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MÉMORIAL DES FRANÇAIS

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MÉMORIAL DES FRANÇAIS

DÉPORTÉS AU CAMP DE

LANGEN STEIN-ZWIEBERGE

KOMMANDO DE BUCHENWALD

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MÉMORIAL

DE

LANGENSTEIN-ZWIEBERGE Kommando de BUCHENWALD

AVANT-PROPOS :

SOURCES ET DIFFICULTÉS RENCONTRÉES

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Lorsque, avec mon ami Roger LEROYER, je me suis lancé dans cette aventure, je ne la pensais pas si compliquée, cela, d'autant plus que je disposais d'une documentation abondante.

Au Mémorial du ZWIEBERGE, j'avais pu photocopier la totalité des archives:

les cahiers journaliers du 6 juin 1944 au 3 avril 1945 sur lesquels étaient notés toutes les entrées, les sorties, les décès, les changement de blocks, les admissions et retours du revier (DOC.1); un certain nombre de listes d'arrivée au kommando dont la totalité de celles du petit camp JUNKERS; de diverses feuilles et dossiers des malades du revier, les listes journalières des morts et de retour au camp central de BUCHENWALD (1).

Un certain nombre de ces éléments existent aussi aux bureau des archives du ministère des Anciens Combattants à CAEN avec, en plus, la totalité des listes de transport de BUCHENWALD ou de SACHENHAUSEN vers le ZWIEBERGE; la photocopie, en deux grands registres, de la totalité des 6800 cartes des détenus du kommando, les états journaliers d'effectifs des malades du revier et des shonung, y compris ceux du camp JUNKERS; le registre des morts s'arrêtant à l'arrivée des américains avec 1802 morts et quantité de documents annexes.

Figurent surtout dans ces archives de CAEN de nombreux documents concernant le camp de BUCHENWALD, notamment la photocopie des registres des entrées établi par ordre croissant de numéros, toutes les listes d'arrivée et de transfert, une partie des fiches individuelles des déportés français (les originaux) classées également par numéros.

Il existe aussi, dans ces archives, un fichier central, de plusieurs millions de fiches, de tous ceux ou celles qui sont allés en Allemagne pendant la dernière guerre: travailleurs volontaires ou requis, prisonniers et déportés, comportant la référence de renvoi aux dossiers, quand il en existe un, parfois la date du retour, du décès ou de la disparition. Malheureusement il n'y a pas de classement spécifique par catégorie, ni de mise sur ordinateur. C'est un outil remarquable établi après le retour, pour renseigner les ressortissants ou leur famille mais non pour faire des statistiques ou des recherches.

Pour savoir ce qu'est devenu tel ou tel autre camarade il faut donc manier des dossiers poussiéreux ou de lourds bacs de fiches classées par ordre alphabétique.

Par exemple, il existe plusieurs centaines de DUPONT, plusieurs dizaines de DUPONT Jacques dont quelques uns seulement ont été déportés. Il faut les différencier par les dates et lieux de naissance... quand on les connaît. Si le nom est mal orthographié, il faut retourner aux sources: la fiche d'entrée à BUCHENWALD ou le registre, à condition d'avoir le bon numéro.

Cette recherche m'a permis de découvrir comment fonctionnait l'administration allemande des camps et notamment BUCHENWALD, camp pour lequel les archives sont les plus complètes.

(1) Des photocopies de documents sont groupées en fin d'ouvrage, de Doc. 1 à Doc. 24. avec la bibliographie. Nous avons également inséré quelques photos, la plupart, soit prises par des correspondant américains, découvertes aux archives de WASHINGTON, soit tirées d'un film vidéo sur la libération du camp réalisé à partir d'un film de 11 minutes retrouvé au même endroit.

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Lorsque nous partions de COMPIEGNE (ou d'ailleurs), il n'y avait qu'une seule liste établie par la SIPO (Sicherheitpolizei) de PARIS, quelquefois manuscrite et surchargée ou tapée à la machine. Elle comportait le numéro de COMPIEGNE, le nom, le prénom, la date de naissance. Cette liste, après notre arrivée à BUCHENWALD était renvoyée à la SIPO de PARIS. En aucun cas elle ne servait à établir la liste d'arrivée. Ces listes originales ont disparu. Certaines ont été reconstituées comme l'ont été les registres d'entrée de COMPIEGNE, mais les reconstitutions sont toujours une source d'erreur.

