ATS ATS
Jules Ferry
T8 : Conduction thermique (ou diffusion thermique)
T8
Les différents processus de transferts thermiques ont déjà été discutés au chapitre T2 :
• la conduction thermique étudiée ici (pas de mouvement de matière) ;
• la convection thermique (présence d’un mouvement fluide : mécanique des fluides + thermodynamique) ;
• le rayonnement électromagnétique qui peut s’effectuer sans présence de matière (cf EM5).
Remarque : ce chapitre est ici répertorié en thermodynamique car l’équation de la chaleur, loi fondamentale de ce chapitre, se démontre en appliquant le premier principe de la thermodynamique.
Cependant, il pourrait être classé dans une autre partie, qu’on aurait alors appelée « processus de conduction ou de diffusion » et serait traité en parallèle du processus de conduction électrique (cf EM2).
Les notions de « flux » se retrouvent aussi dans 3 chapitres au programme d’ATS : le flux thermique étudié ici, le flux de masse ou de volume (étudiés au chapitre MF2 sous les noms de débits massique ou volumique) et le flux de charge électrique (ou débit de charge électrique ou encore intensité électrique, étudiée au chapitre EM2).
I. Flux thermique
1. Présentation : expérience historique de Ingen-Housz (1789)
On réalise l’étude de T(x , t) en conduction pure (pas de mouvement de matière au sein du matériau conducteur étudié).
2. Définition du flux thermique
Par l’expérience précédente, il ressort une grandeur physique importante : le transfert thermique à travers une section droite S du matériau étudié par unité de temps : δQ/S
dt =Pth(t)=Φth(t) appelée puissance thermique ou flux thermique et exprimée en Watt.
Remarque : on pourrait aussi appeler cette grandeur « débit thermique », par analogie avec les définitions des débits massique et volumique données au chapitre MF2 ; ou encore « courant thermique », par analogie avec la définition du courant électrique donnée au chapitre EM2.
3. Vecteur densité de flux thermique (ou de courant thermique)
Remarque : historiquement, la notion de vecteur densité de flux thermique est née de l’analogie avec le flux de masse (ou débit massique) en mécanique des fluides et le flux de charge électrique (ou courant électrique) en électrocinétique :
• MF2 : Dm/S(t)=Φm/S(t)=
∬
P∈S
⃗jm(P , t) ⃗dSP ; on en déduit alors Φth/S(t)=
∬
P∈S
j⃗th(P , t) ⃗dSP
• EM2 : i/S(t)=δqélec/S
dt =Φchargeélec/S(t)=
∬
P∈S
j⃗élec(P , t) ⃗dSP .
Signification physique : dΦth(t)= ⃗jth(P , t) ⃗dSP donc :
• ‖ ⃗jth(P , t)‖=dΦth
dSP si dS⃗P est colinéaire à j⃗th(P) : ‖ ⃗jth‖ représente la puissance thermique par unité de surface ;
• j⃗th(P) est de même direction et de même sens que le transfert thermique.
Conclusion : Φth/S(t)=
∬
P∈S
j⃗th(P , t) ⃗dSP où j⃗th est le vecteur densité de flux thermique ; ‖ ⃗jth‖ s’exprime en W.m−2.
4. Loi de Fourier
Il s’agit d’une loi expérimentale et intuitive (cf expérience de Igen-Housz) :
Loi de Fourier : j⃗th=−λ ⃗grad T où λ est la conductivité thermique du matériau étudié, elle s’exprime en W.m−1.K−1 .
Remarque : l’expérience d’Igen-Housz montre que λCu>λAl>λFe. Ordres de grandeur de la conductivité thermique en fonction du matériau :
• pour les métaux solides : de 10 à 400W.m−1.K−1, ce sont de très bons conducteurs (ici thermiques, on verra qu’il en est de même pour la conduction électrique) ;
• le verre et le béton ont des conductivités thermiques de l’ordre de 1W.m−1.K−1 (moyennement conducteurs) et le bois possède une conductivité d’environ 0,25W.m−1.K−1 ;
• λlaine de verre∼0 ,04W.m−1.K−1 (bon isolant) et λair au repos∼0,026W.m−1.K−1.
