CALCULER LE COÛT RÉEL DE LA MALTRAITANCE DU TROISIÈME ÂGE : CE QUE NOUS SAVONS, OÙ NOUS DEVONS COMMENCER
Spencer, C.; LL.M. professeure adjointe, Gerontology Research Centre, Simon Fraser University, Vancouver, C.-B., Canada
La maltraitance du troisième âge a des répercussions importantes sur la société
canadienne relativement aux coûts tangibles tels que les soins de santé et les transferts du gouvernement, et aux coûts intangibles tels que la diminution de la qualité de vie ou les souffrances et douleurs. L’analyse des coûts sociaux peut nous aider à mieux comprendre ces répercussions et pourrait aider les communautés à intervenir efficacement pour obtenir des ressources appropriées visant à servir les personnes âgées maltraitées.
Dans le cadre de la rationalisation des dépenses publiques, une analyse du coût social pourrait aider à donner aux communautés des renseignements supplémentaires pour
« faire une analyse de rentabilité » et cela pourrait également aider les gouvernements à réexaminer leurs pr iorités politiques. Bien que la société ait des coûts liés à l’action (comme la prévention des mauvais traitements, des ressources pour aider, des frais juridiques) il y a également d’énormes coûts cachés liés à une action limitée et à l’inaction.
ÉLABOR ATION DES MÉTHODES DE CALCUL DU COÛT
Des méthodes de calcul du coût social ont été élaborées pour examiner divers types de problèmes sociaux et de santé, notamment le fardeau économique de la tabagie, du cancer et des chutes.
Un travail préliminaire du calcul des coûts a été effectué au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande pour la violence familiale et la violence à l’égard de l’épouse dans les années 90 pour faire une évaluation plutôt modérée du coût annuel dans ces domaines.
Au début des années 2000, Santé Canada a commandité deux rapports exploratoires sur le
« Coût de la maltraitance et de la négligence du troisième âge » afin d’aider à déterminer les principaux domaines de coûts provoqués par la maltraitance des personnes âgées et l’état actuel des données disponibles actuellement (Spencer, 2001).
ÉLABORATION ET UTILISATION DU MODÈLE
Une des plus grosses difficultés pour l’établissement des coûts sociaux dans ce domaine est la nécessité de créer un modèle attentif aux différences de traitement à cause de l’âge et du sexe. Traditionnellement, l’établissement de coûts a été fondé sur la norme du jeune homme blanc qui travaille, et il dévalorise systématiquement le travail des femmes, le travail non rémunéré, les efforts de bénévolat, les contributions des personnes âgées à la famille et à la communauté et les contributions interdépendantes au sein des familles. Par exemple, dans l’établissement traditionnel du coût économique, les mesures telles que les années personnes de perte de vie (APPV), la « valeur » d’une personne cesse à 75 ans. Un modèle approprié se basera probablement sur le modèle de la violence familiale, mais il devra reconnaître la manière dont l’âge ajoute un élément très important à l’analyse.
A. CARACTÉRISTIQUES IMPORTANTES
Lors de l’élaboration d’un modèle d’établissement des coûts de la maltraitance des personnes âgées, il sera important de tenir compte des renseignements sur l’incidence, l’impact et le coût pour les services formels (par ex., santé, santé mentale, services juridiques) et les services informels (par ex., groupes d’aînés, d’entraide, de soutien des pairs, des services bénévoles).
Tout établissement du coût social doit être en mesure de comprendre et d’incorporer dans le modèle le fait que la maltraitance des aînés peut commencer plus tôt dans la vie et continuer à l’âge d’or, ou elle peut commencer à apparaître plus tard dans la vie. Le modèle doit également reconnaître la diversité des personnes âgées au Canada.
L’établissement des coûts devra également prendre en considération que les personnes âgées maltraitées avec des capacités intellectuelles en régression exigent des ressources différentes de celles qui n’ont pas ce problème, et il devra également tenir compte des divers milieux dans lesquels las mauvais traitements se produisent (communauté et institution).