Lorsque nous arrivions à BUCHENWALD les fonctionnaires détenus du camp remplissaient devant nous une fiche de base que nous avons signée comportant la nationalité, le numéro attribué, nom, prénom, profession, date et lieu de naissance, religion, adresse, date d'arrestation. Elle était complétée ultérieurement par la date d'arrivée et l'ancien numéro s'il s'agissait d'un transfert d'un autre camp.

Cette fiche de base servait à établir la liste d'arrivée, classée d'abord par ordre alphabétique, puis par numéros croissants. Elle sera recopiée sur un fichier central et sur le registre des entrées du camp. Sur ces registres, car il y en a eu plusieurs, pour chaque numéro, il y avait plusieurs lignes. Y figure le nom prénom, nationalité, date de naissance et kommando (Pour le ZWIEBERGE:BII, puis Z). Si le détenu était décédé ou transféré dans un autre camp, une dernière colonne en indique la date et, dans ce cas, la deuxième ligne est utilisée pour y inscrire un autre détenu car le numéro est de nouveau affecté.

Certains numéros ont ainsi été utilisés trois ou quatre fois.

A partir du fichier central sont établies deux cartes personnelles dont l'une avec photo, une carte de contrôle du courrier, une fiche d'administration des finances (Chaque détenu pouvait recevoir un mandat de 30 DM par mois) deux fiches concernant nos effets personnels et autres objets confisqués à notre arrivée et déposés à l'effectenkammer (1) (En cas de transfert dans un autre camp toutes ces affaires suivaient), enfin la fiche de travail où les kommandos successifs étaient notés en langage codé avec les dates.

A chaque fois que le nom ou les renseignements portés sur la fiche originale étaient recopiés, ils étaient déformés, germanisés ou polonisés, suivant la nationalité du bureaucrate. Par exemple, je ne m'appelle plus LE GOUPIL, mais LA GOUPIL et je n'habite plus PETIT-QUEVILLY mais QUERILLY. (DOC. 2)

Lorsque nous sommes partis en transport pour le ZWIEBERGE, de nouvelles aventures attendaient notre état-civil: une première liste de transfert était établie par blocks d'origine. Ainsi, pour prendre un exemple, la liste du 14 novembre 1944 de 500 noms comportait 1 détenu du Block 3, deux du 2, cinq du 8 etc., le gros du contingent étant fourni par les blocks de quarantaine. Cette première liste était sujette à modifications, certains noms étaient rayés pour diverses raisons: entrée au revier, détenus NN qui ne devaient pas partir en transport ou, le plus souvent, intervention auprès de l'Organisation du camp.

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Dans cette liste, 14 noms ont été rayés et une liste supplémentaire de 14 noms a été établie pour les remplacer mais on sait qui a été remplacé et par qui car si le numéro d'ordre N° 22 de la liste portant tel numéro et tel nom a été rayé, sur la liste supplémentaire, il est indiqué pour le N° 22 tel autre numéro et tel autre nom. Quelquefois des Français ont remplacé des étrangers, mais le plus souvent ce sont des étrangers qui ont remplacé des Français comme s'il y avait conflit permanent entre nationalités. Je reparlerai de cette question lorsque, dans l'histoire du kommando, j'indiquerai l'arrivée et la composition des différents convois.

Une seconde liste, définitive, cette fois, était établie avec de nouvelles déformations des noms et des renseignements d'état-civil. Cette liste servait à constituer le fichier. Pour le ZWIEBERGE, il y avait trois fichiers classés par ordre croissant de numéros, l'un pour les détenus arrivés en 1944, un autre pour les détenus arrivés en 1945 (Listes des 10 et 18 février 1945) et un troisième pour les morts. Il s'agissait alors simplement de retirer la fiche des deux premiers fichiers et de la mettre dans le troisième en y ajoutant une croix et la date du décès. C'est à partir de ces fichiers que notre camarade DEDIEU a établi la liste des Français avant de partir du camp. Ce qui explique qu'il ait fait plusieurs listes toutes classées par numéros.

