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Raoul Montandon, 1877-1950
PITTARD, Eugène
PITTARD, Eugène. Raoul Montandon, 1877-1950. Archives suisses d'anthropologie générale , 1950, vol. 15, no. 2, p. 173-177
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:106390
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Totue XV, No 2, r95o.
Raoul Montandon, L877-1950
La
Revue dans l4quelle paraît cet article cloit à Raoul Montanrlon un souvenir reconnaissant.L'hornme dont je viens cl'écrire Ie nom peut être considéré comme un de ces rares modèles d'humanité qu'on aimerait égaler. Sa
vie
presqlre tout entièrefut
consacrée au béné{ice des autres. cette magnifique qualité morale est à relever dans une époque commela
nôtre oir domine, parmitrop
d'intellectuels, un arrivisme.a^,
g.and",rr.Raoul Montandon avait été mon élève et, déjà à ce moment lointain, nous nous Sommes amicalement rencontrés.
Et
cette rencontre clura plus de cinquante ans.Il fit, tout
d.'aborcl, carrière d'architecte' Mais l'histoire de l'homme avait toujours préoccupé son esprit.Et,
spécialement, les chapitres 1es plus anciens de cette histoire. Aussi,tout
en accomplissant- et
avec clueltalent
-
sa profession, chercha-t-il à reprendre pied dans les éturles rela- tives à nos origines.Il
revint travailler avec son ancien maître.Il fut
un des membres actifs clu XIVe congrès international d'Anthro- pologie et d'Archéologie préhistoriques, tenu à Genève en rgr2.Et;
dans le compte rendu de cette réunion, oir tant de savants jllustres furent présents, nous avons publié en commun deux mémoftes. (L'outillage dela
slatioto attrignacietone <Les RebièresII
>, station Dwrand, Rwel,et
owtillage micro- lithiqwe d.e la station au,rigna.cien'ne < Dttramd, Rwel' >.) Ce fut, pour Montandon,le
début d'une carrière active de préhistorien.R.
Montandon, admirable dessinateur,avait un
réeltalent
pour mettre en valeur, envue
d'une reproduction t5zpographique, les caractéristiquesd'un outil
de silex.Il
illustra non seulement nos mémoires communs mais, avec le dévouement
qui
était chezlui
comme une seconde nature,iI
me donna, pendant bien des années, son aide bénévole d'artiste.A la suite du Congrès de
]]]2,
fut créé à Genève, en dehors et au-dessus r-le toutes relations ofÊcielles,I'Institut
suisse d'Anthropologie générale, avec ce sous-titre: Anthropologie, Préhistoire, Ethnographie.Il
enfut
unI
171 NECROLOGIE
des premiers animateuls, et longtemps le trésorier.
Et ii
continua à remplirce demier poste lorsque le Comité de
I'Institut
n'eut plus, comme existence réelle, que la charge de sa Reaue, c'est-à-dire les présentes Archives.Il
sedémit c1e ses fonctions entre les mains cle Mme Lobsiger-Dellenbach
il y
a quelques années seulement.En r9t4-r9r5
parut le premier Tome des Archives. Ony
trouve trois mémoires de Montandon, deux sont écrits en collaboration avec le signa-taire
decet article
(L'ou,tillage en silex dela
station. mot+stérienne: les RebièresI,les
racloirs (coupoirs) puis une étude des pointes à rnain,dela
même station; le troisième mémoire, celui-là exclusivement personnel, est
intittrlé:
A
propos de la statioto paléolithique d,e Veyrier, sa positiort. chrono- logiqwe).En
r9r9, Montandon publia, en collaboration avec Louis Gay: Décow- aerte cl'me nouaelle station paléolithiqwe à Veyrier, socts Salèae (Hte-Saaoie).Cet habitat, appelé pêr lui la station des Grenouilles, à cause de la multitude
d'ossements de Batraciens qu'elle renfermait, contenait un squelette humain considéré comme magdalénien.
Il fut
décritpar Pittard et
Sauter:[/t.
squelette magdalénieu. froaenant delastat'iond,es Grenowilles, Veyrier, Haute- Saaoie (Arch. s. d'Anthrop. gén.,
XI,
1945.)Le Tome
IV
contient encore un article de Montandon: De la chronologie quetelneile.A
propos des fouilles de Cotencher (Cantotc de Neuchâtel).On voil" que le préhistorierr ne restait pas inactif.
