la charge (B).

L’objectif de ces batch est de maintenir la température du CAD aussi basse que possible le long de la journée et de satisfaire les exigences de température élevée pour la préparation de l’ECS pour une courte durée seulement. Cela permet à la fois de limiter les pertes de chaleur de distribution du réseau et d’optimiser les performances de la PAC. Selon les données du constructeur, le COP de la PAC centralisée est de 4.6 en mode chauffage (50oC) et de 3.6 en mode ECS (65oC) [13].

Figure 7 : Représentation schématique du système de production et de distribution de chaleur du CAD des Vergers

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Figure 8 : Illustration de la régulation de température du CAD [32]

Lorsque la PAC ne peut pas combler l’intégralité de la demande de chaleur du réseau des Vergers ou lorsqu’elle est en maintenance, l’appoint est effectué par le réseau haute température (HT) CAD-SIG (visible en rouge sur la droite de la Figure 9). Il alimente également la ville de Meyrin en chaleur grâce à la valorisation de l’incinération des déchets des Cheneviers. Les niveaux élevés de température de ce réseau, proches de 100°C, ne permettent pas d’injecter une éventuelle surproduction de chaleur de la centrale des Vergers vers le CAD-SIG HT. Le transfert de chaleur est donc uniquement possible du CAD-SIG vers le CAD Vergers.

Côté source de la PAC, l’utilisation de la chaleur fatale de la zone industrielle de Meyrin et Satigny (ZIMEYSA) joue un rôle de premier ordre pour atteindre les objectifs de durabilité. En effet, comme le montre la Figure 7, la PAC centralisée puise sa source dans l’eau de trois puits situés dans la région de Peney, pompant de l’eau de la nappe d’accompagnement du Rhône. Cette eau est d’abord acheminée vers des clients avec des besoins de froid de la ZIMEYSA par le réseau de froid à distance (FAD) (en bleu sur la Figure 9), où elle permet de refroidir des bâtiments tels que l’Hôpital de La Tour ou HP. Ensuite, l’eau du FAD alimente la centrale thermique des Vergers, et plus particulièrement l’évaporateur de la PAC. Après son passage dans la centrale, l’eau est finalement rejetée dans le lac des Vernes à partir duquel elle retournera dans le Rhône par le Nant d’Avril (traitillé bleu sur la Figure 9).

En prévision d’une connexion de clients supplémentaires et de la réalisation d’une boucle d’anergie dans la zone ZIMEYSA, une augmentation de la taille des conduites FAD a été réalisée sur le parcours entre la ZIMEYSA et les Vergers. Cette réserve de puissance rend possible une future extension de la valorisation actuelle de chaleur. La valeur nominale du débit est de 690 m3/h [30] et varie selon le besoin des clients FAD avec des valeurs comprises entre 840 m3/h en été et 520 m3/h en hiver (voir annexe 2).

Une vision globale de l’interconnexion des différents réseaux de chaud et froid impliqués dans ce projet (FAD, CAD des Vergers et CAD-SIG HT) est disponible sur les plans de la Figure 9.

Le règlement sur l’utilisation des eaux superficielles et souterraines (L2 05.04 - RUESS) fixe le cadre légal pour l’usage de cette ressource. En général il est stipulé que l’apport ou le prélèvement de chaleur ne doit pas modifier la température moyenne de la nappe de plus de 3°C à 100 m du point de restitution des eaux prélevées. Le cas de l’eau des puits de Peney est particulier. D’une part sa température est augmentée dans un premier temps par de clients avec des besoins de froid. Puis l’eau du lac des Vernes est également alimentée par les eaux claires de la cité de Meyrin et retournera au Rhône par le ruisseau du Nant d’avril. Ces éléments feront que la température de restitution de l’eau sera finalement principalement influencée par des facteurs indépendants de la centrale des Vergers, ce qui a permis d’augmenter la différence de température admissible à 5°C. Ceci fixe finalement la limite suivante : la température de l’eau de rejet dans le lac des Vernes ne doit pas être en dessous 7.5°C [33] en moyenne, ce qui correspond une différence de température d’environ 5°C entre eau extraite et eau rejetée.

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Figure 9 : Plan du réseau FAD de la ZIMEYSA

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4.4 Estimation initiale des besoins énergétiques du quartier

Afin de dimensionner le système, une estimation initiale des besoins énergétiques du quartier a été réalisée.

Elle est fondée sur les hypothèses de calcul suivantes [30] :

 SRE totale : 164'595 m2

 Bâtiments majoritairement certifiés Minergie-A

 Energie utile pour le chauffage : 33 kWh/m2.an, soit 2.8 MW de puissance nominale pour 2’000 h/an

 Puissance retenue pour la production d’ECS : 3.3 MW

 Puissance totale retenue pour le dimensionnement des équipements : 5 MW

 Puissance retenue pour les consommations (ECS + chauffage) : 55 kWh/m2.an, soit 4.5 MW

Les besoins thermiques calculés sur base des hypothèses ci-dessus s’élèvent alors à 9 GWh/an (90% PAC et 10% CAD-SIG). Ces valeurs estimées initialement permettent alors d’établir un point de comparaison avec les besoins réels mesurés décrits à la Partie A , section 2.3.

Il est à noter que les besoins théoriques pour le chauffage et l’ECS de bâtiments majoritairement labellisés Minergie A sont de 35 kWh/m2.an calculés selon la norme SIA 380/1, ce qui donne une consommation d’environ 5.76 GWh/an pour l’ensemble du quartier. L’estimation ci-dessus de 9 GWh/an est donc bien supérieure, probablement choisie de sorte à tenir compte d’un écart de performance par rapport aux valeurs théoriques.

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