Chaque fiche comportait au coin gauche supérieur la lettre de nationalité: F ou Frz pour les Français, FJ pour les français classés comme juifs, P pour les Polonais et PJ pour les Polonais juifs etc... Au milieu, le nom, en dessous le prénom, la date de naissance et la profession. A droite, en haut, le numéro et, en dessous, la date d'arrivée. En bas, à droite, les blocks successifs avec R pour les séjours au revier. Ces fiches sont difficilement exploitables par suite des nombreuses erreurs dues aux transcriptions. (DOC. 3)

Le cas extrême est celui de notre camarade AILLAUD Marceau. A son arrivée à BUCHENWALD le secrétaire de service avait inversé les noms et prénoms, il était donc devenu MARCEAU Aillaud, puis MORCEAU A., puis, sur le fichier du ZWIEBERGE: MORE AU Alfred ! Ainsi RAFFINI est devenu BATTINI; DROUHIN: BRAUN; BARROU: DUVVEN ; BLANC: MANE etc...

Dans plusieurs cas, nos camarades ont caché leur véritable identité. Entre autres BILLAC est devenu BILLORET; STORM: LENOBLES; BUHOT: ROPARS. Sans doute reste-t-il quelques erreurs car je n'ai pas retrouvé tous les véritables noms. Quant aux dates de naissance, elles étaient presque toutes fausses avec des différences, parfois, de quarante ans. Là aussi il peut rester quelques rectifications qui n'ont pu être faites.

Le but principal de ce mémorial, outre de pérenniser les noms de nos camarades victimes de ce sinistre kommando, était de savoir s'ils étaient rentrés ou non. Là aussi de grandes difficultés nous attendaient. Pour les morts au camp, pas de problèmes, le nom et le numéro sont portés sur les cahiers journaliers jusqu'au 3 avril 1945. Ils sont notés, au jour le jour, sur le livre des décès, sur les fiches et sur les feuilles de "Mouvement du camp" destinées à comptabiliser les détenus au moment de l'appel. (DOC. 4)

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Nous retrouvons ces morts, jusqu'au 10 mars 1945, sur les registres du crématoire de QUEDLINBURG où les corps ont été incinérés (environ 140 Français). Quelquefois les cendres étaient transférées à BUCHENWALD. Après cette date les corps ont été jetés dans les grandes fosses communes jusqu'au 6 avril, puis dans la petite fosse près du revier jusqu'à l'évacuation des malades vers l'hôpital d'HALBERSTADT par les Américains le 18 avril 1945. Après cette date les morts français ont été inhumés individuellement dans le cimetière d'HALBERSTADT. Les corps seront exhumés et rapatriés en 1950. Nous en avons également retrouvé les listes. (DOC.5). Pour la plupart de ces morts des certificats de décès ont été établis, soit au camp (DOC. 6), soit à l'hôpital d'HALBERSTADT (DOC. 7).

A partir du 9 avril 1945, date de l'évacuation, il a été très difficile de retrouver la trace de nombreux camarades. Par manque de documents, nous ne savons pas combien de Français sont partis parmi les 3000 évacués (Ce chiffre, lui non plus, ne peut être confirmé) et, à fortiori leurs noms. Non plus, de ce fait, le nombre et les identités de ceux restés au camp. Pour retrouver la trace de nombreux camarades, il a fallu recourir aux fiches et dossiers individuels du bureau des archives des anciens combattants. Lorsque ceux-ci sont incomplets et ne signalent pas de dates de rapatriement ou d'actes de décès ou de disparition, il ne reste que la solution d'écrire à la mairie de naissance, lorsqu'elle est située en France et lorsqu'on a un état-civil exact, pour savoir s'il existe des mentions marginales.

