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À L’ÈRE DE LA NOUVELLE RÉVOLUTION INDUSTRIELLE

Dans le document Savoir et formation: l'intégrale (Page 53-55)

Par Andrée De Serres, Ph. D., professeure et titulaire, Chaire Ivanhoé Cambridge d’immobilier, ESG UQAM

es changements qui marquent le contexte dans lequel nous évoluons sont tellement nombreux et considérables que nous pouvons évoquer une véritable nouvelle révolution industrielle. Et comme pour tous les autres secteurs d’activité, elle gagne le secteur de la construction et des services en immobilier.

UNE OFFRE DE SERVICES ET DE BIENS RENOUVELÉE

Nous étions habitués à un flux régulier de changements, mais pas à ce rythme qui s’est grandement accéléré. Les innovations proliférèrent au point que nous avons peine à les suivre. Et certaines sont très perturbatrices ! Nous ne disposons plus d’années pour les mettre en œuvre, mais de quelques mois seulement ! Elles bousculent tout sur leur passage et nous font entrer dans une nouvelle ère ; pour être en mesure de les suivre, il nous faut acquérir de toutes nouvelles compétences et ajuster nos modèles d’affaires, parfois de façon radicale. Cette vague de changements produit des conséquences négatives en rendant obsolètes les entreprises qui n’ont pas pris la précaution d’intégrer plus de technologies dans leurs façons de faire et de développer les compétences pertinentes pour se les approprier. À l’opposé, elle favorisera la croissance des entreprises qui ont su réagir à temps en adaptant leurs modèles d’affaires. Toutefois, elle ouvre aussi la porte à des acteurs qui n’évoluaient pas jusqu’à maintenant dans le secteur de l’immobilier.

L

Voici quelques exemples concrets démon­

trant comment le contexte dans lequel évoluent les entreprises de l’immobilier et du bâtiment subit de profonds boulever ­ sements.

UNE OFFRE ET UNE DEMANDE DE BIENS ET DE SERVICES PROFONDÉMENT MODIFIÉES

Certaines technologies logicielles, accom ­ pagnées du développement des compé­ tences appropriées pour bien s’en servir, ont modifié l’offre de plusieurs services reliés à la gestion des phases de conception, de construction ou d’exploitation des projets immobiliers : c’est le cas de la modélisation des données du bâtiment (ou BIM, Building

Information Management) du FM (gestion

des installations), du GMAO (gestion de la maintenance), de l’EDMS (gestion des documents), de l’EMS (gestion de l’énergie) et du BAS (automatisation du bâtiment). Ces technologies permettent de planifier et de visualiser les structures, les systèmes et les installations d’un bâtiment à l’étape de la conception et de la construction ; elles fournissent les moyens de contrôler et de suivre leur état et leur performance au cours de la phase d’exploitation (voir l’article de Maintenance, vol. 6, no 2, p. 11 à 15).

Elles permettent en quelque sorte de créer le passeport d’un bâtiment.

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Un autre facteur de changement à surveiller découle de l’intérêt croissant pour les technologies et les services « propres » visant à réduire, suivre, mesurer et contrôler les émissions de gaz à effet de serre (GES) et les autres impacts environnementaux négatifs. Les certifications de bâtiment durable, telles que LEED, BOMA BEST, Energy Star et ASHRAE, avaient déjà contribué de façon importante à inciter les propriétaires et les investisseurs les plus exigeants à rehausser volontairement les performances environnementales et énergétiques de leurs immeubles. On passe maintenant à une autre étape : de l’engagement volontaire, on se dirige de plus en plus vers l’adoption de normes

réglementaires qu’on devra respecter. Le changement de tempo découle notamment de l’adoption de nouveaux cadres politiques et réglementaires consécutive à l’adhésion du gouvernement du Canada en 2015 à l’Accord de Paris sur le climat (COP21) et à l’adoption par le gouvernement du Québec en 2016 de sa politique énergétique. Cela implique des changements aux spécificités techniques et à la performance écoénergétique des produits, matériaux, services et systèmes de gestion qui entrent dans la construction et l’exploitation des bâtiments et qui ont un impact sur son empreinte carbone, sa production de GES et sa performance énergétique.

Les entreprises de production de biens destinés aux bâtiments sont donc concernées, et ce, de multiples façons. Pour rester compétitives, elles auront aussi à affronter les défis de l’Industrie 4.0, qui marie la fabrication et l’Internet des objets, l’informatique nuagique et le big data pour créer des « usines intelligentes ». Cette nouvelle capacité de communication leur permet de réaliser des tâches qui sont trop difficiles ou trop dangereuses pour les humains, de fournir des renseignements et des visualisations pour aider les décideurs. Elle propose aussi des moyens de prendre des décisions décentralisées et de réaliser des tâches de façon autonome. Ces nouvelles technologies de l’information nous propulsent dans l’ère

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de l’industrie manufacturière « nouvel âge » qui touchera les entreprises existantes, les forçant à s’adapter et à chercher comment demeurer compétitives. La transformation de nos usines de production de biens est un élément critique pour que celles­ci puissent répondre aux nouvelles demandes de leur marché local et développer des marchés internationaux. D’autres phénomènes contribuent au bouleversement du contexte traditionnel : la demande de biens et de services subit aussi de grandes mutations. À l’ère de l’autopartage, de la multiplication d’autocontributeurs qui ont accès aux sources ouvertes et aux possibilités de l’impression 3D, du sociofinancement (crowd funding) et des communautés d’intérêt et de partage qui se multiplient, les attentes des usagers se modifient considérablement. Leurs habitudes ou celles des occupants des immeubles ont évolué. Les bâtiments et les services en immobilier changent et doivent s’adapter à des usages différents. On veut des espaces ouverts et flexibles, voués au coworking, à la créativité, au partage, qui favorisent le bien­être des occupants.

Dans les faits, la connectivité des objets, des systèmes et des bâtiments, combinée avec celle des usagers et des citoyens, est un phénomène incontournable en plein essor. Nous sommes au cœur d’une nouvelle révolution industrielle qui influe sur la production de biens et sur l’offre de services dans tous les secteurs d’activités industrielles. Nous sommes maintenant en mesure de bâtir et d’exploiter des bâtiments intelligents et des villes qui le sont tout autant. Ce qui relevait encore de la science­fiction il y

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