Nos Archives ne furent pas les seules
à
publier des mémoires signés de Montandon; le Bulletin de la Société préhistorique de France, le Globe (organe de la Sociétê de Géographie de Genève) contiennent des articles delui. Il fit
aussi paraître en librairie quelques ouvrages. Ainsi: Coup cl'æil sur les époqu,es préhistorique, celtigue et rornaine dans le Car+ton de Genève et les régions limitrophes, Genève,tgtT;
Mélanges d'archéologie et cl'h.istoire générale, le coynmerce des ains dansla
Genèae gallo-romaine et I'origine denos aignobles, rgzr.
En rgzz, c'était la venue d'un volume de belle présentation, aujourd'hui épuisé: Genèue, cles origines aux invasions barbares, avec
vingt
planches hors texte et une carte, sorte d'hommage ofiert par l'auteur à sa ville natale.La guerre de
r9r4
avait, comme nous tous, bouleversé Montandon.Il la
vécut comme ofûcier. Maisil
ne pouvait se désintéresser des suites néfastes qu'entraîneun tel
bouleversement.Et
les æuvres dela
Croix- Rouge bénéficièrentde
sestravaux. (La
d,istribar,tion géograploique desfriso,nniers de gwerre pend,ant te conflit mond'ial, d.e
rgt4-t9rg,
publié enr9r9.) Puis, toujours préoccupé des misères subies par les hommes, mais
élargissant satls cesse son horizon, Montandon consacra clès lors une part importante de sa carrière de savant
et
d'écrivain à l'étude des calamités naturelles (inondations, avalanches, tremblements de terre, famines, etc.)' Dans la revue Metéliau,x pootr t'étwd.e des Calamités qui, pour cela même,fut, par lui, fondée (tgz+),l\{ontandon
fit
paraître de nombreuses chroniques des calamités diverses abattues suf le monde, Puis, à côté, une carte nt'ond'iale cle leu.y d.istribcttion, publiéepar la
r Revue internationale c1ela
Croix- Rouge ,), rgz3. on doit signaler quc lcs a Matériaux > présentent une richesse clocumentaire que, dans untel
domaine, ils sont seuls à possécler'Mais Montandon est de plus en plus dominé par le problème de la vie et de la mort, par les phénomènes troublants, mystérieux, que présentent, à notre intelligence et à notre conscience, les prémonitions, les phénornènes
<le télépathie.
A
propos de ses étuclessllr
ces problèmes particulièrement délicats,il
clébuta par quelques communications comme: Poutf la.démonstration ex'l>é- ri,m,entale cht corps a'strat (rg25). Puis, en rg27, paraît
le
premier cle sesouvrages (cl'autres suiyirent) consacrés
à
cette nouvelle discipline: Zes Racliations humaines. Introdorctionà la
clémonstïa.tioix expérimerttale d'escorfs subtils de I'homme. Patis, tgz7,406 pages.
Et bientôt les
étucles psychiquesprirent
Montandon presque tout entier. Mon incompétencem'interdit
de parler de ces choses; des revues spéciales sont consacrées à cet objet. Mais, clans ce domaine aussi,j'ai
suivi les efforts si largement, si totalement désintéressés, de mon ancien ôolla- borateur.Il faut
rnaintenant rappeler l'ceuvre considérable, l'æuvre maîtresse, quantitativement parlant, de Montandon qui le rapprocha sans cesse de la vie scientifique. celtttla
Bibtiogra,l>hie générale des trauawx falethnologiqor'es et archéologiques: cincl volumes consacrés à relever tous les titres cles tra-vaux
ayanttrait aux
époques préhistoriques, protohistoriqueset
gallo- romaine concernantla
France. CEuvre de longue haleine que personne n,avait osé entreprend.re avantlui,
au moins avec une telle ampleur. Elle fut récompensée par l'Académie des Inscriptions, honorée d'une souscriptiondu
Ministèrcdc l'Instruction
publique cle Franceet
reçut, cle torrs les spécialistes, de tous les savants de tous les pays, I'accueil le pius empressé et le plus reconnaissant. Car chacun d.e ceux qui entreprennent une recherche savent à quel point la bibliographie concernant le sujet qu'ils ont choisi est fastidieuse, souvent rebutante.Il
fallait la patience sans limites, inusable,et le
sentiment de rendreun
service aux autfes, ces qualités éminentespossédées par MontandOn, pour s'atteler à une telle entreprise et surtout
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pour, au cours de longues années, la rnener à bien. (trlle sera continuée par la Société préhistorique française sous la forme de suppléments.)