II. Équation de diffusion thermique (ou équation de la chaleur) dans le cas unidimensionnel
1. Équation de diffusion
L'évolution spatio-temporelle du champ de température T(x , t) est régie par l’équation de diffusion :
∂2T
∂x2−1 D
∂T
∂t =0 où D est appelé coefficient de diffusion. Dans le cas de la diffusion thermique, Dth= λ
ρc avec :
• ρ est la masse volumique du matériau étudié ;
• c est la capacité thermique massique du matériau étudié (en J.K−1.kg−1).
x
x x + dx
⃗jth(x , t) ⃗jth(x+dx , t) Remarques :
1. Il s’agit de la forme canonique d’une équation de diffusion (thermique, de particules, … ) ; D est le coefficient de diffusion associé.
2. Si le phénomène de diffusion n’est pas unidimensionnel mais à 3D, l’équation de diffusion devient : ΔT− 1
D
∂T
∂t =0 . Propriétés :
• Il s’agit d’une équation linéaire !
Historiquement, c’est en étudiant cette équation que Fourier a eu l’idée d’utiliser les séries qui portent son nom aujourd’hui.
• Cette équation n’est pas renversable dans le temps.
Si t→−t alors l’équation devient ∂2T
∂x2+ 1 D
∂T
∂t =0 : phénomène irréversible dû à l’inhomogénéité de température.
• D s’exprime en m2.s−1.
Il relie le temps caractéristique τ et la longueur caractéristique L du phénomène de diffusion en ordre de grandeur : D#L2
τ .
Ordres de grandeur du coefficient de diffusion thermique :
Matériau Cuivre Laiton Acier inox Verre Bois Eau liquide à 293K
Dth (en 10−6m2.s−1) 114 33 4 0,58 0,45 0,14
2. Démonstration à connaître !
• On applique le premier principe de la thermodynamique en système fermé à ΣF entre les instants t et t+dt : d Etot=δW+δQ avec :
◦ d Etot=Etot(t+dt)−Etot(t)=dU+dEc+dEp et
◦ d Ec=0 ; d Ep=0 ; δW=0 car le système est fixe.
Donc dtU=δQ .
• Pour une phase condensée ou un gaz parfait, dtU=CvdtT=ρcvS dx dtT
• On ne considère que la conduction thermique donc δQ=δQentrant en x−δQsortant en x+dx avec
◦ δQentrant en x=jth(x , t)S dt ;
◦ δQsortant en x+dx=jth(x+dx , t)S dt
Donc δQ=−(jth(x+dx , t)−jth(x , t))S dt=−∂jth
∂x S dt dx.
• Il vient : ρcvS dx(T(x ,t+dt)−T(x , t))=−∂jth
∂x S dt dx soit ρcv∂T
∂t =−∂jth
∂x .
• Loi de Fourier : j⃗th=−λ ⃗grad T=−λ ∂T
∂xe⃗x et jth=−λ ∂T
∂x .
⃗jth=j(x , t) ⃗ex T(x , t);
ΣF
T1 S S T2
x0
x
x0
x
solide air Text
D’où ρcv∂T
∂t=+λ ∂2T
∂x2 soit ∂2T
∂x2−ρcv λ
∂T
∂t =0 .
• Par identification, D= λ
ρcv . Pour une phase condensée, on a donc D= λ ρc .
Remarque : si le système fermé considéré est un solide en équilibre mécanique monobare, on peut appliquer le premier principe simplifié : ΔH=QmonoP donc en écriture infinitésimale : dtH=δQ.
Avec, pour une phase condensée, dtU≃dtH et cv≃cp≃c.
3. Conditions aux limites
a) Conditions aux limites « classiques »
• Il y a toujours continuité du flux thermique Φth à une interface.
jth1(x0−)=jth2(x0+)
• Il y a continuité de la température, on parle de contact thermique parfait : T1(x0−)=T2(x0+).
b) Loi de Newton (pas à connaître mais à savoir utiliser)
S’il y a une interface solide/fluide et que la différence de température est grande, un phénomène conducto- convectif naturel peut apparaître :
On modélise alors j⃗th(x0, t) par la loi de Newton : j⃗th(x0, t)=±h(T(x0, t)−Text) ⃗ux où h est positif, caractérise l’échange conducto-convectif et s’exprime en W.m−2.K−1.
À n’utiliser que si l’énoncé en parle.
Attention : si la loi de Newton est vérifiée, T(x0,t)≠Text .
matériau 1 matériau 2
l faible
0 ⃗jth=jthu⃗x x
III. Diffusion thermique unidimensionnelle en régime stationnaire
1. Étude de l’évolution spatiale de la température dans un conducteur unidimensionnel : T(x)
En régime stationnaire, ∂T
∂t =0 donc l’équation de la chaleur devient ∂2T
∂x2=0 soit ∂T
∂x=A et T(x)=A x+B où A et B sont des constantes d’intégration.