Lorsqu'il y en a une, postérieure à 1945, de décès, de disparition, ou de mariage, on sait si le déporté est rentré ou non. Lorsqu'il n'y en a pas, cela ne signifie pas que l'intéressé est rentré et toujours vivant car j'ai rencontré plusieurs cas où le déporté, s'il est toujours vivant, serait plus que centenaire. Il n'y a mention de décès que si celui-ci a été dûment constaté et mention de disparition que si la famille a fait une demande de recherches. Si le disparu n'en avait pas, il est doublement disparu car personne ne s'est soucié de ce qu'il était devenu. Dans ce cas, nous avons mis: "SANS NOUVELLES" Ce qui signifie qu'on ne sait pas si le camarade est rentré ou non. Sur 35 lettres envoyées dans les mairies, j'ai eu 34 réponses: 15 avec une mention de décès postérieure à 1945, 7 sans mention, et 12 dont les recherches n'ont pas abouti par suite d'un état-civil erroné pour des raisons diverses comme nous en avons précédemment donné quelques exemples.

A propos du jugement déclaratif de décès prononcé par les tribunaux après disparition (Seulement à la demande des familles), l'acte donne comme date de décès le lendemain du jour où le tribunal avait la preuve que le déporté était encore vivant: ce peut être une lettre datée de BUCHENWALD, ou un nom sur une liste de transport datée. Ainsi quelques camarades sont portés décédés à une date précédant leur arrivée au ZWIEBERGE, certains le lendemain de leur départ de France. Dans tous ces cas nous avons mis "DISPARU" sans préciser la date car si le décès est certain, ni la date ni le lieu ne sont connus.

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Evidemment, nous aurions pu faire mieux encore: chercher à savoir ce qu'étaient devenus tous ceux qui étaient rentrés et leur date de décès éventuelle en écrivant à toutes les mairies de naissance; connaître aussi la proportion de déportés politiques ou résistants: a ce propos j'ai remarqué qu'il y avait eu, au ZWIEBERGE un nombre relativement important de personnes dont les demandes de cartes avaient été rejetées et quelques "droits communs". Quelques uns étaient même recherchés, après leur retour, pour finir de purger une peine ! Ces questions de statistiques et d'histoire quantitative intéresseront peut-être un jour des universitaires. Notre travail pourra alors leur servir de base.

Cette étude se limite essentiellement au kommando de LANGENSTEIN- ZWIEBERGE. Les lecteurs non informés sur les camps d'où venaient les détenus: BUCHENWALD, SACHSENHAUSEN ou autres Kommandos et prisons pourront se reporter aux ouvrages cités dans la bibliographie, dont certains sont encore actuellement disponibles.

Voici l'essentiel des remarques préalables à l'étude historique du kommando.

Pour terminer ce chapitre, je remercie la directrice du mémorial de LANGENSTEIN-ZWIEBERGE Mme Ellen FAUSER qui m'a permis, au cours d'un séjour en Allemagne, de photocopier toutes les archives du camp, sa traductrice Gesine DAIFI souvent mise à contribution, Monsieur Karl KUNZE, membre de l'association de Sauvegarde du Mémorial qui a mené des recherches dans la ville d'HALBERSTADT, Mme GRIMBERT, professeur d'Allemand en retraite qui m'a traduit de nombreux textes intéressant le camp ou le tunnel, les camarades qui ont apporté leur pierre à l'ouvrage en signalant des noms de déportés de leur convoi ou des faits intéressants permettant de cerner au plus près la vérité, enfin Mme DIATTA, chef de bureau des archives au ministère des Anciens Combattants qui a guidé mes pas dans le dédale des dossiers et des fiches et qui a, par sa compétence et l'aide de son personnel, facilité mes recherches.

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CARTE AU 1/600000 DES LIEUX CITES

Le triangle tête en bas indique qu'il existe en ce lieu un monument commémoratif

concernant la déportation. BUCHENWALD figure sous le nom de ETTERSBERG.

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HISTOIRE du CAMP

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I

LE LANDHAUS ET LA GRANGE

C'est après le bombardement des usines JUNKERS à HALBERSTADT du 11 janvier 1944 et surtout celui du 20 janvier suivant auquel participèrent 700 bombardiers américains à grand rayon d'action qui détruisit partiellement ces usines que les nazis décidèrent d'accélérer le processus de leur mise sous terre.

Etaient intéressées par ces travaux les firmes 1) GRÜN u. BILFINGER 2) HERM ANN - GORIN G-WERKE 3) BAUWENS, MAGDEBURG 4) JULIUS SCHMIDT, MAGDEBURG

et sans doute d'autres firmes plus petites ainsi que la REICHSBAHN.