Il
frrt-
en partie-
récompensé de ce magnifique effort par l,octroi dn doctorat h'onoris causa de I'université de Genève et par sa nomination au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur.J'ai
déjàdit
à quel pointle
dévouement de Montandonà la
chose publique était sans limites.voici
quelques-unes des charges quilui
furent confiéeset
dont la collectivité retira, chaque fois, les bénéfices: président (à plusieurs reprises) dela
Société de Géographie de Genève; président (pendantr9
ans) de la Société auxiliaire du Musée d.'Ethnographie; prési- dent (pendant_z3 ans) dela
Fédération genevoise d.es sociétés savantes;membre de la commission de la Bibliothèque publique; de celle clu Musée
d'Art et
d'Histoire;et
aussi de celledu
Musée d'Ethnographie; chef deservice
de la
docunr.entation scientifiquede l'union
internationale d.esecours; président de la Société des Etudes psychiques; membre honoraire de la Société astronomique; président, au Bureau international cLe la paix, de son Comité permanent, etc., etc.
A I'étranger, le nom de Raoul Montandon était honoré. Au XIVc Congrès
d'Anthropologie
il fut
délégué del'Institut internatio'al
ethnographique cle Paris.Il
était membre de I'Académie de Mâcon.Il fut
appelé au comité d'honneur dela
Semaine internationale des géographes, ethnographes et naturalistesà
Marseille;il fit
partiedu
comité d'honneur clela
Société belge d'étudesà
Liège, membre de l'American geographical Society de Nerv-York, membre français de la Société d'archéologie... et son utrricwrwut.aitae renrerme encore
un
nombre impressionnantde titres
honorifiques rnontrant, avec éloquence,la
qualité de l'estime dont, partout,il
était cntouré.La
dernière æuvre que Montandon publia concerne encore Genève et son rayonnement intellectuel.Il y
rappelle en même temps que sontitre
cl'ancien secrétairedu
service municipalde
I'instruction publique, des musées et collections, l'historique de plus de cent institutions scientiliques, littéraires, artistiques, sous cetitle
général Genèue, loyer intellechtel, rg5o.La mort de Raoul l\fontandon
fut
pour tous une surprise clo'loureuse.Itien ne faisait prévoir une fin aussi rapide. Aussi, clans tous les milieux, ra consternation fut-elle grande.
chacun se rappelait I'homme au-x richesses intellectuelles nultiples, l'homme courtois, dévoué, au delà de toute expression, à toutes les charges cle
la
llépublique qu'àlui,
presque seul,on
désirait confier.Et, par
là,quelle leçon
il
donnait àtant
de politiciens ! La générosité de son cæur ne connaissait pas d.e limites.Il
semblait que, pourlui,
travailler au bénéfice des autres avait été son destin. Chacun admirait ses inépuisables qualités de cæur. On se sentait honoré d'être son ami. Sa seule plésence était un réconfort.Le Musée d'Ethnographie, au nom duquel
j'ai
déjàdit
quelques mots,reçut de Montandon un appui constant. Très vite il avait senti, dès les débuts rnêmes de la vie du musée
-. il y
a cinquante ans de cela-
I'intérêt quepouvait avoir Genève à posséder un tel enrichissement intellectuel et moral.
Et
cette dernière qualité, chez Montandon, I'emportait sur la. prernière.Représentation de
la vie
multiforme de l'Humanité, cette maison, otril
aimait venir était ainsi, pour
lui,
comme une Académie conduisant à un véritablehumanisme.
.ticomme
il
chercha toujours à connaître les hommes parle
dedans, et le plus intimement possible, nos collections lui offraient de multiples images des pensées issues de toutes les raceset
de tous les lieux.Il
aimait à les confronter, à retirer, de leurs comparaisons, des réflexions et des sentirnents de plus en plus enrichissants pour l'âme supérieure qui étaitla
sienne et qui était sans cesse sur le chemin de l'élévation.Genève cloit beaucoup à son désintéressement absolu.
Il
l'a bien servie.Nous n'oublierons pas les leçons que chaque jour, par sa seule présence,
il
nous donna.
La cité perd en
lui
un grandcitoyen'
b.rgan"