Par les conditions aux limites,
{
TT(x(x=0)=T=L)=T12soit
{
B=A L+TB=T1 2 d’où{
A=B=T2T−TL1 1 donc T(x)=T2−TL 1x+T1 .Par la loi de Fourier, j⃗th=−λ ⃗grad T=−λ T2−T1
L u⃗x ; jth=λ T1−T2
L >0 uniforme dans le matériau.
2. Résistance thermique – analogie électrique (cf EM2 ou SII)
a) Définition de la résistance thermiqueEn régime stationnaire, la différence de température T1−T2 appliquée aux extrémités du matériau est directement proportionnelle au flux thermique qui le traverse Φth1→2. La constante de proportionnalité est appelée résistance thermique du conducteur considéré : Rth=T1−T2
Φth1→2 en K.W−1 ; elle est définie positive.
Remarque : la définition provient d’une analogie avec l’électricité :
Conduction thermique Conduction électrique
Φth I=Φélec
T V
Rth Rélec
⃗jth j⃗élec
T1 T2
L
x b) Cas d'un conducteur unidimensionnel en régime stationnaire Dans le cas unidimensionnel, Φth1→2(1D)=jthS=λS
L (T1−T2) donc Rth(1D)= L λ S . Remarque : illustration sur une casserole en cuivre des grands cuisiniers
• fond de la casserole : S est grande et l petite donc la résistance thermique est faible ;
• manche : L est grande et s petite dons la résistance thermique est grande (ouf !).
Remarque pour la démonstration : parfois, elle est demandée en sens inverse : on demande d’abord de démontrer l’uniformité du flux thermique le long du matériau (Φ(x)=cte) en régime stationnaire pour en déduire Rth(1D).
On applique alors le premier principe de la thermodynamique au matériau situé entre x et x+dx :
dtU=δW+δQ avec
{
δW=0 car phase condensée (ou isochore)dtU=0 car régime stationnaire donc δQ=0.
Or δQ=δQentrant en x−δ Qsortant en x+dx=
(
Φth(x)−Φth(x+dx))
.dt d’où Φth(x+dx)=Φth(x)=cte : uniforme, avec jth(x)=ΦthS =cte ' .
Par la loi de Fourier, j⃗th=−λ ⃗grad T=−λ
(
∂T∂x)
u⃗x donc ∂∂Tx est uniforme soit ∂T∂x=T2−T1 L (1) ! D’où Φth(1D)=S jth=Sλ
L (T1−T2) et on obtient Rth(1D). D’ailleurs en réintégrant (1), on retrouve T(x)=T2−T1
L x+T1.
x x + dx
Φth (x) Φth (x+dx)
c) Propriétés (analogie avec les résistances électriques)
• Si N résistances thermiques Rthi sont en série (i.e. traversées par le même flux thermique Φth) alors elles sont équivalentes à une seule : Rth(série)=
∑
i=1 N
Rthi .
• Si N résistances thermiques Rthi sont en parallèles (i.e. soumises à la même différence de température) alors elles sont équivalentes à une seule résistance Rth// telle que 1
Rth//=
∑
i=1
N 1
Rthi .
Démonstrations :
1. Rth(série) : Ti−Tf=Ti−T1+T1−...+TN−1−Tf=Rth1Φth+...+RthNΦth=(
∑
i=1 N
Rthi)Φth et Ti−Tf=Rth(série) Φth. Par identification, on obtient le résultat.
2. Rth// : Φtot=
∑
i=1 N
Φi=
∑
i=1
N Ti−Tf
Rthi =(Ti−Tf)
∑
i=1
N 1
Rthi et Φtot=(Ti−Tf)
Rth// . Par identification, on obtient le résultat.
Remarque : pour les mêmes raisons, les ponts diviseurs de tension (de température, un exemple sera donné en TD), de courant (flux thermique), ainsi que le théorème de Millman existent en thermique !
IV. Ondes thermiques unidimensionnelles (cf TD ex4)
Les ondes régies par des processus de diffusion possèdent des caractéristiques différentes des ondes régies par des processus de propagation.
On étudie donc le comportement d’une onde thermique à l’exercice 4 du TD.