La réalisation fut confiée aux dépendances du bureau du groupe C du service de sécurité du Reich pour la production de guerre. Ce fut le Bauleitung der Waffen-SS und Polizei, Baustab Heese, SS-Fûhrungsstab B2 qui fut chargé de superviser ces travaux. (Le nom de code BII pour le kommando vient peut- être de là)

Après inspection des sites: mines de sel de HADMERSLEBEN, STASSFURT et autres de la région qui furent également utilisées, ils décidèrent, malgré l'avis des géologues qui trouvèrent la roche trop friable, de construire un grand complexe souterrain sous les monts THEKEN. Pourquoi ce site? parce qu'il était très près de la ville d'HALBERSTADT et du terrain d'aviation et aussi parce que la voie de chemin de fer très proche pouvait permettre un raccordement rapide et un acheminement de matériaux dans les meilleurs délais. De plus, il y avait, avec des casernes proches et de nombreuses auberges, une possibilité de logement immédiate pour les travailleurs civils volontaires ou requis au titre du service de travail obligatoire. Par suite de la destruction presque complète des usines JUNKERS le 14 février 1944, une main d'oeuvre importante était disponible. Les travailleurs étrangers et les cadres allemands déjà en place débutèrent le travail en creusant la colline probablement sur la face Nord du THEKENBERGE où existait déjà une faille appelée "Ravin des Rossignols".

Le premier groupe de déportés venant de BUCHENWALD, constituant les cadres, arriva le 21 avril 1944. Ces 18 déportés, dont Hans NEUPERT qui devint Lageraltester et notre compatriote le docteur RAINE, furent logés à l'auberge de LANDHAUS, rendez-vous de chasseurs, au pied du THEKENBERGE, situé à 4 km d'HALBERSTADT et à 2 km de LANGENSTEIN. Ils furent gardés, sur l'ordre des SS, par des aviateurs de l'aéroport voisin. Leur premier travail consista à aménager le site déjà entouré de barbelés et dont les fenêtres donnant sur la route avaient été condamnées par des planches, afin de permettre le logement du premier transport.

Celui-ci arriva le 27 avril 1944: 200 déportés venant directement de

NEUENGAMME immatriculés à BUCHENWALD de 50502 à 50701, convoi

composé de 30 Estoniens, 68 Russes et 102 Polonais.

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Ils étaient encadrés par un groupe de SS Totenkopf commandés par TSCHEU qui prit la direction du camp. Leur principal travail fut d'aménager un lieu plus important pour recevoir les convois venant de BUCHENWALD dont l'arrivée était programmée. Le choix se porta sur une grange assez vaste appelée "Am kleine Holz" (Au petit bois) située à la sortie Est du village de LANGENSTEIN en bordure d'un chemin rural.

Ces deux bâtiments, le LANDHAUS et la grange seront occupés le 8 mai 1944 par 300 détenus puis le 22 mai par 300 autres détenus, tous deux de nationalités et de numéros divers venant de BUCHENWALD. Parmi eux quelques Français. Le 5 juin le camp comptait 786 détenus.

Nous avons retrouvé la première feuille d'appel datée du 6 juin 1944. Le kommando était divisé en deux: 253 détenus au LANDHAUS baptisé Lager 1 et 533 à la grange (Lager 2) Parmi eux une vingtaine de Français seulement. Ces deux camps vont servir de logement aux nouveaux arrivants jusqu'au début d'Août.

Nous n'avons pas de détails sur la vie au LANDHAUS, aucun de nos camarades français, sauf le docteur RAINE, y étant internés. Par contre, nous avons encore deux témoins vivants Georges PETIT, arrivé le 22 mai et André ROGER arrivé le 20 juin. De leur récit nous avons retenu que la grange était entourée de barbelés non électrifiés avec une petite cour devant servant de place d'appel. L'intérieur était resté en une seule pièce sauf le cagibi réglementaire des autorités Häftling. Tout l'espace était occupé par des blocs de 7 ou 14 lits lits superposés sur quatre étages séparés par des allées de 2 à 3 m ne permettant pas l'installation de sièges et de tables. Les détenus mangeaient sur leur lit. Il n'y avait ni cuisine ni logement pour les gardes.