B. L’INTERPRÉTATION
Tout établissement du coût social de la maltraitance des personnes âgées doit être nuancé dans sa collecte de renseignement et dans son analyse (par exemple, reconnaître comment les services de soins de santé ont été utilisé pour « surveiller » les situations de mauvais traitements ou comment le placement institutionnel en maisons de soins infirmiers a été
mouvante des mauvais traitements au troisième âge ainsi que des divers effets sur les individus, les familles, les communautés aussi bien que sur les secteurs public et privé.
RÉSULTATS PROBABLES DES COÛTS GÉNÉRAUX DANS CERTAINS DOMAINES PAR COMPARAISON À D’AUTRES DOMAINES DE VIOLENCE DOMESTIQUE
Les rapports préliminaires de Santé Canada sur les coûts sociaux pour le troisième âge postulent un certain nombre de domaines de coûts plus élevés et moins élevés par comparaison à d’autres domaines de violence domestique. À cause d’une part de l’effet cumulatif de la maltraitance de longue date et de la vulnérabilité qui augmente
vraisemblablement avec l’âge, on peut anticiper des coûts plus élevés de soins de santé pour les aînés maltraités que dans les autres domaines de violence domestique, avec des incidences similaires. Toutefois les frais de justice peuvent être bas, reflétant la
répugnance des personnes âgées d’avoir recours aux autorités juridiques et de faire face aux obstacles systémiques du système judiciaire. Dans de nombreuses communautés, une grande partie du travail de prévention des mauvais traitements envers les personnes âgées est effectué par des aînés et le secteur bénévole, avec un taux élevé de contributions en nature, et par conséquent, les coûts peuvent être bas à modérés par comparaison à d’autres domaines de violence domestique. Les transferts du gouvernement peuvent être un domaine de coût élevé étant donné que l’exploitation financière est une des formes de mauvais traitements les plus fréquentes et qu’elle diminue de manière permanente les biens et les ressources de la personne âgée. On pense que les coûts des services
communautaires et les coûts pour les entreprises et le secteur privé seront fréquemment cachés et qu’il sera difficile de les séparer des services généraux.
OÙ COMMENCER : COMPRENDRE LES EFFETS SUR LA SANTÉ
La recherche indique que la violence familiale affecte l’utilisation des soins de santé pour ce qui est des effets directs (fractures) et des séquelles sur la santé mentale. La vie dans un milieu abusif provoque également un stress général sur la santé accroissant les risques de maladies cardiaques ; et les mauvais traitements peuvent également nuire à la bonne gestion de sa santé. Nous apprenons également que le milieu peut augmenter les effets (par ex., les personnes maltraitées dans des communautés rurales avec un accès limité aux ressources de soins de santé peuvent avoir des résultats plus mauvais) et que de bons soutiens peuvent alléger dans une certa ine mesure les effets nuisibles sur la santé.
OÙ EN SOMMES -NOUS : OÙ SONT LES DONNÉES ?
Même dans les systèmes formels, il y aura souvent peu de données disponibles sur la maltraitance des aînés. Pour des raisons qui sautent aux yeux, les fournisseurs de services communautaires et gouvernementaux ont tendance à accorder une priorité plus faible à la collecte de données qu’à la prestation des services nécessaires. Toutefois, il est possible de commencer à ramasser ces données pour des analyses de coûts grâce à des projets pilotes avec des ressources appropriées pour les organismes communautaires qui font cette collecte de données. Les données peuvent également être ramassées grâce à une recherche qualitative auprès des personnes âgées maltraitées qui décrivent les nombreux
ressources, si tant est qu’il y en ait, ils utilisent actuellement. Il sera important de
comparer la trajectoire et les situations des personnes âgées maltraitées avec celles qui ne le sont pas. Ce sont là des premières étapes importantes pour mieux comprendre les implications sociales de la maltraitance et de la négligence au troisième âge.