L'intendance et l'administration passaient par le LANDHAUS. La grange n'était qu'un vaste dortoir de 650 lits environ occupés, à la fin, chacun par deux détenus.

La nourriture, sans être suffisante, était bien supérieure à ce qu'elle sera au ZWIEBERGE: la boule était à partager souvent à trois ou quatre, quelquefois à deux avec, outre la margarine, supplément journalier de saucisson ou de poisson genre sprat (Comme cela était au grand camp de BUCHENWALD à la même époque). De plus, il arrivait encore des colis familiaux pour quelques Français, Tchèques et Polonais, colis qu'ils devaient défendre contre les Russes qui n'en recevaient jamais. Bien qu'en partie pillés ces colis constituaient un supplément appréciable de nourriture pour ceux qui avaient la chance d'en recevoir.

Ce n'est qu'à la mi-mai que, pour les déportés, le travail commença dans le

tunnel. Une grande partie d'entre eux continua a être utilisée pour la

construction du camp du ZWIEBERGE et dans des kommandos extérieurs

(Défrichage, construction de routes et de voies de chemin de fer pour accéder

au tunnel, pose de canalisations, station de pompage etc...)

(15)

Le 7 juin il arriva un petit convoi de 30 Belges et le 20 juin un grand transport de 400 détenus dont 44 français, un certain nombre d'entre eux, les 53000 venant d'AUSCHWITZ via BUCHENWALD dans le convoi dit: "des tatoués" (1). Ils furent intégrés à la grange. L'effectif du kommando passa alors à 1166 dont 286 à L1 (LANDHAUS) et 880 à L2 (La grange)

Le revier installé à L1 fut rapidement saturé et un contingent de 50 malades fut renvoyé à BUCHENWALD. Il y eut ainsi, par petits groupes, à l'époque de la grange, 162 retours à BUCHENWALD. Très peu revinrent au kommando après leur remise sur pieds.

C'est également pendant cette période qu'il y eut le plus d'évasions, une trentaine, sans que l'on puisse savoir combien ont réussi car tout évadé était rayé de la liste du camp et rien n'indiquait s'il avait été repris et pendu.

Le 18 juillet arrive un convoi de 200 et le 19 un autre convoi de 50 composés de Tchèques, Russes et Polonais, ce qui porte le L1 à 383 et le L2 à 922. Mais les deux camps sont véritablement saturés avec l'arrivée le 8 août 1944 d'un transport, parti le 6, de 400 Lettons et Polonais venus, via BUCHENWALD , du camp de SALASPILS, près de RIGA. Le L1 compte 392 détenus et le L2 1306. Dans les jours qui suivent, le ZWIEBERGE étant opérationnel, 6 blocks y sont ouverts et la grange est évacuée. Un septième block est mis en service le 23 Août après l'arrivée d'un convoi, parti le 21 de BUCHENWALD, dont les numéros s'échelonnent de 71514 à 73034. Ce convoi aura 172 morts jusqu'au 9 avril 1945 soit 43% de son effectif.

Ce n'est que le 1er septembre que le LANDHAUS sera fermé. Pendant toute cette période de plus de 4 mois il n'y aura eu que 10 morts. Le premier Français décédera le 2 septembre 1944. Cela tient aux conditions de travail (Le tunnel n'était qu'à son début et on y pratiquait les 3/8), au régime de nourriture, meilleur que par la suite, à la bonne saison et principalement au retour des malades vers BUCHENWALD. (DOC. 8)

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, ces premiers convois ne sont pas ceux où la mortalité a été la plus grande. Ainsi je n'ai trouvé, jusqu'au 9 avril 1945, que 17 décédés sur 200 (Moins de 10%) dans le convoi du 27 avril et 117 sur 400 (moins de 30%) dans celui du 5 Août 1944. Les premiers arrivés ont probablement occupé les meilleurs postes de travail et aussi les places les plus intéressantes à l'intérieur du camp.

(1) Ce convoi de 1677 déportés non juifs, composé en partie de personnalités importantes de la Résistance, fut envoyé à AUSCHWITZ-BIRKENAU le 27 avril 1944, à partir de COMPIEGNE, sans qu'on en connaisse encore actuellement la raison. Ils furent transférés à BUCHENWALD 12 jours après leur arrivée (Convoi des 52 et 53000) Ils sont tatoués au bras gauche de 184936 à

186580.

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REGISTRE MATRICULAIRE DES 85000.

Sur cette page on peut lire les matricules, les noms, prénoms et affectations des détenus.

Pour la plupart est indiqué le block de quarantaine, le block du grand camp et les kommandos

successifs. Sur cette page, 12 déportés sont allés au Zwieberge (BII), 4 à Iéna, 3 à

Niédérorchel, 1 à Ohrdruf (SIII). 4 sont morts. Souvent le registre portait, en plus, la date

d'arrivée au camp central, la date de naissance mais l'affectation, écrite au crayon, était

gommée et réécrite à chaque changement.

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II

LE ZWIEBERGE : CONVOIS ET EFFECTIFS

Le camp fut établi dans une dépression entourée de bois à environ 3 km. à l'est de LANGENSTEIN et 6 km. d'HALBERSTADT. Il était limité au nord par les rochers de HASSELHOLZ, au sud par le TONNIGSBERGE et à l'ouest par les roches de grés du ZWIEBERGE ainsi appelées parce qu'elles sont couronnées par deux sommets. A l'écart d'un chemin rural et loin de toute habitation, il pouvait rester secret. Il y fut établi 26 grandes baraques (DOC. 9), dont un certain nombre en dehors du camp étaient occupées par les SS. Il était entouré d'une clôture électrique et gardé par une douzaine de miradors non fermés, en bois. Certains étaient équipés de projecteurs et de mitrailleuses (DOC. 10). A l'entrée nord du camp s'élevait un poste de garde qui commandait un grand portail à deux battants et où passait également un petit chemin de fer comme il en existait pour le ramassage des betterave.

D'après quelques témoignages, ce petit train aurait été utilisé, au début du camp, pour transporter les détenus jusqu'au tunnel.

A compter du début 1945 fut aménagé et entouré de barbelés, dans l'enceinte même du camp, dans sa partie nord, le long de la place d'appel, un petit camp, dit "camp JUNKERS" comportant 3 baraques différenciées par des lettres au lieu de nombres: Blocs A, B, C. Les détenus qui occupaient auparavant ces baraques furent transférés dans d'autres blocks. Ces trois blocks avaient la particularité de n'avoir ni lits ni paillasses. Il en était de même pour le block 4 du grand camp occupé essentiellement par des juifs à partir de février 1945. Pour dormir, les occupants de ces baraques se serraient autour de la chambre roulés dans leur couverture.

Jusqu'en Août les Français avaient été très minoritaire: une soixantaine sur un effectif d'environ 2000, or, le 26 septembre arriva un convoi de 500 détenus venant de BUCHENWALD dont plus du tiers était Français. Ce convoi a, en additif, une liste de 39 noms remplaçant 39 noms rayés, en grande partie des Français. Deux de ceux-ci arriveront quand même au ZWIEBERGE en novembre. J'ai retrouvé l'un d'eux et lui ai demandé comment il avait pu se faire rayer du transport. Il m'a répondu que c'était sur intervention de son chef de block de BUCHENWALD à qui il avait demandé de partir en même temps qu'un ami alors hospitalisé au revier. En définitive, cela n'a rien changé car son ami est parti à BERGEN-BELSEN où il est mort et lui est allé quand même au ZWIEBERGE 2 mois après.

Je reviens sur cette liste du 26 septembre car elle comportait un groupe de

Français, les 85000 (de 85126 à 85301, soit 175) partis directement de

BELFORT pour BUCHENWALD; 105 iront au ZWIEBERGE. Notre camarade

BERTRAND, qui appartenait à ce convoi, en a fait une étude détaillée très

intéressante. Appartenaient aussi à ce convoi immatriculés dans les 60 et

69000, une trentaine de Français étant arrivés à BUCHENWALD directement

de TOULOUSE dans un grand convoi rassemblant, outre les détenus de la

prison de TOULOUSE et des environs, les internés Français, Espagnols et

étrangers internés des camps d'ARGELES, St SULPICE la POINTE, LA NOË et

autres, livrés par VICHY.

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IMP. BERTOUT - LUNERAY

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